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ARCHIVÉ - Qualité de vie - rapport conceptuel : les moyens de définir et de mesurer la qualité de vie et de présenter aux Canadiens des rapports à ce sujet

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Message de la présidente


Lors de son discours du Trône en 1999, le gouvernement actuel a décrit d'ambitieux projets pour l'avenir. Il entend investir dans des secteurs comme la jeunesse, l'emploi, la santé, l'environnement et la technologie - les secteurs qui importent le plus pour les Canadiens et les Canadiennes. Cette intention correspond au ferme engagement pris par le gouvernement vis-à-vis de la population canadienne de prendre des mesures qui amélioreront et protégeront la qualité de vie dans notre pays.

La « qualité de vie » est un concept vaste que l'on peut définir de nombreuses façons et qui ne se limite pas simplement au revenu. Il est le produit de l'interaction d'un certain nombre de facteurs sociaux, économiques, environnementaux et liés à la santé. Il est important pour les décideurs à tous les paliers gouvernementaux de chercher à comprendre davantage quelles sont les choses auxquelles les Canadiens et Canadiennes attachent de la valeur dans le contexte de leur qualité de vie. Cette compréhension est essentielle à la création, à la mise en oeuvre et à l'évaluation de programmes et de services axés sur les citoyens et les citoyennes de notre pays.

En Octobre 1999, j'ai déposé au Parlement le rapport intitulé Une gestion axée sur les résultats 1999. Dans le chapitre 3 de ce document, on aborde des questions ayant trait à la mesure des indicateurs sociaux et on propose des approches que l'on pourrait adopter pour produire des rapports complets tenant compte de la qualité de vie. Le Secrétariat du Conseil du Trésor s'est engagé à consulter de nombreux partenaires différents à propos de ce sujet important et complexe. Le présent document, Qualité de vie, s'inscrit dans ce processus. Il vise à encourager la discussion et la communication d'idées sur la manière de définir et de mesurer la qualité de vie pour les Canadiens et Canadiennes et d'en rendre compte.

Je vous encourage donc à lire ce document, à réfléchir aux questions qu'il soulève et à nous faire part des commentaires qu'il suscite. C'est à partir de cette réflexion que tous ensemble, nous pourrons mieux définir nos politiques publiques, aujourd'hui et pour l'avenir.

 

Lucienne Robillard
Présidente du Conseil du Trésor


Résumé


Le présent rapport conceptuel examine trois éléments : les moyens de définir et de mesurer la qualité de vie (QV) ainsi que les moyens de présenter des rapports à son sujet. Il propose ensuite un cadre pour l'établissement d'un processus fédéral de mesures du rendement et de rapports qui pourrait intégrer des rapports sur la QV.

L'intérêt que suscite la présentation de rapports sur la QV trouve son origine dans trois tendances qui se sont dessinées récemment dans le domaine de la gestion publique moderne. En premier lieu, on assiste à un regain d'intérêt pour les indicateurs sociétaux, après un déclin, dans les années 80, qu'avaient précédé quelque quinze années de développement. Les gouvernements de tous ordres ainsi que des organisations internationales publient des rapports sur les indicateurs sociétaux. L'OCDE commencera en l'an 2000 à rendre publiques des données sur les indicateurs sociétaux, mais le rapport le plus connu est l'Indice du développement humain des Nations Unies, qui a maintes fois classé le Canada au premier rang d'un indice que les médias ont popularisé comme étant un outil de classement des pays au chapitre de la qualité de vie.

En deuxième lieu, on observe une tendance croissante des administrations publiques à faire rapport aux citoyens sur le rendement. Cette présentation de rapports libère l'imputabilité, ou obligation de rendre compte, de la formule simpliste qui consiste à pointer du doigt, pour la faire tendre vers une approche nouvelle dans laquelle les gouvernements sont responsables de dire quels sont les résultats désirés des programmes et comment ces résultats seront mesurés de façon transparente, puis de tirer des leçons des échecs pour atteindre les résultats escomptés et modifier les programmes en conséquence.

En troisième lieu, on remarque que, de plus en plus, les citoyens veulent avoir leur mot à dire dans la définition des questions et dossiers à l'ordre du jour et dans le processus d'élaboration des politiques. La présentation de rapports sur la QV peut faciliter la mise en oeuvre de processus visant à faire participer les citoyens à l'élaboration des politiques.

Il existe divers liens entre la fonction proposée de rapports sur la QV et des initiatives fédérales connexes déjà en cours, notamment les rapports ministériels sur le rendement (RMR) et le rapport de la présidente du Conseil du Trésor intitulé Une gestion axée sur les résultats, qui sont déposés chaque année au Parlement, ainsi que les engagements que le gouvernement fédéral a pris, dans l'Entente-cadre sur l'union sociale (ECUS), en matière d'obligation redditionnelle et de présentation de rapports.

Le présent rapport propose un processus fédéral exhaustif de mesure du rendement et de transmission de données aux citoyens qui intègre trois volets de présentation de rapports : la fonction de rapport sur les tendances sociétales, comme la QV; la fonction de rapport sur les résultats atteints quant aux buts sociétaux communs, comme ceux que prévoit l'ECUS; la fonction de rapport sur les résultats de programmes et sur le rendement des programmes fédéraux au chapitre de la prestation de services, dimensions qui sont la raison d'être des RMR. Chacun de ces volets répond à des objectifs différents et chacun en est à une étape différente d'élaboration. Un rapport intégré ne remplacerait aucune de ces initiatives existantes, ni n'en modifierait l'évolution, mais s'en inspirerait plutôt pour atteindre un objectif plus fondamental.

