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Robert Lahey
REL Solutions Inc.
Janvier 2011
Le présent rapport est un sommaire des consultations tenues auprès d’un échantillon restreint d’administrateurs généraux de ministères et organismes fédéraux au sujet de la fonction d’évaluation. L’objectif était de recueillir de l’information qui allait servir d’intrant pour la rédaction du premier rapport annuel sur l’état de la fonction d’évaluation que le Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT) présentera au Conseil du Trésor.
Le Centre d’excellence en évaluation (CEE) du SCT a retenu les services de Robert Lahey, président de REL Solutions Inc., qui, en septembre 2010, a mené des entrevues auprès de neuf administrateurs généraux sur quatre grands thèmes :
On trouvera la liste des administrateurs généraux participants à l’annexe 1.
Le présent rapport donne un aperçu sommaire des rétroactions des administrateurs généraux ayant participé aux consultations en fonction des quatre grands thèmes énumérés ci‑dessus.
Un rapport annuel au Conseil du Trésor sur l’état de la fonction d’évaluation est une nouvelle exigence de la Politique sur l’évaluation de 2009, et son objet est d’éclairer le Conseil du Trésor et le Secrétariat en faisant un survol des progrès de la mise en œuvre de la Politique dans les ministères. D’un point de vue opérationnel, on s’attend à ce qu’un tel rapport aide le SCT à s’acquitter de son rôle en matière de leadership fonctionnel et qu’il aide aussi les ministères à cerner les améliorations à apporter à la fonction d’évaluation.
Même si la consultation auprès des administrateurs généraux ne constitue qu’un intrant du rapport sur l’état de la fonction d’évaluation, on s’attendait à ce qu’elle représente une riche source d’information sur la façon dont les administrateurs généraux voient et utilisent l’évaluation dans le cadre de la gestion de leurs organisations.
Dix‑huit mois après la mise en œuvre transitoire de la Politique sur l’évaluation de 2009, on pensait que les organisations auraient accumulé suffisamment d’expérience en la matière. De plus, si des enjeux importants avaient surgi, il y aurait eu suffisamment de temps depuis l’entrée en vigueur de la Politique pour qu’ils viennent à l’attention du fonctionnaire du rang le plus élevé au sein de l’organisation.
C’est le SCT qui a déterminé combien d’organisations seraient consultées (9) et de quelles organisations il s’agirait.
L’échantillon de neuf participants est très petit et il ne faut donc pas penser qu’il est représentatif de tout l’univers, mais les organisations choisies représentent une bonne sélection de ministères et d’organismes. Les neufs administrateurs généraux participants, dont on trouvera la liste à l’annexe 1, représentent un vaste éventail d’activités opérationnelles gouvernementales et de situations aux fins de l’évaluation; il s’agit notamment d’un ministère qui a une vaste composante de subventions et de contributions (S et C); d’un ministère chargé de l’élaboration de politiques; d’un organisme régional; du ministère qui compte la plus vaste unité d’évaluation; d’une diversité de catégories de programmes, y compris des programmes sociaux, des programmes économiques, des programmes de réglementation et des programmes internationaux; et d’organisations au sein desquelles l’évaluation cohabite ou ne cohabite pas avec la vérification interne.
Pour prendre les rendez‑vous aux fins des entrevues, c’est le Secrétaire du CT qui a communiqué formellement avec chaque administrateur général (on trouvera à l’annexe 2 l’information préalable qui a été transmise aux administrateurs généraux par le SCT). Les entrevues allaient durer entre 30 et 60 minutes et aucune préparation préalable n’allait être nécessaire de la part des administrateurs généraux, car l’objet de la consultation était d’obtenir leurs réactions spontanées à des questions au sujet de leur fonction d’évaluation. Seuls les quatre grands thèmes de discussion leur ont été communiqués.[1]
Les administrateurs généraux ont participé à des entrevues dont la durée est allée de 45 à 60 minutes. Dans tous les cas, ils ont été plus que disposés à consacrer toute leur attention à la discussion de l’évaluation et de son utilisation.
