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ARCHIVÉ - Examen des dépenses et comparabilité - Volume Un - Rapport d'analyse et recommandations

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11. Recommandations sur la transparence et la reddition de comptes

À l'heure actuelle, peu de gens ont une vision globale de la rémunération fédérale. En effet, les données factuelles à ce sujet se trouvent dans des bases de données difficiles d'accès et incohérentes qui sont maintenues dans diverses parties de la fonction publique. Il est vrai que les Comptes publics font état d'une somme totale consacrée aux dépenses en personnel (article courant 01). Pour 2002‑2003, cette somme s'est élevée à 25,1 milliards de dollars[154]. Elle se compare étroitement au total que nous avions indiqué pour 2002‑2003, soit environ 24,8 milliards de dollars. Cependant, les Comptes publics ou les autres rapports ordinaires du gouvernement ne donnent que peu de détails connexes. Par ailleurs, aucun rapport ne précise comment les dépenses à ce titre ont fluctué d'année en année, ou n'explique les facteurs à l'origine de ces fluctuations.

Il s'ensuit que le contexte des délibérations au sujet des dossiers entourant la rémunération fédérale est, au mieux, flou. De fait, la question fait rarement l'objet d'un débat public. La principale exception se produit durant les grèves occasionnelles au sein de la fonction publique, quand les médias reprennent essentiellement les positions de négociation rendues publiques par le syndicat menant la grève en question. Les syndicats font naturellement état des données qui étayent le mieux leurs revendications. Pour sa part, le gouvernement fédéral tarde habituellement à présenter ses arguments. Et tout comme les syndicats, le gouvernement présente les données les plus favorables à sa position dans la négociation en cours. Il ne reste aux médias qu'à essayer de décortiquer toute cette information, étant donné qu'ils n'ont habituellement pas accès aux données complètes qui leur permettraient de formuler leurs propres interprétations.

De temps à autre, d'autres nouvelles font la manchette, presque toujours sans le bénéfice d'une perspective plus étendue. Nous entendons des critiques de la rémunération au rendement versée aux cadres de direction, par exemple, mais pas grand-chose au sujet de la comparabilité de leur rémunération à celle versée dans le secteur privé, ni du rôle que la rémunération conditionnelle joue dans la comparabilité. Les syndicats se plaignent naturellement que les augmentations économiques qu'obtiennent leurs membres sont peu élevées, mais nous entendons rarement parler des autres modalités contractuelles qui se répercutent sur la rémunération, ni de l'évolution globale des salaires moyens que touchent effectivement les employés. Nous entendons dire que les fonctionnaires fédéraux sont en moyenne mieux rémunérés que leurs homologues du secteur privé, mais on ne parle pas beaucoup des limites des études fondées sur des données globales comme celles du Recensement ou de l'Enquête sur la population active.

Le fait que les médias et le public n'ont pas une vue d'ensemble du domaine de la rémunération fédérale est en soi préoccupant. Mais, de fait, le gouvernement lui-même n'a pas systématiquement un aperçu des niveaux et des tendances des diverses composantes de la rémunération fédérale. Pour autant que nous le sachions, cette étude est la première compilation et description complète du sujet depuis au moins le Rapport Glassco publié au début des années 1960, il y a plus de 40 ans.

Cette situation semble résulter de plusieurs facteurs. Tout d'abord, comme nous l'avons appris en rédigeant le présent rapport, il est difficile d'avoir accès à l'information requis pour brosser un tableau complet de la situation, à un niveau de détail utile.

Deuxièmement, une bonne partie des services d'analyse en place au gouvernement fédéral avant l'Examen des programmes ont été démantelés au début et au milieu des années 1990. Le Bureau de recherches sur les traitements (qui relevait de la Commission des relations de travail dans la fonction publique) a été aboli en 1992, en partie pour économiser et en partie parce que l'employeur considérait apparemment les enquêtes du Bureau comme biaisées. Fait intéressant, les agents négociateurs émettaient eux-mêmes des réserves à l'endroit des conclusions du Bureau, quoique d'une perspective différente. Au Secrétariat du Conseil du Trésor, la suspension, pendant six ans, de la négociation collective et de l'arbitrage a entraîné le départ d'experts clés et la réaffectation des personnes qui sont restées à la fonction publique à des dossiers plus urgents. La reconstitution de la capacité à ce titre est bien amorcée, mais est loin d'être terminée[155].

Enfin, il est difficile d'échapper à l'impression que, tacitement, les parties ont trouvé plus simple de faire en sorte que la rémunération reste un domaine hermétique. Dans un tel environnement où le public n'exerce qu'une surveillance limitée, des ententes peuvent être conclues plus facilement et les conflits difficiles, réduits au minimum.

Rapport annuel sur la rémunération

La qualité de l'information est le fondement même de la qualité de la gestion. En conséquence, la mesure qui, à elle seule, serait la plus efficace pour améliorer la gestion de la rémunération au sein de l'administration fédérale serait de compiler, d'analyser et de publier régulièrement les données les plus importantes. Un rapport annuel sur la rémunération fédérale serait le produit le plus visible et le principal moteur d'un régime amélioré de transparence et de reddition de compte à l'égard de la rémunération fédérale.

Le rapport annuel mettrait à jour et suivrait une série d'indicateurs clés et rendrait compte des principaux changements survenus, au cours de l'année, dans les niveaux d'emploi, les conventions collectives et les politiques et dépenses de rémunération. Idéalement, on y ferait aussi, chaque année, une analyse plus approfondie de l'évolution d'un thème particulier. La détermination de la structure exacte du Rapport annuel dépasse la portée de ce projet.

