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ARCHIVÉ - Examen des dépenses et comparabilité - Volume Un - Rapport d'analyse et recommandations

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Examen des dépenses et comparabilité de la
politique de rémunération dans le secteur public fédéral

Volume Un
Rapport d'analyse et recommandations





Novembre 2006

Table des matières

Volume Un

Rapport d'analyse et recommandations

Remerciements

SECTION UN - CONTEXTE DE LA COMPARABILITÉ

SECTION DEUX - COMPOSANTES DES AUGMENTATIONS DES SALAIRES MOYENS

SECTION TROIS - COMPARABILITÉ DE LA RÉMUNÉRATION

5. Comparaison de la rémunération fédérale totale aux indicateurs économiques, 1990 à 2003

6. Études comparant la rémunération dans l'administration fédérale à celles du secteur privé et du secteur public élargi

7. Comparaison des régimes de pension

8. Comparabilité des autres avantages

9. Conclusions au sujet de la comparabilité

SECTION QUATRE - RECOMMANDATIONS

Notes - Volume Un

 




Volume Un

Rapport d'analyse et recommandations

Remerciements

Un rapport aussi complexe et exhaustif que celui‑ci n'est possible que grâce à l'apport et à la collaboration de nombreuses personnes, chacune ayant son domaine de spécialisation. Nous tenons dans la mesure du possible à remercier ici toutes les personnes ayant permis de préparer ce rapport. Leur générosité et leur savoir n'ont pas de prix; en outre, ces personnes ne sauraient en aucune manière être tenues responsables des erreurs ou malentendus qui pourraient subsister.

Clients

Le présent examen a été entamé à la demande de Jim Judd, qui était à ce moment secrétaire du Conseil du Trésor. Alex Himelfarb, qui était alors greffier du Conseil privé, a également appuyé la tenue de l'examen. Enfin, l'honorable Reg Alcock, qui assumait la charge de président du Conseil du Trésor, a convenu que cette étude devait faire partie des examens des dépenses commandés par le Conseil du Trésor au début de 2004.

L'honorable Lucienne Robillard, qui a occupé le poste de présidente du Conseil du Trésor, n'a pas pris part directement à l'examen, si ce n'est qu'elle a donné son appui aux examens des dépenses à titre de membre du Conseil du Trésor. Cela dit, sa rigueur et sa passion en faveur d'une saine gestion avaient favorisé antérieurement la tenue de travaux sur la planification de la rémunération, lesquels ont servi de fondement au présent projet.

Wayne Wouters, qui a succédé à Jim Judd à titre de secrétaire du Conseil du Trésor, a appuyé vigoureusement la réalisation de ce projet, tout comme Linda Lizotte‑MacPherson, secrétaire déléguée du Conseil du Trésor.

Membres de l'équipe

Au cours du projet, l'auteur a tiré profit de l'engagement de plusieurs membres du personnel du Secrétariat du Conseil du Trésor affectés à l'équipe à temps plein ou à temps partiel. Ces personnes ont apporté une contribution indispensable : elles ont mené des travaux de recherche, géré les aspects logistiques et mené des consultations auprès d'autres spécialistes. Certaines ont pris part à la planification du rapport, à sa rédaction et à l'examen critique de son contenu.

Lee Beatty a participé au projet de février 2004 à juillet 2005; elle s'est principalement penchée sur des aspects liés à la comparabilité et a aussi contribué à la gestion de la validation externe. Monique Paquin a été coordonnatrice du projet depuis le tout début, en janvier 2004, jusqu'à l'automne de la même année. Noomen Ketata a conçu beaucoup de figures et de tableaux durant une bonne partie de 2004. Don Booth a rempli différents rôles liés à la recherche et à la rédaction sur une base ponctuelle de la fin de 2004 au début de 2006. Son travail en mars et en avril 2006 a été crucial aux fins de l'achèvement du rapport. Joanne Di Raimo a géré l'horaire de l'auteur, a tenu les dossiers relatifs au projet et a accompli de nombreuses autres tâches utiles. Les travaux de recherche et le soutien logistique de Louise Richer et de Lucie Proulx ont été précieux aux dernières étapes de la préparation du rapport.

David Swayze, expert‑conseil chevronné dans les domaines des ressources humaines et de la rémunération au sein de la fonction publique, a fourni des services de recherche et de rédaction; il a aussi rédigé des diapositives à partir du rapport pour la tenue de présentations. Ses critiques franches et ses encouragements chaleureux ont été fort appréciés. Joanne Godin a révisé le libellé du rapport, le rendant beaucoup plus facile à lire. Souvent, ce sont ses suggestions ayant suscité le plus de réticences qui se sont révélées les plus précieuses, ce qui est typique de tout bon réviseur. Ron Thibault et Randi Saunders Morry ont grandement contribué à réviser le texte afin d'en assurer l'uniformité. Mary Daly, experte‑conseil en ressources humaines, nous a aidés à examiner la rémunération au sein du secteur public fédéral dans le contexte de la théorie générale et des pratiques en matière de rémunération. Terry Lister, des Services‑conseils en affaires IBM Canada, et Judy Lendvay‑Zwickl, du Conference Board du Canada, nous ont fait profiter lors des premières étapes du projet de leurs connaissances approfondies sur la théorie et les pratiques de rémunération.

Le Bureau de la traduction a exécuté rapidement un travail de première qualité, en veillant à garantir l'unité du style, ce qui représente un véritable défi pour un travail de cette envergure. Jean Pierre Toupin et Marie Claude Faubert ont préparé la version finale du document et ont révisé le texte français en fonction des changements apportés à la version anglaise. Je tiens à remercier le réviseur de la version française de la qualité de cette dernière, compte tenu de l'adaptation rendue nécessaire à la suite des restructurations et des révisions de la version anglaise.

Spécialistes

Des dizaines d'employés du Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT) et de l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada (AGRHFPC) ont accompli beaucoup de travail pour fournir des données, expliquer la politique en vigueur et examiner des textes aux fins du rapport. Hélène Laurendeau, Phil Charko, David Moloney (sans oublier ses prédécesseurs Kevin Page et Mike Joyce), Rick Burton et Mark Corey, qui occupent les postes de secrétaires adjoints du SCT et de vice‑présidents de l'AGRHFPC, ont beaucoup contribué à la bonne marche du projet en permettant aux membres de leur personnel d'appuyer nos travaux. HélèneLaurendeau a aussi offert des locaux et un soutien logistique après que l'auteur eut quitté le Secrétariat du Conseil du Trésor à la fin de 2004; elle a également lu et commenté plusieurs sections du texte. Phil Charko, Rick Burton et Mark Coreyont aussi formulé des commentaires.

La contribution des employés du SCT dont le nom suit a été indispensable en ce qui touche l'emploi, les salaires et la rémunération totale, sans oublier les analyses et les indicateurs économiques : Louis Beauséjour, Richard Stuart, Alex Hui, Jim Plumpton, Marc Richard, Rick Hartrick, Louise Richer et Bibi Majeed. Richard Stuart et Alex Huiont été des collègues extrêmement dévoués, rigoureux et créatifs relativement à certains des aspects les plus ardus du rapport. Concernant les questions liées à l'analyse des dépenses consacrées aux salaires et aux avantages sociaux, Hubert Séguin a accompli un travail de pionnier qui a été de première importance pour notre rapport.

Au sujet des pensions de retraite de la fonction publique, nous avons compté énormément sur les connaissances spécialisées de Bryce Peacock et sur l'aide de Claude Gagné, Linda Hansen, John Kay, Tony Rizzotto et Benoît Robert. Notre principal conseiller au sur les différents régimes d'avantages sociaux a été Rolf Amundsen et nous avons aussi tiré parti des conseils de Ron Kaden, Diane Filby, Kathy Jordan, Terry Ranger, Jean‑Pierre Breton et Dale De Spiegelaere.

Les commentaires de Patricia Power et Jake Hogervorst de l'AGRHFPC ainsi que de Kent Sproul et Harris Sinclair de la Commission de la fonction publique sur des aspects stratégiques et quantitatifs liés à toute la question de la classification et de la reclassification ont été fort utiles.

Au sujet de la classification et de la rémunération des cadres, il convient de souligner le généreux apport des membres de l'AGRHFPC faisant partie du Réseau du leadership, notamment Ken Kritsch, Carolyn Guest et Lynn Lemire‑Lauzon. Wayne McCutcheon et Ginette Bougie, qui font partie du Secrétariat du personnel supérieur du Bureau du Conseil privé, ont également offert leurs connaissances spécialisées sur la question.

En ce qui touche la parité salariale, les commentaires de Linda Giroux ont été particulièrement utiles aux fins du rapport; cette dernière a d'ailleurs formulé les mesures faisant partie de la recommandation 17. Don Graham et Michel Lefrançois ont fourni une aide précieuse sur la question de la négociation collective. Mylène Bouzigon, avocate générale principale au Conseil du Trésor, a fourni des conseils très appréciés sur ces sujets ainsi que sur d'autres aspects juridiques pertinents aux fins du rapport.

John Morgan et Louise Breton du Bureau du contrôleur général ont offert des conseils utiles sur des questions ayant trait aux Comptes publics et aux pratiques financières du gouvernement.

Statistique Canada a contribué à certaines analyses de comparabilité fondées sur ses bases de données; l'organisme a aussi vérifié l'utilisation que nous avons faite de ses données du domaine public. Le statisticien en chef, Ivan Fellegi, nous a permis de profiter du soutien de son personnel, notamment Mike Sheridan et son successeur au poste de statisticien en chef adjoint, Richard Barnabé, de même que plusieurs employés, dont Peter Morrison du Secteur de la statistique sociale, des institutions et du travail.

Aux fins de préparer le contenu du rapport traitant des Forces canadiennes, la coopération du vice‑amiral G.E. Jarvis et de différents membres de son état‑major, dont le colonel J.C. Rochette, le capitaine Chuck Garnier et le commandant G. Vandervoort, nous a permis d'obtenir des données essentielles et d'apporter des correctifs. Le colonel McCarthy a fourni des renseignements sur les Services de santé des Forces canadiennes. Au sein du Secrétariat du Conseil du Trésor, Rae Angus a été particulièrement utile dans ce domaine.

Concernant la Gendarmerie royale du Canada, Paul Gauvin, sous­‑commissaire, Gestion générale et Contrôle, a fourni une aide constante lors de plusieurs exercices de collecte de renseignements, de révisions et de vérifications. Les commentaires de Marie Stewart, Roxanne Noël et Sylvain Murray ont été grandement appréciés. Fred Drummie,président du Conseil de la solde de la GRC, a fourni des commentaires sur le texte. Michel Haddad du SCT nous a également été utile sur les questions relatives à la GRC.

À propos de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, nous avons pu compter sur les données et les commentaires éclairés fournis par Dan Tucker,commissaire adjoint, Ressources humaines, Claude Tremblay, directeur général, Relations de travail et rémunération, et Debi Pilgrim.Concernant l'Agence canadienne d'inspection des aliments, nous avons profité de l'aide fort utile de Fiona Spenser,vice‑présidente, Ressources humaines. Mary McLaren,directrice générale, Ressources humaines, Conseil national de recherches du Canada, nous a fourni des renseignements et des points de vue fort utiles. En ce qui touche Parcs Canada, nous tenons à souligner l'aide de Chris Reny, chef d'équipe, Rémunération et avantages sociaux. Pour ce qui est de la Société canadienne d'hypothèques et de logement, nous avons reçu le soutien de Jim Miller, vice‑président, Gestion des risques et Communications. Guy Tremblay,directeur général, Finances, Ressources humaines et Développement des compétences Canada, nous a fourni des commentaires utiles sur les raisons de la conversion des dépenses non salariales en dépenses salariales dans une optique ministérielle.

En ce qui a trait aux questions associées à la rémunération des parlementaires, nous avons tiré profit des données et des commentaires fournis par Luc Desroches,directeur général, Services corporatifs, Chambre des communes, Murielle Boucher de la Bibliothèque du Parlement ainsi que Connie Balasa et Hélène Lavoie, du personnel du Sénat.

Au sujet des taux quotidiens de rémunération des experts‑conseils, le rapport s'appuie sur les renseignements fournis par Peter Everson et Bill McCann de Conseils et Vérification Canada ainsi que par Josée Touchette,sous‑ministre adjointe, Services ministériels, Justice Canada.

Collaborateurs externes

Plusieurs spécialistes éminents, dont la plupart n'appartiennent pas à l'administration fédérale, ont offert des conseils sur les différentes questions abordées dans le rapport, et même dans certains cas sur des segments de la version provisoire du rapport. Leur apport a été de première importance aux fins de conserver une juste perspective et de valider les constatations faites au cours des deux dernières années.

Nous souhaitons remercier tout particulièrement : Gary Breen,de Gary Breen and Associates; Jean-Claude Bouchard,président de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale; Ian Clark,président du Conseil des universités de l'Ontario; Fred Drummie,président du Conseil de la solde de la GRC; Jean‑Guy Fleury,président de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié; Morley Gunderson,professeur à l'Université de Toronto; Martha Hynna,présidente de la Fiducie du Régime de soins de santé de la fonction publique; Nitya Iyer,avocate, Heenan Blaikie, Vancouver; Alain Jolicoeur,président de l'Agence des services frontaliers du Canada; Judith Maxwell,ancienne présidente des Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques; Jim Mitchell,associé principal, Sussex Circle; John O'Grady, de John O'Grady Consulting Inc.; Sylvie St‑Onge, des Hautes Études Commerciales de Montréal; Jodi White, présidente du Forum des politiques publiques; et David Zussman,vice‑président exécutif, Ekos.

Lors des premières étapes du projet, plusieurs spécialistes externes ont accepté de fournir des renseignements à l'auteur au sujet des pratiques de rémunération. Ces spécialistes étaient notamment : Gary Dobbie,premier vice‑président responsable de la rémunération, des avantages sociaux et des relations avec les employés à la Banque Royale du Canada; David Dodge, gouverneur de la Banque du Canada; Don Drummond,économiste en chef de la Banque Toronto Dominion; Warren Edmondson,président du Conseil canadien des relations industrielles; Shirley Howe, commissaire de la fonction publique, gouvernement de l'Alberta; Jean‑François Munn,associé, Loranger Marcoux, Montréal; André Ouellet, ancien président de la Société canadienne des postes; Yvon Tarte,président de la Commission des relations de travail dans la fonction publique; Laura Thanasse,vice‑présidente responsable de la rémunération à la Sun Life; Roland Theriault,associé, Mercer Consulting, Montréal; et Kevin Wilson,sous‑ministre adjoint, Ressources humaines, Conseil de gestion de l'Ontario.

Il aurait été bon que des représentants des syndicats de la fonction publique fédérale participent à ces consultations. L'auteur a transmis une invitation en ce sens aux dirigeants du Conseil national mixte, mais les syndicats ont décidé de ne pas y participer. Après avoir pris sa retraite à titre de président de l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada en décembre 2004, Steve Hindle a examiné et commenté certaines parties de la version provisoire du rapport, tirant parti de sa vaste expérience de dirigeant syndical. Fort de sa connaissance approfondie des questions liées à la rémunération dans l'optique des syndicats, un autre expert‑conseil externe, John O'Grady, a lui aussi présenté des commentaires.

Autres personnes dont nous avons reçu l'appui

De nombreuses autres personnes ont soutenu la réalisation du projet et la rédaction du rapport, à différents moments et de différentes façons. Au Secrétariat du Conseil du Trésor, Rose Kattackal, Mary Gregory et Enza Mattioli ont constamment fourni une aide utile. Stephen Silcox et Mike Giles des Services ministériels ont assuré un soutien en matière de marchés et de gestion financière. Bianca Bertrand a pris part aux activités de dotation pour la réalisation du projet. Roxanne Lépine et Cendrine Brisson, qui font partie du bureau d'Hélène Laurendeau, ont toujours été chaleureuses et utiles.

À différents moments en 2005 et au début de 2006, Michael Horgan, sous‑ministre, Affaires indiennes et du Nord canadien, a consacré du temps à l'auteur pour lui permettre d'achever son rapport, et ce dernier tient à le remercier de sa patience.

À différents moments en 2005 et au début de 2006, Michael Horgan, sous‑ministre, Affaires indiennes et du Nord canadien, a consacré du temps à l'auteur pour lui permettre d'achever son rapport, et ce dernier tient à le remercier de sa patience.

 




SECTION UN - CONTEXTE DE LA COMPARABILITÉ

1. Introduction

Le présent rapport fait état de la première analyse descriptive exhaustive de la rémunération dans le secteur public fédéral du Canada. Il présente également un ensemble complet de recommandations sur les moyens de renforcer la gestion de la rémunération dans le secteur public fédéral à l'appui d'une fonction publique de haut calibre qui corresponde aux attentes des Canadiens.

La rémunération est une question importante qui nécessite une gestion plus systématique. Elle constitue un important poste de dépenses discrétionnaires au gouvernement fédéral. Pour l'exercice 2002‑2003, la rémunération sous forme de salaires et autres modes de rémunération a représenté pour les contribuables fédéraux des coûts d'environ 25 milliards de dollars. Cela équivaut à plus du tiers des dépenses discrétionnaires du gouvernement fédéral, soit la partie du budget fédéral qui n'est pas prescrite par la loi[1].

Un système de rémunération bien pensé est une composante essentielle de la gestion efficace de la fonction publique. Les membres de la génération du baby‑boom atteindront l'âge de la retraite au cours de la prochaine décennie, et les connaissances des employés, l'innovation et la souplesse revêtiront une importance croissante en milieu de travail au Canada. La rémunération sera donc un facteur critique pour toute organisation souhaitant attirer et conserver les talents dont elle a besoin pour atteindre ses objectifs opérationnels.

Origine et nature de ce rapport

L'augmentation relativement rapide de la taille de la fonction publique fédérale et des dépenses totales en personnel à la fin des années 1990 et au début des années 2000 nous a amenés à nous interroger sur les facteurs à l'origine de ces changements. Les Comptes publics du Canada renferment des renseignements généraux sur les dépenses en personnel des ministères et les dépenses globales du gouvernement à ce poste, rajustées à la comptabilité d'exercice pour l'ensemble des opérations. La comparabilité des dépenses d'une année à l'autre dépend du moment auquel surviennent certains déboursés importants, comme les règlements au titre de la parité salariale, et peut être influencée par les changements apportés aux conventions comptables. Néanmoins, les dépenses totales dans ce domaine présentées dans les Comptes publics, sur une base comparable d'une année à l'autre, révèlent une croissance significative à compter de 1999. Le tableau qui suit permet de voir l'évolution des dépenses depuis 1995, la première année pour laquelle des chiffres sont disponibles par voie électronique.

Des études externes récentes sur la comparabilité de la rémunération au gouvernement fédéral par rapport à la rémunération d'un travail semblable dans le secteur privé canadien ou aux autres paliers de gouvernement indiquent qu'il y avait une plus‑value importante et croissante en faveur du secteur public fédéral. Certaines de ces études sont évaluées à la Section 3 du présent volume. Nous en concluons qu'elles surestiment probablement la taille d'une prime éventuelle, mais qu'il semble vrai qu'au cours des dernières années, le taux d'accroissement des salaires moyens dans la fonction publique fédérale a dépassé celui du marché du travail canadien.

Année

Dépenses en personnel
(Millions de $)

1995

19 155 $

1996

19 269 $

1997

17 933 $

1998

17 804 $

1999

18 300 $

2000

19 779 $

2001

23 902 $

2002

23 165 $

2003

25 120 $

2004

26 360 $

Pour éclairer ces questions, le Conseil du Trésor a décidé au début de 2004 d'inclure la rémunération dans la série d'examens des dépenses entrepris à cette époque[2].

Bien que cet examen particulier ait été conçu à l'origine pour permettre une exploration rapide de ce domaine vaste et complexe, l'examen s'est élargi au fur et à mesure de la progression des travaux pour devenir une étude beaucoup plus ambitieuse et informée. Amorcé au début de 2004 en même temps que les autres examens, l'examen présenté dans ce rapport était pour l'essentiel achevé à la fin de 2005. Après la mise en forme et la traduction, le Rapport a été finalisé au début de 2006[3].