Un rapport exhaustif mentionnerait que le but de chaque type de rapport est différent. Les rapports de QV sur les données conjoncturelles (tendances) visent à renseigner les citoyens sur la façon dont ils peuvent influer sur l'orientation des politiques générales et sur la sélection des questions et dossiers à l'ordre du jour. Compte tenu de la difficulté, dans ces types d'indicateurs, d'attribuer des changements à des mesures gouvernementales particulières, ce type de rapports ne peut être assimilé à un instrument pour tenir les gouvernements responsables, quoique certains puissent vouloir les utiliser à cette fin. La fonction de rapport sur les résultats atteints à l'égard de buts sociétaux communs vise à renseigner les citoyens pour les amener à participer, de concert avec d'autres intervenants tels que les organisations gouvernementales et non gouvernementales, à la définition et à la réalisation de buts communs. La fonction de rapport sur les résultats de programmes et la prestation de services des ministères a pour objet de permettre aux citoyens de tenir les gouvernements responsables, idéalement dans une perspective de transparence et d'apprentissage, plutôt que de se contenter de blâmer ou de critiquer.

La série de rapports sur la gestion axée sur les résultats, publiés au cours des quatre dernières années, commandait un processus de rapport sur les indicateurs sociétaux, et les parlementaires ont fait remarquer qu'un tel processus de rapport fournirait la matière de leur examen des RMR.

Comme point de départ du débat et de la discussion, le chapitre 3 du rapport Une gestion axée sur les résultats 1999 propose, en matière de présentation de rapports, une approche exhaustive qui comporterait un volet centré sur la qualité de vie; le rapport prévoit également une série d'exemples d'indicateurs sociétaux, que Statistique Canada a élaborés de façon assez détaillée.

Tout processus du genre de celui qui est discuté ici devrait être axé sur les citoyens. Les indicateurs définitifs de QV sur lesquels on s'est entendu doivent être pertinents aux citoyens et rendre compte de leurs valeurs quant à ce qui contribue à la QV. Il conviendrait donc de faire participer les citoyens à la définition des indicateurs et des mesures réelles utilisés pour évaluer le rendement. Il faudrait également faire appel à des experts pour veiller à ce que la méthodologie qui sous-tend les rapports soit crédible. Il y aurait également lieu de consulter d'autres gouvernements qui publient déjà des rapports sur les indicateurs sociétaux, comme le gouvernement de l'Alberta, qui a inclus des indicateurs sociétaux dans son rapport annuel de mesure du rendement, afin de partager les meilleures pratiques.

Pour mettre en place un cadre de rapport exhaustif, il conviendrait de recourir à une approche évolutive et graduelle qui susciterait l'adhésion des intervenants à l'égard d'un tel rapport. Parallèlement, il existe déjà une solide expertise dans certains ministères, en particulier Statistique Canada. Des relations avec les experts et les membres du Parlement ont déjà été tissées avec la publication des rapports sur la gestion axée sur les résultats, et des discussions sur la mesure du rendement sont toujours en cours avec les provinces en vue d'initiatives conjointes, comme le Régime national de prestations pour enfants (RNPE) et le Programme d'action national pour les enfants (PANE). La possibilité de tirer parti de ce travail et l'appui qui existe déjà pour de tels rapports contribueraient à faire avancer le concept et la mise en oeuvre d'un cadre de rapport exhaustif.


1. Définir la QV


Il ne semble pas y avoir de définition unique généralement acceptée de la QV dans les très nombreux documents qui ont été produits sur le sujet au cours des trente dernières années. Qui plus est, d'autres expressions, telles que « bien-être social », « sécurité sociale » et « développement humain », sont souvent utilisées comme des expressions équivalentes ou analogues. Par exemple, comme on l'a déjà vu, l'Indice du développement humain des Nations Unies est souvent qualifié d'instrument de mesure de la QV. Généralement, toutefois, la QV est considérée comme le produit de l'interaction de plusieurs facteurs (sociaux, de santé, économiques, environnementaux) qui, collectivement et par des moyens souvent inconnus, entrent en interaction pour finalement avoir une incidence sur le développement humain et social, au niveau des particuliers comme à celui des sociétés.

Dans les études et ouvrages parus sur la question, on reconnaît qu'une telle notion comporte une dimension à la fois subjective et objective. « En ce qui a trait à la qualité de vie subjective, il est question de se sentir bien et d'être satisfait des choses en général. Quant à la qualité de vie objective, il s'agit de satisfaire aux exigences culturelles et sociétales en matière de richesse matérielle, de statut social et de bien-être physique. » (Centre de recherches sur la QV, Danemark). i Cela représente un défi pour ce qui est de mesurer la QV et de faire rapport à cet égard. Par exemple, les résultats d'un indicateur subjectif tel qu'un sondage d'opinion pourraient faire apparaître qu'un groupe en particulier se dit très satisfait de sa QV, alors que des indicateurs objectifs comme la santé, le logement, le revenu et l'éducation, appliqués au même échantillon, pourraient dénoter un niveau moins élevé de QV, peut-être, par rapport à d'autres personnes. Lequel de ces indicateurs représente la mesure la plus pertinente de la QV et lequel devrait guider la définition des programmes et l'élaboration des politiques?