Le rapport annuel sera le plus efficace si l'on se contente d'y donner un aperçu succinct des niveaux de la rémunération fédérale et des tendances dans ce domaine, sans devenir impénétrable en en multipliant les détails et la complexité. Par ailleurs, pour ceux qui désirent effectivement avoir des détails ou qui s'y intéressent en tant que spécialistes, il devrait être facile d'avoir accès, par Internet, à des sources de données plus détaillées. Le défi le plus important, sur le plan conceptuel, sera de choisir un ensemble limité, mais utile, d'indicateurs clés à suivre. Ceux‑ci devraient être véritablement des indicateurs, c'est‑à-dire qu'ils devraient résumer des renseignements importants de façon que même les non-spécialistes puissent discerner les tendances et les problèmes naissants.

La portée du rapport annuel devrait être la même que celle du présent rapport, c'est‑à-dire le noyau de la fonction publique (dont le Conseil du Trésor est l'employeur ), les employeurs distincts, les Forces canadiennes, les membres réguliers et civils de la GRC, ainsi que les groupes spéciaux comme les juges nommés par le gouvernement fédéral, les parlementaires, les employés du Parlement, le personnel des cabinets de ministres et les étudiants. Nous avons exclu les entreprises publiques fédérales et autres sociétés d'État parce que seule une partie relativement limitée de leurs coûts en personnel est financée au moyen de crédits parlementaires et qu'il leur revient d'établir leurs propres politiques en matière de personnel. Le rapport devrait faire état de toutes les formes de rémunération, en fonction de leurs coûts pour l'employeur plutôt que de la valeur qu'elles représentent pour l'employé[156].

Parmi les indicateurs clés, on compterait les dépenses totales consacrées aux salaires et à la rémunération totale, le nombre d'employés, les salaires moyens, l'évolution de la composition de la main-d'œuvre, les reclassifications, la rémunération au rendement, la valeur des augmentations salariales négociées ou gérées, les cotisations aux régimes de pension, les autres formes de rémunération versée, les assurances et dépenses de santé et les contributions aux programmes législatifs.

Dépenses totales consacrées aux salaires et à la rémunération totale

Il s'agit là des mesures les plus globales des tendances en matière de rémunération. Nous avons signalé dans le Volume Deux que les salaires et les traitements dans le secteur public fédéral sont passés de 12,5 milliards de dollars en 1997‑1998 à 17,9 milliards en 2002‑2003, soit une hausse de 43 %. Pour sa part, la rémunération totale a crû encore plus rapidement, passant de 16,6 milliards de dollars en 1997‑1998 à 24,8 milliards en 2002‑2003, une hausse de 49 %. Ces montants devraient être publiés à la fois en dollars courants et en dollars constants.

Nombre d'employés

Un important facteur dont il faut tenir compte pour interpréter les variations de la masse salariale et de la rémunération totale est la fluctuation du nombre des employés fédéraux. En indiquant la hausse ou la baisse de cet indicateur, le Rapport annuel devrait résumer les principales causes de variation. On devrait y faire état à la fois des décisions du Conseil du Trésor d'autoriser l'embauche de nouveaux employés (ou de réduire les effectifs) et les variations totales découlant des décisions prises par le ministère de réaffecter une partie des budgets non salariaux aux budgets salariaux. On pourra ainsi suivre l'évolution de la taille de la fonction publique et en débattre.

Salaires moyens

C'est là un indicateur particulièrement intéressant, bien que non exempt de controverse. Le salaire moyen est une mesure brute obtenue en divisant la masse salariale par le nombre d'employés. Entre 1997‑1998 et 2002‑2003, les salaires moyens ont augmenté beaucoup plus vite que l'inflation. Quoique cela soit en partie imputable à l'octroi d'augmentations économiques supérieures au taux cumulatif d'inflation, la hausse est également le résultat d'autres changements apportés aux structures salariales, comme l'ajout ou la suppression d'échelons dans une échelle salariale particulière, ainsi que de l'évolution de la composition de la main-d'œuvre fédérale.

Cet indicateur pourrait faire l'objet de critiques, en ce sens qu'il a pour effet d'exagérer les fluctuations des salaires fédéraux, puisqu'une part importante de l'augmentation récente des salaires moyens résulte de l'évolution de la composition de l'effectif. Le fait reste, cependant, que le suivi des fluctuations des salaires au sein de la fonction publique est intuitivement important et permet de regrouper utilement les différents effets d'influences disparates, dont certaines mériteraient un examen plus approfondi.

Évolution de la composition de la main-d'œuvre

Comme nous l'avons décrit au chapitre 4, la composition de la fonction publique fédérale a évolué sensiblement au cours des années 1990 et au début des années 2000. La taille de groupes relativement bien rémunérés, comme les groupes Systèmes d'ordinateurs (CS), Droit (LA) et Économie, sociologie et statistique (ES), a plus que doublé sur un peu plus d'une décennie. À l'opposé, la taille de groupes plus axées sur l'exploitation, comme les groupes Secrétariat, sténographie et dactylographie (ST), Services divers (GS), Manœuvres et hommes de métier (GL) et Commis aux écritures et règlements (CR), a diminué dans des proportions considérables (de 82 % à 28 %) sur la même période. Le suivi de ces changements est essentiel pour comprendre la rémunération fédérale.

Reclassifications

Nous avons souligné plus tôt qu'il existe des raisons valables de reclassifier les postes. Cependant, il importe aussi de suivre les tendances dans ce domaine et de faire les vérifications appropriées pour s'assurer que le système est bien géré. Les coûts supplémentaires qui résultent des reclassifications devraient aussi être rapportés.

Rémunération au rendement 

Il faudrait résumer les dépenses totales au titre de la rémunération au rendement ainsi que la valeur par personne de cette forme de rémunération pour les fonctionnaires fédéraux admissibles. Il faudrait aussi faire état du pourcentage de personnes qui touchent le montant normal (dans le cas des cadres de direction aux niveaux 1 à 3, par exemple, jusqu'à 7 %)[157], et la proportion de celles qui touchent davantage.