L'étude de la rémunération et de sa comparabilité visait à faire un examen objectif et factuel de la question afin de donner aux ministres et à la haute direction un tableau accessible, intégré et cohérent de la rémunération dans toute sa complexité. Le Rapport d'examen pourrait ensuite servir de base à un débat et à des choix responsables et éclairés pour améliorer la gestion de la rémunération dans le secteur public fédéral au cours des années à venir.

Un point de vue indépendant

Ni le président du Conseil du Trésor ni aucun des dirigeants ou cadres supérieurs du Secrétariat du Conseil du Trésor n'ont cherché à influencer les conclusions ou les recommandations de l'examen. Ainsi, le Rapport ne traduit pas les vues du Conseil du Trésor ni du Secrétariat du Conseil du Trésor au sujet de la rémunération dans le secteur public fédéral. L'analyse et les recommandations présentées dans le Rapport sont uniquement celles de son auteur principal, James Lahey, qui a occupé le poste de secrétaire délégué au Secrétariat du Conseil du Trésor jusqu'en décembre 2004, puis de sous‑ministre délégué à Affaires indiennes et du Nord Canada.

Après avoir réalisé l'examen de façon autonome, en tablant sur son expérience au sein de l'ancien Bureau de la gestion des ressources humaines du Secrétariat du Conseil du Trésor et, auparavant, dans les postes de sous‑ministre adjoint du Travail, puis de sous‑ministre adjoint de la Politique stratégique à Développement des ressources humaines Canada, M. Lahey a remis son rapport final au secrétaire du Conseil du Trésor.

Il incombe maintenant au Conseil, en sa qualité de comité du Cabinet chargé de la gestion judicieuse de la fonction publique fédérale, de décider, sur les conseils du secrétaire du Conseil du Trésor, des mesures à prendre pour donner suite au Rapport. Les recommandations qu'il renferme ont une vaste portée, englobant 77 propositions dont plusieurs concernent des questions difficiles ou controversées. Par conséquent, lorsqu'il décidera des mesures de suivi à prendre, le Conseil du Trésor devra mettre soigneusement en balance les considérations de leadership, de coût, de faisabilité, de relations, de calendrier d'exécution et de capacité de gestion.

Observations sur le Rapport

Nous sommes conscients que ce rapport de plus de 600 pages, comprenant deux volumes, sans compter les appendices, qui fait abondamment usage de chiffres, de graphiques et de tableaux, pourra en décourager plus d'un. Nous ne nous faisons pas d'illusions : la plupart des intéressés se contenteront de lire l'Aperçu – qui compte lui‑même quelque 80 pages – et peut‑être de parcourir rapidement le reste du texte ou de se limiter aux questions qui les touchent plus particulièrement.

Pourquoi produire un document aussi volumineux? Essentiellement, nous voulions dresser un portrait complet de la rémunération dans le secteur public fédéral, assorti de détails suffisants et d'une analyse assez approfondie pour servir de base fiable à la fois pour comprendre la situation et pour déterminer les mesures à prendre afin de renforcer la cohérence et l'efficacité de la gestion dans ce domaine. Nous espérons que cet aperçu extrêmement fouillé et, selon nous, relativement clair d'une question importante mais ténébreuse influencera la façon dont les membres de la fonction publique fédérale envisagent la rémunération. Il ne devrait plus être acceptable de discuter d'un volet de la rémunération dans l'administration fédérale ou de l'examiner isolément des autres. Tous les aspects de la rémunération, voire de la gestion des ressources humaines en général, sont interconnectés et s'influencent inévitablement les uns les autres.

Nous avions aussi l'intention de dresser, à l'intention des praticiens du domaine de la rémunération dans la fonction publique fédérale, un compendium accessible des politiques et du contexte factuel dans lequel s'inscrit leur travail. En s'en servant comme point de départ, les nouveaux intervenants du domaine pourront rapidement être en mesure de situer les enjeux dans un ensemble plus vaste.

Nous considérions en outre que nous faisions œuvre de pionniers dans le domaine de l'examen des dépenses. Une des responsabilités fondamentales du Secrétariat du Conseil du Trésor est de suivre de près et d'évaluer les tendances des dépenses publiques pour être en mesure de recommander des économies éventuelles et de désigner les domaines où la réussite appelle de nouveaux investissements. C'est pourquoi il importe de développer pleinement la capacité du Secrétariat de réaliser des études approfondies et de résumer une information vaste et complexe pour la présenter de manière réfléchie et utilisable. Le présent rapport constitue un modèle d'une telle analyse en profondeur des dépenses et des politiques.

Il est aussi instructif d'exposer certains autres principes que nous avons tenté d'appliquer dans notre examen et le rapport qui en découle. Ces principes sont énumérés ci-après.

Orientation factuelle

Dans la mesure du possible, nous avons cherché à présenter les données factuelles disponibles sur les décisions de politique et les dépenses des employeurs. Nous nous sommes abstenus de porter des jugements ou d'interpréter les faits, sauf lorsque nous avons jugé que des commentaires s'imposaient pour en faciliter la compréhension.

L'Examen met l'accent sur cinq domaines d'emploi fédéraux :

  1. Le noyau de la fonction publique,
  2. Les employeurs distincts,
  3. Les Forces canadiennes,
  4. La Gendarmerie royale du Canada,
  5. Les autres groupes, y compris les juges de nomination fédérale, les parlementaires, le personnel des cabinets de ministres et les étudiants.

Un autre domaine dont nous traitons brièvement est celui des entreprises commerciales et sociétés d'État fédérales qui financent leurs dépenses de rémunération essentiellement à même leurs recettes commerciales. L'appendice D renferme une liste des organisations figurant dans chaque domaine.

Nous nous sommes fiés aux autorités compétentes de chaque domaine pour la plus grande partie de nos données. En ce qui concerne le noyau de la fonction publique, il s'agit surtout du Secrétariat du Conseil du Trésor et, dans une certaine mesure, de l'Agence de gestion des ressources humaines dans la fonction publique et de la Commission de la fonction publique.

En ce qui a trait aux employeurs distincts, nous avons pu recourir dans bien des cas aux bases de données du Secrétariat du Conseil du Trésor. Pour certains employeurs, comme le Conseil national de recherches, et pour certaines questions touchant l'ensemble des employeurs distincts (comme les mouvements de personnel ou les heures supplémentaires), nous nous sommes adressés directement aux employeurs concernés pour obtenir des données.

En ce qui concerne les domaines des Forces canadiennes et de la Gendarmerie royale du Canada, ce sont les services des ressources humaines et/ou des finances et les sites Web de ces organisations qui nous ont servi de sources. Dans le cas de la GRC, nous avons également eu le concours du personnel du Conseil de la solde de la GRC.

Pour les autres domaines, nous avons utilisé des données publiées, les données du Conseil du Trésor et des Comptes publics et les renseignements fournis par les gestionnaires financiers compétents.

Pragmatisme 

Nous nous sommes efforcés de trouver les bons chiffres sur telle ou telle question, mais après avoir fait des efforts raisonnables, nous avons accepté l'information disponible. Dans certains cas, la recherche de la perfection nous aurait entraînés dans une spirale de confusion croissante, sans nécessairement nous donner de meilleures données.

Perspective de l'employeur

Par l'entremise du Conseil national mixte, nous avons invité les syndicats de la fonction publique à nous faire part de leur vues sur la rémunération dans le secteur public fédéral. Ils ont toutefois décliné notre invitation, peut‑être parce qu'ils ne savaient pas dans quoi ils s'engageaient. Nous avons consulté à l'occasion des personnes bien informées des vues des syndicats et nous avons tenu compte de leurs observations, mais notre rapport reflète nécessairement la perspective de l'employeur. Durant la période de consultation recommandée après la publication du Rapport, les syndicats et d'autres parties prenantes devraient avoir l'occasion de commenter notre analyse et nos recommandations.

Franchise

Nous avons choisi la franchise lorsqu'il nous fallait aborder des questions délicates. Nous n'avons pas cherché délibérément la controverse, mais nous n'avons pas non plus hésité à dire la vérité telle que nous la comprenions.

Les limites des données disponibles

Au fil de la rédaction des divers thèmes du Rapport, la disponibilité, l'interprétation et la fiabilité des données quantitatives ont posé des défis incessants. Dans chaque cas, nous avons retenu ce qui nous paraissait la meilleure information. Nous nous sommes efforcés de faire preuve de constance au sujet de chaque indicateur ou sujet tout au long du Rapport. Nous avons consulté des spécialistes dans chaque domaine et lorsque, comme dans le cas des reclassifications, nous avons trouvé deux sources légitimes dont les renseignements différaient sensiblement, nous avons réuni les experts pour discuter des écarts dans leurs données et convenir d'une approche commune. Enfin, dans la mesure où les ressources le permettaient, nous avons présenté une version préliminaire de notre rapport, pour examen et révisions, aux gestionnaires de données les mieux informés.

Toutefois, au bout du compte, nous devons reconnaître que les données disponibles ne sont pas parfaites. Beaucoup de chiffres sont des estimations plutôt que des observations exactes. Cela est inévitable, car la plupart des chiffres dont il importe d'assurer le suivi ne cessent de fluctuer. Les effectifs ou le total des salaires, par exemple, changent tous les jours, voire toutes les heures. Les chiffres annuels ne peuvent être qu'approximatifs. Normalement, ils fourniront un instantané de la situation à tel moment, ou mieux encore, une moyenne de plusieurs instantanés pendant la période de référence, afin d'atténuer l'effet des variations saisonnières. De surcroît, la complexité des questions étudiées et le caractère inédit d'une grande partie du Rapport nous ont obligés à improviser ou à chercher des variables de substitution pouvant donner une idée raisonnable de l'évolution d'un indicateur. Tous ces éléments, auxquels il faut ajouter les faiblesses humaines pendant les nombreux mois au cours desquels nous nous sommes consacrés à cette vaste entreprise, se sont inévitablement traduits par des erreurs.

La vraie question, cependant, est de savoir si toute erreur de ce genre est importante. Est‑il probable qu'une série de chiffres soit erronée au point de donner une idée fondamentalement fausse du niveau, de la nature ou des tendances des dépenses consacrées à la rémunération dans le secteur public fédéral ou de ses principales composantes? Après avoir passé de nombreux mois à travailler sur ces données et à faire autant de recoupements que possible sur une même question à partir de différentes sources, nous avons acquis la conviction que les tendances et les relativités présentées ici sont pour l'essentiel exactes. Et advenant qu'un critique puisse démontrer qu'un chiffre ou une série de chiffres est erroné, les corrections subséquentes favoriseront la transparence, un débat réfléchi et une rigueur méthodologique qui ne pourront que contribuer à la gestion responsable de la rémunération dans l'administration fédérale.

Structure du Rapport

Le Rapport couvre un vaste domaine dont la plus grande partie n'a jamais été résumée de façon accessible et dont les éléments n'ont jamais été regroupés en un texte continu.

Le Rapport comprend trois volumes, auxquels s'ajoute un aperçu.

Le volume un traite des questions essentielles et présente des données comparatives accompagnées d'une analyse de chacune des recommandations.

La section un du présent volume renferme les données essentielles et historiques nécessaires à la compréhension de l'ensemble du domaine de la rémunération.

Le chapitre 2 présente l'historique de la comparabilité de la rémunération depuis la mise en place du système de rémunération au mérite en 1918, en passant par les recommandations de diverses commissions, notamment les commissions Beatty et Glassco, à l'établissement d'un cadre de négociation collective, et diverses périodes de suspension de la négociation collective et de gel des salaires, jusqu'à aujourd'hui.

Le chapitre 3 explique le cadre juridique et institutionnel de la détermination des salaires, en décrivant le processus de négociation collective mis en place avec l'adoption de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, de 2003, et présente un aperçu de la structure de classification des postes. Il décrit aussi le processus mis en place pour les employeurs distincts, celui qui s'applique aux cadres de direction et aux employés exclus de la négociation collective, et les programmes du Conseil national mixte qui s'appliquent aux employés de tous les groupes.

Lasection deux, qui est constituée du chapitre 4, décrit et examine les facteurs qui ont contribué à l'augmentation des coûts moyens des salaires. Cette analyse précise le contexte de l'examen détaillé de la rémunération présenté dans le volume deux et fournit suffisamment d'informations pour que celui ou celle qui lirait seulement le présent volume puisse avoir une idée de certaines des grandes questions qu'il importe d'aborder.

Lasection trois renferme l'ensemble de l'analyse comparative entreprise aux fins du présent examen.

Le chapitre 5 compare les tendances de la rémunération fédérale aux tendances économiques dans l'ensemble de la société canadienne.

Le chapitre 6 examine les conclusions des rapports externes qui comparent la rémunération dans le secteur fédéral à celle du secteur privé.

Le chapitre 7 scrute le Régime de pension de retraite de la fonction publique et en compare les prestations à celles en vigueur dans d'autres secteurs.

Le chapitre 8 compare les autres avantages sociaux offerts dans la fonction publique fédérale à ceux offerts dans d'autres sphères de compétence et dans le secteur privé.

Le chapitre 9 renferme nos conclusions sur la question de la comparabilité, sur la base des analyses présentées dans la section trois.

Lasection quatre fait état de nos conclusions générales et de nos recommandations.

Le chapitre 10 explique comment la transparence et l'obligation de rendre compte peuvent aider à gérer les facteurs à l'origine de l'évolution des coûts de la rémunération.

Le chapitre 11 fournit des détails sur la façon dont la rémunération dans le secteur fédéral peut être gérée de façon cohérente.

Le chapitre 12 traite de questions de fond importantes touchant à la rémunération, par exemple la structure des groupes professionnels, la réforme de la classification, la gestion des salaires et la paye des groupes spéciaux, y compris les cadres de direction, les dirigeants des sociétés d'État et les personnes qui travaillent dans les domaines fédéraux autres que le noyau de la fonction publique.

Le chapitre 13 renferme nos recommandations en ce qui a trait aux pensions de retraite de la fonction publique et aux autres avantages sociaux.

Le chapitre 14 traite des modifications possibles aux lois, y compris le cadre de règlement des différends liés à la négociation collective et la parité salariale.

Le chapitre 15 propose une approche étape par étape pour la mise en œuvre.

Le chapitre 16 renferme nos conclusions.

Le volume deux renferme les analyses détaillées de la rémunération dans chacun des cinq domaines de l'administration fédérale en 2002‑2003.

Divers chapitres du volume deux présentent aussi un rappel historique de la façon dont nous sommes parvenus aux formes et aux niveaux actuels de rémunération, ainsi que des descriptions de tous les avantages sociaux, dont les divers régimes de retraite. Nous décrivons à la fois les salaires et avantages des employés de la fonction publique et les coûts qu'ils représentent pour les contribuables. Les données vont jusqu'à l'exercice financier 2002‑2003, le plus récent pour lequel une information complète était disponible en 2004, lorsque le Rapport a été rédigé. L'analyse historique est centrée sur la période de 1990‑1991 à 2002‑2003, avec un accent particulier sur la période de 1997‑1998 à 2002‑2003, qui faisait suite à la mise en œuvre complète des compressions de personnel et des contrôles salariaux liés à l'Examen des programmes.

En examinant aussi longuement l'évolution de la politique et des dépenses liées aux divers volets de la rémunération, nous voulions mieux comprendre la situation de la rémunération telle qu'elle se présentait dans le secteur public fédéral au début des années 2000. Une simple ventilation des dépenses en 2002‑2003 ne permet pas de voir quels secteurs sont en croissance ni les raisons de cette croissance. Tout plan viable doit tenir compte de ces facteurs.

Le volume deux est divisé en trois sections.

La première section renferme l'introduction, qui présente des données contextuelles utiles aux examens détaillés qui suivent.

La seconde section traite de la rémunération totale dans le domaine du noyau de la fonction publique et celui des employeurs distincts.

Le chapitre 2 décrit l'ensemble des composantes de la rémunération pour le noyau de la fonction publique, y compris les employeurs distincts. Nous avons dû inclure les employeurs distincts avec le noyau de la fonction publique en raison des nombreux changements clés survenus ces dernières années qui ont fait en sorte que des segments importants de la fonction publique ont, alternativement, fait partie du noyau de la fonction publique et du domaine des employeurs distincts.

Le noyau de la fonction publique comprend les ministères et organismes pour lesquels le Conseil du Trésor est l'employeur aux termes de la loi et dont la liste se trouve à la Partie I de l'Annexe I de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.

Le domaine des employeurs distincts englobe les organismes énumérés à la Partie II de l'Annexe I de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, soit l'Agence du revenu du Canada[4], l'Agence canadienne d'inspection des aliments, le Conseil national de recherches du Canada, le Service canadien du renseignement de sécurité, le Centre de la sécurité des télécommunications et Parcs Canada, de même que plus de 15 entités de moindre envergure qui comptent tout au plus quelques centaines d'employés chacune. Dans notre analyse, nous nous concentrons principalement sur les plus grands employeurs distincts.

Le chapitre 3 examine les facteurs qui sont à l'origine des augmentations et des diminutions des niveaux d'emploi et de salaire, y compris des éléments tels que les nouvelles initiatives de programmes, les répercussions de l'Examen des programmes et les changements dans la composition de l'effectif.

Le chapitre 4 explique comment se déroule le changement structurel dans le noyau de la fonction publique, y compris les mécanismes de reclassification et de dotation des postes. Il examine aussi les diverses composantes de l'évolution de la masse salariale globale.

Le chapitre 5 décrit d'autres éléments de la rémunération, tels que la rémunération au rendement pour certains groupes d'employés, le temps supplémentaire et les autres indemnités et primes.

Le chapitre 6 examine en détail le Régime de pension de retraite de la fonction publique et fait un survol historique des taux de cotisation des employés et de l'employeur.

Le chapitre 7 décrit les divers régimes d'assurances et les autres avantages sociaux accessibles aux employés et aux pensionnés de la fonction publique.

La troisième section englobe les quatre autres domaines d'emploi au palier fédéral.

Le chapitre 8 présente un instantané de la rémunération et des avantages sociaux en 2002‑2003 pour le domaine des Forces canadiennes, dont les membres réguliers des Forces canadiennes et les membres actifs de la Réserve des Forces canadiennes, ainsi qu'un aperçu historique de la rémunération globale dans ce domaine.

Le chapitre 9 présente un instantané et un survol historique du domaine de la Gendarmerie royale du Canada, y compris les membres réguliers de la GRC et les civils employés aux termes de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada. Les fonctionnaires ordinaires travaillant pour la GRC sont compris dans le noyau de la fonction publique.

Le chapitre 10 présente un instantané et un survol historique du domaine des Autres groupes, soit les juges de nomination fédérale, les parlementaires (députés et sénateurs), les employés de la Chambre des communes, du Sénat et de la Bibliothèque du Parlement, le personnel des cabinets de ministres et les étudiants embauchés dans le cadre de programmes spéciaux d'emploi des étudiants. Notre analyse se limite aux données disponibles.

Le chapitre 11 présente un instantané et un survol historique du domaine des entreprises commerciales fédérales. Étant donné que ces sociétés comptent sur des recettes de source commerciale pour financer en tout ou en grande partie leurs activités, elles n'ont que très peu recours aux crédits parlementaires fédéraux pour couvrir leurs dépenses de rémunération. De plus, elles ont toute latitude pour établir leurs propres politiques en matière de personnel et de rémunération, et celles-ci varient largement selon les domaines d'activité où ces sociétés sont présentes[5]. Notre analyse est donc forcément brève.

On pourrait être tenté d'utiliser l'information présentée dans le volume deux pour faire des comparaisons entre les divers domaines d'emploi du secteur public fédéral. Par exemple, nous présentons des figures ventilant l'effectif dans chaque domaine d'emploi par tranche de 5 000 $ de salaire. Il est intéressant de juxtaposer ces distributions parce qu'elles révèlent des tendances très distinctes dans différents domaines. On pourrait tenter de les expliquer en affirmant que tel domaine est surpayé ou sous-payé par rapport à tel autre. Mais nous devons nous garder de faire de telles comparaisons futiles. Chaque domaine a ses propres secteurs d'activité et des besoins correspondants en main-d'œuvre qui se reflètent dans des courbes salariales caractéristiques. Il n'y aucune raison de s'attendre à observer une relation particulière entre les domaines.