Ce sommaire fait la synthèse des constatations en fonction des quatre grands thèmes de discussion. Compte tenu de la petite taille de l’échantillon, l’analyse est de nature plus qualitative, mais elle permet de faire ressortir dans quels cas la majorité des administrateurs généraux était du même avis.
Les administrateurs généraux indiquent une variété de façons dont la fonction d’évaluation peut être utilisée – et est utilisée – au sein de leur organisation. Certains ont mentionné expressément le lien avec la planification stratégique et les rapports sur le rendement (en tant qu’intrant du Rapport ministériel sur le rendement), mais les utilisations suivantes semblent ressortir :
Quelques administrateurs généraux ont ajouté que les usages possibles de l’évaluation ne peuvent pas tous être nécessairement prévus à l’avance, car il est parfois difficile de déterminer où les conclusions d’une évaluation auront une influence particulière (par exemple, dans les discussions sur les politiques).
Ce qui se dégage des observations des administrateurs généraux est que les évaluations ont besoin d’être réalisées et discutées en temps opportun et d’être solidement reliées aux discussions de la haute direction. Ce dernier élément est important si on veut s’assurer que la fonction d’évaluation anticipe les domaines qui revêtiront de l’intérêt à l’avenir et que les conclusions d’une évaluation pertinente soient mises à la disposition des auditoires clés.
Un certain nombre de répondants étaient d’avis que la nouvelle proximité de l’examen stratégique et de l’évaluation avait, comme un administrateur général l’a souligné, « donné un nouveau souffle à la fonction d’évaluation ».
« L’examen stratégique a relevé la fonction d’évaluation de quelque degrés. »
Mais comme l’ont fait remarquer certains répondants, l’impact réel de la fonction d’évaluation se manifestera dans l’avenir, car la première ronde des examens stratégiques a dû miser sur l’information déjà disponible et dans de nombreux cas, il n’y avait pas eu d’évaluations. Mais dorénavant, comme les lacunes dans l’information sont mieux connues, l’opinion est que la planification des futurs travaux de l’évaluation peut tenir compte du calendrier des futurs examens stratégiques.
Dans l’ensemble, un grand nombre des administrateurs généraux estimaient que l’évaluation apportait une « solide » contribution à la prise de décisions dans leur ministère, mais certains croyaient aussi qu’on pourrait en faire plus à ce chapitre (pour des raisons qui seront examinées dans la section qui suit).
Les administrateurs généraux ont mentionné plusieurs facteurs qui contribuent vraisemblablement à l’utilisation de l’évaluation :
La plupart des administrateurs généraux ont mentionné certains éléments qui, à leurs yeux, entravent directement le recours à l’évaluation dans leur ministère ou qui y feraient probablement obstacle :
Comme on l’a vu ci‑dessus, certains administrateurs généraux ont constitué leur Comité d’évaluation ministériel (CEM) sur le modèle de leur Comité de la haute direction. Cette décision repose apparemment sur des motifs administratifs, mais rien ne laisse penser que la « neutralité »[3] de la fonction d’évaluation s’en trouve diminuée.
Dans un certain nombre d’organisations consultées, l’évaluation cohabite avec la vérification interne, ce qui s’explique en grande partie par le positionnement historique des deux fonctions au sein de l’organisation. Cela pourrait avoir diverses répercussions du point de vue de la « gouvernance », surtout à cause de certaines exigences de la Politique de 2006 sur la vérification interne, notamment les suivantes : l’intégration de membres de l’extérieur du gouvernement dans les comités de vérification ministériels; ii) un profil rehaussé pour le dirigeant principal de la vérification (DPV); et (iii) une importance accrue accordée à « l’indépendance ».
Selon les administrateurs généraux, jusqu’à maintenant, les membres de l’extérieur qui font partie des comités de vérification comme des comités d’évaluation ont surtout besoin de mieux se familiariser avec l’évaluation et son rôle dans l’organisation.