Valeur des augmentations salariales négociées ou gérées

Pour la plupart des employés, les conventions collectives déterminent comment leurs salaires changeront. Le rapport annuel devrait totaliser les augmentations cumulatives des salaires moyens résultant des négociations collectives. Il faudrait inclure à la fois les augmentations économiques, qui sont bien connues, et la valeur moyenne des autres changements moins bien connus, comme l'ajout ou la suppression d'un échelon à une échelle salariale. Il faudrait indiquer ces renseignements dans une annexe pour toutes les conventions collectives conclues au cours de l'année. Le Rapport annuel devrait contenir de brèves explications sur les changements non conformes aux tendances générales.

Cotisations aux régimes de pension

Les dépenses de rémunération les plus importantes après les salaires sont les cotisations aux régimes de pension. Le montant total cotisé par le gouvernement et les membres des régimes devrait être déclaré pour chaque volet du secteur public fédéral, ainsi que le ratio de ces cotisations.

Cette information est actuellement publiée dans les Comptes publics et les rapports annuels sur les principaux régimes de pension, mais son inclusion dans un Rapport annuel d'ensemble sur la rémunération dans le secteur public fédéral situerait cet aspect important de la rémunération dans un contexte approprié.

Autres formes de rémunération versée

Le Rapport annuel devrait résumer la valeur de toute autre forme de rémunération versée, comme les indemnités, le paiement des heures supplémentaires, l'indemnité de départ, les paiements tenant lieu de congés et les règlements au titre de la parité salariale. Tout changement important du niveau ou de la nature de ces composantes devrait être noté.

Assurances et dépenses de santé

Les dépenses totales au titre de l'assurance-vie, de l'assurance-invalidité et des régimes de soins de santé et de soins dentaires devraient être déclarées. En raison de leur importance, on devrait faire état des dépenses par personne au titre du Régime de soins de santé de la fonction publique (RSSFP). Chaque année, on pourrait donner des détails sur les changements apportés à l'un des autres régimes, ainsi que des détails supplémentaires, tous les deux ou trois ans, sur les différentes composantes des coûts du RSSFP.

Contributions aux programmes législatifs 

On devrait faire état des dépenses totales dans ce domaine, en expliquant tout changement important.

Conformément à l'approche générale du gouvernement en matière de rapports financiers, l'information financière figurant dans le Rapport annuel proposé devrait être présentée sur la base de la comptabilité d'exercice et inclure des détails sur les dépenses courantes, au besoin. Cela facilitera les comparaisons utiles d'un exercice à l'autre.

On devrait faire état des mêmes renseignements pour les groupes suivants dont les salaires sont déterminés sans négociation collective : les cadres de direction, les personnes nommées par le gouverneur en conseil, y compris les dirigeants des sociétés d'État, les autres employés non représentés, dont les agents de personnel (PE), les membres des Forces canadiennes, les membres réguliers et civils de la GRC, les juges nommés par le gouvernement fédéral et les parlementaires.

Pour les employés, il serait utile de produire une version simplifiée adaptée à leur propre situation. Le Secrétariat du Conseil du Trésor leur fournit actuellement un rapport annuel personnalisé très informatif sur leurs avantages sociaux. On pourrait en élargir la portée en faisant état des cotisations que l'employeur paie au nom de l'employé ainsi que des tendances générales de la rémunération fédérale.

On court certainement le risque que le Rapport annuel proposé ne soit lu qu'en partie et que les taux de rémunération et les politiques de rémunération dans le secteur public fédéral fassent l'objet d'attaques injustes. Toute forme de transparence comporte le risque que l'information fournie soit mal utilisée. Cependant, une présentation complète des données, mise à jour annuellement, est en soi la meilleure défense contre les critiques non équilibrées. En conséquence, voici notre première et plus importante recommandation :

Recommandation 1

1.1 Le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait présenter annuellement au Parlement un rapport sur la rémunération fédérale. Ce rapport devrait contenir des données sur les indicateurs comme ceux décrits dans la présente section, à la fois pour l'année en cours et dans une perspective historique. Le rapport lui-même devrait être bref et facile à lire, et faire amplement emploi d'aides visuelles.

1.2 Les annexes devraient renfermer des renseignements plus détaillés sur les résultats des négociations collectives pour des groupes clés, sur les décisions relatives à la rémunération des groupes non représentés, ainsi que sur les changements de politique touchant à la rémunération. Il serait utile d'inclure chaque année une étude plus approfondie d'un thème particulier. Des données plus détaillées sur les groupes professionnels et les groupes de classification particuliers, ainsi que sur les différents employeurs distincts, devraient être accessibles en direct.

1.3 Un résumé du rapport devrait être inclus dans le rapport annuel sur les avantages sociaux remis aux employés.

Cadre budgétaire possible

En plus de faire état de l'évolution de la rémunération, le gouvernement devrait envisager de traiter dans le Budget de son orientation générale en matière de rémunération afin d'alimenter le débat public[158]. La hausse ou la baisse attendue des dépenses consacrées à la rémunération devrait faire l'objet d'une prévision, comme c'est le cas d'autres catégories de dépenses clés. Le montant présenté devrait être le total des hausses prévues en raison de l'évolution du niveau et de la composition de l'emploi dans le secteur public fédéral et des variations des niveaux de salaire, quelle qu'en soit la cause, et des dépenses liées à tous les autres aspects de la rémunération – des pensions à l'assurance-maladie.