Il importe de tenir compte de la façon dont les Canadiens perçoivent actuellement la notion de QV et de ce que cette expression signifie vraiment pour eux. Fait intéressant à noter, l'expression ne semble pas être confondue avec le « niveau de vie », puisque tant les travaux et documents publiés sur la question que le public en général font une nette distinction entre la QV et le « niveau de vie ». La International Society for Quality of Life Studies définit le niveau de vie comme une mesure de la quantité et de la qualité des biens et services mis à la disposition des gens, comme le PIB par habitant, le nombre de médecins par millier d'habitants, le pourcentage du PIB consacré à la santé et à l'éducation, ou le nombre de téléviseurs et de téléphones par ménage. Elle donne de la QV une définition très différente : « le produit de l'interaction entre les facteurs sociaux, économiques, environnementaux et de la santé qui touchent le développement humain et social ».ii En fait, la notion de QV a vu le jour au milieu des années 1960, comme solution de rechange au concept de la « société d'abondance », dont on doutait de plus en plus qu'il puisse être une mesure de la richesse d'une société. Y fait écho cette réflexion du président américain Johnson qui, en 1964, caractérisait la « grande société » comme « ne se préoccupant pas tant de la quantité de produits que de la qualité de la vie. »

Un récent sondage d'opinion EKOS sur la notion de productivité a fait ressortir « un profond écart d'opinion entre la façon dont on perçoit le 'niveau de vie' et la résonance de la 'qualité de vie' », et que les Canadiens n'accordaient pas la même valeur aux deux expressions. Par exemple, en réponse à une question sur le but national que le Canada devrait atteindre d'ici 2010, les répondants ont déclaré que s'ils se trouvaient pendant une journée à la place du premier ministre, ils mettraient (dans une proportion de 66 %) « la meilleure qualité de vie au monde » au premier rang des priorités de la nation, comparativement au « niveau de vie le plus élevé des pays industrialisés », qui a constitué la deuxième réponse la moins populaire, avec une proportion de 30 % des répondants. iii

Le sondage EKOS a également révélé que, pour le grand public, l'expression « qualité de vie » semblait clairement liée aux politiques et objectifs économiques et sociaux, ce qui correspond à la façon dont la politique publique devrait être élaborée aux yeux de la majorité. Il semble que les Canadiens soient de plus en plus nombreux à reconnaître que « la croissance économique et un meilleur niveau de vie passent obligatoirement par de bons programmes sociaux et de bonnes politiques sociales ». iv Le rapport EKOS conclut que les répondants qui ont massivement rejeté l'idée du « niveau de vie le plus élevé » comme objectif déterminant pour le Canada ne se perçoivent pas ni ne perçoivent leur société en simples termes pécuniaires, mais se préoccupent de ce qu'on appelle souvent « l'investissement humain », c'est-à-dire la santé, l'éducation, l'acquisition de compétences et les résultats des enfants.

Pour les Canadiens, la « qualité de vie » pourrait aussi représenter cette quête constante d'un équilibre entre les objectifs sociaux et économiques qui différencie le Canada de bien d'autres pays, en particulier les États-Unis. Nombreux sont ceux qui estiment que l'identité canadienne réside en fait dans cette différenciation explicite du Canada et des États-Unis, en particulier au chapitre des programmes sociaux, tels que les soins de santé. D'aucuns ont émis l'hypothèse que cette approche pourrait être définie comme « la façon canadienne », et d'autres ont fait valoir qu'une politique de la qualité de vie pouvait être caractérisée comme une version canadienne de la « troisième manière » mise de l'avant par le premier ministre de Grande-Bretagne, Tony Blair.

Lors d'une réunion de participants du gouvernement, du milieu des affaires et du secteur bénévole, qui s'est tenue à l'occasion du Forum des politiques publiques (FPP), en juin 1999, a émergé un autre sens de l'expression « qualité de vie ». L'objectif de cette réunion était d'étudier des façon d'améliorer le partenariat à trois entre ces secteurs afin d'« édifier une saine société ». Les participants ont décidé de mettre en oeuvre un grand projet pour aider les trois secteurs à travailler de concert et à créer une vision commune de cette société. Le projet qu'ils ont choisi a été celui de l'élaboration d'indices de la qualité de vie, notamment parce qu'ils voyaient la « qualité de vie » comme un possible point de ralliement sur lequel tous les secteurs pourraient s'entendre, malgré des divergences sur des dossiers particuliers tels que l'exode des cerveaux et la productivité. Ils ont isolé ce terrain d'entente car ils convenaient tous de l'importance de lier les objectifs économiques aux objectifs sociaux, ce que l'expression « qualité de vie » semble là encore incarner.

Les significations variées mais compatibles entre elles que semble revêtir l'expression « qualité de vie » pour les Canadiens militent grandement en faveur de son utilisation comme thème directeur de l'action gouvernementale. On ne saurait toutefois réduire la qualité de vie à un simple slogan si l'on veut qu'elle oriente la politique publique et, en particulier, si elle représente un moyen de définir et de formuler l'identité canadienne en réponse aux pressions de la mondialisation et de l'intégration économique accrue avec les États-Unis. L'approche retenue pour mesurer la QV et faire rapport à cet égard sera déterminante pour la formulation et l'évolution de la QV au-delà du simple slogan.

Il est plus important encore que le gouvernement soit clair sur l'objet de la fonction gouvernementale de rapport sur la QV et qu'il soit en mesure de satisfaire les attentes de citoyens. En particulier, il faudra que le gouvernement fasse la distinction entre le recours à cette fonction de rapport pour opérer des choix éclairés en matière de processus d'élaboration des politiques et l'établissement d'un lien explicite entre la présentation de rapports sur la QV et la définition des priorités.


2. Mesurer la QV


Il y a un certain nombre de difficultés d'ordre méthodologique associées à la mesure de la QV. En fait, les problèmes de mesure ont été les moteurs de l'élaboration du concept même de la QV. Les critiques sur le plan méthodologique faites au domaine des indicateurs sociaux, qui mettaient l'accent sur son incapacité de démontrer comment différentes variables entrent en interaction pour produire une QV donnée et le fait que ce domaine n'ait pu intégrer des données subjectives, ont entraîné son déclin au début des années 1980, après quelque quinze années de développement. Peut-être ce déclin était-il inévitable étant donné cette hypothèse initiale, non dénuée d'une certaine prétention, qui voulait que l'expérience et les processus sociétaux puissent être quantitativement modelés et rapportés d'une façon qui pouvait se traduire directement par une action gouvernementale. Avec un tel objectif en point de mire, les recherches sur les indicateurs sociaux n'ont pu répondre aux attentes.

