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ARCHIVÉ - Rapport du groupe de travail sur les transformations gouvernmentales et les langues officielles

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Chapitre 3 - Analyse des transformations gouvernementales

3.1 Le Cadre d'examen des différents modes d'exécution des programmes

Outre la responsabilité spécifique des institutions assujetties à la Loi sur les langues officielles quant à sa mise en oeuvre, l'élaboration et la coordination générale des principes d'application en ce qui concerne le service au public, la langue de travail et la participation équitable incombe au Conseil du Trésor. Toutefois, au cours des dernières années, le rôle du Conseil a été transformé : d'une agence de contrôle, celui-ci est devenu une sorte de « conseil de gestion », ce qui signifie en pratique s'acheminer vers un système de gestion globale axé sur les résultats et la reddition des comptes. Le Conseil s'occupe maintenant de l'élaboration de normes et de cadres stratégiques pertinents en matière d'information et d'établissement de budgets pour l'ensemble du gouvernement; de la prestation de conseils et d'aide aux ministères pour respecter ces normes et atteindre leurs propres objectifs; et de la diffusion de renseignements sur le rendement du gouvernement.

Dans le cadre des activités d'examen des programmes, le Secrétariat du Conseil du Trésor a publié au début de 1995 un Cadre d'examen des différents modes d'exécution des programmes. Celui-ci vise à établir les grands principes qui doivent guider les institutions intéressées à adopter des modes différents de prestation des services.4 Le Cadre d'examen précise les critères qui doivent guider les transformations gouvernementales. Les considérations en matière de langues officielles se retrouvent sous deux grands principes : « l'intérêt public » et « la qualité des services et besoins des clients ».

Dans l'évaluation du test de l'intérêt public, on soulève la dimension linguistique en posant la question suivante : Quelles obligations en matière de langues officielles devraient s'appliquer et quels mécanismes pourraient garantir qu'elles sont satisfaites ? La référence à la langue apparaît également dans les paramètres du principe de la qualité des services et des besoins des usagers : Les clients auront-ils accès à des services dans la langue officielle de leur choix ?

Or, cette façon de faire intervenir la dimension linguistique indirectement comme on le fait dans le Cadre ne rend pas justice à l'importance qu'elle revêt dans la société canadienne et dans les lois et la Constitution du Canada. Les questions telles qu'elles sont formulées laissent entendre que ce ne sont pas tous les droits linguistiques qui doivent être considérés.

Le Cadre d'examen aurait dû donner aux droits linguistiques la prééminence qui leur revient. Aux termes de la Charte canadienne des droits et libertés, elle est un élément d'intérêt public axiomatique et premier.

Le Cadre d'examen, comme toute autre grille de principes de base qu'utilise le gouvernement fédéral, devrait à l'avenir conférer à la dualité linguistique officielle son statut de valeur fondamentale au Canada, sans quoi son poids dans la décision de procéder ou non avec une proposition de transformation gouvernementale sera tout au plus un élément parmi d'autres à considérer.

Le Cadre d'examen devrait entre autres préciser la nécessité de démontrer comment le mandataire assumera l'engagement du gouvernement fédéral énoncé à l'article 41 de la Loi sur les langues officielles de favoriser l'épanouissement et d'appuyer le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire ainsi que de promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne. Il devrait aussi référer à la mise en oeuvre de cet engagement au moyen de l'effort concerté des institutions fédérales auprès desquelles le ministère du Patrimoine canadien a la responsabilité d'assurer la coordination aux termes de l'article 42 de la Loi sur les langues officielles. Dans cette perspective, le Cadre d'examen devrait aussi imposer à l'instance concernée, en rapport avec toute transformation gouvernementale, le devoir d'établir un processus de consultation auprès des communautés de langue officielle en situation minoritaire, au sujet de l'impact que pourrait avoir le projet de transformation gouvernementale sur les droits linguistiques.

La volonté du gouvernement fédéral de reprendre le leadership en matière de dualité linguistique officielle doit s'évaluer en fonction des gestes concrets qu'il posera et des résultats obtenus.

