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ARCHIVÉ - Rapport du groupe de travail sur les transformations gouvernmentales et les langues officielles

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Chapitre 4 - Consultations

Le présent chapitre présente les faits saillants de nos consultations.
 

4.1 Organismes porte-parole des communautés de langue officielle en situation minoritaire

Les organismes porte-parole des communautés de langue officielle en situation minoritaire partagent largement les mêmes préoccupations et leurs points de vue reflètent de façon générale une grande communauté de pensée. Dans leur présentation, ils ont traité principalement des transformations gouvernementales, de l'Examen des programmes, de l'évolution de l'appui fédéral aux communautés dans sa portée et dans ses modalités, et enfin du désengagement de l'État.

De plus, ils sont d'avis qu'au cours des changements apportés ces dernières années, le gouvernement fédéral n'a pas pris tous les moyens nécessaires pour s'assurer que les droits linguistiques soient pleinement pris en compte.
 

4.1.1 Les transformations gouvernementales

Dans son mémoire, la Société Saint-Thomas-d'Aquin de l'Île-du-Prince-Édouard déclare, en parlant des enjeux inhérents aux transformations gouvernementales :

« Un par un les membres de ces communautés s'étiolent, et réalisent que leurs droits n'existent en réalité que sur papier. Ils vont, un par un, cesser de lutter pour leurs droits. L'absence d'imputabilité de l'appareil gouvernemental fédéral et son désengagement face aux communautés minoritaires provoquent la remise en question de l'esprit de la Loi sur les langues officielles. Le gouvernement fédéral doit démontrer son engagement et doit faire respecter la Loi sur les langues officielles s'il ne veut pas perdre sa crédibilité auprès des Canadiens et des Canadiennes. »
 

4.1.1.1 Propos généraux

Tout comme la Société Saint-Thomas d'Aquin, les autres organismes porte-parole, notamment ceux de l'Alberta, de la Saskatchewan et de Terre-Neuve et du Labrador, n'ont pas tardé à souligner que les transformations gouvernementales, soit par voie de transferts à d'autres paliers de gouvernement ou par le biais des privatisations, les laissaient profondément sceptiques au plan du respect des exigences prévues en matière de langues officielles et d'appui aux communautés de langue officielle. En effet, il serait déjà très difficile de faire respecter ces exigences au sein de l'administration fédérale. Dans ces circonstances, comment 
peut-on en attendre plus des sociétés privées ou des gouvernements provinciaux ? L'Association culturelle franco-canadienne de la Saskatchewan (l'ACFC) déclare : « Vous connaissez la situation actuelle et la difficulté de mise en application de la Loi sur les langues officielles, alors imaginez la situation lorsqu'on transfère ces responsabilités à des niveaux encore moins favorables à cette loi ». La Société des Acadiens et Acadiennes du Nouveau-Brunswick (la SAANB) déclare pour sa part que : « La privatisation des services fédéraux porte un coup sérieux à la visibilité du Canada dans nos communautés et se traduit par un appauvrissement des services dans les deux langues officielles ».

Même s'ils insistent sur les ententes sur le développement du marché du travail conclues avec les provinces, il est clair que les organismes porte-parole des communautés se soucient des autres transformations que le gouvernement fédéral a réalisées.

Ainsi, la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (la FCFAC) déclare que : « Certaines, sinon la plupart, des transformations qu'ont connues les institutions fédérales ne garantissent pas le respect des obligations du gouvernement fédéral en matière de langues officielles, que ce soit dans le secteur des postes, des aéroports, des gares, du développement de la main-d'oeuvre, ou d'Air Canada et Petro-Canada ». La FCFAC s'est aussi montrée préoccupée de ce que la Loi sur les contraventions ait amené des changements ayant pour effet d'écarter les droits linguistiques.

La Fédération des francophones de la Colombie-Britannique (la FFCB) souligne la difficulté d'obtenir des services en français à l'aéroport de Vancouver depuis qu'il a été privatisé, de même que dans les bureaux de poste privatisés. La SAANB traite des problèmes causés par la perte de bureaux de poste bilingues et par la privatisation des services aéroportuaires.