Les divers appendices aux volumes un et deux renferment des renseignements et des données supplémentaires pour approfondir l'analyse présentée dans les trois volumes. Dans au moins un cas, l'appendice C traitant du rapport de 1962 de la Commission royale d'enquête sur l'organisation du gouvernement (le Rapport Glassco), nous avons reproduit intégralement les passages les plus pertinents.

L'Aperçu, publié séparément, présente un sommaire de l'ensemble du Rapport.

 




2. Historique de la comparabilité de la rémunération et de la négociation collective

Dans le présent chapitre, nous résumons comment le gouvernement fédéral a fait part de ses intentions à l'égard de la politique sur la comparabilité au cours des années. Nous notons que des considérations d'ordre pratique ont souvent eu préséance sur la politique. Comme le rapport de la Commission Glassco (1962) le faisait remarquer : « Les prix qui ont cours sur le marché dictent les limites de la rémunération, mais la fixation de telle ou telle échelle de salaires se ressent d'influences changeantes d'ordre politique, administratif et social. »[6]

Au moyen de diverses formulations au fil des ans, les gouvernements fédéraux successifs ont cherché à situer la politique de rémunération en visant la comparabilité avec le marché du travail externe. Toutefois, les formulations étaient si générales que les résultats ont grandement varié. Malgré ces variations, la pratique systématique a été de verser des salaires supérieurs à ceux du marché aux niveaux subalternes de la fonction publique et des salaires inférieurs à ceux du marché aux niveaux plus élevés. Aux niveaux intermédiaires, les salaires pouvaient être plus élevés ou moins élevés selon les circonstances. Cette tendance s'observe pour les salaires et encore davantage pour la rémunération globale[7].

La comparabilité et son application de 1913 au début des années 1960

Les débuts : un système de rémunération au mérite

De 1913 à 1920, les augmentations salariales dans la fonction publique ne représentaient qu'environ la moitié de la croissance du niveau de vie au niveau national.

La Première Guerre mondiale a mené à une expansion rapide de la fonction publique fédérale et l'on a de plus en plus reconnu que, pour être efficace, la fonction publique devait être dotée en fonction du mérite et non du favoritisme. En 1918, la Loi sur le service civil prévoyait que les nominations devaient être réglementées par la Commission du Service civil conformément au principe du mérite. La Commission a aussi reçu le mandat de recommander des révisions aux taux de rémunération. Afin de s'acquitter de cette responsabilité, la Commission a demandé, en 1919, l'avis de la société Arthur Young & Company sur la manière de structurer un régime de classification et de rémunération. Les principes[8] généraux suivants ont guidé son travail :

Une rémunération uniforme

La rémunération, au même niveau, devrait être uniforme.

Une juste rémunération pour différentes « catégories » de travail

La rémunération des différentes catégories de postes doit être relativement « juste ». Le rapport entre les échelles de salaires des différents métiers, professions et genres d'emplois doit être identique à celui qui existe entre ces domaines dans le monde des affaires. Pour le même métier, la même profession ou le même genre d'emploi, cette relativité est établie en regard des différences de fonctions, de responsabilités, d'expérience, de connaissances et de compétence.

La parité

Le salaire prévu pour chaque catégorie doit être équitable, c'est-à-dire, juste envers l'employé et juste envers le public contribuable.

La parité pour les employés

Pour être juste envers le fonctionnaire, le salaire qu'on lui verse doit lui permettre de maintenir un niveau de vie conforme au bien-être de la société présente et future. Aux paliers inférieurs, le salaire doit être assez élevé pour attirer dans le service civil des jeunes gens et des jeunes filles qui, sans charge de famille, possèdent une formation et des aptitudes telles qu'ils puissent plus tard se perfectionner et fournir un précieux apport au service.

La parité pour le public contribuable

Le salaire ne doit pas être sensiblement supérieur au salaire que des employeurs avisés accordent pour des services comparables dans le monde des affaires et l'industrie. Tout excédant sur la moyenne courante prend l'allure d'une subvention spéciale et aucun groupe ne doit être favorisé de cette façon.

Pour comparer la rémunération prévue pour des services analogues dans la fonction publique et le secteur privé, il faut tenir compte des avantages et des désavantages relatifs de l'emploi public et privé, dont la permanence et la continuité de l'emploi, les heures de travail et les vacances et congés de maladie.

Ce premier énoncé de politique renferme plusieurs thèmes qui sont revenus pendant les décennies suivantes. Le concept le plus fondamental est celui de la parité pour l'employé et les contribuables. La notion selon laquelle la façon d'atteindre cet équilibre est d'égaler le monde des affaires quant à la norme de rémunération appropriée pour les divers métiers, professions et genres d'emploi est assez explicite. Le plafond de la rémunération devrait être le salaire versé pour des services comparables par des employeurs avisés. Enfin, la comparaison doit tenir compte de toutes les formes de rémunération et non seulement des salaires.Les augmentations offertes dans le sillage du rapport déposé par Arthur Young & Company étaient des paiements forfaitaires beaucoup plus importants en pourcentage aux niveaux de revenus inférieurs.

En appliquant les recommandations de politique formulées dans le rapport, le gouvernement a créé deux catégories d'employés. La première comprenait les employés nommés en vertu de la Loi sur le service civil, dont les taux de rémunération étaient recommandés par la Commission du Service civil. En 1922, il y avait environ 50 000 fonctionnaires répartis en quelque 2 200 catégories aux fins de la détermination de la rémunération. Treize mille autres employés, la plupart des hommes de métier qualifiés et des membres d'équipage de navires, étaient exemptés de l'application de la Loi. Ils furentéventuellement désignés « employés rémunérés au taux courant » parce qu'ils étaient payés au taux en vigueur dans la localité où ils étaient employés[9]. Le Conseil du Trésor établissait les taux pour les hommes de métier exclus en tenant compte des relevés régionaux des salaires courants effectués par le ministère du Travail.

La Commission Beatty

À la fin des années 1920, on était manifestement conscients de la nécessité d'améliorer la rémunération relative des employés qui seraient aujourd'hui appelés « employés du savoir » dans la fonction publique. La Commission royale sur le personnel technique et scientifique, présidée par E.W. Beatty, a produit un rapport en 1930. Selon ce rapport, il est évident que le principal déterminant de l'évolution des salaires n'était pas la comparabilité. Parallèlement, la Commission Beatty soulignait la complexité accrue de la tâche de l'administration publique ainsi qu'une « intrusion » du gouvernement dans un grand nombre de nouveaux domaines. La Commission indiquait que :

... pour ce qui est de l'échelle salariale, nous constatons que les travailleurs dans les domaines technique, scientifique et professionnel au niveau subalterne du service ne sont pas désavantagés de façon marquée comparativement à d'autres employés de même niveau dans le marché du travail externe. En effet, il est évident que les salaires des débutants dans le service sont souvent un peu plus élevés que ceux des débutants dans d'autres secteurs[10]. (TRADUCTION)

Le problème a trait à l'avancement dans la fonction publique comparativement au secteur privé. La Commission a aussi fait part de son inquiétude devant le fait que les catégories de classification résultant du système Young étaient devenues « inutilement encombrantes ». Toutefois, lorsque la Commission a soumis son rapport, la crise économique sévissait et ses recommandations sont demeurées sans suivi pendant une décennie et demie.

Crise économique et guerre

La principale décision politique prise subséquemment a été l'adoption de la Loi de la déduction sur les traitements de 1932, qui réduisait les salaires de 10 % de façon généralisée. Comme les baisses de salaires dans le secteur privé ont été beaucoup plus importantes et que l'on a rétabli graduellement la baisse de 10 % des traitements des fonctionnaires, les salaires dans la fonction publique au début de la Deuxième Guerre mondiale étaient avantageux en comparaison de ceux du secteur privé. La comparabilité semble être intervenue seulement de façon générale pour produire ces résultats.

Pendant la guerre, le pragmatisme a eu préséance encore une fois. Les augmentations de salaires étaient généralement restreintes. Pour recruter le personnel nécessaire et prévenir l'injustice flagrante, le gouvernement a eu recours à des mesures telles que les indemnités de vie chère, l'avancement dans les unités miliaires, les suppléments liés aux responsabilités de temps de guerre et l'assouplissement du système de classification.

Changements après la guerre

Après la Deuxième Guerre mondiale, la taille de la fonction publique a augmenté pour atteindre 117 000 employés en 1946. La Commission royale d'enquête sur les classifications administratives dans la fonction publique (1946), présidée par W.L. Gordon, a poursuivi le travail entrepris par la Commission Beatty. La Commission Gordon a déploré qu'en raison de l'augmentation continue des responsabilités du gouvernement, il n'y avait pas suffisamment « d'hommes » de haut calibre aux niveaux supérieur et intermédiaire. Elle convenait avec la Commission Beatty que « le chevauchement des échelles salariales dans des postes successifs pour les promotions [n'est] pas conforme au maintien de l'efficacité maximale »[11]. (TRADUCTION) La Commission a critiqué les rôles contradictoires de la Commission du Service civil et du Conseil du Trésor en ce qui a trait à la détermination des salaires et elle était en faveur de confier ce rôle entièrement à ce dernier organisme.

Dans ses recommandations, la Commission Gordon a proposé les principes suivants pour déterminer la rémunération au niveau supérieur de la fonction publique :

Le niveau général de ces échelles salariales pour le groupe administratif [nous dirions aujourd'hui la direction] et pour le groupe scientifique, technique et professionnel devrait être établi de sorte qu'au niveau des postes subalternes, les salaires pourraient attirer dans la fonction publique le nombre nécessaire des meilleurs candidats des universités; au niveau intermédiaire, ils reconnaîtraient les fonctions de plus en plus importantes à assumer et tiendraient compte des responsabilités familiales croissantes que les hommes, au début ou au milieu de la trentaine, doivent habituellement assumer, tandis qu'au haut de l'échelle, les salaires devraient permettre aux hauts fonctionnaires d'assumer leurs fonctions sans avoir de problèmes financiers. (TRADUCTION).

Suite au rapport de la Commission Gordon, on accorda des hausses à certains sous-ministres et à d'autres hauts fonctionnaires. De façon plus générale, on intégra au régime salarial de la fonction publique l'indemnité de vie chère versée durant la guerre.

L'augmentation relativement rapide des taux de rémunération dans le secteur privé et la croissance continue de la fonction publique fédérale durant la période d'après-guerre ont exercé de fortes pressions sur le niveau et la structure des taux de rémunération de la fonction publique. La tendance à recourir à des augmentations générales soulignait les lacunes du mécanisme appliqué pour réviser les taux de rémunération. En 1948, le premier ministre de l'époque, Louis St-Laurent, réaffirma en ces termes les principes sur lesquels reposait la politique du gouvernement en matière de rémunération :

Depuis longtemps, la politique du gouvernement en ce qui concerne les salaires dans la fonction publique repose sur deux grands principes. Premièrement, ils devraient être suffisants pour attirer au service civil et y maintenir en poste des personnes satisfaisant aux critères et, compte tenu de tous les facteurs pertinents tels les conditions d'emploi, les salaires établis pour chaque catégorie de travail devraient généralement correspondre à ceux que versent les bons employeurs du secteur privé pour un travail comparable. (TRADUCTION)

L'importance accrue accordée à la comparabilité externe dans cette formulation relativement succincte soulignait la nécessité d'une meilleure information au sujet des niveaux et des pratiques de rémunération dans le secteur privé. En 1957, inspiré par la British Royal Commission on the Civil Service (1955), le gouvernement a créé le Bureau de recherche sur les traitements. La mission du Bureau était « de fournir de l'information objective sur la rémunération et les conditions de travail au gouvernement, dans le secteur des entreprises et dans le secteur industriel et de réunir et d'analyser des données factuelles sur les tendances en matière d'emploi en dehors de la fonction publique ». Ce mandat représentait une importante innovation à au moins deux égards : premièrement, il indiquait l'engagement de fournir des preuves empiriques pour déterminer les salaires; deuxièmement, sa gouvernance prévoyait la participation active des associations d'employés à l'établissement des priorités du Bureau.

En 1958, le premier ministre Diefenbaker a fait la déclaration suivante sur la politique de rémunération dans la fonction publique :

Tout d'abord, les salaires doivent être assez élevés pour répondre à l'objectif qui leur est propre : attirer et conserver dans le service du gouvernement ceux et celles qui possèdent les aptitudes requises. En second lieu, ils doivent être équitables, et pour les fonctionnaires et pour ceux qui ne sont pas au service du gouvernement, autrement dit, les contribuables; la rémunération que nous accordons pour tel ou tel genre d'emploi doit donc se comparer au salaire que versent les employeurs de l'entreprise privée pour un travail analogue, compte tenu des autres conditions d'emploi qui doivent entrer en ligne de compte si l'on veut établir une juste comparaison.

Il est intéressant de noter les changements de terminologie passant « d'employeurs avisés » (Arthur Young & Company, 1919) à « bons employeurs » (Louis St-Laurent, 1948) à simplement « employeurs de l'entreprise privée » (John Diefenbaker, 1957). Nous pouvons seulement émettre l'hypothèse que cet assouplissement apparent au fil des ans de la description des employeurs comparables adéquats du secteur privé représente un recul conscient de perspective.

En conformité avec cet énoncé de politique, la nouvelle Loi sur le service civil (1961) renfermait dans le paragraphe 10(2) la première description législative de la politique sur la rémunération :

En faisant des recommandations sur la rémunération, la Commission doit considérer les exigences du service civil et tenir compte également des salaires et autres modalités et conditions d'emploi qui règnent au Canada pour un travail similaire à l'extérieur du service civil, de même que du rapport qui existe entre les fonctions des diverses catégories dans le service civil et de toutes autres questions qu'elle estime être dans l'intérêt public.

Par conséquent, au début des années 1960, la comparabilité de la rémunération de la fonction publique avec celle du marché du travail externe était devenue plus présente dans les énoncés de politique, mais non particulièrement essentielle à la détermination réelle des salaires et des avantages sociaux.

La Commission Glassco

Aujourd'hui, plus de 40 ans après sa publication, le chapitre portant sur la « Gestion du personnel » du Rapport de la Commission royale d'enquête sur l'organisation du gouvernement (Glassco)[12] traite d'un grand nombre de questions auxquelles la fonction publique est encore confrontée. Dans les domaines particuliers de la rémunération de la fonction publique et de sa comparabilité à l'économie générale, la Commission Glassco offre un bon aperçu de la politique et de la pratique.

À partir du travail accompli par le nouveau Bureau de recherche sur les traitements, la Commission Glassco a évalué comment les salaires et les avantages sociaux de la fonction publique étaient reliés à ceux des emplois comparables dans le secteur privé. Parmi les observations générales de la Commission au sujet de la comparabilité, mentionnons les points suivants :

Dans l'ensemble, les échelles de salaires pour les postes inférieurs de l'administration sont égales ou même supérieures à celles des emplois correspondants dans l'industrie privée. Les échelles de salaires pour les emplois supérieurs à ces niveaux accusent certaines différences, surtout dans les hauts postes administratifs ou professionnels où le gouvernement est nettement désavantagé, au point de vue financier, par rapport à l'industrie privée.

Dépourvu de la souplesse requise pour adapter les traitements aux niveaux des salaires qui ont cours dans les diverses régions, le service public applique souvent des échelles de salaires supérieures à ces niveaux dans certains centres, inférieures dans certains autres.

D'une façon générale, les régimes de prévoyance en vigueur dans la fonction publique sont plus favorables aux employés que ceux de la plupart des industries privées... certains employeurs importants offrent maintenant un régime de prévoyance qui vaut presque celui du service du gouvernement, et quelques-uns offrent même des avantages plus attrayants que la fonction publique... le régime des pensions constitue le principal attrait des programmes de la fonction publique... les programmes d'avantages offerts aux employés du gouvernement sont si compliqués que nombre de fonctionnaires et de candidats éventuels n'en reconnaissent pas la valeur[13].

Tenant compte de cette vision élargie de la situation relative de la rémunération de la fonction publique dans l'économie canadienne de l'époque, la Commission a porté un œil critique sur les différentes déclarations de politique faites à l'époque. À son avis :

On n'a pas encore établi, jusqu'ici, l'ensemble des principes régissant la rémunération des fonctionnaires. Les déclarations qu'on a formulées dans le passé, parce qu'elles étaient trop générales, n'ont eu qu'une utilité très restreinte dans la pratique... ce n'est que ces dernières années qu'on a accordé une grande attention aux forces du marché pour la fixation des traitements des fonctionnaires[14].

La directive de la Commission était la suivante :

Ce programme devrait tendre vers trois objectifs précis : aider à remplir les cadres du service par un personnel compétent, en y attirant les candidats qui font l'affaire et en retenant les employés compétents; rémunérer équitablement les serviteurs du gouvernement; réaliser les deux objectifs précédents à des frais le moins élevé possible pour le contribuable[15].

On pourrait croire que cette formulation n'est pas moins généralisée que les énoncés des principes de la rémunération que la Commission a elle-même critiqués. En fait, la Commission a analysé divers termes clés tels que « taux du marché » ou « taux régnants ». Elle a souligné, par exemple, la nécessité de préciser que les enquêtes sur les salaires ne devraient pas se limiter aux « meilleurs employeurs », mais devraient inclure « un groupe représentatif d'employeurs à qui le service public dispute des candidats »[16].

La Commission a aussi souligné l'importance d'assurer un traitement équitable aux travailleurs fédéraux (par exemple, les météorologues) pour lesquels il n'y a aucun équivalent direct sur le marché du travail externe. Elle a fait une critique sévère du système de classification actuel comme étant un obstacle à une rémunération équitable[17] et a conclu que « le régime actuel de rémunération est essentiellement négatif » puisqu'il ne prévoit pas « la reconnaissance formelle du rendement supérieur »[18].

En général, le rapport de la Commission Glassco a marqué un tournant entre une fonction publique traditionnelle enracinée dans les règles et la procédure et une nouvelle fonction publique accordant un rôle plus important à la délégation des pouvoirs à la direction et à la reddition de comptes pour les décisions prises en fonction des conditions locales. Dans le domaine de la rémunération et de la comparabilité, la Commission a offert l'évaluation la plus complète de la situation relative de la fonction publique à cette époque et peut-être depuis. Ses commentaires sur les principes régissant la rémunération et leur interprétation étaient percutants et suggéraient comment en améliorer la clarté et l'application.

Mais ce rapport est paru à une époque où le paternalisme de l'employeur perdait du terrain à la faveur d'une plus grande acceptation sociale d'une approche davantage axée sur la collaboration dans l'établissement des salaires. Presque immédiatement après la publication du rapport, le gouvernement minoritaire de Lester Pearson a décidé de transférer la détermination des salaires dans la fonction publique au domaine de la négociation collective.

Politique de rémunération de la fonction publique et comparabilité durant les premières années de la négociation collective

Comité préparatoire à la négociation collective

En 1965, le Comité préparatoire des négociations collectives dans la fonction publique, présidé par A.D.P. Heeney, a publié un rapport[19]. Afin de préparer officiellement le terrain pour la négociation collective, il fallait régler deux questions fondamentales. Premièrement, comment serait structuré l'effectif de la fonction publique pour la négociation collective? Deuxièmement, quels rouages et règlements seraient mis en place pour encadrer le nouveau système?

Pour ce qui est de la première question, le Comité préparatoire a indiqué que « le système de classification et d'échelles de salaires, tant pour les fonctionnaires civils que pour les employés à taux courants, n'a pas subi de révision complète depuis 1919 ». Le Comité a reconnu (comme la Commission Glassco avant lui) qu'il y avait « absence d'une ligne de démarcation bien claire entre les deux systèmes » et que les employés faisant partie des deux catégories accomplissaient le même genre de travail. Il a donc recommandé que les deux catégories d'employés soient fusionnées sous un seul système. Pour cela, le Comité a proposé une simplification radicale de la classification des postes, tel qu'illustré à la figure 1001. Les 700 catégories et 1 700 niveaux applicables aux 138 000 travailleurs employés en vertu de la Loi sur le service civil ont été remplacés par une structure à deux paliers. Le palier de la « catégorie professionnelle » serait une vaste division horizontale de la fonction publique utile aux fins de la planification et de l'élaboration de la politique de personnel. Le deuxième palier, celui du « groupe professionnel » serait une sous-division servant d'assise au processus de détermination de la rémunération.