Parmi les mesures à prendre, le Groupe de travail propose les suivantes :

  • une campagne visant à sensibiliser les organismes assujettis à la Loi sur les langues officielles à l'importance de la dualité linguistique officielle et à l'étendue des droits linguistiques qui en découlent;
  • la mise en place d'un dispositif de concertation de haut niveau qu'exige la prise en compte constante et efficace de la dualité linguistique officielle dans le cadre des transformations gouvernementales; et
  • l'affectation des sommes nécessaires afin que le gouvernement puisse maintenir une présence suffisante en vue de contribuer à la vitalité des communautés francophones et anglophones partout au Canada.

 

3.2 L'examen des différents modes d'exécution des programmes et de prestation des services 

Dans son approche en matière de transformations gouvernementales, le gouvernement a décidé de poursuivre plusieurs modèles. Une analyse approfondie des différents modes utilisés révèle qu'il n'y a pas d'approche unique pour traiter de la dimension linguistique d'un modèle à l'autre, pas plus qu'il n'y a de solution uniforme pour les diverses transformations puisque celles-ci suivent différents modèles.

Notre étude touche plus particulièrement aux modes de diversification suivants :

  • les organismes de services spéciaux,
  • les organismes gouvernementaux de services, 
  • les partenariats, 
  • le recours aux tiers conventionnés,
  • la privatisation 
  • le transfert de responsabilités aux provinces.

 

3.2.1 Les organismes de services spéciaux

Les organismes de services spéciaux sont le premier mode de diversification que nous avons examiné. Il s'agit d'unités de prestation de services qui disposent, à l'intérieur de leur ministère d'attache, d'une marge de manoeuvre accrue en matière de gestion. En retour, ces organismes doivent réaliser un niveau de rendement et de résultats convenus. Le Conseil du Trésor demeure l'employeur et la Commission de la fonction publique, responsable de l'embauche et des promotions. Le Bureau des passeports et le Bureau de la traduction en sont des exemples. La Loi sur les langues officielles continue de s'appliquer aux organismes de services spéciaux.
 

3.2.2 Les organismes gouvernementaux de services

D'une facture nouvelle et d'origine récente, les organismes gouvernementaux de services sont un deuxième mode de diversification. Il s'agit d'entités juridiques créées en vertu d'une loi fédérale spéciale et ayant un mandat précis pour l'exécution de certains programmes ou la prestation de certains services. Le premier organisme de ce genre à voir le jour, en 1997, était l'Agence canadienne d'inspection des aliments suivi de l'Agence Parcs Canada. Un autre projet de loi, présentement devant le Parlement, vise à créer une agence canadienne des douanes et du revenu.

À l'instar des organismes de services spéciaux, il est prévu que la Loi sur les langues officielles s'applique à un organisme gouvernemental de services de la même manière qu'à toute autre institution fédérale. En conséquence, dans les trois cas mentionnés, les mêmes obligations en matière de service au public, de langue de travail et de participation équitable, ainsi que d'appui au développement et à l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire s'appliqueront. Toutefois, le statut d'employeur distinct soustrait ces organismes à certaines dispositions spécifiques en matière de langues officielles que le Conseil du Trésor a, dans ses politiques, adoptées précisément à l'intention des ministères et organismes dont il est l'employeur. Ces dispositions ont trait à la détermination des exigences linguistiques des postes, à la prime au bilinguisme, à la dotation des postes bilingues, à la formation linguistique et aux exigences linguistiques auxquelles ont à répondre les membres du groupe de la direction. Compte tenu de leur statut d'employeur distinct, il revient aux organismes gouvernementaux de services de décider eux-mêmes de la façon de gérer ces questions, sous réserve des politiques applicables du Conseil du Trésor en la matière.

Pourtant, à titre d'employeurs distincts, les organismes gouvernementaux de services, comme par ailleurs les ministères et organismes dont le Conseil du Trésor est l'employeur, font partie de la fonction publique fédérale et leurs employés continuent d'être rémunérés à même les fonds publics.