S’agissant du profil rehaussé que la Politique de 2006 sur la vérification interne donne au dirigeant principal de la vérification, les cas de cohabitation sembleraient signifier que dorénavant, la fonction d’évaluation a des interactions plus fréquentes avec l’administrateur général. Toutefois, on ne sait pas au juste si cela suscite vraiment plus de discussions au sujet de l’évaluation.
S’agissant de l’accent qui est mis sur l’indépendance de la fonction de vérification interne — les administrateurs généraux semblent faire une distinction entre les deux fonctions à cet égard. L’opinion générale semble être que les évaluateurs (contrairement aux vérificateurs internes) devraient consulter les gestionnaires à différentes étapes de l’évaluation – et le font bel et bien – tout en étant capables de conserver leur neutralité et leur objectivité lorsqu’il s’agit d’analyser les constatations et de rendre compte des résultats.
En général, les administrateurs généraux interviewés n’ont exprimé aucun problème ni aucune préoccupation au sujet du risque que la neutralité de l’évaluation soit compromise dans leurs organisations.
Le deuxième thème de la consultation auprès des administrateurs généraux concernait l’incidence que le renouvellement du Système de gestion des dépenses et la Politique sur l’évaluation de 2009 ont eue dans les ministères des points de vue de l’exécution des évaluations, de leur planification et de l’attribution des ressources nécessaires à leur exécution.
Les administrateurs généraux qui ont mentionné le SGD l’ont fait seulement dans le contexte des « examens stratégiques »; toutefois, tous avaient des choses à dire au sujet de la nouvelle Politique sur l’évaluation et de la façon dont ils la perçoivent. Les commentaires allaient de l’opinion selon laquelle la Politique était assez bien conçue à la mention de certaines de ses exigences qui sont trop ambitieuses. Mais aux dires de l’un des répondants, il est probablement trop tôt pour déterminer toute l’incidence de la Politique, tant que les ministères n’ont pas achevé un cycle complet.
Selon certains administrateurs généraux, le lien implicite entre l’évaluation et l’examen stratégique a rehaussé le profil de leur fonction d’évaluation.[4] Aux dires d’un répondant, la Politique a « relevé la barre » pour l’évaluation, notamment parce qu’elle obligera tous les programmes gouvernementaux à examiner systématiquement des enjeux fondamentaux comme « leur raison d’être ».
Un administrateur général a déclaré que l’évaluation « occupe maintenant un peu plus de place » et « pour les bonnes raisons ».
Toutefois, un grand nombre des répondants n’ont pas manqué de dire que si la barre devait être relevée, le SCT allait devoir jouer un plus grand rôle en matière de leadership en ce qui concerne l’évaluation. On reviendra sur cette question dans la section 4.3.
Cinq grandes préoccupations sont revenues un certain nombre de fois et ont été exprimées de diverses façons pendant les entrevues. Elles sont résumées ici, sans ordre particulier.
Les enjeux des ressources humaines (RH) et de la capacité sont revenus constamment dans les entrevues. Plusieurs aspects de la question des ressources humaines sont ressortis des discussions avec les administrateurs généraux. Même dans les organisations dont l’unité d’évaluation interne a pris de l’expansion ces dernières années (soit presque la moitié des organisations sondées), les questions suivantes soulèvent généralement des préoccupations :
Selon les répondants, pour régler ces enjeux, il faudra que le SCT prennent des mesures sur de nombreux fronts. Étant donné la nature de la formation des évaluateurs, la stratégie devra nécessairement reposer sur le plus long terme et peut-être même être à l’échelle de la collectivité. Certains pensent qu’on pourrait tirer des leçons utiles de l’expérience du BCG au moment de la constitution de la collectivité de la vérification interne.