Figure 1001
Une nouvelle structure pour la fonction publique avec l'adoption de la négociation collective

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Une nouvelle structure pour la fonction publique avec l'adoption de la négociation collective

On soulignait la capacité d'établir autant que possible une comparaison des tâches à celles du marché du travail externe.

Pour ce qui est de la deuxième question, deux observations méritent une attention particulière. Dans l'ensemble, le Comité préparatoire a conclu que « le régime de négociations collectives et d'arbitrage de la fonction publique du Canada doit autant que possible avoir pour point de départ les principes et coutumes qui régissent les rapports entre employeurs et employés dans l'ensemble de la collectivité canadienne ». Le Comité a indiqué clairement que le gouvernement devrait accepter la restriction « au droit historique de la Couronne de déterminer unilatéralement les conditions d'emploi de ses fonctionnaires » inhérent à l'acceptation d'un régime de négociation collective et d'arbitrage. Néanmoins, le Comité a proposé que le mécanisme de « règlement des différends par un tiers » soit un tribunal d'arbitrage permanent dirigé par un président permanent. On envisageait que les membres seraient « des hommes et des femmes qui jouissent d'une certaine réputation à travers le pays » et qu'il serait « rare que leur rôle quasi judiciaire soit entaché d'étroitesse ou d'esprit de parti ».

Le Comité préparatoire a également mentionné l'équilibre à maintenir entre la comparabilité externe et la parité interne, qui est essentiel pour assurer une juste détermination des salaires:

Les exigences du marché du travail et du maintien d'une relativité interne ne peuvent que difficilement se concilier dans un plan de classification. Pour répondre aux pressions du marché, il faut une structure flexible composée d'un grand nombre de parties dont chacune peut se mouvoir indépendamment. D'autre part, les exigences de la relativité interne imposent une structure rigide et unifiée dans laquelle chaque emploi peut être classé en un rapport invariable avec tous les autres. On ne saurait obtenir les meilleurs résultats possibles si l'on ne peut établir un équilibre raisonnable entre ces deux extrêmes.

Selon le Comité, le marché est le plus approprié en période de changement et de développement économiques, comme celle qui a prévalu au Canada depuis la Deuxième Guerre mondiale. Un système trop rigide conviendra mal pour recruter et maintenir en poste un personnel « compétent », notamment dans les emplois « hautement spécialisés ».

Le Comité s'est aussi fait un devoir d'exprimer le point de vue selon lequel « le nouveau système devrait offrir de forts stimulants au maximum de rendement », y compris l'application de ces pratiques au-delà de la « catégorie des hauts fonctionnaires ».

Le Comité s'est dit convaincu que, dans de nombreux secteurs de la fonction publique, une grève serait injustifiable et un lock-out impensable. Bien qu'il ait décidé de ne pas recommander l'interdiction des grèves, le Comité s'attendait clairement à ce que l'arbitrage soit le moyen habituel de résoudre les différends.

Influencé par la grève des travailleurs des postes en 1965 et sans doute par sa situation minoritaire au Parlement, le gouvernement Pearson a décidé « de tenir compte du point de vue de ceux et celles qui s'opposaient à l'arbitrage en principe » (TRADUCTION) en offrant l'option de la conciliation assortie du droit de grève dans la loi.

La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Un cadre législatif pour la négociation collective dans la fonction publique fédérale a été promulgué en vue d'être mise en œuvre à compter de 1967. La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) établissait les règles pour l'accréditation syndicale, le règlement des différends et la résolution des griefs. La Loi incorporait l'essentiel des recommandations du Comité. La Loi sur l'administration financière conférait au Conseil du Trésor la responsabilité d'employeur pour la majeure partie de la fonction publique, y compris les négociations portant sur les conditions d'emploi des travailleurs syndiqués ainsi que l'autorisation d'établir un régime de classification selon les paramètres proposés par le Comité préparatoire.

La LRTFP ne renfermait pas un énoncé direct de la philosophie du gouvernement fédéral en matière de rémunération. Toutefois, les points que le tribunal d'arbitrage doit prendre en considération au moment de rendre une décision arbitrale (article 68) révélaient indirectement les buts pertinents de la politique. Puisque l'on s'attendait à ce que l'arbitrage soit le moyen habituellement employé pour régler les différends, ces considérations prenaient encore plus d'importance :

Dans la conduite de ses audiences et dans ses décisions au sujet d'un différend, le conseil d'arbitrage prend en considération les facteurs suivants :

  1. les besoins de la fonction publique en personnel qualifié;
  2. les conditions d'emploi dans des postes analogues hors de la fonction publique, notamment les différences d'ordre géographique, industriel et autre qu'il peut juger pertinentes;
  3. la nécessité de maintenir des rapports convenables, quant aux conditions d'emploi, entre les divers échelons au sein d'une même profession et entre les diverses professions au sein de la fonction publique;
  4. la nécessité d'établir des conditions d'emploi justes et raisonnables, compte tenu des qualités requises, du travail accompli, de la responsabilité assumée et de la nature des services rendus;
  5. tout autre facteur qui, à son avis, est pertinent.

Premières étapes

La négociation collective a d'abord été en vigueur de 1967 à 1975, les deux parties apprenant comment composer avec le nouveau système. L'arbitrage était l'option privilégiée pour la plupart des différends. Au cours de la première année d'application (1967-1968), 26 des 30 différends ont fait l'objet d'un arbitrage, bien que le nombre d'employés visés par des processus de conciliation ait été plus élevé que le nombre d'employés dont l'agent de négociation a opté pour l'arbitrage.

Pendant ces huit années, on ignore dans quelle mesure la comparabilité avec les niveaux de salaires externes a incité les arbitres à rendre des décisions arbitrales ou les négociateurs à conclure des règlements par voie de conciliation. Selon l'étude de Finkelman et Goldenberg, aucune décision du Tribunal ou de la Commission n'a mentionné la pondération relative à accorder à chacun des facteurs (que les conseils d'arbitrage devraient prendre en considération) énumérés à l'article 68 de la LRTFP.

Les périodes du contrôle de l'inflation et de l'après-contrôle

En 1975, la Loi anti-inflation a imposé des restrictions aux augmentations salariales dans l'ensemble de l'économie canadienne, y compris la fonction publique fédérale, qui se sont appliquées jusqu'en 1978. Durant cette période, l'arbitrage dans la fonction publique a clairement été appliqué dans le cadre d'un régime plus vaste de détermination des salaires au Canada, imposant en fait une forme de comparabilité dans l'établissement des niveaux de salaires[20].

Mesures postérieures au contrôle de l'inflation – le Programme de coopération

En mai 1977, à la fin de la période des mesures de contrôle de l'inflation, le gouvernement a publié un document intitulé Programme de coopération – Un document d'étude portant sur les questions du décontrôle et de l'après-contrôle. Le contexte était dominé par l'opinion bien arrêtée selon laquelle l'inflation représentait une grave menace pour le bien-être économique et qu'on ne pouvait permettre qu'elle augmente hors de contrôle. À cet égard, le document souligne que :

Les administrations publiques ont d'importantes responsabilités à titre d'employeur. Elles doivent fixer une politique de rémunération qui soit équitable tant pour les fonctionnaires que pour les travailleurs du pays. Sans contribuer aux tensions inflationnistes, elles doivent être justes envers leurs employés, en particulier ceux qui gagent le moins[21].

Dans le chapitre 8 du document d'étude, entièrement consacré à la rémunération dans le secteur public, le gouvernement caractérisait le contexte comme suit :

Même quand les deux secteurs représentent des postes identiques et que le principe de la comparabilité a été adopté, son application laisse souvent à désirer... Aussi la politique de rémunération dans le secteur public tend-elle à être influencée à la fois par le principe de comparabilité et par d'autres éléments, dont le maintien des écarts au sein de la fonction publique, les contraintes budgétaires et les objectifs sociaux à caractère général.

Cette exigence légitime, combinée à l'absence d'un « plancher » ou d'une rémunération appropriée fixée par les règles du marché, oblige parfois les pouvoirs publics à accorder des hausses peu justifiées.

Analysant la période postérieure aux mesures de contrôle, le document réitère le principe de la parité qui existe depuis longtemps pour les employés et les contribuables, et celui de la comparabilité raisonnable avec le secteur privé et de la protection des droits des fonctionnaires en vue d'une négociation collective responsable. Par la suite, le document ouvre de nouvelles pistes en insistant sur la « rémunération globale » (la valeur combinée de l'ensemble des salaires et des avantages offerts aux employés) comme élément de base de la comparabilité avec le marché du travail externe, de la façon suivante :

Le gouvernement se propose, pour rémunérer les fonctionnaires fédéraux, d'adopter le principe de comparabilité moyenne de la rémunération globale avec un échantillon représentatif des employeurs du secteur privé. Cette méthode sera appliquée de manière que la rémunération des fonctionnaires fédéraux continue de suivre celle du secteur privé.

Cela ne veut pas dire que l'administration fédérale se prive du droit de montrer l'exemple dans certains cas. En fait, le gouvernement gardera un rôle de chef de file quand des considérations sociales le justifient, par exemple dans des domaines comme les conditions de travail, les relations de travail et les avantages non monétaires. Cela signifie, toutefois, que les dispositions découlant des initiatives prises dans ces domaines seront explicitement considérées comme faisant partie de la rémunération globale des fonctionnaires fédéraux[22].

Le document de discussion reconnaissait qu'il faudrait élaborer une méthode d'analyse afin de déterminer la rémunération globale et la comparabilité. Il émettait également l'hypothèse qu'il serait difficile d'apporter graduellement les rajustements subséquents, à la hausse ou à la baisse, afin de mettre en œuvre la comparabilité. Enfin, le document reconnaissait qu'il y aurait des inquiétudes quant à la mesure dans laquelle les négociations collectives demeureraient significatives devant la rigueur requise par une politique de rémunération globale. En réponse, le document affirmait que « celles-ci continueront de jouer un rôle clef dans la fixation des conditions d'emploi, le dosage des différents éléments de la rémunération globale et la solution des problèmes évoqués précédemment ou des autres difficultés susceptibles de se présenter ».

Efforts déployés au cours de la période de l'après contrôle pour appliquer la comparabilité de la rémunération globale

En vue d'appliquer cette directive, le gouvernement a entrepris trois tâches :

  • premièrement, élaborer les concepts et la méthodologie nécessaires pour appliquer la comparabilité de la rémunération totale du point de vue de l'employeur;
  • deuxièmement, adopter une loi obligeant les arbitres à appliquer ce principe;
  • troisièmement, faire en sorte que le Bureau de recherche sur les traitements recueille et publie les données nécessaires pour soutenir l'analyse.

Bien que les progrès en vue de la définition du concept de la rémunération globale aient été importants, les deux autres tâches, en partie du moins, n'ont pas abouti rendant la nouvelle approche essentiellement impraticable.

Cinq concepts fondamentaux sous-tendaient la notion de la comparabilité de la rémunération totale :

  1. Le gouvernement fédéral, à titre d'employeur, ne donnerait pas le ton, c'est-à-dire qu'il ne prendrait pas les devants sur le secteur privé pour ce qui est de la valeur totale de l'ensemble des éléments de la rémunération pour un travail comparable.
  2. La sécurité d'emploi ferait partie de l'évaluation; des taux régionaux seraient adoptés « au besoin ».
  3. La rémunération des emplois au bas de l'échelle des salaires serait établie à un niveau supérieur à la comparabilité « en tant qu'instrument de politique sociale ».
  4. Tout rattrapage serait étalé sur une période de deux à trois ans.
  5. On veillerait « à maintenir des relativités appropriées au sein des groupes et entre ceux-ci », et à la « contribution et au rendement relatifs de chaque employé. »[23]

Du point de vue analytique, il était urgent de déterminer précisément les éléments à inclure dans les comparaisons globales. Après avoir analysé plus d'une centaine d'éléments possibles, dont des éléments intrigants tels que l'indemnité de canotage et l'indemnité de cheval, les représentants du Conseil du Trésor ont conclu que 12 éléments représentaient au moins 95 p.100 de la rémunération globale pour la fonction publique et les employeurs canadiens en général. Voici ces 12 éléments :

Conditions de travail, rémunération supplémentaire et congés

  • le temps supplémentaire (et tout autre supplément de rémunération)
  • l'indemnité de cessation d'emploi
  • les heures de travail
  • les congés annuels
  • les congés de maladie
  • les congés fériés
  • les périodes de repos.

Avantages sociaux

  • l'assurance invalidité
  • la pension de retraite
  • la prestation supplémentaire de décès (assurance-vie)
  • la part de l'employeur des primes d'assurance-maladie provinciales
  • la part de l'employeur des primes d'assurance-maladie supplémentaires.

On a exclu explicitement des éléments tels que le coût de la formation et du perfectionnement professionnel, qui étaient perçus comme un investissement de la direction en vue de l'amélioration du rendement et de la productivité; le remboursement des frais de voyages et des dépenses engagées pour remplir les fonctions de l'employé; les programmes sociaux prévus par la loi tels que l'assurance-emploi et l'indemnisation des accidents du travail; et le coût de l'administration des éléments de la rémunération.

On a porté une attention particulière au calcul de la valeur de la sécurité d'emploi, qui était perçue comme un avantage important de l'emploi dans la fonction publique. Sur la recommandation d'un consultant, une définition en deux volets a été retenue : la probabilité de la perte d'emploi et les pertes monétaires prévisibles en raison d'une mise en disponibilité. Il a alors été proposé que la valeur de la sécurité d'emploi se traduise par une prime hypothétique qui serait versée en guise de protection contre les pertes monétaires éventuelles s'il y avait cessation d'emploi. Cette prime pourrait ensuite être incluse dans le calcul de la rémunération globale.

Le gouvernement a déposé le projet de loi C-28[24] en mars 1978, lequel proposait notamment des modifications à la LRTFP afin de compléter ce travail théorique. Le projet de loi définissait largement la rémunération en ces termes :

  • La rémunération globale désigne, à l'égard de la durée du travail, le total du salaire et des équivalents monétaires des indemnités, des avantages sociaux et des autres conditions de travail reliées à la rémunération.

Le projet de loi comprenait également de nouveaux paragraphes à l'article 68 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique pour obliger les arbitres à fonder leurs décisions « sur une comparaison de la rémunération globale pour des fonctions ou un travail semblable ». Diverses comparaisons étaient aussi exigées, d'abord avec des entités privées à but lucratif, puis avec d'autres entités hors de la fonction publique ou, en dernier recours, avec la fonction publique. Les arbitres auraient été tenus de justifier leurs décisions. Le Bureau de recherche sur les traitements aurait aussi eu le mandat législatif d'appuyer le processus. Toutefois, en raison de l'opposition des syndicats, le projet de loi C-28 n'a pas procédé au-delà de la première lecture.

Les syndicats se sont fortement opposés au plan visant à utiliser le Bureau de recherche sur les traitements à titre d'organisme chargé de produire les données qualitatives nécessaires pour calculer la comparabilité de la rémunération totale. Devant la position adoptée par les syndicats, il semble que la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) et le Bureau de recherche sur les traitements (qui faisait partie de la CRTFP) n'aient pas voulu envisager la rémunération globale ou partager de nouvelles données dont l'employeur aurait eu besoin pour faire ses propres calculs.

Globalement, le Conseil du Trésor s'est retrouvé dans une situation difficile en tentant de mettre en œuvre la politique destinée à utiliser la comparabilité de la rémunération totale comme démarche fondamentale pour négocier les salaires et les avantages sociaux au cours de la période subséquente aux mesures de contrôle à la fin des années 1970 et au début des années 1980. Les représentants du Conseil du Trésor doutaient que cette démarche soit réaliste étant donné les « considérations pratiques et les réalités de la négociation collective et le processus de règlement des différends » pour modifier considérablement les règlements actuels en vue d'augmenter ou de réduire les salaires de certains groupes en raison des résultats de la comparabilité de la rémunération totale :

C'est ce qui ressort de dix années d'expérience dans le domaine de la négociation collective et du règlement des différents dans la fonction publique. Il n'y a jamais eu de règlement ou de décision arbitrale qui n'ait pas entraîné de hausse des taux de rémunération, peu importe la situation au niveau de la comparabilité. Sauf pour de très rares exceptions, la plupart des augmentations ont appliqué le « taux courant ». Les propositions de l'employeur en vue d'accorder des augmentations sous forme de paiements forfaitaires et d'éviter des augmentations de taux jugées excessives n'ont jamais été acceptées par les syndicats ou les commissions d'arbitrage.[25] (TRADUCTION)

Étant donné que le gouvernement n'a pas réussi à obtenir la collaboration des syndicats pour mettre en œuvre l'approche de la comparabilité de la rémunération totale ou à se doter des outils législatifs pour l'appliquer directement, cet état de choses a persisté dans la réalité pratique de la détermination des salaires.

Il faut noter cependant que même si la comparabilité de la rémunération totale n'a guère progressé dans les faits, les données recueillies par le Bureau de recherche sur les traitements au sujet des comparaisons de salaires de certaines professions basées sur l'appariement des postes ont joué un rôle clé pendant les négociations collectives.

Restrictions budgétaires et évolution de la comparabilité

Au cours des 10 à 15 années qui ont suivi la mise en place de la Commission de lutte contre l'inflation à la fin des années 1970, les efforts visant à limiter l'inflation se sont poursuivis et l'on a acquis la conviction qu'il fallait réduire les dépenses de l'État. En 1981, comme dans les premières années de la négociation collective, 75 unités de négociation ont choisi l'arbitrage et 47 unités la conciliation, mais les groupes qui ont opté pour la conciliation représentaient un plus grand nombre de fonctionnaires.

La Loi sur les restrictions salariales du secteur public adoptée en 1982 limitait les hausses dans la fonction publique fédérale à 6 et 5 %, respectivement, pour les deux années suivantes.

Entre 1991 à 1996, la Loi sur l'indemnisation des agents de l'État et les lois d'exécution du budget adoptées successivement ont imposé un gel des salaires pendant cinq ans avec une augmentation de 3 % pour la dernière année. Ces interventions législatives ne visaient pas principalement à assurer la comparabilité avec la rémunération dans le secteur public, mais des objectifs macroéconomiques plus vastes.

Durant toute cette période, le Conseil du Trésor a continué d'approfondir sa compréhension de la comparabilité de la rémunération totale et à améliorer ses techniques d'analyse pour appliquer le concept. En septembre 1992, Wyatt Consultants a fait rapport au Secrétariat du Conseil du Trésor sur la façon de poursuivre l'élaboration de la méthodologie de comparaison de la rémunération globale. Parmi les recommandations, mentionnons l'évaluation actuarielle de tous les éléments de la rémunération, la comparaison de la rémunération d'un employé au cours de sa carrière professionnelle, l'amélioration du modèle permettant de calculer la valeur de la sécurité d'emploi (en faisant une distinction, par exemple, entre la mesure universelle et « différentielle » de l'aversion pour le risque), l'amélioration de la représentativité des groupes comparateurs du secteur privé et l'application de l'analyse aux taux de rémunération régionaux[26].

Tentative d'application de la comparabilité de la rémunération totale dans la pratique

Pendant les années 1980 et au début des années 1990, le Secrétariat du Conseil du Trésor a insisté sur l'application des concepts de la comparabilité de la rémunération totale pour la détermination des salaires qu'il contrôlait. Ainsi, on a mis en place, sur plusieurs années, un système complexe de comparaison des professions militaires à des groupes analogues dans la fonction publique. Dans la pratique, les résultats de cette analyse n'ont pas été appliqués de manière cohérente au fil des ans pour établir le niveau des hausses de salaires, engendrant un climat de frustration et de malentendu entre le Secrétariat du Conseil du Trésor et les Forces canadiennes quant à l'utilité réelle de faire des comparaisons de la rémunération globale.