Depuis le milieu des années 1980, les objectifs de la recherche et des travaux appliqués en matière d'indicateurs sociaux sont plus modestes. En même temps, la technologie de l'information, avec l'arrivée des bases de données et de l'infrastructure de traitement des données, a rendu ces objectifs plus faciles à atteindre. Les tenants de ce mouvement ne prétendent pas que des modèles quantitatifs d'indicateurs sociaux peuvent être utilisés pour simplifier les processus de planification ou fixer des priorités. Ils défendent plutôt les indicateurs sociaux à titre de données pouvant éclairer les processus stratégiques et être intégrées dans ces processus, et que l'on peut utiliser pour mesurer les progrès accomplis à l'égard de la réalisation de buts convenus. En particulier, on a affirmé que l'une des plus importantes fonctions des indicateurs sociaux a été de relever le profil des questions sociales dans le débat sur la politique publique dominé par les indicateurs économiques plus facilement accessibles, tels que le produit intérieur brut (PIB). Un chercheur scandinave dans le domaine, Joachim Vagel, soutient que « les rapports sur la société s'inscrivent dans le cadre de l'infrastructure démocratique et qu'ils exercent une fonction politique particulière. Pour simplifier, les rapports sur la société inscrivent la question du bien-être au programme politique. »v

Divers modèles de QV sont déjà utilisés. Plusieurs de ces indicateurs, par exemple l'espérance de vie, la qualité de l'environnement physique, les taux de criminalité, les taux de pauvreté et des statistiques économiques telles que le PIB par habitant, ont tendance à se retrouver dans la plupart des modèles de QV. Parallèlement, au terme de trois décennies de travaux accomplis dans le domaine, il ne s'est toujours pas dégagé de consensus théorique ou méthodologique sur la mesure de la QV. À ce chapitre, mentionnons par exemple le débat entourant la question des indices sommaires, un aspect de la mesure de la QV qui connaît actuellement un regain d'intérêt. Un certain nombre de modèles de QV tentent de fournir un index sommaire, bien que l'une des questions clés, sur le plan stratégique, soit de déterminer dans quelle mesure pareille agrégation (réunion) de données peut être utile pour éclairer le débat politique, d'autant plus que, ainsi que l'affirme Lars Osberg, un index unique a tendance à rendre plus floues les questions de fait, les analyses et les valeurs. Une solution, que l'on retrouve dans l'indice de bien-être économique mis au point par Lars Osberg et Andrew Sharpe vi, consiste à fournir des données pour déclencher explicitement un débat sur le poids qui se rattache à chaque composante de l'indice.

La sélection d'indicateurs procède à la fois de la science et de l'art, puisqu'elle fait fondamentalement appel à des décisions sur des questions statistiques et à des jugements sur des valeurs. Le défi qui consiste à trouver des solutions aux problèmes statistiques peut être relevé en engageant des experts dans un débat sur les questions méthodologiques, mais la nécessité de porter des jugements de valeur sur la présentation de rapports sur la QV commande la participation des citoyens à un certain nombre d'aspects du processus, notamment le choix et la définition des indicateurs ainsi que l'attribution de valeurs aux indicateurs, la réception et l'interprétation des résultats, de même que la surveillance et l'affinement des indicateurs au fil du temps. Un système de mesure de la QV et de présentation de rapports sur la QV crédible et pertinent, et qui vise à influer sur la définition des questions et dossiers à l'ordre du jour, doit absolument faire intervenir experts et citoyens dans son élaboration et son évolution.

Un examen plus poussé de ces problèmes méthodologiques pourrait reposer sur un modèle de rapport sur la QV. Pour produire un tel rapport, il faudrait définir les indicateurs les plus pertinents dans chaque domaine, notamment des données suggestives et des données objectives. Il faudrait faire une analyse des tendances pour chaque indicateur, puisque la mesure la plus utile de la QV n'est pas un instantané ponctuel, mais plutôt une analyse de l'évolution des données pendant les périodes pertinentes. Cette analyse pourrait tabler sur des données repères, au même titre que l'Indice du développement humain des Nations Unies. Comme point de départ, on pourrait inclure des données comparables pour les indicateurs des États-Unis, lorsqu'elles existent.

La série d'indicateurs possibles de la QV présentée dans le tableau ci-dessous, qui a été élaborée par Statistique Canada et le Secrétariat du Conseil du Trésor, est tirée du rapport Une gestion axée sur les résultats 1999 déposé par la présidente du Conseil du Trésor en octobre 1999. On peut trouver des renseignements supplémentaires sur ces indicateurs aux sites suivants : http://www.statcan.ca/. On y trouvera des définitions des indicateurs, des analyses des tendances sous forme graphique, une interprétation des données, et des comparaisons pertinentes avec d'autres pays, notamment à partir de données comparables pour les États-Unis, lorsqu'elles existent.