Une question connexe concerne le recours aux consultants de l’extérieur qui feraient une partie du travail d’évaluation dans les ministères. Pour la plupart des administrateurs généraux cependant, cela ne réglerait pas le problème des RH, et ce, pour trois grandes raisons :
Une question a été posée aux administrateurs généraux au sujet d’une réflexion de la vérificatrice générale dans son récent examen de la fonction d’évaluation[6], qui affirme que ministères et organismes devraient avoir plus d’évaluateurs internes et moins compter sur des consultants de l’extérieur pour faire les évaluations.
Les administrateurs généraux dont les unités d’évaluation avaient pris de l’expansion ont affirmé qu’ils se proposaient de moins recourir aux consultants de l’extérieur à l’avenir, faut‑il s’en surprendre. Les autres auraient recours à des consultants selon les besoins. Ou encore, aux dires d’un répondant, « ça dépend de beaucoup de facteurs – la disponibilité de compétences spéciales, un besoin pressant de livrer la marchandise, la disponibilité d’évaluateurs internes, etc. ». En d’autres termes, tous les administrateurs généraux se proposent de continuer de faire appel à des consultants de l’extérieur quand c’est logique de le faire. Ceci étant dit, la majorité des répondants se plaint de la « qualité » inégale des consultants de l’extérieur.
Pour les administrateurs généraux, le bassin d’évaluateurs qualifiés n’atteindra pas de niveaux satisfaisants si on se contente d’ajouter des évaluateurs de l’extérieur aux évaluateurs internes. C’est pourquoi les administrateurs généraux pensent qu’un bassin insuffisant d’évaluateurs qualifiés à l’échelle du système sera un défi pour les ministères au moment de respecter les exigences de la Politique sur l’évaluation de 2009 à court terme, voire même à plus long terme.
Après avoir défini une série de défis qui se posent à la fonction d’évaluation, les administrateurs généraux ont été priés de dire quels moyens le SCT/le CEE pourraient mettre en œuvre pour appuyer le mieux possible les organisations en matière d’évaluation et en ce qui concerne les exigences accrues de la nouvelle Politique.
Voici un aperçu des suggestions des administrateurs généraux, qui sont classées selon quatre grands thèmes :
Les administrateurs généraux consultés sont généralement d’avis que le SCT doit clarifier ses attentes au sujet de la Politique sur l’évaluation de 2009 et fournir des consignes concernant des approches d’un bon rapport coût‑efficacité pour satisfaire les exigences de la Politique.
Pour remplacer « la solution uniformisée » que propose la Politique selon la perception qu’en ont les répondants, certains administrateurs généraux ont fait les suggestions suivantes :
L’inflexibilité perçue du cycle quinquennal ainsi que la définition de ce qui pourrait constituer un bon rendement de la fonction d’évaluation dans un ministère posent problème à certains répondants. Ils ont fait remarquer qu’une analyse des risques devrait se faire au moment de la planification de la couverture de l’évaluation, comme c’est le cas avec la vérification interne. Comme l’a dit un répondant (qui était tout à fait en faveur de l’évaluation), si le « bon rendement » repose sur le respect de la couverture de 20 %, il y a de bonnes chances que l’évaluation soit moins significative pour le sous‑ministre. Ce qui compte, c’est que le ministère produise des évaluations significatives, autrement dit des évaluations qui « font une différence ».
Plus d’un répondant a mentionné qu’il y a un auditoire important au SCT lui‑même – c’est‑à‑dire les propres analystes du SCT – qui a besoin de mieux comprendre les attentes concernant une fonction d’évaluation, et la mesure du rendement en général. Une opinion partagée par plusieurs administrateurs généraux est que les analystes dans les divers secteurs du SCT ont besoin d’attentes harmonisées lorsqu’il est question d’évaluation. Et les répondants s’inquiètent du fait que ce n’est pas le cas à l’heure actuelle.
Au‑delà de la clarification des attentes, un certain nombre d’administrateurs généraux pensent que des consignes précises et des outils fournis par le SCT faciliteraient la mise en œuvre de la Politique et en fin de compte, l’utilisation de l’évaluation. Leur impression est que de façon générale, le SCT s’est cantonné dans un rôle de « surveillance » et a fourni trop peu de soutien. Selon l’un des répondants, les ministères se sentent généralement « laissés à eux‑mêmes » lorsqu’il s’agit de la nouvelle Politique.