Les cadres de direction et les membres en uniforme de la Gendarmerie royale du Canada représentent deux cas d'application généralement efficace de la méthode de comparaison de la rémunération globale. Après un faux départ dans les années 1980, la comparaison de la rémunération globale avec huit autres services de police importants au Canada a débuté en 1993 et joué un rôle indispensable dans la détermination des hausses salariales des membres réguliers de la GRC. À l'heure actuelle, Hay Associates fournit des comparaisons de la rémunération globale pour les postes de cadres de direction, de sous-ministres et les autres personnes nommées par le gouverneur en conseil. Cette recherche a servi de fondement analytique aux recommandations sur la rémunération de ces groupes du Comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction, présidé successivement par Lawrence Strong et Carol Stephenson.

Non application de la comparabilité de la rémunération totale dans le contexte de la négociation collective

Toutefois, l'incidence de la politique de comparabilité de la rémunération totale sur les résultats réels de la négociation collective ou des commissions d'arbitrage a été, dans le meilleur des cas, contextuelle. Un document de discussion sur la comparabilité de la rémunération paru en 1987 faisait observer ce qui suit :

Bien que la politique ait visé à ce que la disparité monétaire... entre la fonction publique et les éléments externes serve de fondement et de justification pour élargir les mandats de négociation collective, ce n'est pas ce qui s'est produit dans les faits. À l'exception de la comparabilité des salaires, les valeurs de la rémunération globale sont indiquées à l'interne, mais rarement sinon jamais utilisées pour élargir les mandats à la table de négociation ou dans les procédures impliquant des tiers.

Un grand nombre d'éléments de la rémunération globale ne font pas l'objet d'une négociation collective puisqu'ils sont déterminés par voie de législation, au Conseil national mixte ou par d'autres moyens ou forums.

Il y a certains problèmes inhérents à la « méthode d'évaluation » choisie pour appliquer la politique de rémunération énoncée. Les principaux désavantages mentionnés sont sa complexité au niveau conceptuel et méthodologique et la possibilité d'attribuer des valeurs artificielles à des éléments de la rémunération. Une méthodologie aussi complexe, le nombre d'hypothèses énoncées et les valeurs artificielles ne favorisent pas la dimension concrète de la négociation collective[27]. (TRADUCTION)

La dissonance cognitive apparente entre les améliorations toujours plus subtiles de la méthodologie et la reconnaissance de son utilité limitée pour déterminer la rémunération en pratique nous incitent à demander pourquoi les travaux sur la comparabilité de la rémunération totale se sont poursuivis. Essentiellement, il semble que la politique exprimait les intentions du gouvernement à l'égard de sa politique; par conséquent, les fonctionnaires ont poursuivi leurs efforts d'élaboration et d'application. Mais ces intentions n'ont pas été appuyées par des modifications aux mécanismes officiels servant à établir les niveaux de rémunération ou la volonté de concrétiser l'idée mise de l'avant. Par exemple, l'étude de 1992 de Wyatt Consultants était doublement ironique puisqu'elle présentait non seulement des idées que personne ne savait comment appliquer, mais la fonction publique en était alors à la deuxième année de ce qui allait devenir six années de contrôle des salaires dont cinq de gel salarial.

Parité salariale et relativité interne

Un deuxième exemple de la discordance de la politique de la fin des années 1970 aux années 1990 est le concept de la parité salariale. La Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP) adoptée en 1978exigeait que les employeurs relevant de la compétence fédérale en matière de travail (y compris la fonction publique) assurent « à travail de valeur égale, salaire égal ». Cela a engendré un clivage au niveau des politiques entre, d'un côté, l'engagement général du gouvernement à l'égard de la rémunération fondée sur la comparabilité avec un échantillon représentatif d'employeurs du secteur privé et, de l'autre, la priorité au principe « du salaire égal pour un travail de valeur égale » en faveur de la relativité interne entre les postes.

Dans une large mesure, la réflexion politique sur la comparabilité et la parité salariale semble avoir suivi une évolution différente. Les divers documents sur la comparabilité ont consacré relativement très peu d'attention aux exigences de la LCDP. Ainsi, les Notes sur la rémunération de la Direction des relations de travail du Conseil du Trésor, publiées en mars 1984, consacraient au plus deux pages sur 55 à cette question. La dichotomie entre les deux points de vue a été reconnue comme suit :

La détermination de la rémunération dans la Fonction publique en fonction du marché peut être influencée par... la Loi sur les droits de la personne, qui reconnaît la parité salariale pour des fonctions jugées équivalentes, quelles que soient les conditions du marché[28].

Un document plus fouillé publié par le Secrétariat du Conseil du Trésor en 1992 et intitulé Compensation Determination for Represented Employees: Future Directions, présentait des observations similaires :

En général,... les relativités internes constituent le principal élément à considérer pour établir la rémunération en vertu de la LCDP. Cette approche contraste nettement avec la LRTFP, selon laquelle le concept de relativité interne est l'un parmi plusieurs facteurs à considérer pour déterminer la rémunération. »[29] (TRADUCTION)

Alors que, dans les faits, le gouvernement a réglé les plaintes en matière de parité salariale hors de la négociation collective, dans certain cas les deux concepts se sont trouvés réunis. En 1998, un ajustement spécial de rémunération (ASR) a été inclus dans les conventions collectives de divers groupes composés majoritairement de femmes ayant participé à la plainte sur la parité salariale déposée par l'Alliance de la fonction publique du Canada. Bien que le Secrétariat du Conseil du Trésor ait évité de lier les versements d'ASR à la parité salariale, ceux-ci étaient en fait inclus dans le règlement qui a suivi. En général, les deux concepts de la comparabilité externe et « d'un salaire égal pour un travail de valeur égale » à l'interne ont coexisté plutôt que d'être harmonisés.

Capacité réduite

Au début et au milieu des années 1990, la politique appliquée dans le cadre de l'Examen des programmes visait à réduire la taille de la fonction publique et à limiter les salaires et les avantages sociaux dans le cadre de l'engagement du gouvernement d'éliminer le déficit fédéral et de reprendre le contrôle des finances du pays. Le Secrétariat du Conseil du Trésor a réduit considérablement sa capacité dans le secteur de la détermination des salaires et de la négociation collective.

Le gouvernement a décidé d'abolir le Bureau de recherche sur les traitements (BRT) dans le cadre d'un programme plus vaste d'abolition d'organismes intégré au Budget de 1992. Pendant ses 35 années d'existence, le Bureau a acquis une expertise considérable et une grande crédibilité dans de nombreux milieux. Cependant, il semblerait que la direction estimait que les échantillons du BRT n'étaient pas assez représentatifs des employeurs canadiens parce qu'ils provenaient uniquement de grands établissements syndiqués.

Tout comme la création du BRT en 1957 a été un pas en avant pour renforcer la base empirique servant à déterminer la comparabilité, son abolition a mis un terme à la possibilité de recueillir des données détaillées à partir desquelles évaluer la comparabilité. Il se peut que le BRT ait perdu sa raison d'être, du moins à court terme, du fait que le gouvernement s'apprêtait à l'époque à imposer un gel des salaires.

Comparabilité à la reprise de la négociation collective

Lorsque la négociation collective a repris en 1997[30], les syndicats et le Conseil du Trésor ont commencé ce qui s'est avéré être la négociation salariale en fonction des tendances. Cette démarche reflétait sans nul doute la capacité réduite de négociation des deux parties après des années sans négociation collective. Par la suite, les règlements ont été de plus en plus différents entre les groupes, mais la comparabilité externe n'était que l'un des facteurs servant à façonner les ententes.

Indemnités provisoires

Le principal exemple de l'influence de la comparabilité sur les salaires a été l'adoption, en 1997, des indemnités de recrutement et de maintien en poste (généralement appelées indemnités provisoires) pour le groupe des Systèmes d'ordinateurs (CS). Au cours des années suivantes, ces indemnités ont été appliquées à une douzaine d'autres groupes au moins. La décision d'établir ces indemnités était fondée sur des données concernant la rémunération versée par des employeurs concurrentiels dans des circonstances où il était évident que le gouvernement fédéral avait de la difficulté à recruter ou à maintenir en poste un personnel suffisant dans certaines professions en forte demande.

Deux considérations ont dicté le recours à l'indemnité provisoire à des fins de comparabilité. Premièrement, on a voulu réduire le risque de pressions accrues en faveur de la parité salariale en respectant les exceptions au « travail de valeur égale, salaire égal » prévues par l'Ordonnance de 1986 sur la parité salariale, notamment l'article 16 (h) : « la pénurie de main-d'œuvre dans une catégorie d'emploi particulière au sein de l'établissement de l'employeur ». Deuxièmement, on a voulu éviter que les hausses de salaires ne deviennent permanentes puisque les pressions du marché du travail à l'origine des problèmes de recrutement et de maintien en poste pouvaient être temporaires.

Études conjointes

Autres manifestations de la comparabilité externe, les diverses études conjointes menées à la demande du Conseil du Trésor, de l'agent négociateur intéressé et, souvent, du principal ministère employeur pour connaître la rémunération versée par les autres employeurs canadiens à certains groupes tels que les Services correctionnels (CX), le Service extérieur (FS), la Navigation aérienne (AO) et les Services de l'exploitation (SV). Du point de vue de l'employeur, ces études manquaient généralement d'objectivité et d'équilibre et, par conséquent, elles n'ont pas été habituellement acceptées comme élément de base des négociations.

Capacité de recherche

Dans une perspective plus vaste, l'employeur et les syndicats ont commencé conjointement, en 2002, à reconstituer la capacité fournie par le Bureau de recherche sur les traitements de 1957 à 1992. Statistique Canada a entrepris le travail d'élaboration et des études pilotes pour certains postes, sous la direction du Comité consultatif mixte sur la rémunération du Conseil national mixte. La Loi sur la modernisation de la fonction publique, adoptée par le Parlement en novembre 2003, prévoyait la mise en place d'une capacité permanente de recherche sur les traitements intégrée à la nouvelle Commission des relations de travail dans la fonction publique.

La parité salariale

En 1999, la plainte de longue date en matière de parité salariale déposée par l'Alliance de la fonction publique du Canada à l'égard des différents groupes de commis, de secrétaires et d'enseignants composés majoritairement de femmes a été réglée. Bien que l'entente ait servi à régler un différend important au sujet de l'application de la Loi canadienne sur les droits de la personne, elle a sans aucun doute éloigné encore davantage le régime fédéral de rémunération de la comparabilité globale avec le marché du travail canadien.

Taux de rémunération régionaux

Une autre tendance s'éloignant de la comparabilité a été l'élimination progressive des taux de rémunération régionaux dans la fonction publique fédérale. Ce processus a débuté bien avant l'Examen des programmes. En 1985 et 1986, suite aux pressions exercées auprès des députés à l'initiative de l'Alliance de la fonction publique du Canada, on a réduit le nombre de zones de paye pour les groupes de classification des Services divers (GS) et des Manœuvres (GL). Dans les conventions collectives de 1997 et 2001, on a réduit le nombre de zones pour les employés des groupes GS et GL de dix à sept puis à trois. À l'heure actuelle, les zones sont tellement vastes qu'il n'y a aucun lien significatif avec les marchés du travail locaux.

Système de classification universel

Par ailleurs, en 2002, le Conseil du Trésor a décidé de ne pas aller plus loin avec le système de classification universel en vue de réformer les normes de classification pour le noyau de la fonction publique. Une des principales raisons de cette décision était qu'on voulait éviter de créer un cadre trop rigide pour l'évaluation des postes dans la fonction publique, qui aurait rendu presque impossible l'adaptation à l'évolution du niveau de la rémunération externe touchant seulement certaines professions.

Cadre de la rémunération

Le Conseil du Trésor n'a pas adopté officiellement de politique de rémunération après la reprise des négociations collectives en 1997. À deux occasions, au milieu de 1999 et au milieu de 2003, des projets de politique ont été examinés activement à l'interne. Mais des changements au niveau du personnel clé et l'évolution du climat des relations de travail ont jusqu'à présent empêché la mise en place d'une politique. Dans les deux cas, les ébauches étaient manifestement semblables aux politiques énoncées antérieurement, soulignant ainsi la nécessité de concilier la comparabilité externe et la parité interne.

L'ébauche du cadre stratégique de 2003 fait ressortir quatre « grands principes ». La rémunération dans la fonction publique devrait :

  • être comparable à celle offerte pour un travail similaire sur les marchés du travail pertinents;
  • traduire la relativité interne attribuée par l'employeur au travail accompli;
  • récompenser le rendement, dans la mesure où cela est approprié et pratique, selon les contributions individuelles ou de groupe aux résultats opérationnels obtenus;
  • être abordable dans le contexte des engagements pris par le gouvernement de fournir des services à tous les Canadiens, en tenant compte de la situation financière du gouvernement et de l'état de l'économie canadienne.

L'ébauche souligne également que le gouvernement fédéral est responsable de la politique publique en général, en plus d'être le plus important employeur au Canada. Par conséquent, les objectifs de la rémunération seront fonction des considérations de politique publique, notamment les objectifs de la politique économique tels que le contrôle de l'inflation, les lois pertinentes comme la Loi canadienne sur les droits de la personne, les objectifs de la politique sociale tels que la prolongation du congé parental en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi, ainsi que les attentes et les pressions du public.

L'appendice B[31] renferme l'ébauche de la politique de 2003 telle qu'elle a été diffusée aux fins de commentaires.

Le conseil de direction de l'Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) a adopté une telle politique au début de 2001. La politique renferme les points suivants :

En versant à nos employés un taux de rémunération juste et raisonnable, nous nous assurons que l'ADRC sera perçue comme un employeur attirant... Afin d'assurer un meilleur milieu de travail et de maintenir des normes élevées de service, l'ARDC doit s'adapter aux réalités du marché du travail.

Le Conseil de gestion et l'équipe de gestion de l'ADRC sont déterminés à adopter une politique sur la rémunération qui reconnaît les réalités de forces du marché du travail concurrentielles et y donne suite. Si des études montrent qu'il existe un écart appréciable entre la rémunération versée par l'ADRC et celle offerte par un marché du travail concurrentiel, et qu'il peut être démontré que cet écart nuit à notre capacité d'attirer et de retenir des employés, l'ADRC s'engage à combler cet écart.

En général, pendant la période qui a suivi l'Examen des programmes, la rémunération dans la fonction publique fédérale a continué d'être déterminée par différentes forces. Même si la comparabilité était certes un élément important, on ne pourrait pas dire qu'elle a été le facteur déterminant pour établir les salaires et les avantages sociaux.

La période postérieure à l'Examen des programmes concorde de façon générale avec ce qui s'est produit depuis l'adoption du principe du mérite à la fonction publique en 1918. La comparabilité avec le marché du travail externe a toujours été en évidence dans les déclarations du gouvernement au pouvoir sur sa philosophie en matière de rémunération des fonctionnaires. Mais, au fil des ans, d'autres facteurs ont eu tendance à prendre le pas sur la comparabilité en tant que facteur déterminant des salaires et des avantages sociaux. Leur importance a varié avec le temps, allant des pressions exercées pour faire respecter les relativités internes aux considérations pragmatiques comme le fait de trouver un « accord pouvant être accepté » à l'exigence statutaire d'assurer « un salaire égal pour un travail de valeur égale », à la volonté de donner l'exemple à titre d'employeur avisé et à la nécessité de contrôler l'inflation ou de réduire les dépenses gouvernementales.

 




3. Le cadre juridique et institutionnel de la détermination des salaires

Le cadre législatif des négociations collectives dans la fonction publique fédérale est énoncé dans la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP), dont la première version a été promulguée en 1967[32]. La Loi établit le droit de la plupart des fonctionnaires fédéraux de constituer des unités de négociation et de choisir des agents négociateurs ayant pour mandat de négocier en leur nom leurs conditions d'emploi avec l'employeur, soit le Conseil du Trésor soit un employeur distinct désigné dans une loi[33].

La LRTFP prévoit deux méthodes pour résoudre les différends (touchant des intérêts) qui concernent les modalités d'une convention collective. La première est la conciliation, assortie du droit de grève des employés lorsque différentes conditions procédurales sont réunies. La seconde est l'arbitrage, les différends étant réglés par un comité d'arbitrage.

Dans les domaines combinés du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts, environ 210 000 employés (88 % du total) sont représentés par 20 agents négociateurs accrédités. L'Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC) est le syndicat le plus important, représentant environ 68 % des employés syndiqués, comparativement à 20 % pour l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC). Les autres syndicats représentent un nombre variable d'employés – plus de 9 000 dans le cas de l'Association des employés professionnels, mais seulement une douzaine dans le cas de l'Association canadienne du contrôle du trafic aérien.

Figure 1002
Schéma des processus de négociation collective aux termes de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

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Schéma des processus de négociation collective aux termes de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

L'application de la LRTFP est assurée par la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP). Ce tribunal quasi‑judiciaire a notamment pour rôle :

  • d'accréditer les agents négociateurs,
  • d'appuyer la négociation collective par des services de médiation et autres,
  • de statuer sur des plaintes de négociation déloyale,
  • de statuer sur des griefs non réglés par les parties.

La figure 1002 illustre le processus de la négociation collective.

Les négociations s'ouvrent sur un échange de propositions entre les parties; des discussions sont ensuite menées en personne pour convenir de modalités en vue de parvenir à une entente. L'une ou l'autre partie peut demander à la CRTFP de fournir un conciliateur, un médiateur ou un enquêteur. Si l'impasse persiste, la Commission pourra mettre sur pied une commission d'intérêt public ou un conseil d'arbitrage, selon le mode de règlement choisi par l'agent négociateur au début du processus. Les parties peuvent à tout moment opter pour des négociations directes, avec ou sans l'aide d'un médiateur, sauf lorsqu'elles ont commencé à soumettre leurs arguments à un conseil d'arbitrage.

Les Commissions d'intérêt public sont des organes non permanents constitués d'une ou de trois personnes nommées par le ministre responsable et dont le rôle est d'aider les parties à résoudre les différends et de faire des recommandations en vue d'un règlement. Le président de la CRTFP recommande la nomination d'une Commission d'intérêt public soit à la demande des parties soit de sa propre initiative. Il est à noter que les membres d'une Commission sont choisis à partir d'une liste de personnes convenue par les parties. La Commission présente ses recommandations en vue d'un règlement au président de la CRTFP dans les 30 jours de sa nomination; le président de la CRTFP rend ensuite le rapport public. S'il n'y a toujours pas de règlement, les employés acquièrent le droit de grève sept jours après le dépôt du rapport de la Commission auprès de la CRTFP, bien que la Loi exige qu'un vote de grève par scrutin secret ait lieu avant qu'une grève puisse être déclenchée. L'agent négociateur peut autoriser ou déclarer une grève seulement dans la période de 60 jours qui suit ce vote, pourvu qu'il ait obtenu le soutien majoritaire des personnes ayant voté.

Le rôle du conseil d'arbitrage est également d'entendre les positions des parties et de favoriser la conclusion d'une entente. Si les parties ne s'entendent pas, il examine leurs positions respectives et rend une décision arbitrale exécutoire.

L'expérience acquise avec la négociation collective

Précisons d'abord que des négociations collectives se sont déroulées en alternance avec des périodes où la rémunération était soumise à des contrôles législatifs. Au cours des 37 années écoulées depuis l'instauration de la négociation collective en 1967 jusqu'en 2003, ce processus a été suspendu, partiellement ou entièrement, pendant au moins 11 ans, sur trois périodes distinctes. Voici les principaux épisodes d'interruption de la négociation collective :

  • De 1975 à 1978 – Loi anti‑inflation

    Cette loi s'appliquait à l'ensemble du secteur public canadien (y compris les organismes des administrations provinciales et locales) et aux employeurs privés comptant au moins 500 employés. Les hausses salariales étaient plafonnées à 10 % la première année, 8 % la deuxième et 6 % la troisième.

  • De 1983 à 1985 – Loi sur les restrictions salariales du secteur public

    Cette loi prolongeait automatiquement toutes les conventions collectives pour une période de deux ans, avec des hausses salariales annuelles de 6 % en 1983 et de 5 % en 1984, et s'appliquait à l'ensemble du secteur public fédéral.