Quant à l'Association franco-yukonnaise, elle a fait état du transfert de la gestion de l'hôpital de Whitehorse et de la dévolution de certaines responsabilités en santé à titre d'exemples éloquents des batailles stériles qu'elle a menées. « Malgré nos pressions et malgré l'assurance que les besoins de la communauté francophone seraient couverts par les ententes, aucune clause linguistique n'y figure. »

La Fédération Franco-TéNOise, en se référant aux nombreuses ententes liant le gouvernement fédéral à celui des Territoires-du-Nord-Ouest déclare que «...les droits des francophones... conférés par des lois fédérales ou par la Charte canadienne des droits et libertés se voient dilués ou, plus fréquemment, ignorés ».

L'Association culturelle franco-canadienne de la Saskatchewan invite le Groupe de travail à étudier ce qui se passe à Postes Canada « où tous nos droits ont été perdus en terme de langues officielles, lorsque leurs bureaux se sont retrouvés dans des emplacements privés tels les pharmacies, dépanneurs etc ». Un commentaire d'Alliance Québec recoupe ce propos : « La dévolution peut causer d'importants changements dans les comportements établis. Certains changements sont symboliques, comme la perte de l'affichage bilingue. D'autres posent un danger plus substantiel à la langue comme dans le cas où des sous-traitants faillissent à leur engagement à donner des services dans la langue de la minorité aux points de service de Postes Canada ». [Traduction de l'anglais]
 

4.1.1.2 Les Ententes de développement du marché du travail (les EDMT)

Les organismes porte-parole qui ont été consultés ont presque tous fait allusion directement aux EDMT. Le transfert de responsabilités en matière de développement du marché du travail constituerait, selon ce qu'on nous a dit, la transformation gouvernementale ayant posé le plus de défis aux communautés de langue officielle en situation minoritaire.

Alliance Québec indique que l'EDMT intervenue entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec en 1997 prévoit des mesures novatrices pour assurer le maintien des services en anglais. Elle affirme que la signature de l'entente s'est faite après qu'Alliance Québec eut entrepris des démarches soutenues en faveur du maintien des droits linguistiques assurés par les lois fédérales et la Constitution du Canada. Dans son mémoire, la Société Franco-manitobaine (la SFM) décrit pour sa part les efforts intenses qu'elle a dû mener, lorsqu'elle a pris connaissance des changements qui se préparaient, pour faire réaliser, au niveau fédéral, les problèmes que la dévolution en matière de main-d'oeuvre pouvait créer pour la communauté francophone du Manitoba. La SFM déclare que l'entente finale entre la province et le gouvernement fédéral a reconnu que la communauté francophone devait être consultée et lui a garanti des services et des programmes.

L'Association franco-yukonnaise a, pour sa part, indiqué qu'elle avait dû consacrer beaucoup d'énergie à faire inscrire les dispositions souhaitées dans l'entente de co-gestion pour le développement du marché du travail mais que les démarches ont porté fruit.

Pour sa part, l'Association canadienne-française de l'Alberta (l'ACFA) affirme dans son mémoire que « le transfert de pouvoirs [résultant de l'EDMT entre le gouvernement fédéral et le gouvernement de l'Alberta] a été une opération improvisée. La restructuration du gouvernement fédéral n'a pas été vraiment planifiée et réfléchie. Elle a été faite sans consulter nos communautés, sans tenir compte des effets sur nos communautés».

La FFCB fait état dans son mémoire de son inquiétude profonde à l'endroit des négociations en cours entre le gouvernement fédéral et le gouvernement de la Colombie-Britannique en vue d'en arriver à une entente de développement du marché du travail; elle se préoccupe de l'accès aux services et aux programmes visés une fois que la province en aura la responsabilité. Il existe, selon la FFCB, une absence totale de considération de la part du gouvernement provincial à l'endroit de la communauté francophone.

Quant à la SAANB, elle a déclaré qu'elle n'avait pas été consultée au sujet de l'EDMT entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Nouveau-Brunswick.