Diverses questions au sujet desquelles le SCT/le CEE pourraient offrir plus de soutien ont été relevées :
En général, beaucoup de remarques se rapportent à l’absence ou au peu de leadership de la part du SCT en ce qui concerne la fonction d’évaluation. Selon certaines remarques très pointues, le rôle du SCT n’est « pas évident »; les ministères ne reçoivent « pas beaucoup de consignes de la part du SCT »; « il n’y a pas beaucoup de visibilité (pour l’évaluation) de la part du SCT »; et ce n’est pas le cas pour l’instant que la collectivité de l’évaluation donne l’impression d’avoir une orientation, d’avoir des directions de ses dirigeants et de faire une différence. Par contraste, la fonction de la vérification interne au gouvernement, la relation du Bureau du contrôleur général (BCG) avec le dirigeant principal de la vérification (DPV) et les ministères sont décrites comme étant « beaucoup plus solides ».
En plus des consignes proposées dans des domaines particuliers, comme ci-dessus, certaines suggestions plus générales ont été faites : les répondants sont d’avis qu’il faut un champion plus visible et proactif, qui occupe un poste de rang supérieur et qui vient du centre. En particulier :
La quasi‑totalité des répondants a reconnu le grand défi que posent les ressources humaines (RH) dans le domaine de l’évaluation et tous les répondants avaient un commentaire ou une suggestion pour le SCT/le CEE :
Pour la majorité, mais non pas la totalité, des administrateurs généraux interviewés, « le suivi du rendement en continu » et « l’évaluation » sont deux outils de mesure du rendement des programmes d’une organisation.
Dans l’ensemble, l’information générée par le suivi du rendement en continu ne semble pas exhaustive, et même si on considère l’information générée par les évaluations, les deux outils ne donnent pas actuellement aux administrateurs généraux une image complète du rendement à l’échelle de l’organisation. La conséquence, selon un répondant, est que l’évaluation et le suivi du rendement sont des outils plus solides pour aider le SM à gérer les programmes individuellement, plutôt que pour donner une image exhaustive complète du rendement de l’organisation dans son ensemble.
Comme on l’a déjà vu, il semble que la première ronde de l’exercice d’examen stratégique ait aidé les administrateurs généraux à cerner les lacunes en matière d’information lorsqu’il s’agit de définir le « rendement » des programmes de leur organisation. Certains répondants ont dit que cela avait servi au moment de la détermination des priorités pour les évaluations futures.
En ce qui concerne les activités actuelles de mesure du rendement, de l’avis d’un certain nombre de répondants, le « suivi » du rendement en continu est entravé par les difficultés de mesurer les « retombées », d’obtenir les bonnes données rapidement et économiquement. Cela semble représenter un défi particulier pour les organisations qui ont un vaste volet de programmes de S et C, pour lesquels il peut souvent se passer à peine cinq ans entre la conception du programme et son évaluation. Ce n’est pas assez pour recueillir des données appropriées sur le rendement de certains programmes, car il faut parfois plusieurs années avant que les retombées d’un programme se matérialisent.
Les rétroactions des administrateurs généraux donnent à penser que pour un grand nombre d’organisations, le vrai défi n’est pas d’établir un cadre de mesure du rendement à proprement parler, mais plutôt de l’opérationnaliser. Certaines organisations n’ont pas tous les systèmes de mesure nécessaires pour recueillir des données et les répondants pensent également que les attentes actuelles en matière de mesure des retombées sont peu réalistes, ou, de l’avis d’un répondant, « il y encore beaucoup de phrases creuses au sujet de ce qui constitue les « retombées », de sorte que l’accent est souvent placé sur des éléments qui sont difficiles à mesurer ».
Un administrateur général dont l’organisation en est à « sa deuxième ou à sa troisième génération de rapports sur le rendement » a indiqué être encore loin d’un système de suivi du rendement pleinement fonctionnel.