Si un organisme gouvernemental de services continue de faire partie de la fonction publique, il est dans un premier temps clairement appelé à se forger une nouvelle identité et à se donner une culture organisationnelle distincte. Il faut donc s'assurer au départ que les moyens à prendre pour intégrer efficacement les droits linguistiques et l'appui aux communautés de langue officielle en situation minoritaire à cette culture ont été prévus.

En vertu de la Loi sur l'Agence canadienne d'inspection des aliments, le président de l'Agence a la responsabilité de superviser et de diriger le travail de celle-ci. Quant au ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire, il est responsable de la direction générale de l'Agence. Les effets de cette répartition des rôles entre le président et le ministre restent à voir en ce qui concerne la responsabilité en matière de langues officielles.

La Loi sur l'Agence canadienne des parcs prévoit le dépôt au Parlement chaque année d'un plan directeur quinquennal, d'un rapport annuel, d'états financiers commentés par le vérificateur général et la présentation tous les cinq ans d'un rapport sur les valeurs et principes en matière de gestion des ressources humaines. Il prévoit en plus le dépôt de rapports bisannuels sur l'état des lieux patrimoniaux protégés du Canada et les plans de gestion des lieux historiques nationaux, deux instruments supplémentaires au chapitre de l'imputabilité. La Loi est toutefois silencieuse pour ce qui est de faire rapport sur la façon dont l'Agence s'acquitte de ses obligations en matière de droits linguistiques. L'absence d'une telle obligation est révélatrice du suivi qu'il faudra accorder à cet aspect des opérations du nouvel organisme.
 

3.2.3 Les partenariats

Le Cadre d'examen des différents modes d'exécution des programmes publié par le Secrétariat du Conseil du Trésor en 1995 définit le partenariat comme une situation où :

« Deux parties ou plus s'entendent pour collaborer dans leur intérêt mutuel et concluent à cette fin un accord ou un contrat précis qui renferme les objectifs et les conditions d'exécution. Il ne s'agit pas d'un partenariat au sens légal du terme, selon lequel chaque partie est responsable des actes de l'autre. Les ententes de partenariat peuvent avoir ou non un caractère officiel ».

Ce même document donne comme exemples de partenariats celui des centres de services aux entreprises du Canada et celui de la Commission canadienne du tourisme.
 

3.2.3.1 Les Centres de services aux entreprises du Canada (CSEC)5

L'étude du Commissaire aux langues officielles sur les effets des transformations gouvernementales sur le programme des langues officielles du Canada décrit le fonctionnement des CSEC. Elle indique notamment que le personnel de chaque centre provient des organisations participantes. Le Commissaire constate que « l'entente fédérale-provinciale ou territoriale concernant l'établissement de chaque centre contient une disposition exigeant que le service soit disponible dans les deux langues officielles6 ». Il ajoute cependant que «de récentes visites, à l'un de ces centres, dans le contexte du suivi des points de service effectué par le Commissariat, ont révélé que la désignation bilingue n'était pas pleinement respectée »7. Enfin, il s'inquiète généralement de la capacité du gouvernement fédéral d'assurer le respect constant des droits linguistiques, eu égard au partage d'autorité selon lequel le gestionnaire d'un centre provient tour à tour de l'administration fédérale et de l'administration provinciale.

Le Groupe de travail est très sensible aux risques que représente, pour le respect des droits linguistiques et pour l'appui aux communautés de langue officielle en situation minoritaire, la formule de partenariat privilégiée dans les CSEC. Ces centres naissent et s'épanouissent grâce au regroupement et au fonctionnement intégré de personnel venu des secteurs fédéral, provincial et privé, au sein d'une entité nouvelle qui doit à la fois se donner des façons de faire efficientes et efficaces, et se construire une culture d'entreprise bien à elle. L'obligation de prestation de services dans les deux langues officielles existe certes et le Commissaire reconnaît par ailleurs que le Secrétariat national des CSEC est sensibilisé aux exigences de l'article 41 de la Loi sur les langues officielles. Cependant, il y a lieu de se demander comment faire en sorte que les services intégrés de qualité respectent concrètement et entièrement les droits linguistiques lorsque le personnel provient de divers niveaux de gouvernement. Il est clair qu'en termes de suivi, d'évaluation et d'imputabilité, le fonctionnement des CSEC doit être soigneusement encadré de façon que le personnel de toute provenance et de tous les niveaux intériorise la notion de respect des droits linguistiques grâce à une culture d'entreprise fortement axée en ce sens.
 