  • De 1991 à 1996 – Différentes mesures se sont traduites par un gel des taux de salaire pendant cinq de ces six années.
  • La Loi sur la rémunération du secteur public fixait le taux d'augmentation des salaires à 0 % en 1991 et à 3 % en 1992.
  • La Loi d'exécution du budget de 1992 (projet de loi C‑113) a prolongé les conventions collectives de deux ans (1993 et 1994) sans hausse salariale.
  • La Loi d'exécution du budget de 1994 (projet de loi C‑17) a prolongé de deux autres années le gel des salaires et imposé un moratoire de deux ans sur les augmentations d'échelon à l'intérieur des échelles salariales, en plus de suspendre les primes de rendement. En outre, le processus d'arbitrage a été suspendu, éventuellement jusqu'en 2001. Les sociétés d'État n'étaient pas visées par ces mesures.

Figure 1003
Périodes de négociation collective et de contrôle des salaires, 1967 à 2003

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Périodes de négociation collective et de contrôle des salaires, 1967 à 2003

Outre ces interventions générales, le gouvernement est intervenu après la fin des gels salariaux pour imposer une entente à deux groupes particuliers. En 1999, le Parlement a adopté une loi imposant des conditions d'emploi (fondées sur les dernières offres de l'employeur[34]) au groupe Services correctionnels (CX) afin d'éviter le déclenchement d'une grève imminente dans les établissements correctionnels fédéraux. La même loi conférait au gouvernement le pouvoir d'imposer un règlement pour mettre fin à une longue période de grèves tournantes des membres du groupe Services de l'exploitation (SV), qui comprend huit groupes de classification du domaine des manœuvres et des hommes de métier. Une entente fondée sur les dernières offres présentées par le Conseil du Trésor a rendu inutile le recours à ce pouvoir.

Depuis 1997, lorsque la négociation collective a repris, le processus a fonctionné plus ou moins sans heurt. De façon générale, les augmentations économiques au cours des deux premières années ont été de 2,5 % et de 2 %. En 1999, on a conclu une entente d'une durée d'un an assortie d'une hausse de 2 % et d'un paiement forfaitaire variant entre 625 $ et 1 450 $ par employé, selon le groupe[35]. Cette entente a été conclue en prévision de la mise en œuvre de la norme générale de classification, qui a éventuellement été abandonnée par le Conseil du Trésor en 2002. Pour la période comprise entre 2000 et 2003, le principal règlement conclu avec l'Alliance de la fonction publique du Canada prévoyait des hausses économiques annuelles de 3,2 %, 2,8 % et 2,5 %.

Détermination des salaires des employeurs distincts

Tous les employeurs distincts, sauf l'Agence du revenu du Canada, doivent obtenir leur mandat de négociation auprès du Conseil du Trésor et doivent faire approuver par le gouverneur en conseil leurs conventions collectives définitives[36].

Selon la législation établissant l'Agence des douanes et du revenu du Canada, son conseil d'administration peut établir les mandats de négociation et approuver les conventions collectives. Le paragraphe 58(2) de la Loi sur l'Agence des douanes et du revenu du Canada indique qu'avant de conclure une convention collective, « l'Agence doit préalablement consulter le Conseil du Trésor relativement à son plan de ressources humaines, notamment en ce qui a trait au total des augmentations des salaires et des avantages des employés. » Le Conseil du Trésor assure également une supervision générale tout au long du processus général d'approbation du budget.

Parcs Canada doit faire approuver son mandat de négociation par le Conseil du Trésor. Mais, si la convention collective qui en résulte respecte le mandat, Parcs Canada n'a pas besoin d'obtenir l'aval du gouverneur en conseil. En pratique, il en va de même pour le Centre de la sécurité des télécommunications.

Détermination des éléments de la rémunération globale

Pour la majorité des employés du noyau de la fonction publique, la plupart des éléments de la rémunération globale sont établis par voie de négociation avec les syndicats. Pour d'autres, le Conseil du Trésor fixe la rémunération à l'aide des repères décrits ci-dessous.

Conventions collectives négociées

L'essentiel de la rémunération de la plupart des employés est négocié par les représentants du Conseil du Trésor et du syndicat concerné de la fonction publique. Les conventions collectives qui en découlent, dont la durée est habituellement de deux ou trois ans, précisent les taux de rémunération, ainsi que les indemnités et les primes auxquels les employés auront droit, par exemple pour le temps supplémentaire et l'indemnité de départ.

Groupes de « classification » professionnels

Le cadre de détermination des salaires est la structure des groupes professionnels, qui regroupe les employés effectuant un travail semblable et partageant ce que l'on appelle une « communauté d'intérêts » aux fins de la négociation collective[37]. En mars 1999, la structure établie pour le domaine du noyau de la fonction publique englobait 25 groupes représentés par 16 syndicats. À cela s'ajoutent quatre groupes non représentés.

Cette structure a permis de consolider les 72 groupes de classification créés en 1967, lorsque la négociation collective a été instaurée dans la fonction publique fédérale. Si la structure des groupes professionnels sert aux fins de la négociation collective, les groupes de classification plus anciens continuent de dominer dans l'esprit des gens pour deux grandes raisons :

  1. presque toutes les normes de classification en vigueur[38] se rapportent aux groupes plus anciens;
  2. il existe toujours des échelles salariales distinctes pour la plupart des anciens groupes.

C'est principalement pour cette dernière raison que nous analysons en détail les salaires à partir de l'ancienne structure des groupes de classification; une telle approche facilite beaucoup les comparaisons historiques. La figure 1004 illustre la structure actuelle des groupes professionnels. On trouvera à l'appendice E le nom et le symbole à deux lettres désignant chacun des groupes professionnels en place, de même que les groupes de classification correspondant aux groupes professionnels d'avant 1999 et leurs agents de négociation respectifs.

Figure 1004
Structure des groupes professionnels dans le domaine du noyau de la fonction publique, mars 2003

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Structure des groupes professionnels dans le domaine du noyau de la fonction publique, mars 2003

Programmes du Conseil national mixte

Les modalités des régimes d'assurance‑santé, d'assurance‑invalidité et de soins dentaires sont également négociées par le Conseil du Trésor, mais généralement les mêmes modalités sont négociées avec l'ensemble ou la plupart des syndicats, sous les auspices du Conseil national mixte. Mis sur pied en 1944, le Conseil national mixte (CNM) est une tribune patronale‑syndicale paritaire pour la discussion et la négociation d'une gamme de directives d'application générale dans la fonction publique. Au nombre des sujets traités, citons les Directives sur le service extérieur, la Directive sur les voyages et la Directive sur les postes isolés. Le CNM traite également les griefs portant sur l'application de ces directives, de même que les appels concernant l'accès aux régimes de soins de santé, d'invalidité ou de soins dentaires.

Trois employeurs distincts, l'Agence canadienne d'inspection des aliments, le Conseil national de recherches du Canada et le Bureau du vérificateur général, y participent également.

Avantages sociaux prévus par la Loi

Les pensions de retraite et les modalités de certains programmes tels que la Prestation supplémentaire de décès et l'Indemnisation des accidentés du travail sont déterminées par voie de législation édictée par le gouvernement fédéral ou les provinces.

Employés non syndiqués

Les conditions d'emploi des employés non syndiqués sont établies directement par le Conseil du Trésor. Dans le cas du groupe de la direction (EX) et de celui des sous‑ministres et des autres personnes nommées par décret, le gouvernement accepte généralement les recommandations du Comité consultatif sur la rémunération et le maintien en poste du personnel de direction dont le travail est décrit en détail ci-dessous.

Pour les autres groupes non représentés par un syndicat, comme la plupart des avocats, les agents de personnel et les cadres supérieurs d'autres groupes exclus en raison de leurs responsabilités de gestion, le Conseil du Trésor établit les taux de rémunération et les droits aux avantages sociaux. En général, ces dispositions reflètent les normes pertinentes régissant les employés syndiqués, en plus de prévoir l'admissibilité à une rémunération au rendement et à une assurance‑vie supplémentaire défrayée par l'employé.

Interdépendance de la détermination des traitements des plus hauts fonctionnaires fédéraux

À toute fin pratique, en 2003, la détermination des salaires de la plupart des plus hauts fonctionnaires fédéraux était interconnectée entre les divers domaines.

La figure 1005 illustre les liens entre les taux de rémunération des cadres de direction de la fonction publique, des sous‑ministres, des officiers supérieurs des Forces canadiennes et de la GRC, des chefs de la direction des sociétés d'État et des autres personnes nommées par décret, ainsi que des juges, des parlementaires, des ministres et des mandataires du Parlement. Au premier coup d'œil, le diagramme peut paraître chargé, mais il vise à communiquer une grande quantité de renseignements dans une seule figure.

Figure 1005
Aperçu de l'interdépendance des traitements des plus hauts fonctionnaires fédéraux, 2002‑2003

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Aperçu de l'interdépendance des traitements des plus hauts fonctionnaires fédéraux, 2002-2003

Au bas de la partie centrale se trouvent les échelles salariales des cinq niveaux du groupe de la direction (EX) et des quatre niveaux du groupe des sous‑ministres (DM). Le Conseil du Trésor établit la rémunération du niveau EX 1, habituellement sur recommandation du Comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction (actuellement appelé le Comité Stephenson). En 2003, outre la présidente Carol Stephenson, le Comité incluait plusieurs dirigeants de haut niveau des secteurs privé et à but non lucratif. En formulant ses recommandations sur le salaire et les avantages sociaux des cadres de direction et des sous-ministres, le Comité tient compte du rapport annuel de la société Hay Associates, qui compare la rémunération totale[39] des cadres de direction au gouvernement fédéral à celle des postes comportant des responsabilités comparables dans le secteur privé et le secteur public en général au Canada. La politique suivie est de maintenir l'équivalence avec le marché du travail au niveau EX 1, à l'exclusion de la rémunération à long terme, par exemple les options d'achat d'actions.

Une fois le taux de rémunération des EX 1 établi, les échelles salariales des autres niveaux EX et DM sont arrêtées au moyen d'un simple calcul arithmétique. En vertu de la politique, il y a un écart de 12 % entre le salaire maximum de deux niveaux adjacents, sauf entre les niveaux EX 3 et EX 4 et entre les niveaux DM 1 et DM 2. Ces deux transitions correspondent à d'importantes progressions, soit au rang de sous‑ministre adjoint et à celui d'administrateur général d'un ministère ou d'un organisme. Les taux de rémunération aux plus hauts échelons des Forces canadiennes et de la GRC sont établis strictement par rapport aux salaires des niveaux EX, comme l'indique la figure 1005. Les échelles salariales des personnes nommées par décret sont également déterminées en fonction de celles du noyau de la fonction publique, en tenant compte de l'équivalence entre les niveaux GC‑Q3 et les données de Hay Associates sur le secteur privé.

Les échelles salariales des chefs de la direction des sociétés d'État, dans le coin supérieur droit de la figure 1005, sont établies indépendamment des taux des groupes EX et DM et reposent sur une enquête de Hay Associates portant uniquement sur la rémunération dans le secteur privé. Ici encore, le Comité Stephenson formule une recommandation à partir de laquelle le gouverneur en conseil fixe les échelles salariales[40]. On procède essentiellement de la même façon pour maintenir l'équivalence de la rémunération totale au premier niveau de chef de la direction (au 25e centile des emplois de même niveau dans le secteur privé), les taux de rémunération des échelons supérieurs étant des multiples fixes de ceux des échelons inférieurs.

La paye des juges réguliers (dits « puînés ») des cours supérieures provinciales, de la Cour fédérale et de la Cour canadienne de l'impôt est établie suivant la recommandation d'une commission quadriennale indépendante. De façon générale, la Commission favorise l'alignement sur le point médian de l'échelle salariale des DM 3. Les juges de plus haut rang touchent des multiples de ce taux de base.

De là a découlé la rémunération des parlementaires en 2003. Le Premier ministre touche le même salaire que le juge en chef de la Cour suprême du Canada. Les députés reçoivent 50 % de ce montant. Les ministres et le président de la Chambre des communes reçoivent 74 % du salaire du Premier ministre. Les titulaires des autres postes de la Chambre touchent divers pourcentages du salaire du juge en chef de la Cour suprême et du Premier ministre, comme l'indique la figure. Les sénateurs et les titulaires de postes spéciaux comme le président du Sénat et le whip reçoivent le même salaire que leurs homologues de la Chambre des communes, moins 25 000 $.[41]

Enfin, les salaires des agents du Parlement entrent aussi dans cette équation. La vérificatrice générale gagne le même salaire qu'un juge puîné de la Cour suprême et les autres mandataires, comme le directeur général des élections, reçoivent le même salaire que les juges puînés de la Cour fédérale.

Abstraction faite du volet des chefs de la direction des sociétés d'État, toute cette structure repose sur deux décisions : le salaire des EX 1, tel que recommandé par le Comité Stephenson, et le salaire des juges puînés des cours supérieures provinciales et de la Cour fédérale, établi à la lumière des travaux d'une commission quadriennale, qui ont tendance eux‑mêmes à se fonder sur le salaire des DM 3.

Abstraction faite du volet des chefs de la direction des sociétés d'État, toute cette structure repose sur deux décisions : le salaire des EX 1, tel que recommandé par le Comité Stephenson, et le salaire des juges puînés des cours supérieures provinciales et de la Cour fédérale, établi à la lumière des travaux d'une commission quadriennale, qui ont tendance eux‑mêmes à se fonder sur le salaire des DM 3.

 




SECTION DEUX - COMPOSANTES DES AUGMENTATIONS DES SALAIRES MOYENS

4. Composantes des augmentations des salaires moyens

Comme nous le verrons plus en détail dans le Volume Deux, exprimés en dollars constants de 2002‑2003, les salaires moyens dans l'ensemble des domaines de la fonction publique fédérale ont augmenté depuis 1998‑1999, notamment en comparaison de la période de 1982‑1983 à 1998‑1999. Un certain nombre d'éléments sont à l'origine de ces augmentations, notamment l'évolution de la composition de l'effectif par suite de la hausse de la scolarisation des employés, la diminution du travail assuré par les commis et secrétaires et le changement technologique. Parmi les autres facteurs, il y a les hausses salariales en sus du taux d'inflation et les changements aux taux de rémunération découlant de la restructuration des fourchettes salariales ou d'autres éléments de la rémunération. Le présent chapitre explore l'ensemble des facteurs qui ont donné l'impulsion aux augmentations des salaires moyens au cours des années récentes.

Aperçu de l'emploi et de la rémunération au palier fédéral

Selon Statistique Canada, l'effectif de la fonction publique fédérale totalisait 455 754 employés en mars 2003 et l'enveloppe salariale s'élevait à approximativement 22,7 milliards de dollars. Cela représentait environ 2,9 % de l'emploi au Canada et 15,5 % de l'emploi du secteur public.

À l'exclusion des entreprises commerciales fédérales et des autres sociétés d'État, il ressort généralement du présent rapport que la rémunération ordinaire au palier fédéral totalisait approximativement 17,9 milliards de dollars pour l'exercice 2002‑2003, soit quelque 3,4 % du total des traitements et salaires au Canada. Le niveau d'emploi correspondant était d'environ 351 000 postes. Si l'on tient compte des autres coûts se rapportant aux divers éléments de la rémunération totale, y compris les pensions et les avantages comme les régimes de soins de santé et de soins dentaires et l'assurance‑vie, les dépenses fédérales au chapitre de la rémunération ont atteint quelque 25 milliards de dollars en 2002‑2003. Cela représente plus du tiers des dépenses discrétionnaires au niveau fédéral.

En 2002‑2003, le salaire moyen des employés du noyau de la fonction publique (pour lequel le Conseil du Trésor est l'employeur) était de 53 300 $. Le coût de la rémunération totale par employé s'établissait en moyenne à environ 73 400 $.

En 2002-2003, les Forces canadiennes versaient un salaire moyen d'environ 52 700 $, soit essentiellement le salaire moyen de 52 800 $ des domaines combinés du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts.

Le salaire moyen des membres réguliers et des membres du personnel civil de la GRC était passablement supérieur à celui des autres domaines signalés soit 59 900 $ en 2002‑2003.

Les salaires moyens des personnes employées dans le domaine fédéral des « Autres groupes » varient beaucoup. À titre d'exemple, les juges des cours supérieures et de la Cour fédérale gagnaient 210 000 $. Le salaire d'un parlementaire était de 135 000 $, tandis que celui d'un sénateur était de 110 000 $. Les étudiants employés par le gouvernement fédéral touchaient un revenu horaire variant entre environ 9,00 $ pour les étudiants du niveau secondaire à 20,05 $ pour les étudiants au niveau du doctorat possédant de l'expérience.

Changements dans l'emploi et la rémunération de 1982 à 2003

Dans le domaine combiné du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts, le nombre total d'emplois avait

  • atteint près de 245 000 en 1990‑1991,
  • chuté à près de 195 000 en 1998‑1999, puis
  • augmenté autour de 235 000 en 2002‑2003.

Comme nous le voyons de façon détaillée dans le Volume Deux, lorsque nous tenons compte de l'incidence des fonctions transférées hors de l'administration gouvernementale qui sont encore financées par les contribuables canadiens, nous constatons que le nombre total d'emplois réel en 2002‑2003 pour ces domaines combinés a été au moins aussi élevé qu'en 1990‑1991.

De 1982‑1983 à 1998‑1999, le salaire réel moyen (c'est‑à‑dire sans tenir compte de l'inflation) des employés du noyau combiné de la fonction publique et des employeurs distincts est resté essentiellement le même. Sur la même période, le salaire moyen a varié entre 45 400 $ et 48 100 $ en dollars constants de 2002‑2003. Toutefois, à compter de 1999‑2000, il a commencé à croître en termes réels. En 2002‑2003, il atteignait 52 800 $, soit une augmentation en dollars constants de 14,1 % en cinq ans.

Par suite des recommandations du Comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction, un nouveau régime de rémunération au rendement pour le personnel de direction est entré graduellement en vigueur entre 1998 et 2000. La valeur estimative des montants forfaitaires versés aux cadres de direction du noyau de la fonction publique est ainsi passée de 11 millions de dollars en 1997‑1998 à près de 40 millions en 2002‑2003.

En termes réels, leur salaire moyen a augmenté de 13 % entre 1997‑1998 et 2002‑2003. En tenant compte des hausses des primes de rendement versées sur la période, la paye des cadres de direction a augmenté en moyenne de près de 18 % après inflation.

Le salaire moyen en dollars constants de 2003 des membres des Forces canadiennes est passé de 47 500 $ en 1997‑1998 à 52 700 $ en 2002‑2003, une augmentation de 10,9 %.

Entre 1997-1998 et 2002-2003, la hausse en dollars constants enregistrée par les membres réguliers et les employés civils de la GRC a été de 5,6 %.

Au cours de la même période (de 1997 à 2003), le salaire des juges nommés par le fédéral a crû en moyenne de 21 % en dollars constants de 2002‑2003. Celui des parlementaires a augmenté d'environ 19,6 %.

Dans bien des cas, les niveaux de salaire en 2003 reflétaient l'influence sur un certain nombre d'années de facteurs autres que les hausses économiques, qui ont tendance à capter toute l'attention. Les plus importants parmi ces facteurs ont été les changements négociés aux structures salariales, appelés hausses de restructuration, ainsi que les changements survenus dans la composition de la fonction publique et les règlements au titre de la parité salariale. Des pressions supplémentaires sur les niveaux de salaire sont apparues au moment de la création de nouveaux employeurs distincts, ce qui a incité à faire des comparaisons avec le noyau de la fonction publique.