En ce qui concerne les perspectives d'avenir du point de vue des EDMT déjà intervenues, Alliance Québec et la SFM se montrent optimistes. Par ailleurs, l'ACFA se montre très critique, affirmant notamment qu'en ce qui concerne la garantie à l'effet que le service en français sera donné là où il y a une demande raisonnable, l'information semble s'être perdue dans les labyrinthes de la fonction publique et que, pour certains, « la Loi 60 qui rend notre province unilingue anglaise a préséance sur la Loi sur les langues officielles ». Elle ajoute qu'on assiste à un véritable « rapiéçage » à l'égard des services en français.

Dans le cas de l'Ontario où il n'y a pas encore d'EDMT, l'Association canadienne-française de l'Ontario s'est déclarée inquiète face à l'avenir de l'offre de services en français.
 

4.1.2 La nécessité de consulter les communautés de langue officielle en situation minoritaire 

Tous les organismes porte-parole qui ont fait connaître leur point de vue se sont prononcés sans équivoque sur la nécessité pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire d'être consultées par le gouvernement fédéral dans les initiatives de transformations qu'il entreprend. L'établissement d'un processus de consultation efficace de ces communautés constitue, selon les organismes consultés, un élément indispensable de toute démarche fédérale de transformation gouvernementale.
 

4.1.3 L'Examen des programmes

Les organismes ne contestent pas le bien-fondé de l'Examen des programmes du gouvernement fédéral, qui visait à rationaliser les opérations de celui-ci. Ils ont l'impression cependant qu'il s'agissait d'un exercice financier faisant de la réduction des dépenses une fin en soi et imposant aux fonctionnaires des attentes élevées les obligeant à faire des choix. Les effets de cette approche se seraient selon eux, fait sentir entre autres dans des coupes importantes du financement et du personnel affecté à la mise en oeuvre de la Loi sur les langues officielles à tous les niveaux de l'appareil.
 

4.1.4 L'évolution du financement fédéral aux communautés de langue officielle en situation minoritaire

Les organismes porte-parole ont saisi l'occasion qui leur était offerte afin d'élargir le débat et faire connaître leur point de vue sur la réduction du financement fédéral à laquelle les communautés de langue officielle en situation minoritaire ont eu à faire face. Il nous ont aussi entretenu des ententes Canada-communautés et des nouvelles règles concernant le financement axé sur des projets par opposition au financement de base des organismes. 

Selon les organismes porte-parole que nous avons rencontrés, les réductions budgétaires ont handicapé leur capacité de continuer le travail habituel et de lancer des initiatives aidant les communautés à se structurer. La Fédération des francophones de Terre-Neuve et du Labrador (la FFTNL) a déclaré que « l'érosion des fonds du fédéral fait en sorte que nous arrivons à peine à fonctionner à l'intérieur de nos propres paramètres. Les opérations consomment complètement le budget... De moins en moins de temps est consacré au développement de nos communautés. L'érosion progressive des deniers provoque l'instabilité ».

Quant aux ententes Canada-communautés, le financement axé sur la communauté qui les caractérise a sans doute donné aux groupes communautaires un rôle beaucoup plus important dans la distribution des fonds, contribuant du même coup à une responsabilisation accrue de leur part. Cependant, le fait que les ententes Canada-communautés soient intervenues au moment où le gouvernement commençait à réduire les subventions a eu pour conséquence, selon la FCFAC, de « faire retomber 
sur des structures communautaires fragiles l'odieux des coupures requises. Cette situation a eu de très sérieuses conséquences sur la 
solidarité communautaire et a ébranlé les structures de la plupart des communautés ».