À l'heure actuelle, le gouvernement établit une réserve pour la rémunération dans le cadre financier[159]. Cette réserve ne sert pas à assumer les coûts supplémentaires liés à l'augmentation de la taille du secteur public fédéral, mais seulement les coûts de la hausse des salaires ou des avantages sociaux. Les coûts liés aux régimes de pension sont aussi gérés séparément de la réserve pour la rémunération. Le montant de la réserve est tenu secret parce que les négociateurs ne doivent pas dévoiler leur jeu avant de conclure une entente avec les syndicats du secteur public. Même pour les groupes non représentés comme les membres des Forces canadiennes ou les membres réguliers et civils de la GRC, on pourrait craindre que la divulgation de cette donnée fausse les discussions entre le Secrétariat du Conseil du Trésor et le ministère de la Défense nationale et la GRC si les montants théoriques prévus pour la rémunération étaient rendus publics.

Évidemment, il serait irréfléchi de publier des détails sur les résultats attendus des négociations. Ce que nous suggérons, est de publier dans ce rapport des prévisions globales des fluctuations des dépenses liées au personnel, y compris l'impact de l'évolution du nombre et des types de personnes employées. Bien que la divulgation de telles prévisions ne soit pas sans risque, elle comporte les avantages suivants :

  • Implicitement, une telle démarche met en valeur la recherche d'un équilibre entre l'embauche d'employés supplémentaires et l'octroi d'une rémunération plus élevée aux employés en place, ainsi qu'entre les salaires et les avantages sociaux.
  • Ainsi, en établissant pour ainsi dire une enveloppe de rémunération cible, on contribuera à la rigueur des discussions au sujet de la rémunération.
  • Afin d'établir et de défendre ses prévisions, le gouvernement devra se doter d'une capacité stratégique pour gérer la rémunération comme un tout, comme nous le proposons plus loin dans ce chapitre.
  • Point le plus important, il faudra coordonner de façon cohérente les divers processus qui entraînent des changements dans les dépenses de rémunération.

Les prévisions proposées peuvent contribuer à l'établissement d'un système permanent de transparence et de reddition de comptes au sujet de la gestion de la rémunération par le gouvernement. Mais elles ne doivent pas être vues comme un carcan rigide interdisant une gestion sensée en fonction de l'évolution de la situation. Les prévisions peuvent être comparées aux résultats qu'on publierait dans le Rapport annuel sur la rémunération fédérale recommandé dans la section précédente de ce chapitre. Il y aurait normalement de bonnes raisons pour expliquer les différences observées, par exemple les fluctuations du taux d'inflation ou une situation du marché du travail nettement différentes de celles prévues, information qui devrait être communiquée au public. En effet, en établissant une enveloppe des dépenses de rémunération proposées, et en rendant compte des résultats effectivement obtenus, on créerait un cycle de planification et de responsabilisation à l'égard de la rémunération dans le secteur public fédéral.

Sur la base de ce raisonnement, nous recommandons ce qui suit :

Recommandation 2

2.1 Le ministère des Finances devrait envisager d'inclure dans le Budget fédéral annuel une estimation des dépenses totales en personnel dans le secteur public fédéral, à l'exception des sociétés d'État. Cette estimation devrait combiner les variations des dépenses prévues en raison de l'augmentation ou de la diminution du nombre d'employés, des changements des salaires moyens, quelle qu'en soit la cause, et des fluctuations de toutes les catégories d'avantages sociaux.

Gestion des données sur la rémunération

Sur le plan pratique, le principal obstacle à la production d'un rapport annuel fiable est l'état insatisfaisant des données relatives à la rémunération fédérale. Plusieurs problèmes sont devenus manifestes durant cette étude : définitions incohérentes, données et rapports incompatibles, et information incomplète.

Les problèmes relatifs aux définitions abondent. Notamment, nous avons dû aborder quatre grands problèmes, dont l'établissement des domaines du secteur public, l'interprétation des composantes de la rémunération, les calendriers et les périodes de déclaration.

Composition des domaines du secteur public fédéral

Dans ce rapport, nous avons distingué six domaines :

  1. le noyau de la fonction publique, qui comprend les principaux ministères et organismes énumérés à la partie I de l'annexe I de la Loi sur la gestion des finances publiques, dont le Conseil du Trésor est l'employeur;
  2. les employeurs distincts, tels qu'énumérés à la partie II de l'annexe I de la LGFP;
  3. les membres des Forces canadiennes;
  4. les membres réguliers et civils de la GRC;
  5. les entreprises publiques fédérales et autres société d'État;
  6. un domaine résiduel englobant les juges nommés par le gouvernement fédéral, les parlementaires, les employés du Parlement, le personnel des cabinets de ministres et les étudiants.

Nous avons choisi ces catégories parce qu'elles correspondent à d'importantes distinctions sur le plan de la gouvernance et, partant, sur le plan des politiques et des pratiques de rémunération. Nous avons constaté toutefois qu'il était difficile de confirmer la liste exacte des organisations relevant de chaque domaine particulier.

Interprétation des composantes de la rémunération

Bien que ce rapport tienne compte de toutes les composantes de la rémunération fédérale, des salaires aux crédits de congé en passant par les heures supplémentaires, les indemnités, les cotisations aux régimes de pension et les régimes d'assurance et de soins de santé, il est difficile de présenter de l'information uniforme sur cette base. Des détails portant sur certains des domaines sont disponibles dans le système des Comptes publics ou les rapports tirés de l'information sur la paie produits par Travaux publics et Services gouvernementaux Canada. Dans le cas des Forces canadiennes et de la GRC, les systèmes de rapports internes sont la source d'importants détails. Tous ces renseignements sont résumés dans les rapports de Statistique Canada. Cependant, il n'y a pas uniformité de terminologie et d'interprétation entre ces différentes sources.