3.2.3.2 La Commission canadienne du tourisme (CCT)8

Dans son étude sur les effets des transformations du gouvernement sur le programme des langues officielles du Canada, le Commissaire déclare9 que la CCT est l'exemple par excellence de partenariat, celle-ci partant du principe que le gouvernement fédéral travaille en étroite collaboration avec l'industrie touristique canadienne, les provinces et les territoires afin de promouvoir le Canada comme destination touristique.10 Le Commissaire souligne que la CCT est en fait une institution fédérale dont les décisions sont prises en majeure partie par le secteur privé alors qu'elle est financée à parts égales par le gouvernement et les autres partenaires.11

Le Commissaire, s'interrogeant sur les obligations linguistiques de la CCT, note que sa Charte et les principes directeurs de la Commission ne renvoient pas à la Loi sur les langues officielles et ne font pas allusion aux droits linguistiques. Le Commissaire souligne aussi que le directeur de la Commission, même s'il est « responsable du respect des exigences législatives et de la politique gouvernementale12 » ne relève pas d'un ministre ou d'un sous-ministre, mais d'un conseil d'administration composé de membres provenant principalement du secteur privé.

Le Commissaire se penche aussi sur l'apport de la CCT à l'appui au développement et à l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Il fait état de la position mise de l'avant par les représentants de la Commission à l'effet qu'elle n'a pas pour mandat d'examiner les projets sous cet angle et que ses décisions, purement commerciales, reposent sur leur viabilité économique et leur contribution à la promotion du Canada à l'étranger.

Le représentant de la CCT que nous avons entendu lors de nos consultations, tout en reconnaissant que la Loi sur les langues officielles s'appliquait aux activités proprement dites de la Commission, a fait valoir sensiblement les mêmes arguments.

Nous considérons que le fonctionnement de la CCT a besoin d'être soigneusement examiné pour s'assurer que cette institution fédérale est pleinement sensibilisée à l'ensemble de ses obligations en matière de langues officielles. Des efforts conscients, soutenus et innovateurs doivent être menés afin de concilier de manière créatrice et productive l'objectif de rentabilité commerciale et le besoin de respect des droits linguistiques.
 

3.2.4 Le recours aux tiers conventionnés dans le cadre d'une entente de sous-traitance ou d'un marché de services

Le Cadre d'examen des différents modes d'exécution des programmes définit la sous-traitance comme la situation où le gouvernement confie une fonction qu'il exécutait à l'interne, mais non la responsabilité connexe, à un entrepreneur de l'extérieur de la fonction publique, pour une période donnée. 

Le marché conclu entre la Commission de la Capitale nationale (la CCN) et Lafleur de la Capitale est un exemple de sous-traitance associée d'une prise en charge de services par d'anciens fonctionnaires. Lafleur de la Capitale assure la prestation de services fournis auparavant par du personnel de la Commission. Le contrat comporte une clause assurant le service au public dans les deux langues officielles.

L'article 25 de la Loi sur les langues officielles prescrit qu'il incombe aux institutions fédérales de veiller à ce que les services offerts par des tiers pour leur compte le soient dans l'une ou l'autre langue officielle dans le cas où, offrant elles-mêmes les services, elles seraient tenues à une telle obligation. Il s'ensuit naturellement que, dans les circonstances prévues par l'article 25, l'institution fédérale doit assurer que le contrat avec le tiers conventionné établisse clairement que ce dernier est tenu à une obligation de services dans les deux langues officielles.