L'accent mis sur le financement des projets, au détriment du financement de base, a été sévèrement critiqué. On reproche au financement de projets le poids des formalités qu'il comporte. On affirme aussi que ce type de financement a pour effet de détourner les organismes de leur mission de centre de ralliement et de chef de file des communautés. Les dirigeants concentrent trop souvent leurs énergies à concevoir et à développer des projets éligibles au financement, au détriment d'initiatives de développement communautaire qui leur apparaissent prioritaires. La FFTNL a pour sa part déclaré : « Afin de bien cerner le ridicule de cette situation, il arrive que nous dépensions plus de ressources humaines et financières à pondre le projet que la valeur totale du projet pondu. Chaque journée consacrée au jeu des subventions aurait pu être consacrée au développement de nos communautés. »
 

4.1.5 Le désengagement de l'État

Les organismes porte-parole ont fait valoir que l'application de la Loi sur les langues officielles pose souvent problème même lorsqu'elle relève d'organismes faisant intégralement partie de l'administration publique fédérale.

Plusieurs organismes porte-parole en milieu minoritaire francophone s'objectent au fait de devoir consacrer tant d'énergie à faire respecter la Loi sur les langues officielles, une énergie qu'ils devraient plutôt pouvoir consacrer au développement de leur communauté.

Les transformations gouvernementales, indépendamment du mode qu'elles prennent, représentent un élément additionnel d'inquiétude selon les organismes porte-parole et contribuent de façon importante à ce sentiment de retour en arrière que l'on nous a évoqué.

La FCFAC a terminé sa présentation en déclarant qu'elle ressentait un certain désengagement de la part du gouvernement fédéral et qu'un sérieux coup de barre devait être donné afin de redonner espoir aux communautés que leurs droits seront respectés. Elle a aussi mis l'accent sur la valeur fondamentale que représente la dualité linguistique canadienne en déclarant : « La société canadienne a aussi accepté d'investir dans le projet de bâtir une société qui respecte la diversité et d'ériger sa dualité linguistique au rang d'une de ses valeurs fondamentales. Les progrès réalisés dans cette voie au cours des trente dernières années sont réels. Accepter que ces progrès soient compromis par des transformations de l'appareil gouvernemental serait faire courir un risque à notre identité nationale même. Il faut que la protection de cette valeur que représentent les langues officielles soit un des critères qui vont déterminer le bien-fondé ou non d'un projet de transformation ».

La dualité linguistique comme composante essentielle de l'identité canadienne est un thème récurrent des représentations des organismes porte-parole, comme c'est le cas pour leur désir de voir le gouvernement fédéral renouveler son appui à l'endroit de la dualité linguistique du Canada.

Dans le cadre de cet engagement renouvelé, les associations porte-parole souhaitent que le gouvernement reconnaisse la nécessité de mieux tenir compte des besoins des communautés de langue officielle en situation minoritaire dans les transformations gouvernementales. Les associations porte-parole veulent aussi pouvoir compter sur un financement bien conçu et adéquat.
 

4.2 Consultations auprès des organismes gouvernementaux fédéraux et des experts-conseils

Le Groupe de travail a entendu des hauts dirigeants de plusieurs ministères et organismes fédéraux ainsi que des experts-conseils du secteur privé. Ses membres ont aussi eu des rencontres avec quatre conseils régionaux de hauts fonctionnaires fédéraux.

Ces rencontres nous ont permis de mesurer l'éventail et la diversité des perspectives et des points de vue en matière de transformations gouvernementales et ont fait ressortir les grandes questions et les messages importants. Les échanges portant sur le Cadre d'examen et son histoire, la Loi sur les contraventions, les ententes sur le développement du marché du travail, les organismes gouvernementaux de services (Parcs Canada, Revenu et Douanes), les partenariats (Commission canadienne du tourisme), les ententes Canada-communautés, la mise en oeuvre des articles 41 et 42 de la Loi sur les langues officielles et la façon dont les transformations sont vécues en région nous ont été d'une grande utilité.

Ces rencontres se sont déroulées à l'enseigne du dialogue : le Groupe de travail désirait connaître et comprendre les transformations gouvernementales sous leurs divers aspects. Grâce aux échanges qui ont ainsi eu lieu, le Groupe de travail a acquis une appréciation d'ensemble des transformations gouvernementales. Plus particulièrement, ces consultations nous ont fait voir la complexité et l'ampleur des défis en cause.