Des problèmes similaires se posent en ce qui concerne les rapports sur le niveau de l'emploi dans l'administration fédérale.

Traiter de la question des estimations

La réponse à l'une des questions les plus simples s'avère d'une complexité extrême. Combien a‑t‑on dépensé pour un élément donné, ou en rapport avec un groupe particulier, au cours d'une période particulière? De même, il est difficile de répondre à la question suivante : Combien de personnes travaillaient au sein d'une organisation ou d'un groupe particulier, pendant une période donnée ou à un moment particulier? Le problème fondamental est que l'effectif de la fonction publique fluctue constamment. Des gens y entrent ou la quittent chaque jour. Certains travaillent à temps partiel. Les salaires ou les avantages sociaux sont octroyés, puis périodiquement corrigés, à différents moments pour différentes périodes. En raison de la pratique habituelle qui consiste à verser les salaires toutes les deux semaines, il est rare que les périodes de paie correspondent exactement aux périodes de déclaration, comme les mois ou les années.

Ces exemples suffisent pour illustrer pourquoi chaque statistique agrégée sur la rémunération et l'emploi est en fait une estimation fondée sur une méthode donnée permettant de calculer approximativement le total réel. Ainsi, une façon d'estimer le nombre d'employés au cours d'une période donnée est de relever ce nombre à divers points et d'en faire la moyenne. Même cette façon de faire est plus difficile à appliquer qu'il n'y paraît, en ce sens qu'à n'importe quel point donné les personnes ayant le statut juridique d'employé peuvent entrer dans différentes catégories, dont travail à temps plein, travail à temps partiel, congé rémunéré, congé de maladie, congé non payé, etc.

Ces complications font que chaque nombre à estimer doit être calculé à l'aide d'une méthode d'estimation particulière. Dans ce contexte, ce qui importe le plus est de définir et d'appliquer uniformément une méthode d'estimation raisonnable.

Définir la période de déclaration

Un dernier point nécessitant un effort de normalisation, ou du moins plus de clarté, est celui de la période de déclaration. Certaines données sont présentées en fonction de l'exercice financier et d'autres, de l'année civile. Quoique les différences entre ces périodes soient normalement petites et les tendances à long terme passablement similaires[160], il serait moins mêlant d'utiliser une seule période de référence, probablement l'exercice financier, étant donné qu'il est à la base de la comptabilité publique.

Besoin de préciser la responsabilité

Dans une large mesure, le problème des données et rapports incompatibles résulte de la fragmentation des responsabilités pour la gestion des divers aspects du système de rémunération. En l'absence d'une culture de collaboration, les définitions variées abondent. Dans de nombreux cas, plusieurs organisations font rapport sur ce qui semble être le même thème, mais avec des résultats contradictoires. Un cas notable qui s'est présenté durant la préparation du présent rapport a trait aux reclassifications dans le domaine du noyau de la fonction publique. La Commission de la fonction publique a tenu des données sur ce point, fondées sur ses rapports de dotation; de même, la Direction de la modernisation de la gestion des ressources humaines, de l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada, a colligé de l'information à partir de ses dossiers sur la classification des postes. Au départ, leurs résultats étaient largement différents, variant d'environ 4 800 aux environs de 8 800 pour 2002‑2003. Après des efforts conjoints difficiles pour rapprocher ces chiffres, les deux groupes se sont entendus sur un total de près de 6 700, dont nous avons fait état au chapitre 4[161].

Pour tous les éléments de données importants, il importe de s'entendre sur l'organisation à qui il reviendra de définir l'élément, puis d'en rendre compte avec cohérence. Toute autre organisation intéressée à un élément donné devrait pouvoir faire connaître son point de vue à l'organisation responsable, mais en intégrer les résultats à son propre travail.

En réalité, les données incomplètes sont aussi un problème qui résulte des difficultés liées aux définitions. Pour divers thèmes, nous n'avons pas réussi à trouver des données similaires fiables pour différentes organisations.

En l'absence d'une entente sur une façon judicieuse de faire état des niveaux de rémunération, il n'est pas surprenant que certains renseignements aient été difficiles à trouver. Il existe des protocoles régissant la répartition des dépenses dans les Comptes publics. Cependant, ils sont conçus dans une optique de comptabilité financière, et non dans celui de l'analyse et de la compréhension des questions de rémunération. Une fois que les définitions seront normalisées pour appuyer la production du Rapport annuel sur la rémunération fédérale recommandé, les systèmes de rapports financiers qui alimentent les Comptes publics devront être harmonisés en conséquence.

Dans ce domaine comme dans tout autre, des données fiables, cohérentes et complètes sont indispensables à la mise en place d'un système réaliste de transparence et de reddition de comptes. Quand on recueille des données complexes, il est inévitable que se produisent des erreurs et des incohérences. Ce qui compte, c'est de prendre des mesures responsables pour réduire au minimum ces risques et de se doter des moyens d'assurer un suivi longitudinal permettant de détecter les problèmes éventuels. En conséquence, notre troisième série de recommandations porte sur ce point : 

Recommandation 3

3.1 Le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait définir en détail chaque élément de donnée à inclure dans le Rapport annuel sur la rémunération fédérale. Dans le cas des éléments qu'il faut estimer, la définition devrait préciser la méthode à employer. Les sources de données devraient être indiquées pour tous les éléments. Les définitions devraient être rendues publiques sur le site Web du Secrétariat et mises à jour au besoin.

3.2 En établissant et en révisant les définitions des éléments de données sur la rémunération, le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait consulter tous les groupes ayant un intérêt professionnel pour la question, y compris l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada et le Bureau du contrôleur général au sein du portefeuille du Conseil du Trésor, ainsi que Statistique Canada, Finances Canada, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, la Commission de la fonction publique, les employeurs distincts, les Forces canadiennes, la GRC, la Commission des relations de travail dans la fonction publique, les syndicats de la fonction publique et les universitaires intéressés. En l'absence d'un consensus, le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait prendre une décision appropriée.