Santé, environnement et sécurité
du public
Occasions et participation
économiques
Participation sociale
  •  
  • qualité de l'air et de l'eau
  • espérance de vie
  • mortalité infantile
  • santé
  • taux de criminalité
  • crimes violents
  • niveau de scolarité
  • taux d'alphabétisation
  • taux d'emploi
  • produit national brut par habitant
  • revenu discrétionnaire
  • recherche et développement/ innovation
  • mesures du racisme et de la discrimination
  • participation au vote
  • bénévolat
  • activités et produits culturels

Cet ensemble d'indicateurs éventuels a pour objet d'alimenter la discussion sur des questions de fond et de forme, puisqu'il faudrait beaucoup plus de travail pour produire un rapport crédible sur la QV. En particulier, il faudrait prendre davantage en considération les critères que l'on ferait intervenir pour recenser les indicateurs de QV à utiliser pour produire un rapport fédéral sur la QV, notamment la pertinence au programme stratégique actuel, la pertinence par rapport aux citoyens et la disponibilité de données ou le coût de la production de nouvelles données.

Une autre question à examiner serait celle de déterminer si seules des données nationales doivent être présentées, ou si le rapport devrait comprendre des ventilations pertinentes par sous-groupe. Par exemple, la courbe des données canadiennes sur l'espérance de vie est positive au niveau national, mais le tableau est bien différent pour les données d'espérance de vie des autochtones. En corollaire, il s'agirait de mesurer l'opportunité de fournir des données régionales qui seraient plus pertinentes pour les citoyens. Sur le plan technique, on pourrait concevoir un site Web consacré aux grands indicateurs, qui permettrait à l'utilisateur d'accéder, en mode descendant, à une information plus détaillée.

Il importe aussi de définir l'équilibre à atteindre entre les données quantitatives et l'analyse et l'interprétation qualitative des données. Fondamentalement, il s'agit de déterminer pourquoi certains indicateurs évoluent à la hausse et à la baisse dans le temps et si tous les Canadiens sont touchés de la même façon par ces tendances. Quels résultats d'analyse devraient se retrouver dans un document gouvernemental et quelle proportion de l'analyse doit être laissée aux universitaires et aux organisations non gouvernementales intéressés? Dans quelle mesure cela aurait-il une incidence sur la crédibilité du rapport?


3. Faire rapport sur la QV


Un rapport sur la QV devait être un rapport public plutôt qu'interne, qui pourrait être rendu public par le gouvernement fédéral, voire déposé au Parlement, sur le modèle du rapport sur la gestion axée sur les résultats, qui est déposé annuellement à l'automne. Il faudrait formuler clairement l'objectif du rapport et clarifier les liens entre une nouvelle initiative de rapport sur la QV, les actuels RMR et d'autres engagements en matière de rapport que le gouvernement fédéral a pris.

Il y a, dans la gestion publique moderne, diverses tendances qui fournissent le contexte de la présentation de rapports sur la QV par le gouvernement fédéral.

Tout d'abord, les organisations statistiques nationales et internationales compilent et publient davantage de données statistiques sur un éventail de sujets de plus en plus large. Cette tendance est induite par de nombreux facteurs, notamment les progrès de la technologie de l'information, la complexité croissante des questions de politique publique, qui nécessite la compilation de données plus nombreuses et de meilleure qualité, et le besoin de fournir des données au secteur privé afin qu'il maintienne sa capacité concurrentielle dans une économie de plus en plus mondialisée. Au nombre des intervenants clés dans ce domaine, mentionnons les bureaux statistiques, tel Statistique Canada, qui publie des données nationales, mais aussi des organisations internationales comme les Nations Unies et l'Organisation de Coopération et de Développement Économiques, qui publient des rapports renfermant des données comparables sur un certain nombre de pays. De plus en plus, on perçoit ces derniers rapports comme établissant des données de référence sur le rendement de chaque pays.

Un exemple classique de ce genre de rapport est celui de l'Indice du développement humain des Nations Unies. Le Canada peut s'enorgueillir à juste titre du premier rang qu'il y occupe depuis quelques années, mais on se demande si un rapport « fait au Canada » sur notre qualité de vie ne rendrait pas mieux compte de nos priorités et valeurs propres et, par là même, ne serait pas plus pertinent à notre programme politique.

En deuxième lieu, en gestion publique moderne, se dessine une tendance des gouvernements à faire rapport aux citoyens. Cela représente une évolution notable de la traditionnelle fonction gouvernementale de communication de renseignements, puisque cela signifie que les administrations publiques font preuve d'une plus grande transparence à l'égard des objectifs qu'elles essayent d'atteindre, des raisons qui leur font croire que des activités ou programmes gouvernementaux particuliers permettront d'atteindre ces objectifs et de la façon dont elles (les citoyens) mesureront le degré de réalisation de leurs objectifs. En faisant ainsi rapport, les gouvernements ont aussi l'occasion de montrer comment ils apprennent de ce processus de mesure des résultats et y modifient leurs activités en sorte d'atteindre les résultats désirés. Ce genre de transparence étaye une nouvelle perspective sur la responsabilisation, dans laquelle les administrations publiques sont responsables, aux yeux de la population :

  • de comprendre et formuler clairement quels résultats sont escomptés, comment les programmes et politiques sont conçus pour atteindre ces résultats et comment l'on mesurera le degré de réalisation de ces buts;
  • d'atteindre ces résultats dans le respect des traditionnelles valeurs de la fonction publique, soit l'application régulière de la loi, l'équité et la justice, en satisfaisant aux normes de service en matière de rapidité de traitement, de qualité et d'exactitude et, le cas échéant, en prévoyant des mécanismes d'appel et de recours ou de réparation; de tirer les leçons des échecs pour modifier les programmes en conséquence et atteindre les résultats désirés.