Même dans les ministères dont les systèmes de collecte de données sont arrivés à maturité, la question de savoir si les gestionnaires de programmes individuels disposent ou non d’une information complète pour le suivi du rendement semble avoir des réponses variables. Certaines données sur le suivi du rendement sont peut-être facilement accessibles, mais s’il faut constituer de nouvelles bases de données (ou s’il faut faire une étude ou une enquête spéciale pour recueillir des données), les enjeux des coûts et des ressources entrent en ligne de compte; le gel des budgets constitue un défi de taille dans le contexte actuel.
Les administrateurs généraux ont affirmé que les unités d’évaluation jouent un rôle consultatif pour aider les gestionnaires de programmes à mettre sur pied des systèmes de mesure du rendement. Toutefois, compte tenu des problèmes de ressources soulevés par les répondants, les organisations auront peut-être un autre défi à relever à l’avenir : le groupe de l’évaluation aura‑t‑il les ressources nécessaires pour continuer de jouer ce rôle consultatif?
En matière d’évaluation, les rétroactions des administrateurs généraux donnent à penser qu’à cause des défis de la mesure des retombées par le biais du suivi du rendement en continu, il y aura peut-être encore des cas où ce genre d’information sur le rendement n’est pas facilement accessible à titre d’intrant du travail d’évaluation, de sorte que les évaluateurs seront obligés de recueillir les données nécessaires pour déterminer si oui ou non les retombées se matérialisent.
Ce rapport résume les opinions de neuf administrateurs généraux qui ont été consultés en septembre 2010 sur quatre grands thèmes concernant l’utilisation de l’évaluation et la Politique sur l’évaluation de 2009. Un tel échantillon est certainement trop petit pour qu’on puisse tirer des conclusions générales s’appliquant à tout l’univers des administrateurs généraux des organisations fédérales, mais il donne néanmoins un aperçu des opinions de répondants provenant de diverses organisations.
D’après les rétroactions des neuf répondants, il semble que les administrateurs généraux accordent plus d’attention à l’évaluation que par le passé. Pour certains, le fait de reconnaître que l’évaluation peut jouer un rôle utile dans la surveillance et la gestion de l’organisation n’est certainement pas un phénomène nouveau. Dans le passé, ils ont utilisé l’évaluation de diverses façons au sein de leur organisation. Mais en général, alors que dans le passé, la perception et l’utilisation de l’évaluation étaient probablement « inégales » d’une organisation fédérale à l’autre, son profil et sa stature se sont probablement un peu relevés à l’échelle du système aujourd’hui.
La Politique sur l’évaluation de 2009, qui exige une couverture intégrale sur un cycle de cinq ans et qui établit un ensemble prédéterminé d’enjeux fondamentaux, a suscité des réactions mixtes. Beaucoup reconnaissent maintenant que la fonction d’évaluation dans un ministère peut jouer un rôle utile dans le cadre de l’exercice d’examen stratégique, qui est encore plus significatif dans le contexte des gels budgétaires actuels. Mais la plupart estiment que les défis qui se posent à l’échelle du système (et particulièrement l’insuffisance du bassin d’évaluateurs qualifiés) empêcheront la plupart des organisations de se plier aux exigences de la Politique. Et les rigidités perçues de la Politique et de son application vont probablement accroître le coût global de l’exécution des évaluations. Aux yeux des administrateurs généraux, le manque de flexibilité perçu peut également provoquer des tensions au moment de déterminer si l’évaluation peut être menée de façon à répondre à tous les besoins du ministère/de l’organisme.
À de nombreux égards, compte tenu des exigences de la Politique sur l’évaluation de 2009 en matière de couverture intégrale jumelées à l’évaluation annuelle de la composante de gestion « Qualité et utilisation de l’évaluation » dans le contexte du CRG[7], les administrateurs généraux semblent amenés à examiner de plus près la possibilité d’évaluer tous leurs programmes de façon plus systématique.