3.3 Le Conseil du Trésor devrait autoriser les investissements dans les systèmes et les services analytiques requis pour mettre en place une méthode cohérente d'estimation et de déclaration des éléments de données sur la rémunération. Compte tenu de la taille de ce poste de dépenses fédérales (environ 25 milliards de dollars en 2002‑2003) et de sa croissance annuelle, des investissements appropriés[162] visant à bien comprendre comment sont dépensés les budgets de rémunération et leur évolution se paieront presque certainement d'eux-mêmes plusieurs fois.

Rapports sur la comparabilité

Comme il ressort du chapitre 6 du présent volume, il n'est pas facile de situer la rémunération fédérale dans l'ensemble du marché du travail canadien. Cependant, malgré les défis que soulève, sur le plan conceptuel et pratique, l'évaluation de la comparabilité, aucun système de transparence et de reddition de comptes à l'égard de la rémunération fédérale ne pourra être crédible sans tenir compte directement de cette perspective.

La Loi sur la modernisation de la fonction publique, adoptée en novembre 2003[163], prévoit la mise sur pied d'un service de recherche et d'analyse sur la rémunération, qui relèvera de la nouvelle Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP). Ce service effectuera des enquêtes sur la rémunération, compilera et analysera l'information connexe et la mettra à la disposition des parties[164] et, dans des cas particuliers, au public. Il effectuera aussi des recherches sur la rémunération axées sur le marché. Un comité consultatif aidera le président de la CRTFP à établir les normes et les méthodes d'analyse du nouveau service.

Logiquement, le nouveau service qui relèvera de la CRTFP devrait être la principale source publique d'information sur la comparabilité, pour le noyau de la fonction publique et les employeurs distincts dont les employés sont syndiqués. Il ne sera pas facile cependant d'en arriver au point où ce service fonctionnera de manière satisfaisante.

La plus grande difficulté sera de trouver des méthodes d'enquête et d'analyse crédibles à la fois pour les employeurs fédéraux et les syndicats de la fonction publique fédérale ainsi que pour les critiques externes. Bien qu'on dise habituellement que l'ancien Bureau de recherches sur les traitements (BRT), dont le mandat était similaire, a été aboli en 1992 afin de réduire les coûts, selon l'histoire orale le manque de confiance dans l'objectivité des méthodes d'enquête du BRT a joué un rôle au moins aussi important dans la décision de fermer celui-ci. Ainsi, le principe qu'appliquait le BRT de n'enquêter qu'auprès des grands employeurs dont les effectifs étaient syndiqués était perçu comme faussant indûment les résultats.

Au cours des dernières années, le Secrétariat du Conseil du Trésor et les syndicats de la fonction publique fédérale ont collaboré, sous l'égide du Comité consultatif mixte sur la rémunération du Conseil national mixte, à la réalisation d'un projet pilote portant sur des enquêtes de comparabilité de la rémunération. Statistique Canada s'est chargé de la conception des enquêtes et des essais pilotes au nom des parties. Statistique Canada et le CCMR ont commencé à analyser les premiers résultats de ce projet pilote dans le but de mettre au point une méthodologie approuvée par toutes les parties qui pourrait servir au déroulement d'enquêtes nationales sur la rémunération. La responsabilité du projet a récemment été confiée au CRTFP. Jusqu'à ce que le projet pilote soit terminé, il sera difficile d'évaluer cette expérience menée en collaboration. Cependant, il y a des signes encourageants au moins dans la mesure où les parties ont réussi à s'entendre sur une approche conforme aux normes professionnelles d'enquête de Statistique Canada.

En dépit de ce départ positif, personne ne devrait sous-estimer les difficultés inhérentes à la compilation régulière de données sur la comparabilité d'une vaste gamme d'emplois dans tout le pays. Les difficultés à résoudre vont des problèmes politiques, comme choisir les catégories d'employeurs qui serviront d'éléments de comparaison, en passant par les problèmes méthodologiques, comme la façon de choisir des emplois comparables, aux problèmes pratiques, comme la façon de convaincre les employeurs du secteur privé de fournir les données nécessaires. Aucun de ces problèmes n'est facile à résoudre. Les défis ne font que se multiplier quand la tâche s'élargit (comme elle le doit si l'on veut que les comparaisons soient vraiment utiles), en passant de la simple comparaison des salaires et des traitements à une approche axée sur la rémunération totale, où l'on comparerait l'ensemble du régime de rémunération.

Il est essentiel que les employeurs fédéraux[165] invitent leurs cadres supérieurs à contribuer à la prise de décisions sur les principales politiques et méthodes d'analyse du service de recherche sur la rémunération de la nouvelle CRTFP. Une énergie considérable au niveau analytique et conceptuel doit être consacrée à l'établissement d'une approche rigoureuse dès le point de départ. Aussi tentant qu'il puisse paraître de céder sur des points contestés afin d'accélérer le processus, il vaut mieux débattre des concepts et des méthodes d'entrée de jeu, plutôt qu'après la compilation et la communication des données. Par le passé, on a peut-être eu tendance à adopter une approche en apparence pragmatique pour la réalisation de diverses études conjointes portant sur des groupes particuliers. Toutefois, comme nous l'avons expliqué au chapitre 6, les études qui en ont résulté n'avaient trop souvent que peu de crédibilité pour l'employeur, même si elles paraissaient entérinées par les deux parties. La confusion subséquente n'était pas propice à une négociation efficace.