Résumé de l'accroissement des salaires moyens

Tableau 1006

Progression du salaire moyen en dollars courants et en dollars constants de 2002-2003 dans le domaine du noyau de la fonction publique et celui des employeurs distincts, 1990-1991 à 2002-2003

Année Population
totale
Masse salariale
(M $)
Salaires moyens
pour l'ensemble de la population
      ($ courants)

($ constants)

1990-1991

242 398

9 082

37 465

47 581

1991-1992

244 099

9 297

38 086

46 344

1992-1993

245 116

9 742

39 745

47 589

1993-1994

240 867

9 764

40 537

47 835

1994-1995

233 695

9 566

40 934

48 106

1995-1996

218 297

8 972

41 099

47 289

1996-1997

206 221

8 471

41 079

46 458

1997-1998

197 642

8 200

41 489

46 295

1998-1999

194 776

8 368

42 963

47 495

1999-2000

202 282

9 197

45 467

49 183

2000-2001

213 185

10 037

47 079

49 561

2001-2002

225 469

11 110

49 274

50 743

2002-2003

234 393

12 384

52 836

52 836

Le salaire moyen constitue la mesure la plus générale de l'évolution de la rémunération individuelle. Le tableau 1006 et la figure 1008 illustrent l'évolution du salaire moyen dans les domaines du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts de 1990-1991 à 2002-2003.

Il ressort de ces données que la progression du salaire moyen a connu un changement profond après 1997‑1998. De 1990‑1991 à 1997‑1998, la valeur du salaire moyen (en dollars constants de 2002‑2003) a oscillé à l'intérieur d'une fourchette relativement étroite, soit de 46 300 $ à 48 100 $. On pourrait penser que cette stabilité était une anomalie provoquée par les gels salariaux imposés durant cette période. Toutefois, nous avons pu calculer les salaires moyens selon la même approche pour la période allant de 1982‑1983 à 1989‑1990 afin de vérifier la validité de ce point de vue. La négociation collective était en vigueur pendant tous ces exercices, sauf deux. Sur la période, le salaire moyen (en dollars constants de 2002-2003) dans le noyau de la fonction publique s'est maintenu entre 45 400 $ et 47 200 $, comme l'indique le tableau 1007.

Tableau 1007

Évolution du salaire moyen dans le noyau de la fonction publique, 1982-1983 à 1988-1989

Année

Salaire moyen
($ courant)

Salaire moyen
($ constant de 2002-2003)

1982-1983

25 113

45 431

1983-1984

27 238

46 823

1984-1985

28 469

47 078

1985-1986

28 827

45 794

1986-1987

30 925

47 180

1987-1988

31 876

46 597

1988-1989

32 355

45 417

Cela signifie que, durant les 15 exercices antérieurs à 1997‑1998, marqués par des périodes de négociation collective et de contrôle ou de gel salarial, le salaire moyen dans la fonction publique fédérale est demeuré à peu près inchangé en termes réels.

Au cours des cinq exercices suivants, on a observé une croissance marquée, le salaire moyen atteignant 52 800 $ en 2002‑2003. Le changement survenu de 1997‑1998 à 2002‑2003 dans le noyau de la fonction publique et le domaine des employeurs distincts a été de 27,3 % en dollars courants et de 14,1 % en dollars constants de 2002‑2003.

Figure 1008
Graphique de l'évolution du salaire moyen dans les domaines combinés du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts, 1990-1991 à 2002-2003

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Évolution du salaire moyen dans les domaines combinés du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts, 1990-1991 à 2002-2003

De 1997‑1998 à 2002‑2003, l'indexation à l'inflation a constitué le facteur le plus important de l'évolution des niveaux de salaires courants. Au cours de ces cinq exercices, le coût de la vie a augmenté d'environ 11,6 %. Les hausses salariales correspondant à l'inflation servent à maintenir le pouvoir d'achat pour un niveau de revenu donné. Mais, contrairement à ce qui s'était passé dans la fonction publique fédérale durant au moins les 15 exercices précédents, on a observé une hausse soutenue des salaires moyens réels. Notre analyse tentera donc de décrire les facteurs à l'origine de cette hausse en termes réels. La figure 1009 schématise l'importance relative des principaux facteurs de changement.

Figure 1009
Facteurs de changement du salaire moyen en dollars constants dans le noyau de la fonction publique et les employeurs distincts1, 1997-1998 à 2002-2003

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Facteurs de changement du salaire moyen en dollars constants

*   Points de pourcentage

1 Approximation fondée sur les données disponibles.

2 Rajustement tenant compte du fait qu'un certain nombre d'augmentations négociées instaurées en 2002 n'ont pas entièrement été incluses dans la croissance du salaire moyen pour 2002‑2003 parce qu'elles sont survenues vers la fin de l'exercice.

3,4 Pour tenir compte du fait que l'incidence globale des taux de croissance des composantes (autres que l'a parité salariale) se multiplie (au lieu de s'additionner).

L'incidence salariale permanente de la parité salariale de 190 M$, par habitant (divisée par l'emploi en 2002‑2003), représente une croissance de 2,0 % du salaire moyen de 1997‑1998. Comme l'incidence permanente inclut déjà l'incidence des augmentations salariales négociées, cette composante s'additionne (au lieu de se multiplier).

Incidence du changement de profil (ou effet de la composition) dans l'ancien noyau de la fonction publique (LRTFP partie I, annexe I plus ADRC, ACIA et Agence Parcs Canada) de mars 1998 à mars 2003.

Les restructurations ne comprennent pas les ajustements spéciaux de rémunération (ASR).

8 Dans le volume 2, il est fait mention d'une augmentation réelle nette de 1,1 % attribuable à la progression dans l'échelle salariale. Ce montant est intégré principalement dans le 5,3 % associé au « changement de la composition de l'effectif », bien qu'il puisse y avoir eu un léger chevauchement avec le 4,1 % lié à l'augmentation de restructuration.

9,10 Tient compte de l'augmentation moyenne négociée par employé faisant partie du noyau de la fonction publique (LRTFP partie I, annexe I) seulement. Toutes les augmentations en 1997 sont comprises parce qu'elles n'ont été saisies par le système des titulaires qu'après mars 1998.

Tableau 1010

Hausses économiques et hausses de l'Indice des prix à la consommation, 1997 à 2002*,**

 

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Croissance
1997-2002

Moyenne des hausses économiques

2,3 %

2,0 %

2,0 %

3,0 %

2,7 %

2,6 %

15,7 %

Changement de l'Indice des prix à la consommation (IPC) en pourcentage

1,6 %

1,0 %

1,7 %

2,7 %

2,6 %

2,2 %

12,4 %

Moyenne des hausses derestructuration

0,4 %

0,4 %

1,5 %

0,6 %

0,9 %

0,2 %

4,1 %

Total des hausses salariales négociées

2,7 %

2,4 %

3,6 %

3,6 %

3,7 %

2,8 %

19,8 %

Excédent des hausses salariales sur l'IPC
(points de pourcentage)

1,1 %

1,4 %

1,9 %

0,9 %

1,1 %

0,6 %

     8,0 %

Notes :  Les hausses signalées par suite des négociations collectives rendent compte de la hausse moyenne négociée par employé faisant partie du noyau de la fonction publique. Les hausses relatives à la parité salariale, les ajustements spéciaux de rémunération (ASR) et les indemnités provisoires sont exclus. La croissance est calculée selon la hausse cumulative en pourcentage au cours des six années, sauf pour l'« Excédent des hausses salariales sur l'IPC », qui montre l'écart en points de pourcentage entre les deux taux de croissance cumulatifs.

Les années identifiées indiquent l'année civile au cours de laquelle les hausses ont pris effet et non celles où elles ont été convenues ou ratifiées.

** À noter que l'augmentation cumulative de l'IPC (inflation) présentée dans ce tableau est de 12,4 %, tandis que le changement indiqué à la figure 1009 est de 11,6 %. La différence s'explique par le fait que le tableau 1010 est basé sur l'année civile, tandis que la figure 1009 est basée sur l'exercice financier. Nous avons jugé que le rajustement du tableau et de la figure pour qu'ils représentent la même période était une tâche trop complexe compte tenu de la façon dont les résultats de la négociation collective sont enregistrés.

Le sommaire de l'analyse présenté à la figure 1009 ne prétend pas à l'exactitude. Quoi qu'il en soit, la taille relative approximative des composantes du changement du salaire moyen ressort clairement de l'analyse. Les rajustements indiqués dans la figure pour l'effet cumulatif des augmentations et le moment auquel ils sont survenus doivent nécessairement être présentés pour que soit pris en compte le fait que les divers facteurs du changement interagissent dans le temps.

Le principal facteur influant sur le changement des salaires réels (après avoir exclu l'effet de l'inflation), auquel on peut imputer plus de la moitié de la hausse, est l'effet cumulatif des résultats des négociations collectives. Le tableau 1010 illustre ce qui est survenu entre 1997‑1998 et 2002‑2003 dans le noyau de la fonction publique. Les données sont présentées pour l'année visée par les augmentations, non celles où elles ont été négociées ou ratifiées. Elles diffèrent légèrement de celles présentées à la figure 1009, qui porte sur les domaines combinés du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts, tandis que le tableau 1010 rend compte uniquement du noyau de la fonction publique.

Figure 1011
Écart entre les augmentations de l'indice des prix à la consommation, les hausses « économiques » des salaires et les hausses attribuables à la restructuration, 1997 à 2002

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Écart entre les augmentations de l'indice des prix à la consommation

Tant dans le tableau 1009 que dans la figure 1010, nous avons ventilé les augmentations réelles découlant de la négociation collective en deux volets :

  • la mesure dans laquelle les « hausses économiques » ont été plus importantes que l'inflation réelle;
  • l'effet des hausses attribuables à la restructuration, décrites ci-dessous.

Si l'on examine uniquement le premier volet, nous pouvons déduire du tableau 1010 que l'écart cumulatif entre les hausses économiques et l'inflation a été d'environ 3,3 % pour le noyau de la fonction publique. Pour les domaines combinés du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts, la figure 1009 situe cet élément à 3,7 %. L'écart entre l'inflation et les hausses « économiques » moyennes, ainsi que le total des augmentations incluant les hausses attribuables à la restructuration, sont présentés à la figure 1011.

Effet des hausses attribuables à la restructuration

Nous tournons maintenant notre attention au second volet des résultats de la négociation collective qui ont entraîné des augmentations réelles des salaires moyens au cours de la période étudiée. L'expression « hausses attribuables à la restructuration » englobe les changements que les parties jugent nécessaires pour :

  • évoluer en parallèle avec le marché du travail hors du secteur public
  • rajuster les relativités internes
  • atténuer les préoccupations touchant la parité salariale
  • simplement conclure une convention collective qui pourra être ratifiée par les employés.

Comme le montre la figure 1011, la valeur moyenne des hausses de restructuration, pondérées par la taille des groupes visés, a été importante en 1999 (1,6 %) et en 2001 (1,0 %). Leur effet cumulatif sur les salaires moyens de 1997‑1998 à 2002‑2003 a été de 4,1 % environ.

L'appendice F fournit des données détaillées sur les hausses de restructuration et sur d'autres avantages pécuniaires qui ne font pas partie des hausses économiques.

Ajout ou suppression d'échelons

L'ajout ou la suppression d'échelons à l'intérieur d'une échelle de rémunération constitue l'exemple le plus typique et le plus fréquent de restructuration. L'échelle de rémunération d'un groupe de classification comporte habituellement plusieurs échelons, les employés passant d'un échelon à l'autre annuellement jusqu'à ce qu'ils atteignent l'échelon maximum ou soient promus à un niveau supérieur. Normalement, chaque échelon représente de 3,5 % à 4 % de la rémunération.

L'ajout d'un échelon entraîne une hausse immédiate des salaires uniquement pour ceux qui ont déjà atteint l'échelon maximum. Étant donné que, dans la plupart des cas, un nombre limité d'employés d'un groupe donné ont atteint cet échelon maximum, le coût par employé peut être modeste au départ. Toutefois, avec le temps, chaque employé atteignant cet échelon profitera de la rémunération majorée.

La suppression d'un échelon au bas d'une échelle entraîne généralement peu de coûts au départ mais, par la suite, le salaire minimum des nouveaux employés sera plus élevé. Un autre effet, pas toujours facile à constater, de la suppression ou de l'ajout d'un échelon est la distorsion de l'alignement entre les normes de classification ou les valeurs relatives du travail et la rémunération.

Au cours de la période qui a suivi la reprise de la négociation collective, en 1997, la plupart des conventions comportaient une forme ou une autre de restructuration des échelles de rémunération. Le plus souvent, il y a ajout d'un échelon au haut de l'échelle pour une partie ou l'ensemble des niveaux d'un groupe. Les échelons inférieurs ont été supprimés dans plus d'une dizaine de groupes. Dans quelques cas, on a ajouté des échelons intermédiaires. Dans au moins trois cas, tous les membres d'un groupe ont grimpé d'un ou deux échelons à l'intérieur de leur niveau, sauf s'ils se trouvaient déjà à l'échelon maximum, avant l'application des hausses économiques. Ce sont :

  • le groupe Systèmes d'ordinateurs (CS), en 1997 et en 2000;
  • le groupe Services correctionnels (CX), en 2000;
  • le groupe Radiotélégraphie (RO), en 2001.

Des échelons ont ainsi été ajoutés à l'échelle de rémunération du groupe Systèmes d'ordinateurs (CS) dans chacune des quatre conventions conclues par l'IPFPC avec le Conseil du Trésor de 1997 à 2004 (sans oublier des modifications salariales générales à deux reprises). Le salaire moyen de ce groupe est passé de 49 500 $ en 1997 à 63 200 $ en 2003, soit une hausse de 27,6 % en dollars courants et de 12,2 % en dollars constants de 2003.

Les hausses attribuables à la restructuration pour le groupe CS comportaient peut‑être une prime plus importante par rapport à la moyenne d'un autre groupe dont les membres ont déjà atteint, ou presque, le taux maximum de rémunération pour leur niveau. Cela dit, dans un groupe en croissance rapide, on peut s'attendre à ce qu'un nombre relativement plus grand d'employés touchent une rémunération proche de l'échelon inférieur de leur niveau, comme c'est le cas du groupe CS. Par contre, si la croissance ralentit alors que le groupe CS atteint une certaine maturité au cours des années à venir, une part plus importante de l'augmentation éventuelle des coûts pourrait se concrétiser.

Réduction des écarts entre régions

Les fusions de zones sont un autre exemple de restructuration salariale. On entend par là le processus de réduction des écarts de taux salariaux entre régions. Avant l'instauration des négociations collectives en 1967, 15 % environ des fonctionnaires (plus de 24 000) étaient assujettis aux Règlements généraux applicables aux employés aux taux régnants et 3 000 autres, aux Règlements concernant les officiers des navires de l'État et aux Règlements concernant les équipages des navires. Les taux salariaux applicables à ces employés étaient fixés pour de nombreux postes dans des dizaines de localités. L'une des priorités de l'AFPC et des autres syndicats concernés a été d'éliminer progressivement ces zones, dont le nombre a diminué presque à chaque ronde de négociation.

En 2002‑2003, environ 13 300 employés du noyau de la fonction publique (soit quelque 8 % du total) ont été touchés par une modalité quelconque de paye régionale.

Le plus important bloc d'employés rémunérés en fonction de taux régionaux en 2002‑2003 était constitué des 9 700 membres des groupes Manœuvres et hommes de métier (GL), Services généraux (GS) et Services hospitaliers (HS). Les trois zones de paye régionales sont les suivantes :

Zone 1 – la Colombie‑Britannique et les trois territoires;

Zone 2 – les provinces de l'Atlantique, le Québec et l'Ontario;

Zone 3 – les trois provinces des Prairies.

Les écarts régionaux variaient selon le sous‑groupe et le niveau. Les taux horaires les plus élevés se retrouvaient presque systématiquement dans la zone 1, soit la Colombie‑Britannique et les trois territoires. L'écart le plus important entre le taux le plus élevé et le taux le moins élevé – environ 18 % – touchait le sous‑groupe des tôliers; l'écart le plus modeste se situait entre 6 % et 8 % et touchait le sous‑groupe de l'usinage, de l'outillage et de la gravure. Dans le cas du sous‑groupe le plus nombreux (quelque 1 100 jardiniers, soudeurs et employés d'entretien), l'écart était d'environ 10 %.

Au cours des années 2000 à 2003, aux termes de la convention applicable à l'unité de négociation du groupe Services de l'exploitation (SV), le nombre de zones salariales applicables aux groupes de classification Manœuvres et hommes de métier (GL) et Services divers (GS) a été ramené de dix à sept, puis à trois. En 1989, il y en existait 16. Le coût salarial permanent de ces fusions de zones était estimé à 3,65 millions de dollars à partir de 1999, et à 9,9 millions additionnels à partir de 2000.

Le second groupe en importance en ce qui concerne les employés rémunérés en fonction de taux régionaux était celui des Sciences infirmières (NU), qui comptait environ 1 600 membres. Ce groupe compte :

  • une zone pour les postes isolés (équivalant au taux le plus élevé, c'est‑à‑dire celui de la Colombie‑Britannique),
  • des taux pour les provinces de l'Atlantique et pour chacune des autres provinces,
  • un taux pour le Yukon et les Territoires du Nord‑Ouest (T.N.‑O.).

L'écart entre le taux de rémunération le plus élevé et le plus bas au sein du niveau du groupe NU comptant le plus d'employés (niveau 3) était d'environ 9,4 %.

En 2002-2003, les employés du groupe Réparation des navires étaient répartis à peu près également entre les côtes est et ouest (environ 700 sur la côte est et 620 sur la côte ouest) et leurs tâches étaient semblables. En 2002‑2003, cependant, les taux de rémunération étaient supérieurs d'environ 20 % en Colombie‑Britannique.

Plusieurs autres petits groupes présentaient des écarts salariaux régionaux, notamment :

  • le groupe des enseignants (environ 200 personnes),
  • celui des imprimeurs (moins de 50),
  • celui des ergothérapeutes et des physiothérapeutes (environ 50).

Les quelque 300 avocats fédéraux en poste à Toronto en 2002-2003 touchaient une prime de 8 %.

Harmonisation des courbes salariales entre les groupes de classification

Une forme importante de restructuration est l'harmonisation des structures de rémunération. Tel que noté précédemment, en 1999, plus de 70 groupes de classification ont été regroupés en 25 unités de négociation. Du coup, l'employeur et les syndicats ont envisagé de combiner les taux de rémunération des groupes de classification d'une même unité. Le premier exemple a été l'unification, à compter de 2000, des échelles de rémunération du groupe Économie, sociologie et statistiques (ES) et du groupe Soutien des sciences sociales (SI), qui forment la nouvelle unité de négociation Économique et services de sciences sociales (EC). Le coût de l'harmonisation a représenté au départ environ 1 % de la masse salariale de cette unité dans le noyau de la fonction publique.

Le deuxième exemple, d'une portée plus vaste, date également de 2000. Le Conseil du Trésor et l'AFPC ont convenu d'harmoniser la structure salariale des groupes de classification Administration des programmes (PM), Services administratifs (AS) et Services d'information (IS), qui forment une fraction importante de l'unité de négociation Services des programmes et de l'administration (PA). Le coût a représenté au départ 0,9 % environ de la masse salariale de l'unité. Par contre, l'incidence de cette mesure sur les employés touchés a été nettement plus grande. Quelque 26 660 employés ont obtenu des hausses salariales de 1,7 % en moyenne.

Autres formes de restructuration

Il existe enfin d'autres formes de restructuration importantes mais assez peu fréquentes. Notamment, dans le cadre des conventions applicables au groupe Service extérieur (FS) en 1999 et en 2001, on a approuvé une hausse du taux de salaire maximum afin qu'il corresponde en gros à la rémunération de base du premier niveau du groupe EX, ainsi que du taux de salaire initial afin de rendre le service extérieur plus attrayant pour des candidats de haut calibre. On a aussi adopté des échelons salariaux fixes pour permettre aux membres du groupe FS d'atteindre plus rapidement le niveau salarial maximum. Le coût de ces changements représentait au départ 7 % environ de la masse salariale du groupe. Autre exemple, à compter de 1997, le groupe Gestion financière (FI) a obtenu une augmentation de 3,45 % pour tenir compte du fait que l'horaire de travail quotidien des membres passait à 7,5 heures, soit l'horaire de travail normal de la plupart des autres fonctionnaires.