Cependant, les administrateurs généraux avaient un certain nombre de préoccupations au sujet de la façon dont la Politique sur l’évaluation est graduellement mise en œuvre et avaient des suggestions à faire au SCT. Comme on n’a pas encore atteint la moitié de la période de transition, il est encore temps de tirer des leçons et d’apporter des rajustements au besoin. Ceci étant dit, et comme certains administrateurs généraux l’ont indiqué, il est probablement encore trop tôt pour comprendre toutes les répercussions de la Politique et son incidence sur les ministères et organismes avant un cycle complet.
Selon plusieurs répondants, à l’avenir, il sera important que le SCT joue un rôle plus visible de leadership pour la fonction d’évaluation. Des comparaisons ont été faites avec le Bureau du contrôleur général (BCG) lorsque, en 2006, les ministères et organismes ont dû se plier à de nouvelles exigences en matière de reddition de comptes lors de l’introduction de la nouvelle Politique sur la vérification interne, au moment même où la collectivité des professionnels de la vérification avait aussi besoin de beaucoup de soutien. Les administrateurs généraux ont fait remarquer que le BCG avait contribué à voir à ce que les organismes fédéraux adoptent la nouvelle Politique sur la vérification interne tout en assurant du soutien pour les besoins de la collectivité en matière de renforcement de la capacité. L’opinion est que le SCT n’a pas offert le même soutien de niveau élevé pour la fonction d’évaluation. Une plus grande visibilité pour l’évaluation et un champion occupant un rang élevé au SCT ont été cités comme des facteurs importants sur lesquels il faudrait se pencher.
En outre, en se concentrant sur la surveillance, le SCT donne l’impression de faire trop peu d’efforts pour soutenir le développement de la collectivité en ce qui concerne la fonction d’évaluation. Tous les administrateurs généraux ont parlé des enjeux des ressources humaines (RH) auxquels fait face la fonction d’évaluation. L’opinion générale est que la capacité d’évaluation à l’échelle du système est compromise du fait qu’il y a trop peu d’évaluateurs qualifiés, et le SCT doit jouer un rôle pour régler ce problème. Diverses suggestions ont été faites.
Les administrateurs généraux sont également d’avis que la fonction d’évaluation a des défis à relever dans le contexte actuel qui n’existaient pas lors de l’entrée en vigueur de la Politique sur la vérification interne. En 2006, la question du financement ne posait pas autant de problèmes et on souhaitait ardemment plus de reddition de comptes dans le système, mais aujourd’hui, la fonction d’évaluation a des défis à relever sur ces deux plans. Certains répondants semblent penser qu’il y a trop de mécanismes de « surveillance » et de reddition de comptes à l’heure actuelle; plusieurs se demandent dans quelle mesure sont harmonisées les exigences des diverses politiques et initiatives du SCT, ce qui laisse penser que le SCT doit améliorer la communication à ce sujet. En cette période de gels des budgets, la Politique sur l’évaluation de 2009 soulève une autre question pour les administrateurs généraux, à savoir quelle est la façon la plus judicieuse d’utiliser l’argent marginal : le consacrer à des activités d’évaluation/de surveillance plus nombreuses ou à la mise en œuvre de programmes et de services?
Finalement, d’après les rétroactions de la plupart des administrateurs généraux, il y a des lacunes au chapitre de la communication/de l’information au sujet des exigences de la Politique sur l’évaluation de 2009. Plusieurs administrateurs généraux se sont dits préoccupés par le manque de flexibilité concernant la façon dont ils pourraient appliquer la Politique sur l’évaluation de 2009 dans leur organisation. Cela va à l’encontre des affirmations du SCT/du CEE, selon lesquelles il y a une certaine flexibilité en matière d’application de la Politique. Les suggestions faites par les administrateurs généraux pourront peut-être se révéler utiles au SCT pour régler cette question et corriger les erreurs de perception, tout en clarifiant au besoin les problèmes concrets de mise en œuvre de la Politique sur l’évaluation.