Il ne fait pas de doute que nous pourrons parvenir où il faut, à condition que les parties y accordent toute l'attention nécessaire et fassent preuve de bon sens. L'exemple de l'Institut de la statistique du Québec (lui-même en quelque sorte un descendant de l'ancien Bureau fédéral de recherches sur les traitements) montre qu'il est possible de créer un service professionnel et crédible. Mais il a été difficile pour l'Institut aussi de convaincre le gouvernement en tant qu'employeur et les syndicats à se fier à ses résultats. Il sera essentiel que la CRTFP résiste aux pressions exercées par l'une ou l'autre des parties pour « négocier en fonction de la réalité ».

En se fondant sur le temps requis pour préparer et réaliser les enquêtes pilotes du Conseil national mixte, on peut s'attendre à ce qu'il faille plusieurs années pour mettre en place progressivement un cycle convenable d'établissement de rapports de comparabilité. Entre-temps, des pressions s'exerceront pour que quelque chose de significatif soit dit sur la façon dont la rémunération dans le secteur public fédéral se compare à celle offerte par d'autres employeurs au pays. On peut s'attendre à ce que des organisations comme la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante publient tous les cinq ans un survol de la rémunération dans le secteur public par opposition au secteur privé, en fonction des résultats du recensement quinquennal. Comme nous l'avons montré au chapitre 6, la portée de telles études est si générale que leur utilité est douteuse, sauf pour suivre les tendances manifestes.

Plutôt que de laisser entièrement le champ à ce genre d'évaluations privées, le Conseil du Trésor ou même la CRTFP devrait envisager de publier son propre aperçu global de la comparabilité tous les deux ou trois ans, en se servant des données disponibles. Il serait logique que le Conseil du Trésor, peut-être en partenariat avec les syndicats de la fonction publique membres du Conseil national mixte, commande des études sur divers aspects de la comparabilité, touchant par exemple les pensions, les avantages sociaux et les congés, d'ici à ce que la CRTFP soit prête à les réaliser elle-même.

Nos observations s'appliquent essentiellement au noyau de la fonction publique et aux employeurs distincts dont le personnel est syndiqué. Pour les groupes non syndiqués et non représentés, il est important d'effectuer des études comparatives externes. Les études comparatives consacrées aux cadres de direction que l'on mène depuis longtemps devraient se poursuivre. Cependant, il serait bon d'en revoir la méthodologie pour en confirmer la validité. En particulier, il faudrait vérifier si des comparaisons rigoureuses aux niveaux supérieurs au premier niveau du groupe de la direction (EX) justifieraient d'accorder des hausses de salaire aux employés visés. D'autres observations sur la rémunération du personnel de direction sont présentées plus loin dans ce chapitre. Les groupes spécialisés non syndiqués, comme les agents du personnel (PE), devraient être comparés au secteur privé à intervalles réguliers.

Pour d'autres groupes, il importe tout autant de publier des données sur la comparabilité. Les rapports du Conseil de la solde de la GRC semblent fondamentalement rigoureux, quoiqu'il serait bon d'en revoir la méthodologie étant donné que le premier rapport de ce genre a été publié il y a environ 10 ans. Dans le cas des Forces canadiennes, il faut repenser la méthode de comparaison de la rémunération totale avec celle du noyau de la fonction publique. Elle est onéreuse sans être convaincante ni pour l'état-major et les membres des Forces canadiennes, ni pour le Secrétariat du Conseil du Trésor. Comme nous l'expliquons plus loin à la recommandation 13.4, la mise en place d'un comité consultatif sur la rémunération des forces canadiennes aiderait le Conseil du Trésor à déterminer la rémunération équitable qu'il conviendrait d'accorder aux membres de nos forces armées. Une des premières tâches du nouveau comité pourrait être de recommander une méthode simplifiée et crédible d'évaluation de la comparabilité de la solde militaire à la rémunération du noyau de la fonction publique, étant donné que les comparaisons directes avec le marché du travail extérieur ne semblent pas plus convaincantes qu'elles ne l'étaient par le passé.

Avant de conclure sur ce sujet, nous devons prendre en considération deux autres dimensions de la comparabilité qui sont à la fois controversées et difficiles, sur le plan conceptuel, à intégrer à une évaluation de la comparabilité. Le premier aspect porte sur la sécurité relative des emplois. Le public en général a l'impression que les fonctionnaires sont essentiellement casés pour la vie dès qu'ils deviennent des employés permanents, tandis que les personnes qui travaillent dans le secteur privé sont susceptibles de perdre leur emploi sans préavis ou recours. Les deux volets de ce tableau sont exagérés, tout en étant encore apparemment plus vrais que faux.

Dans la fonction publique fédérale, les réductions d'effectifs qui ont fait suite à l'Examen des programmes au milieu des années 1990 ont entraîné des milliers de départs hâtifs à la retraite non planifiés et d'autres pertes d'emploi. Cependant, les méthodes employées (le Programme d'encouragement à la retraite anticipée et la Prime de départ anticipé décrits dans le Volume Deux) pour procéder à la réduction des effectifs étaient généreuses à la fois sur le plan financier et à la fois parce qu'elles permettaient à ceux qui voulaient partir de se substituer à ceux dont les postes étaient abolis mais qui voulaient rester. Il est également vrai qu'il est relativement rare que des fonctionnaires soient congédiés, le plus grand nombre de départs volontaires étant attribuables aux renvois en cours de stage[166].

Dans le secteur privé, la sécurité d'emploi varie de faible (essentiellement le préavis de licenciement de quelques semaines exigé par les lois sur les normes de travail) à grande, selon l'employeur. Les employés syndiqués bénéficient habituellement de la plus grande sécurité d'emploi et des meilleures indemnités de licenciement. Mais même les meilleures conventions collectives permettent les mises à pied et les médias annoncent régulièrement des centaines ou des milliers de mises à pied lors de fermetures d'usines.