Ce genre de transparence et d'obligation redditionnelle est l'objectif du mouvement auquel on assiste en faveur d'une approche d'apprentissage basée sur les valeurs et les résultats, en gestion publique moderne, que l'on retrouve de plus en plus souvent dans les RMR. La présentation de rapports sur la QV pourrait aussi être une composante de la gestion publique moderne, mais d'une façon qui tienne bien compte de la capacité souvent limitée des administrations publiques d'influer directement sur les indicateurs de QV choisis. Ainsi, la présentation de rapports de QV ne doit pas être interprétée comme un instrument d'imputabilité du gouvernement (quoique certains voudront l'utiliser de cette façon), mais plutôt comme un outil servant à éclairer le programme politique. Mais si l'on veut une approche exhaustive en matière de communication de l'information, il conviendrait de compléter les rapports sur la QV par des rapports sur les résultats de programmes et la prestation de services que feraient les administrations publiques qui fournissent des renseignements aux citoyens sur les mesures particulières que prend le gouvernement pour influer, en bout de ligne, sur la qualité de vie au Canada.

Le troisième aspect de la gestion publique moderne pertinent aux rapports sur la QV consiste à aller au-delà de la transparence et de la responsabilité pour faire réellement participer les citoyens au processus de sélection des questions et dossiers à l'ordre du jour et d'élaboration des politiques. Certains ont qualifié cet aspect d'évolution selon laquelle les citoyens ne sont pas simplement considérés comme des électeurs ou des consommateurs de services publics, mais comme des partenaires de la gouvernance. Les sondages d'opinion dénotent clairement une volonté des citoyens de participer aux discussions sur les questions de politiques publiques qui sont importantes à leurs yeux, en particulier celles qui portent sur des valeurs fondamentales et impliquent des compromis à faire entre les valeurs, et montrent qu'ils ne sont pas satisfaits des traditionnels véhicules de communication des renseignements et de consultation que les gouvernements ont utilisés pour les faire participer au processus d'élaboration des politiques.

Qui plus est, les citoyens estiment que la résolution de nombreuses questions de politiques publiques exigera de plus en plus la participation d'un certain nombre d'intervenants, et pas seulement un seul ordre de gouvernement. L'accent sera mis sur la participation d'un certain nombre d'intervenants qui s'entendront sur des buts communs et des résultats escomptés, en définissant la contribution que chacun d'eux fera à la réalisation de ces buts ainsi qu'en mesurant et faisant rapport sur la contribution de chaque intervenant. Ce genre de processus transparaît clairement dans de récentes initiatives, comme le RNPE et le PANE, ainsi que dans les engagements redditionnels que les administrations fédérale, provinciales et territoriales ont pris dans l'ECUS. Les rapports sur la QV pourraient compléter les rapports sur des buts communs, comme le PANE, en fournissant des analyses de tendances sur les indicateurs clés des résultats touchant les enfants, par exemple la mortalité infantile et le niveau scolaire.

Cette analyse de l'environnement de la gestion moderne dans lequel le gouvernement fédéral pourrait instaurer la présentation de rapports sur la QV implique que l'objectif de tels rapports doit être clairement formulé et différencié de celui des autres rapports du gouvernement, mais, idéalement, en étant complémentaire des objectifs des autres rapports. Cette analyse fait également ressortir la nécessité, pour un gouvernement fédéral désireux d'instaurer un processus de présentation de rapports sur la QV, de faire participer un certain nombre d'autres intervenants, par exemple des experts en méthodologies associées à la QV, les citoyens (au sujet des valeurs qui pourraient étayer un rapport sur la QV « fait au Canada »), les gouvernements provinciaux (sur les implications d'un tel rapport sur leurs initiatives de rapport au public) et le Parlement (sur le rôle qu'il pourrait tenir dans ce processus).

En outre, il y aurait lieu de s'attaquer à d'autres questions essentielles liées à la fonction de rapport sur la QV. L'une de ces questions est de savoir si le rapport doit être publié par le gouvernement fédéral comme tel ou par un bureau comme Statistique Canada. S'agirait-il d'un rapport annuel renfermant des données sur une même série d'indicateurs année après année, ou mettrait-on l'accent sur différents domaines d'indicateurs chaque année? Quels liens, le cas échéant, y aurait-il avec les rapports sur la QV publiés par d'autres groupes, comme le Conference Board du Canada, la Fédération canadienne des municipalités et les Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques? Comment, quand et par qui les citoyens seraient-ils appelés à participer au processus?

La section suivante du présent document tente de répondre à certaines de ces questions par la présentation graphique d'un cadre qui positionne la présentation de rapports sur la QV comme l'un des trois grands axes de rapport qui pourraient former ensemble un processus national exhaustif de mesure du rendement et de rapport. Le cadre proposé distingue la présentation de rapports sur la QV et son objet de ceux des deux autres axes, tout en montrant les liens qui s'établissent entre eux.


4. Cadre proposé pour mesurer la QV et faire rapport à cet égard


Le diagramme qui suit illustre un cadre pour un processus national exhaustif de rapport et de mesure du rendement qui comprendrait la présentation de rapports sur la QV.

Processus national de rapport et de mesure du rendement

Selon ce cadre, les rapports sur la QV devraient être considérés comme faisant partie d'un rapport intégré et exhaustif sur la mesure du rendement qui brosserait, à l'intention des Canadiens, un tableau détaillé du rendement atteint dans des domaines intéressant les citoyens : amélioration de notre qualité de vie, degré de réalisation des objectifs sociétaux communs et résultats particuliers atteints par les programmes et services nationaux.