Ce qui nous amène à l’opinion plus générale d’un grand nombre des administrateurs généraux, qui pensent que le SCT doit faire preuve d’une plus grande visibilité en ce qui concerne la fonction d’évaluation, non seulement en donnant les consignes nécessaires, mais aussi en relevant le profil de la fonction à proprement parler.
Ministère ou organisme | Nom |
---|---|
Développement économique Canada pour les régions du Québec | Suzanne Vinet |
Patrimoine canadien | Judith Anne LaRocque |
Agence canadienne de développement international | Margaret Biggs |
Citoyenneté et Immigration | Neil Yeates |
Ressources humaines et Développement des compétences Canada | Ian Shugart |
Industrie Canada | Richard Dicerni |
Affaires indiennes et du Nord Canada | Michael Wernick |
Sécurité publique | William V. Baker |
Travaux publics et Services gouvernementaux Canada | François Guimont |
On procède actuellement à une consultation auprès des administrateurs généraux de dix ministères ou organismes fédéraux afin de mieux comprendre comment ils perçoivent la fonction d’évaluation.
Cette initiative est menée par le Centre d’excellence en évaluation du SCT. Son objet est de mieux comprendre les progrès de la fonction d’évaluation dans différents ministères et organismes et de déterminer dans quelle mesure cette fonction appuie la prise de décisions de la part des sous‑ministres et de la haute direction. Les constatations qui se dégageront de la consultation serviront d’intrant pour la rédaction du premier rapport annuel au Conseil du Trésor sur l’état de la fonction d’évaluation.
Des entrevues en personne de 30 à 60 minutes se dérouleront d’ici le milieu de septembre 2010.
Le Secrétariat du Conseil du Trésor a retenu les services d’un consultant, M. Robert Lahey, pour diriger les entrevues avec les administrateurs généraux. Ancien cadre de la fonction publique fédérale maintenant à la retraite, M. Lahey possède une connaissance approfondie de la fonction d’évaluation et de la gestion axée sur les résultats.
La consultation auprès des administrateurs généraux portera sur quatre grands thèmes :
Le SCT souhaite recueillir des réactions à froid à ces questions sur la fonction d’évaluation. Il n’est donc pas nécessaire de se préparer aux entrevues. Les noms des participants et des participantes figureront dans le rapport sur la consultation, et tous en recevront une copie.
Rédigé par :
Le Centre d’excellence en évaluation (CEE), Secteur de la gestion des dépenses. Si vous avez des questions, n’hésitez pas à vous adresser à Anne Routhier, directrice principale (613‑952‑7447), ou à Rob Chambers, directeur, (613‑952‑3112), au CEE.
[1]. En prévision des entrevues, le consultant a examiné l’évaluation du CRG et l’analyse de la capacité d’évaluation les plus récentes menées par le SCT, pour se faire une idée de la capacité d’évaluation et de l’utilisation de la fonction d’évaluation au sein de chaque organisation.
[2] Certains administrateurs généraux ont aussi mentionné d’autres enjeux liés à la passation des marchés, y compris des problèmes créés par les « offres à commandes ».
[3] Aux termes de la Politique sur l’évaluation, la neutralité est un « attribut que doivent posséder la fonction d’évaluation et les évaluateurs, qui se caractérise par des comportements et des processus impartiaux ».
[4] Cependant, comme on l’a vu ci‑dessus, les discussions de la contribution plus significative de l’évaluation à l’examen stratégique auront vraisemblablement lieu au moment de la prochaine ronde d’examen.
[5] Des problèmes possibles au sujet du recours à des « offres à commandes » pour le recrutement ont été signalés.
[6] Rapport de la vérificatrice générale du Canada, Automne 2009, Chapitre 1, L’évaluation de l’efficacité des programmes, Ottawa, 2009.
[7]. La composante « qualité et utilisation de l’évaluation » est l’une des composantes de gestion (CG6) parmi les critères de l’évaluation annuelle du Cadre de responsabilisation de gestion.