Par ailleurs, le Cadre d'examen des modes d'exécution des programmes indique que, dans le cadre d'un marché de services, le gouvernement conclut un marché avec un organisme extérieur pour que les services soient assurés par des employés autres que des fonctionnaires. Il donne comme exemple à cet égard l'achat de fournitures médicales ou de services d'alimentation ou de blanchisserie dans des institutions fédérales. Dans une telle situation, la question de l'application des dispositions de la Loi sur les langues officielles ne se pose pas du point de vue du service au public mais plutôt du point de vue de la langue de travail. Selon l'alinéa 36 (1) a) de la Loi, les institutions fédérales de la région de la Capitale nationale et des régions bilingues aux fins de la langue de travail ont, entre autres, l'obligation de fournir des services à leur personnel dans les deux langues officielles, notamment à titre individuel ou à titre de services auxiliaires centraux. Le contrat de l'institution fédérale avec le tiers conventionné doit alors prévoir des dispositions pour l'application de cette exigence.

Dans le cas du recours à un tiers conventionné, la responsabilité ultime repose sur l'institution fédérale. Le Groupe de travail est d'avis que ces situations doivent être revues soigneusement afin de faire le point sur la portée des ententes et l'efficacité des clauses contractuelles utilisées ainsi que sur le suivi et l'évaluation effectués par les institutions fédérales en cause aux fins de s'assurer que les tiers les honorent fidèlement.
 

3.2.5 Les privatisations

Le Cadre d'examen des modes d'exécution des programmes définit comme privatisation le cas où le gouvernement cède à des investisseurs du secteur privé les titres qu'il détient dans une société d'État, un établissement public ou un autre service, lorsqu'il n'y a plus lieu qu'il continue de détenir ces titres. Cette définition a besoin d'être élargie pour inclure les cas où le nouvel organisme prend en charge des activités exercées auparavant par un ministère fédéral. Petro-Canada, Air Canada, un bon nombre de grands aéroports du pays, le CN et le système de navigation aérienne sont des cas de privatisations. Le gouvernement a adopté des lois spécifiques pour traiter de ces situations. La Loi sur les langues officielles s'applique dans sa totalité à Air Canada et au CN ainsi qu'à NavCan, la société qui gère le système canadien de navigation aérienne. Dans le cas des administrations aéroportuaires locales gérant les aéroports cédés par bail, les parties IV, V, VI, VIII, IX et X de la Loi s'appliquent. Lorsque les aéroports sont vendus, ce sont les parties IV, VIII, IX et X qui s'appliquent. Dans le cas de Petro-Canada, les obligations en matière de langues officielles sont plus restreintes que dans les autres cas mentionnés. Il est prévu que cette société doit, dans des circonstances prescrites, assurer la prestation du service dans les deux langues officielles.

Une privatisation qui impose le respect de tous les droits et obligations prévus dans la Loi sur les langues officielles crée un défi de taille. Les aéroports privatisés et NavCan sont des sociétés sans but lucratif dont la vocation dans la communauté, à l'échelle régionale ou nationale, est à la fois importante et unique. Air Canada et le CN sont des sociétés commerciales qui doivent, dans un univers concurrentiel, répondre à des exigences de rentabilité. La culture d'entreprise de ces organisations reflète ces circonstances. Les obligations en matière de droits linguistiques doivent alors s'intégrer dans cette culture organisationnelle. Il en résulte un défi différent qui, selon nous, doit être abordé en prenant pleinement conscience des circonstances dans lesquelles il se présente. Il faut mener auprès de ces entreprises une action sur mesure qui tienne compte de leurs circonstances et développer des mécanismes adaptés de suivi, d'évaluation et d'imputabilité.
 

3.2.6 Ententes avec les provinces

Le Groupe de travail s'est arrêté aux ententes de développement du marché du travail, conclues avec les provinces conformément à l'article 57 de la Loi sur l'assurance-emploi, et à celles conclues conformément au paragraphe 
65 (2) de la Loi sur les contraventions.
 