Un rapport détaillé et intégré sur le rendement de ce genre représente une évolution naturelle de l'approche adoptée au cours des quatre dernières années lors du dépôt, à l'automne, du rapport annuel intitulé Une gestion axée sur les résultats. Le rapport intégrerait trois types de compte rendu : les rapports sur les données sociétales; les rapports sur les résultats atteints à l'égard de buts sociétaux communs; les rapports sur les résultats de programme et sur le rendement des programmes fédéraux en matière de prestation de services. Chacun de ces axes de rapport comporterait des objectifs distincts mais complémentaires, pouvant même se chevaucher. Le rapport sur les tendances vise à mieux orienter l'élaboration des politiques générales et la définition des questions et dossiers à l'ordre du jour; le rapport sur les résultats atteints à l'égard des objectifs communs vise à faire appel au concours des citoyens et d'autres intervenants pour recenser et atteindre les buts sociétaux communs; la communication de données sur les résultats des programmes et la prestation de services vise à accroître la transparence et l'obligation redditionnelle du gouvernement. Les liens entre ces trois types de transmission de données seraient aussi clairement définis. Par exemple, les résultats atteints par un programme fédéral donné, comme les soins prénatals, contribuent à la réalisation d'un objectif commun formulé dans le PANE et visent à réduire les taux de mortalité infantile, qui sont un indicateur de la QV.

Rapport sur les tendances

Dans le cadre proposé, l'objectif de la présentation de rapports sur la QV est de transmettre des données conjoncturelles (tendances) sur les indicateurs clés de la qualité de vie afin de guider l'élaboration des politiques générales et la sélection des questions et dossiers à l'ordre du jour des gouvernements. Forts de cette analyse des tendances, les citoyens seraient en mesure de déterminer s'il y a eu amélioration ou non du rendement quant aux indicateurs qui revêtent de l'importance à leurs yeux. Le compte rendu comprendrait une analyse des raisons pour lesquelles le rendement, pour certains indicateurs, a changé et, dans le cas d'une diminution du rendement, signalerait assurément le besoin d'y prêter attention. Les données sur la QV seraient fournies à l'échelle nationale, mais pourraient aussi être ventilées par région, par sexe, par tout un éventail de sous-groupes comme les cohortes d'âge, ou par population particulière, par exemple les autochtones.

Un rapport sur la QV pourrait présenter une analyse des tendances pour les indicateurs clés que les Canadiens auront recensés comme étant les plus pertinents pour définir et mesurer leur qualité de vie. Les indicateurs devraient également tenir compte des politiques publiques et des domaines sur lesquels pourrait influer l'action du gouvernement. Les indicateurs fictifs de QV présentés dans le rapport Une gestion axée sur les résultats 1999 donnent une première idée de l'identification des indicateurs pertinents, mais il faudrait les mettre à l'essai auprès des citoyens pour en mesurer la pertinence. Cependant, ce que les citoyens considèrent comme pertinent devra aussi être pondéré par d'autres variables, comme la disponibilité des données ou le coût de production de nouvelles données. Il faudra aussi se pencher sur des questions de forme, par exemple la quantité d'interprétations à inclure dans un rapport gouvernemental et la pertinence d'y inclure des données comparatives internationales.

Une approche à privilégier serait de permettre au processus de présentation de rapports sur la QV d'évoluer à mesure que les citoyens et les administrations publiques se familiarisent avec le processus. Un premier rapport pourrait décrire le processus proposé et fournir quelques indicateurs à titre d'exemples pour nourrir le débat entre les citoyens et les experts. Les premiers rapports pourraient se contenter de suivre l'évolution des indicateurs sur lesquels on se sera entendu, de tenir compte des tendances et de modifier les indicateurs en conséquence. Une fois que l'on estimera qu'un ensemble acceptable d'indicateurs a été réuni, le rapport pourrait introduire la notion d'analyse comparative avec d'autres pays. Le besoin de répondre aux préoccupations des citoyens en ce qui concerne les tendances dans les indicateurs et la réaction des citoyens aux résultats des analyses comparatives pourraient fort bien amener les gouvernements à définir des orientations stratégiques particulières pour combler les lacunes observées dans le rendement du Canada, particulièrement par comparaison avec le rendement d'autres pays. La transmission de données sur la QV pourrait aussi influer sur des débats publics plus généraux portant sur les niveaux d'imposition ou la taille du gouvernement.

Rapport sur les résultats

L'objectif du volet des comptes rendus sur les résultats, dans un rapport intégré de mesures du rendement, serait de transmettre des informations aux citoyens pour les faire participer à la définition de buts communs et à la surveillance des progrès dans la réalisation de ces buts. Cette participation viendrait étayer les efforts déployés pour définir des buts communs, exercice qui exige le concours de nombreux intervenants, pour définir la contribution potentielle de chacun d'eux à la réalisation de l'objectif commun, puis pour mesurer les progrès à cet égard. Ce volet constituerait donc un véhicule particulièrement utile et opportun de transmission de données sur les buts communs recensés par les administrations fédérales, provinciales et territoriales dans le cadre de leurs discussions sur l'union sociale.

Par exemple, ces ordres de gouvernement collaborent déjà à des initiatives de rapport et de mesure du rendement pour le PANE et le RNPE, en plus de travailler de façon continue sur d'autres secteurs, comme la santé et les programmes pour personnes handicapées. Comme ces initiatives prévoient déjà la publication conjointe de rapports annuels, ces rapports seraient simplement synthétisés dans le programme national proposé de mesure du rendement, et l'on indiquerait aux lecteurs la façon d'accéder aux rapports complets. Cette forme faciliterait la communication aux citoyens de renseignements sur les résultats atteints dans les nombreux secteurs de l'union sociale. Le rapport fédéral ne doit pas être nécessairement le seul à synthétiser cette information, puisque les gouvernements provinciaux pourraient également opter pour l'inclusion de ce genre de données dans leurs propres rapports de mesure du rendement. La communication de données sur les résultats ne se limiterait toutefois pas à la présentation de rapports sur les buts sociaux, mais comprendrait aussi des comptes rendus sur la réalisation de buts économiques, comme celui de la productivité améliorée, et d'objectifs environnementaux, comme celui du développement durable.