Le deuxième thème est celui de l'attrait relatif des emplois à la fonction publique. En théorie, on peut mesurer cet attrait de deux façons : le nombre de personnes qui postulent pour les postes vacants ouverts au grand public et le taux de départs volontaires. Sur ces deux plans, la fonction publique fédérale semble se comparer avantageusement au secteur privé. Les postes à la fonction publique fédérale annoncés à l'extérieur attirent souvent des centaines de candidatures, quoique la proportion des candidats qualifiés n'ait pas été jusqu'à maintenant documentée de façon systématique. Le taux d'attrition (exception faite des départs à la retraite) est très faible à 1,5 % en 2002‑2003, par exemple. La proportion des départs volontaires dans le secteur privé est évidemment très variable, mais a varié en gros autour de 10 à 15 % en 2003[167].

Tant la sécurité d'emploi relative que l'attrait relatif de l'employeur représentent une valeur pour les employés, même s'ils sont difficiles à quantifier. À tout le moins, il faudrait documenter et divulguer la situation globale de la fonction publique fédérale sur ces deux plans comparativement au secteur privé et à l'ensemble du secteur public au Canada. Si l'évaluation présentée ici voulant que la fonction publique fédérale bénéficie d'une position relativement favorable sur ces plans est exacte, cela implique que les salaires et les avantages sociaux offerts dans l'administration fédérale pour le même travail pourraient, raisonnablement, être un peu plus bas que ceux offerts dans le secteur privé. Cela serait évidemment très difficile à négocier dans le cadre des négociations collectives, mais on pourrait au moins en discuter franchement et ouvertement.

En résumé, voici nos recommandations concernant la communication de l'information sur la comparabilité :

Recommandation 4

4.1 De concert avec les syndicats du secteur public, le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait aider activement la Commission des relations de travail dans la fonction publique à établir, dès que possible, une fonction de recherche sur la rémunération faisant autorité. La portée des rapports sur la question devrait englober tous les aspects de la rémunération et non uniquement les traitements et salaires.

4.2 Le Secrétariat du Conseil du Trésor et ses partenaires devraient prendre le temps et le soin nécessaires pour réfléchir aux questions méthodologiques dès le départ et en discuter à fond, en reconnaissant aussi qu'il faut apprendre de l'expérience. Les parties devraient s'assurer de recommander des représentants qualifiés, y compris des experts indépendants, pour siéger au Comité consultatif créé pour veiller à ce que l'on utilise une méthodologie de recherche de haut calibre.

4.3 Les dirigeants de la Commission des relations de travail dans la fonction publique devraient consulter pleinement les représentants de l'employeur et des syndicats en vue de l'établissement et de la gestion de la nouvelle fonction de recherche sur la rémunération autorisée par la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Cependant, en tirant des leçons de l'expérience de l'Institut de la statistique du Québec et de celle du Comité consultatif établi en vertu de la Loi, la CRTFP devrait elle-même s'assurer du bien-fondé des méthodes adoptées pour mener les enquêtes comparatives et présenter les rapports connexes.

4.4 Jusqu'à ce que la CRTFP soit prête à publier des renseignements suffisamment complets sur la comparabilité de la rémunération fédérale par rapport à l'ensemble du marché du travail canadien, le Secrétariat du Conseil du Trésor (si possible en partenariat avec les syndicats du secteur public sous l'égide du Conseil national mixte) devrait publier au moins tous les trois ans des macro-perspectives pertinentes sur la comparabilité.

4.5 En ce qui a trait aux autres groupes d'employés fédéraux non syndiqués ou non représentés, le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait commander et publier des études de comparabilité à intervalles convenables. Pour les rapports de ce type qui existent déjà, comme ceux ayant trait aux cadres de direction de la fonction publique ou aux membres réguliers et civils de la GRC, des experts en rémunération indépendants et objectifs devraient revoir la méthode de comparaison avec le marché du travail externe pour s'assurer qu'elle demeure valable et pertinente à la situation.

4.6 En complément à la documentation sur la comparabilité des salaires et des avantages sociaux, des données sur la sécurité d'emploi et l'attrait du travail chez les employeurs étudiés devraient être compilées et publiées.

Le premier groupe de quatre recommandations est à la fois le plus important et le plus réalisable. En faisant rapport annuellement sur les principales tendances en matière de rémunération dans le secteur public fédéral, en veillant à ce que les données sous-jacentes reposent sur des définitions et des méthodes d'estimation claires, et en fournissant de l'information valable, sur le plan analytique, quant à la façon dont le secteur public fédéral se compare à l'ensemble du marché du travail canadien, on établira au profit de tous le contexte requis pour bien gérer la rémunération fédérale. Cependant, la mise en œuvre de nos recommandations sur la transparence et la reddition de comptes suppose, et même exige, que des changements soient apportés à notre façon de gérer la rémunération dans le secteur public fédéral. La prochaine série de recommandations aborde ce thème.

Le premier groupe de quatre recommandations est à la fois le plus important et le plus réalisable. En faisant rapport annuellement sur les principales tendances en matière de rémunération dans le secteur public fédéral, en veillant à ce que les données sous-jacentes reposent sur des définitions et des méthodes d'estimation claires, et en fournissant de l'information valable, sur le plan analytique, quant à la façon dont le secteur public fédéral se compare à l'ensemble du marché du travail canadien, on établira au profit de tous le contexte requis pour bien gérer la rémunération fédérale. Cependant, la mise en œuvre de nos recommandations sur la transparence et la reddition de comptes suppose, et même exige, que des changements soient apportés à notre façon de gérer la rémunération dans le secteur public fédéral. La prochaine série de recommandations aborde ce thème.