3.2.6.1 Les Ententes de développement du marché du travail (les EDMT)

Il existe onze ententes à l'heure actuelle qui sont de deux types : les ententes de co-gestion (Terre-Neuve, Île-du-Prince-Édouard, Yukon, Colombie-Britannique et Nouvelle-Écosse) et les ententes de transfert (Alberta, Saskatchewan, Manitoba, Québec, Nouveau-Brunswick et Territoires-du-Nord-Ouest).

Dans un premier temps, les « ententes de co-gestion » prévoient que Développement des ressources humaines Canada (DRHC) continue, dans un contexte de gestion conjointe, d'assurer la prestation des programmes et services conformément aux lois fédérales, y compris la Loi sur les langues officielles.

Pour leur part, les « ententes de transfert » prévoient que les gouvernements provinciaux assument l'entière responsabilité de la conception, de la prestation et de l'évaluation des « mesures actives d'emploi » ainsi que des fonctions du service national de placement. Ces ententes comportent le transfert de ressources humaines ainsi que de fonds destinés aux programmes. Elles incluent également des dispositions visant à assurer le respect de l'alinéa 57(1) d.1) de la Loi sur l'assurance-emploi concernant «la possibilité de recevoir de l'aide dans le cadre de prestations ou de mesures dans l'une ou l'autre des langues officielles là où l'importance de la demande le justifie ».

D'une entente de transfert à l'autre, les clauses linguistiques ne sont pas les mêmes. Certaines sont plus détaillées. Au Québec et au Nouveau-Brunswick par exemple, les programmes et services sont disponibles « sur demande ». Les ententes de transfert suivantes font référence à l'utilisation du Règlement sur les langues officielles ? communications avec le public et prestation des services comme guide pour définir l'importance de la demande et plusieurs prévoient la consultation de la communauté de langue officielle en situation minoritaire : Alberta, Manitoba, Saskatchewan, Territoires-du-Nord-Ouest.

Le Manitoba et la Saskatchewan ont pris des engagements écrits, à l'extérieur des ententes, pour le maintien des programmes et services dédiés aux francophones de ces provinces. 

Toutes les ententes contiennent des mécanismes en vue d'assurer le suivi et l'évaluation de la conformité aux engagements. Le Commissaire aux langues officielles n'a cependant pas juridiction lorsqu'il s'agit d'ententes de transfert. Un cadre d'évaluation générique a été développé par DRHC et, pour chacune des provinces excepté le Québec, un cadre d'évaluation conjoint a été élaboré à partir du cadre générique. Chacun de ces cadres d'évaluation inclut des questions portant sur les langues officielles. DRHC entend élaborer un cadre d'évaluation pancanadien incluant une section mesurant l'incidence des ententes de transfert sur les communautés de langue officielle. Le ministre du Développement des ressources humaines doit aussi faire rapport au Parlement sur les effets de la réforme, y compris les ententes. Le rapport de 1997-1998 fera état des réalisations de DRHC et servira de base de comparaison pour les années subséquentes. Il inclura une section relative aux ententes mises en oeuvre.

Dans chaque province, il existe une instance de gestion de l'entente, composée de fonctionnaires fédéraux et provinciaux, qui traite de l'ensemble des questions que peuvent soulever la mise en oeuvre et la gestion de l'entente.

Le Groupe de travail a pleinement conscience que les EDMT constituent l'une des transformations les plus importantes entreprises par le gouvernement du Canada au cours des dernières années.

Par ailleurs, nous avons aussi pris note des critiques formulées à l'endroit de ces ententes par le Commissaire aux langues officielles dans son étude sur les effets des transformations du gouvernement sur le programme des langues officielles du Canada, à la suite d'une enquête spécifique qu'il a effectuée sur les EDMT.

Nous constatons notamment qu'en raison des EDMT, le gouvernement fédéral est maintenant privé de moyens importants qu'il avait pour appuyer le développement et l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire et que les EDMT ne contiennent pas d'engagement des provinces à cet effet.