Outre le travail déjà en cours pour faire rapport sur les buts particuliers, comme le PANE, on s'attache aussi à permettre aux gouvernements de faire rapport aux citoyens sur le rendement des systèmes clés au Canada, dans des domaines tels que les soins de santé et l'éducation. Le budget fédéral de 1999 engageait le gouvernement à présenter un rapport annuel sur les soins de santé au Canada, et le Conseil des ministres de l'Éducation (Canada) travaille à l'élaboration d'un cadre de rapport sur le rendement des systèmes d'éducation au Canada. Là encore, ces activités de présentation de rapports pourraient être synthétisées dans un rapport national sur le rendement, en sorte que les citoyens obtiennent une vue d'ensemble détaillée du rendement de ces deux systèmes clés ainsi que des progrès accomplis dans l'atteinte des résultats désirés à l'égard des buts communs.

La nécessité d'élaborer des indicateurs comparables entre les différents ordres du gouvernement, qui a été discutée dans l'Entente-cadre sur l'union sociale (ECUS), s'applique spécifiquement à une activité de rapport de ce type sur les systèmes, puisque l'on s'emploie déjà à définir des indicateurs comparables à l'égard de buts communs tels que le Plan d'action national pour les enfants et la Prestation nationale pour enfants. L'élaboration d'indicateurs comparables et de rapports sur les systèmes exige que l'on déploie des efforts importants pour élaborer des systèmes d'information. Par exemple, le gouvernement fédéral consent un investissement important à la conception de systèmes d'information pour étayer la présentation de rapports sur les soins de santé. De tels efforts de la part de tous les ordres de gouvernement doivent être étendus à d'autres domaines, comme l'éducation, l'aide sociale et les services sociaux, ainsi que l'environnement.

Rapport sur la prestation de services et les résultats de programmes

L'activité fédérale de rapport sur les résultats de programmes a considérablement évolué, au cours des dernières années, pour faire en sorte que les ministères fédéraux se concentrent sur les résultats de leurs activités (pourquoi ils font quelque chose) et pas seulement sur leurs intrants et extrants (ce qu'ils font) ou sur les normes de service (comment ils le font). Ce changement opéré dans la façon de transmettre les données est déterminant pour la mise en oeuvre de la gestion axée sur les résultats au gouvernement.

Cependant, comme nous l'avons mentionné plus haut, la fonction gouvernementale de présentation de rapports axés sur les résultats évolue en soi de manière que, dans l'accent qu'elle met sur les résultats, elle ne perde pas de vue pour autant ces valeurs de la fonction publique que sont l'application régulière de la loi et le principe d'équité, la gestion responsable des dépenses et l'objectif d'améliorer la prestation de services aux Canadiens. Une approche intégrée de ce genre permet aux gouvernements d'utiliser les rapports axés sur les résultats de manière à tirer les leçons des résultats atteints par les programmes et à modifier les programmes en conséquence. Elle permet aussi aux ministères de formuler clairement une « théorie » sur les raisons pour lesquelles leurs activités visent à atteindre des résultats donnés et sur la façon dont ils mesureront les résultats atteints, puis de faire rapport sur le besoin éventuel et la façon de modifier leur théorie pour tirer les leçons des échecs et atteindre les résultats escomptés. Ce type d'activité de rapport au Parlement et aux citoyens amènerait les députés, par leur participation à des comités permanents, et les citoyens à discuter en profondeur des dépenses gouvernementales, augmentant ainsi de façon appréciable la transparence du gouvernement.

En faisant rapport sur la prestation de services et les résultats de programmes, les ministères auraient recours à un large éventail d'indicateurs de rendement, y compris des mesures des intrants/extrants, des normes de service et des mesures des résultats pour démontrer l'atteinte de leurs résultats. Le cas échéant, ils feraient aussi rapport sur l'utilisation de mécanismes d'appel et de recours par les citoyens ainsi que sur les résultats à cet égard.


5. Conclusion


Nous avons vu dans ce document certaines des questions que soulève la qualité de vie, et proposé une approche qui pourrait être retenue pour la mise sur pied d'un processus fédéral exhaustif de mesures du rendement et de présentation de rapports à ce sujet. Nous espérons que les idées présentées ici ainsi que dans le rapport Une gestion axée sur les résultats 1999 inciteront les Canadiens à discuter de ces enjeux importants. En fin de compte, les leçons que nous tirerons de telles discussions viendront appuyer les initiatives du gouvernement visant à améliorer la qualité de nos processus décisionnels, la pertinence de nos politiques et de nos programmes, ainsi que les rapports que nous présentons au Parlement et aux Canadiens.


Références :

i Noll, Heinz-Herbert. 1998. Societal Indicators and Social reporting: The International Experience, Centre de recherche sur la QV, Danemark [ Retour ]
ii International Society for the Quality of Life Studies, University of Virginia, Blacksburg, Virginia. Voir également le site Web http://www.isqols.org/index.htm.   [ Retour ]
iii Les Associés de recherche Ekos inc. 1999. Economic Opportunity, Productivity and Social Policy.  [ Retour ]
iv Avrim, Lazar, sous-ministre adjoint, Politique stratégique, Développement des ressources humaines Canada, avril 1999, Horizons.  [ Retour ]
v Noll, ibid.  [ Retour ]
vi Osberg, Lars, Département d'économie, Université Dalhousie, et Andrew Sharpe, Centre d'étude des niveaux de vie, 1998. An Index of Well-being for Canada, communication à l'occasion d'une conférence sur les niveaux de vie et la qualité de vie au Canada, les 30 et 31 octobre 1998, Hôtel Château Laurier, Ottawa (Ontario).  [ Retour ]