Le Groupe de travail note aussi que les EDMT ne prévoient pas, en matière de langues officielles, de mécanisme de recours spécifique offrant de bonnes garanties d'efficacité en termes d'accès et de correctifs. Même si les cadres d'évaluation développés par DRHC de concert avec les provinces traitent des langues officielles, n'aurait-il pas été préférable que les EDMT elles-mêmes prévoient explicitement des mesures d'obligation de rendre compte et d'évaluation en matière de langues officielles?

Les EDMT sont importantes quant à l'impact qu'elles peuvent avoir sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Il faut avoir recours à un ensemble de moyens pour préciser spécifiquement les avantages dont jouissaient les communautés avant que les EDMT entrent en vigueur, déterminer dans quelle mesure elles n'y ont plus accès et prévoir, le cas échéant, des mesures compensatoires.

Comme les ententes ont des clauses d'évaluation visant les trois premières années, l'occasion existe pour le gouvernement de préciser les ententes en
regard des droits linguistiques à respecter. Le Groupe de travail croit qu'il faut éliminer les inégalités de traitement en matière de droits linguistiques. 
 

3.2.6.2 Les ententes en vertu du paragraphe 65(2) de la Loi sur les contraventions

Les grands objectifs de la Loi sur les contraventions sont de décriminaliser quelque 1 600 contraventions qui tombaient auparavant sous le Code criminel, d'alléger la charge de travail des tribunaux et d'améliorer l'application des lois fédérales. À la lumière des représentations que nous avons entendues du ministère de la Justice et de l'Association des juristes d'expression française de l'Ontario (AJEFO), nous avons pris connaissance des questions que soulèvent, au plan des langues officielles, les ententes avec les provinces en vertu du paragraphe 65 (2) de la Loi.

Nous avons constaté qu'il y avait un désaccord au sujet de l'efficacité des instruments que se propose d'utiliser le ministère de la Justice en vue d'assurer une protection en matière de langues officielles équivalente à celle que prévoyait le Code criminel. Nous avons observé par ailleurs que des mesures correctives ont dû être prises pour tenir compte de la délégation par l'Ontario aux municipalités du pouvoir que lui conférait l'entente en vertu du paragraphe 65 (2) de la Loi et que c'est suite aux démarches de l'AJEFO que l'Ontario a amendé sa Loi sur les infractions provinciales pour tenir compte des droits linguistiques des francophones. L'AJEFO a aussi insisté sur le fait que des consultations devraient avoir lieu dès le début dans le cas de tout transfert de responsabilité pouvant affecter les droits linguistiques.
 

3.3 Constatations générales

Le gouvernement fédéral qui est indiscutablement le principal fiduciaire de la dualité linguistique canadienne et son premier promoteur a raté, dans le cadre des transformations auxquelles il a présidé, une très belle occasion de la faire s'épanouir pleinement. Certes, dans le domaine des transformations gouvernementales, le gouvernement a fait preuve de dynamisme et de sens de l'innovation et il a des réalisations importantes à son crédit. Toutefois, en faisant le bilan de la situation linguistique, le Groupe considère que le gouvernement n'a pas manifesté le même leadership et la même créativité et qu'il n'a pas su assurer pleinement le maintien des droits linguistiques. 

Nous concluons, à l'instar du Commissaire aux langues officielles, que les transformations gouvernementales ont donné lieu à une érosion subtile mais cumulative des droits linguistiques au plan du service au public, de la langue de travail, de la participation équitable ainsi que de l'appui au développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire.

Le gouvernement fédéral doit prendre les moyens afin de redresser la situation. Les modifications que l'on souhaite voir apporter au Cadre d'examen sont l'un de ces moyens. Il est aussi important que le gouvernement fédéral soit prêt à mettre en oeuvre des initiatives pour assurer autrement le maintien de sa présence dans la société canadienne.



4 Conformément au nouveau rôle du Conseil, le Cadre ne présente pas de modèles à suivre, mais définit des stratégies à l'intention des ministères cherchant à sélectionner la meilleure façon d'assurer la prestation de programmes, d'activités, de services et de fonctions dans un environnement axé sur la clientèle, financièrement viable et novateur. Le Cadre établit des principes et des critères afin de déterminer si les différents modes d'exécution des programmes atteignent les objectifs gouvernementaux et décrit ces modes et leurs dispositions concernant l'obligation de rendre compte ainsi que la gestion des finances et des ressources humaines. Le Cadre ne réfère à aucun mécanisme centralisé pour l'examen des modes proposés d'exécution des programmes.  [ Retour ]

5 Le gouvernement du Canada a décidé au début des années 1990 de regrouper l'accès à tous les services qu'il offrait aux propriétaires d'entreprises au sein d'unités de service intégrées, les centres de services aux entreprises du Canada. L'initiative a démarré en 1992 avec l'inauguration des bureaux d'Edmonton, Halifax et Winnipeg. Après en avoir fait l'évaluation, quelque 18 mois plus tard, des discussions entre fonctionnaires fédéraux et provinciaux ont donné naissance à l'idée d'un centre intégrant autant que possible l'ensemble des services aux entreprises. La décision de réaliser cette idée a amené la conclusion de partenariats publics entre des organismes fédéraux et provinciaux avec, en certains cas, la participation du secteur privé et aussi d'organismes non gouvernementaux. Chaque province et territoire compte maintenant des CSEC dans ses grands centres et ces « guichets uniques de services aux entreprises » sont appelés à collaborer les uns avec les autres à ce qu'il est légitime de considérer comme un réseau pancanadien de services.  [ Retour ]

6 Commissaire aux langues officielles, Les effets des transformations du gouvernement sur le programme des langues officielles du Canada, 1998, pp. 13 et 14.  [ Retour ]

7 Ibidem, p. 13.  [ Retour ]

8 Un décret en conseil pris en janvier 1995 a amorcé la création de la nouvelle Commission canadienne du tourisme en créant un comité de 26 membres. Les membres du Comité (ci-après appelé le Conseil) assument des responsabilités décisionnelles analogues à celles d'un conseil d'administration. Outre son président nommé par décret, il se compose de membres nommés par le ministre de l'Industrie ? d'au plus neuf membres du secteur privé, d'au plus sept membres qui sont des exploitants d'entreprises touristiques et représentatifs des régions, d'au plus sept membres qui sont des sous-ministres provinciaux/territoriaux responsables du tourisme et du sous-ministre d'Industrie Canada. Le Conseil est appuyé par un organisme de service spécial (OSS), avec à sa tête un directeur qui est membre du Conseil et qui lui rend directement des comptes, et aide la CCT à s'acquitter de son mandat en matière de tourisme.  [ Retour ]

9 Commissaire aux langues officielles, op. cit. p. 12.  [ Retour ]

10 Le Conseil fonctionne en partenariat avec un ensemble de comités constitués de groupes d'intervenants présidés par des représentants du secteur privé et chargés d'élaborer et de mettre en oeuvre les programmes de la CCT. L'OSS/Commission canadienne du tourisme offre pour sa part ses programmes et services à l'industrie canadienne du tourisme sous la direction de son Conseil.  [ Retour ]

11 Un document de la CCT intitulé Charte (août 1995) fait référence à une annonce du Premier ministre à l'effet que, dans ce nouveau cadre, le financement de base des activités de promotion serait porté à 50 millions de dollars pour l'année 1995-1996 et les années suivantes et que le programme ferait l'objet d'un nouvel examen trois ans après la création de la Commission. En plus des fonds fédéraux, il est prévu selon ce document que les partenaires affecteront des crédits au financement des activités conjointes. On prévoyait pour 1995-1996 des crédits de 31 millions de dollars, l'objectif étant, à moyen terme, d'accroître les crédits des partenaires à 50 millions de dollars afin d'en arriver à un budget conjoint de 100 millions de dollars au titre du marketing.  [ Retour ]

12 Commissaire aux langues officielles,
op. cit. p. 13.    [ Retour ]