Paiements forfaitaires

Au cours de la période 1997 à 2003, d'autres avantages pécuniaires ont été accordés mais ne sont pas assimilés à des mesures de restructuration parce qu'ils ne font pas partie intégrante de la paye régulière. Ainsi, des paiements forfaitaires ont été versés à la plupart des employés syndiqués en 1999 afin de faciliter l'acceptation d'une entente d'un an assortie d'une hausse économique de 2 %. Dans quelques autres cas, des primes à la signature ont été négociées.

Effet des changements dans la composition de l'effectif

L'évolution observée de la composition de l'effectif de la fonction publique découle des effets combinés des décisions prises en matière de classification et de dotation – principalement par les gestionnaires intermédiaires des ministères et organismes. Les décisions en matière de classification établissent les postes à doter et à quel niveau, tandis que le processus de dotation détermine les postes qui seront effectivement dotés et la manière dont ils le seront. Cette distinction est importante car, à tout moment, il y aura davantage de postes classifiés que de crédits salariaux pour en financer la dotation.

Sous l'angle de la classification, il y a de bonnes raisons d'accepter l'hypothèse précitée d'une tendance générale à la croissance des groupes à plus forte concentration de savoir et à l'augmentation de la proportion d'employés aux niveaux supérieurs de certains groupes. Ainsi, la croissance du groupe Systèmes d'ordinateurs – celui dont le nombre de membres augmente le plus rapidement – découle tout naturellement de l'importance de plus en plus centrale de la technologie de l'information et de l'Internet dans toutes les entreprises. L'embauche de nouveaux avocats tient en toute logique à la multiplication des contestations fondées sur la Charte des droits et libertés ainsi que des litiges touchant les droits des Autochtones et d'autres motifs. D'autres facteurs – complexité croissante de la gestion des programmes et des dossiers à l'échelle des champs de compétence, intensification des activités de recherche scientifique gouvernementale, nécessité d'obtenir et d'analyser rapidement des données disparates dans des délais sans cesse plus courts au niveau de l'actualité et des enjeux, etc. – sont tous révélateurs de la nécessité de disposer de personnel plus compétent dont la rémunération est généralement plus élevée.

Parallèlement, de nombreuses activités plus routinières sont en voie de disparition. Par exemple, l'évolution du travail a entraîné l'élimination presque complète de la sténographie, et la plus grande partie des travaux de dactylographie est maintenant accomplie par les analystes et les gestionnaires. Il n'est donc pas étonnant d'observer une migration des employés de secrétariat vers des groupes offrant de plus vastes débouchés. L'avènement des systèmes électroniques a de plus provoqué une forte baisse de la demande de travail de bureau.

L'évolution structurelle de 1991 à 2003 décrite dans la présente section a entraîné une hausse du salaire moyen de l'ordre de quelque 5 000 $ (en dollars de 2003) dans les domaines combinés du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts[42]. Cela représente environ 10,6 % du salaire moyen dans ces domaines en 2003. Durant la période où l'emploi dans la fonction publique était en croissance, soit de 1997‑1998 à 2002‑2003, ces changements structurels ont haussé le salaire moyende 2 600 $ environ, soit 5,3 % du salaire moyen de ces deux domaines en 2003.

Cette évolution du salaire moyen tient principalement à deux facteurs :

  • l'augmentation de la taille des groupes à rémunération élevée et le recul de ceux à plus faible rémunération,
  • l'évolution de la répartition des employés par niveau à l'intérieur des groupes.

L'exemple le plus significatif de la tendance à la diminution des emplois exigeant moins de connaissances en faveur de ceux qui requièrent des connaissances plus poussées est celui des employés des groupes ST et CR, qui sont passés au groupe AS. Cette plus forte proportion d'employés reclassifiés en 2002‑2003 se retrouve dans le groupe ST (environ 26 % de l'effectif permanent à temps plein de ce groupe). Cette proportion remarquable semble s'inscrire dans une tendance à la disparition éventuelle du groupe ST, qui s'explique en grande partie par l'évolution des exigences du travail de bureau dans un environnement automatisé moderne. Le groupe Sténographie et dactylographie (ST) a vu sa taille diminuer de 82 % en 12 ans.

Parmi les employés du groupe ST, le plus grand nombre de reclassifications a touché les postes ST‑SCY 3, passés à CR 5 et à AS 1. Un tel changement représente, au haut de l'échelle, une hausse salariale d'environ 4 400 $, ou 11,4 %, pour un CR 5 et d'environ 5 300 $, ou 13,7 %, pour un AS 1. Il y a eu très peu de reclassifications (environ 4,3 % du total) au sein même du groupe ST. Seulement 29 des 670 employés du groupe ST dont le poste a été reclassifié en 2002 ne sont pas passés à un autre groupe (CR ou AS).

Les autres groupes comptant plus de 5 % de reclassification sont les suivants :

  • Gestion du personnel (PE)
  • Administration des programmes (PM)
  • Techniciens divers (GT)
  • Achats et approvisionnement (PG)
  • Services administratifs (AS)
  • Recherche scientifique (SE)
  • Commis aux écritures et règlements (CS)
  • Économie, sociologie et statistiques (ES).

Il convient de noter que les groupes PE, ES, GT et PG utilisent des programmes de recrutement qui prévoient la promotion à un poste supérieur sous réserve de progrès satisfaisants dans le cadre d'un programme de recrutement ou de perfectionnement. En outre, certains groupes peuvent afficher un taux anormalement élevé de reclassification par suite d'une décision touchant un grand nombre d'employés.

Emplois axés sur le savoir

De 1990 à 2003, la composition de l'effectif de la fonction publique fédérale a connu de profonds changements. La façon la plus simple de dire les choses est que la somme du savoir et des compétences qu'exigent à peu près tous les emplois a augmenté en parallèle avec l'évolution de la technologie et des communications, et que les emplois à concentration relativement élevée de savoir ont connu une progression rapide tandis que les autres emplois ont fléchi.Comme nous le verrons, ces changements ont exercé une pression à la hausse sur le salaire moyen dans la fonction publique.

Trois catégories professionnelles ont été en croissance durant les 12 années étudiée :

  • Administration et service extérieur (51 %)
  • Catégorie scientifique et professionnelle (22 %)
  • Groupe de la direction (5 %).

À l'opposé, trois catégories professionnelles ont vu leur taille diminuer :

  • Technique (21 %);
  • Soutien administratif (38 %);
  • Exploitation (42 %).

Cela confirme clairement la corrélation positive observée généralement entre la croissance et l'intensité du savoir. Ces tendances étaient assez persistantes. Par exemple, toutes les catégories ont reculé durant la période où s'est déroulé l'Examen des programmes, soit de 1994 à 1998. Sur l'ensemble de la période allant de 1991 à 1998, l'effectif des trois catégories en déclin a diminué de 53 100 employés environ, comparativement à un gain net de quelque 3 200 employés dans les trois autres catégories. Subséquemment, soit de 1998 à 2003, toutes les catégories sauf celles du Soutien administratif et de l'Exploitation, ont pris de l'expansion, la croissance la plus forte ayant été enregistrée dans les catégories de l'Administration et du service extérieur, la catégorie Scientifique et professionnelle et celle de la Direction.

Examinant les 70 et quelque groupes de classification que comptent les catégories professionnelles, nous constatons que quatre groupes ont vu chacun leur effectif augmenter de plus de 3 000 employés. Ces groupes représentent près des deux tiers de l'accroissement de l'effectif dans les domaines combinés du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts :

Groupe

Gains, 1991 à 2003

CS) Systèmes d'ordinateurs

9 584

(AS) Services administratifs

9 645

(PM) Administration des programmes

6 530

(ES) Économie et statistiques

3 022

Si l'on considère la taille absolue, les principaux groupes en déclin (ceux ayant perdu au moins 2 000 membres) ont été les suivants :       

Groupe

Pertes, 1991 à 2003

(CR) Commis aux écritures et règlements

-16 629

(ST) Sténographie et dactylographie

-10 736

(GL) Manœuvres et hommes de métier

-8 221

(GS) Services divers

-5 905

(DA) Traitement mécanique des données

-2 058

En tout, ces groupes ont perdu plus de 43 500 membres de 1991 à 2003.

Nous avons aussi examiné attentivement les changements dans la répartition des employés par niveau au sein des groupes de classification afin de voir si les niveaux de classification plus élevés sont un facteur d'augmentation des salaires moyens.

Dans le groupe Commis aux écritures et règlements (CR), on observe une tendance indéniable des niveaux inférieurs vers les niveaux supérieurs. En dépit du recul de 28 % déjà mentionné, le groupe CR demeure le plus important avec un effectif de quelque 43 300 membres en mars 2003. Le niveau CR 1 était déjà disparu dans les faits en 1991. La proportion d'employés appartenant aux niveaux 2 et 3 est passée de 15 % à 6 % et de 35 % à 24 %, respectivement. Par contre, la proportion d'employés du niveau 4 est passée de 37 % à 47 %, tandis qu'elle a presque doublé pour le niveau 5 (de 12 % à 23 %).

En ce qui a trait à la répartition des employés entre les niveaux de rémunération au sein d'un groupe, l'incidence sur le salaire moyen a été modeste. Même dans le groupe Commis aux écritures et règlements (CR), où l'on a observé une nette baisse de la proportion d'employés occupant des postes des niveaux inférieurs et une hausse équivalente aux niveaux supérieurs, la hausse correspondante du salaire moyen entre 1991 et 2003 a été de 1 600 $ – un peu plus de 4 %. Considérant le fait que la structure de la plupart des autres groupes de grande taille a été très stable ou que ces groupes ont connu moins de changement que le groupe CR, on peut raisonnablement estimer que les effets de ce facteur ne représentent pas plus de 1 % à 2 % du salaire moyen.

Un autre groupe où la distribution a évolué en faveur des niveaux supérieurs est celui de l'Administration du personnel (PE). La proportion des employés des niveaux 2 et 3 a diminué de 19 % à 12 % et de 42 % à 29 %, respectivement, entre 1991 et 2003, mais elle augmentait pour les niveaux supérieurs : de 20 % à 28 % pour le niveau 4, de 11 % à 16 % pour le niveau 5 et de 5 % à 9 % pour le niveau 6.

Les choses sont moins tranchées pour certains autres groupes. Dans le groupe Services administratifs (AS), on remarque une augmentation de la proportion des employés appartenant au niveau 1 (de 18 à 23 %) et au niveau 2 (de 25 à 31 %) et une baisse relative dans le cas des deux niveaux suivants, tandis que les niveaux supérieurs sont demeurés à peu près inchangés. S'il nous est impossible de faire une analyse détaillée des mouvements des employés, des données anecdotiques indiquent clairement que l'augmentation de la proportion des membres du groupe AS aux deux niveaux inférieurs s'explique par la transition d'employés appartenant auparavant aux groupes CR et ST.

On observe deux autres tendances intéressantes, relativement aux groupes Systèmes d'ordinateurs (CS) et Direction (EX). La structure du groupe CS est demeurée à peu près stable pour les trois niveaux intermédiaires, même si ce groupe a connu la croissance la plus rapide et que la proportion des membres de ce groupe appartenant au niveau CS 1, elle est passée de 19 % à 24 %. La proportion des employés du groupe CS faisant partie du niveau 5 est demeurée faible (2 %), mais le nombre de ces employés est tout de même passé de 16 à 262, ce qui vaut la peine d'être mentionné. Dans le groupe Direction, la proportion des employés au niveau EX 1[43] a fléchi de 65 % à 53 %, celle du niveau 2 a augmenté de 18 % à 25 % et celle du niveau 3 est passée de 10 % à 16 %. Aux deux niveaux supérieurs, la proportion est demeurée inchangée à 5 % et à 2 %, respectivement.

Alors que le déplacement des niveaux de classification inférieurs vers les niveaux supérieurs au sein des groupes professionnels a exercé une pression à la hausse sur les salaires moyens, l'effet est proportionnellement plus marqué lorsque ce phénomène touche un groupe populeux comme celui des CR, qui a connu une croissance significative aux niveaux 4 et 5 et des baisses aux niveaux 1 à 3, alors même que la taille du groupe diminuait de 28 %. Comme nous l'avons noté ci-dessus, ce groupe demeure néanmoins le plus important avec un effectif de 43 000 postes en 2003.

Des données plus détaillées sur l'évolution de la composition des catégories et des groupes professionnels sont présentés au chapitre 3 du Volume Deux et à l'appendice G.

Promotions

Les promotions correspondent aux situations où un employé est nommé à un poste dont la rémunération maximale est supérieure d'au moins 4 % à celle de son poste précédent. Une promotion peut être accordée avec ou sans concours. Tout écart donné peut déclencher une série de promotions, alors que les candidats sélectionnés créent eux-mêmes des postes vacants qui doivent être comblés, peut-être par voie de promotion. Exception faite de la période de l'Examen des programmes, soit de 1994 à 1998, entre 14 000 et 18 000 promotions ont généralement été accordées annuellement.

L'effectif de la fonction publique connaît des changements relativement importants au cours d'une année. En 2002-2003, on a recensé 22 711 promotions, dont les 6 687 reclassifications décrites ci-dessous. Par conséquent, environ 13,4 % des employés avaient bénéficié d'une promotion en mars 2003. Les déplacements latéraux vers un poste de même niveau ont totalisé 22 673, soit une proportion similaire. Même si ce dernier chiffre inclut les rétrogradations et que les systèmes de données ne font pas la distinction entre ces cas et les mouvements latéraux, des données anecdotiques incitent à penser que les cas de rétrogradation sont rares. On a recensé 13 144 nominations intérimaires. La durée de ces dernières varie beaucoup; 15,1 % ne dépassent habituellement pas six mois, mais 36,4 % durent entre six et douze mois.

Le nombre total de promotions parmi les employés nommés pour une période indéterminée et l'augmentation observée au cours de la période d'expansion rapide indiquent qu'ils sont le principal déterminant de l'évolution de la fonction publique.

Reclassifications

Les mesures de reclassification permettent de faire le lien entre classification et dotation. Nous employons le terme « reclassification » lorsqu'un employé est promu à un niveau plus élevé tout en continuant d'occuper le même poste, après que l'on ait évalué que les exigences du poste ont suffisamment changé pour que cette mesure soit justifiée. Il est important de noter que lorsqu'on observe une augmentation significative des exigences liées à un poste, une reclassification s'avère appropriée.

En général, les reclassifications ont représenté plus de 36 % de toutes les promotions en 2002‑2003 et elles occupent une place importante dans le système de gestion du personnel du domaine du noyau de la fonction publique.

Entre 1996‑1997[44] et 2002‑2003, le nombre de reclassifications a oscillé entre un creux d'environ 3 200 en 1996‑1997 et un sommet de près de 6 300 en 1998‑1999 et de 6 700 en 2002‑2003[45]. Les reclassifications semblent s'être stabilisées au cours des cinq derniers exercices. La proportion des employés à temps plein nommés pour une période indéterminée qui ont été reclassifiés annuellement a varié plus que les chiffres absolus, augmentant rapidement de 2,3 % en 1996‑1997 à 5,5 % en 1998‑1999, puis retombant à 4,2 % en 2001‑2002, avant d'augmenter de nouveau pour atteindre 5,1 % en 2002‑2003. Nous concluons de ces données que les reclassifications ont été un facteur important dans l'évolution de la composition de la fonction publique.

Passage d'un échelon à l'autre des échelles salariales

Le passage des employés d'un échelon à l'autre annuellement au sein des échelles salariales est souvent perçu comme un facteur contribuant à la hausse de la rémunération.

Chaque groupe de classification comporte une série de niveaux reflétant une hiérarchie de degrés de difficulté et de responsabilité. À l'heure actuelle, le nombre de niveaux va de deux dans le groupe du Service extérieur (FS) à quatorze dans celui des Manœuvres et hommes de métier (GL). L'échelle salariale de chaque niveau comporte habituellement des échelons allant d'un taux minimum à un taux maximum ou taux normal.

La paye normale d'un employé dépend de deux décisions. Premièrement, son poste doit être classifié. Pour ce faire, il doit être affecté au groupe pertinent, en fonction de la nature du travail. Ensuite, on évalue le niveau du poste à l'aide d'une norme de classification tenant compte de divers facteurs comme la compétence requise, l'effort, les responsabilités et les conditions de travail. Deuxièmement, la paye réelle à l'intérieur du niveau établi dépend de règles relativement complexes élaborées par le Conseil du Trésor. L'employé dont le salaire n'a pas atteint le maximum de son niveau passe normalement à l'échelon suivant à la date anniversaire de sa nomination à son poste.

Une importante exception s'applique aux employés des groupes Services scientifiques de la défense (DS) et Recherche scientifique (SE‑RES). Dans certains cas, une démarche semblable peut également s'appliquer aux échelons supérieurs du groupe Recherche historique (HR). Pour les quelque 2 450 employés des groupes DS et SE‑RES, la progression des salaires et les promotions dépendent d'une démarche dite « axée sur le titulaire ». L'opinion d'un comité de scientifiques de haut de calibre sur la qualité des travaux scientifiques effectués par chaque employé, leur originalité et leur contribution au savoir détermine le rythme de la progression des employés.

Les pressions associées à ces augmentations sont dans une large mesure contrebalancées par la baisse des salaires découlant du fait que les personnes atteignant les niveaux supérieurs d'une échelle s'en vont et sont remplacées par des employés débutant aux niveaux inférieurs de l'échelle. Le tableau 1012 montre l'incidence de ces deux phénomènes de 1990 à 2003[46]. Pour présenter un portrait complet de l'évolution des salaires dans les postes (autres que les hausses économiques), il inclut l'effet de la reclassification (changement de la composition) sur les salaires pour chaque exercice.

L'examen des données de ce tableau nous apprend que, lors de cinq des treize années étudiées, les augmentations d'échelon et la mobilité externe ont eu comme effet net une légère réduction du salaire moyen. Un effet positif net supérieur à 0,22 % n'a été enregistré qu'en 1998, 1999 et 2000. Il est aussi intéressant de noter que le changement du salaire moyen découlant d'un changement de la classification est, pour la plupart des exercices, à peu près de la même taille que celui découlant des échelons. Considérant tout cela, nous estimons que les échelons salariaux et la mobilité externe au cours de la période étudiée ont eu comme effet net cumulatif une augmentation de 1,5 % environ du salaire moyen dans le noyau de la fonction publique. Ce chiffre est essentiellement inclus dans celui des hausses attribuables à l'évolution de la composition de l'effectif.

Tableau 1012

Effet des augmentations d'échelon, du changement de classification et de la mobilité externe sur le salaire moyen dans le domaine relevant du noyau de la fonction publique, 1990 à 2003

 

Effet sur la rémunération moyenne*

 Année

Échelons**

Changement de classification

Mobilité
externe

Effet global net

Effet net des échelons et de la mobilité externe

1991

0,96 %

1,39 %

-1,26 %

1,09 %

-0,30 %

1992

0,95 %

1,08 %

-1,02 %

1,01 %

-0,07 %

1993

0,86 %

0,79 %

-0,82 %

0,83 %

0,04 %

1994

0,63 %

0,60 %

-0,46 %

0,77 %

0,18 %

1995

0,18 %

0,43 %

-0,27 %

0,33 %

-0,10 %

1996

0,18 %

0,45 %

-0,18 %

0,46 %

0,01 %

1997

0,80 %

0,82 %

-0,72 %

0,90 %

0,08 %

1998

1,09 %

1,27 %

-0,53 %

1,83 %

0,56 %

1999***

1,65 %

1,41 %

-0,48 %

2,57 %

1,16 %

2000***

1,26 %

1,17 %

-1,03 %

1,39 %

0,22 %

2001

1,41 %

1,35 %

-1,42 %

1,34 %

-0,02 %

2002

1,55 %

1,45 %

-1,55 %

1,45 %

0,00 %

2003

1,24 %

1,12 %

-1,52 %

0,85 %

-0,27 %

Total cumulatif (1990 à 2003)

13,5 %

14,2 %

-10,7 %

15,8 %

1,5 %

Total cumulatif  (1998 à 2003)

7,3 %

6,7 %

-5,9 %

7,8 %

1,1 %

* Les chiffres indiqués correspondent aux moyennes annualisées (de décembre à décembre) pour les employés à temps plein nommés pour une période indéterminée.

** Comprend l'effet des hausses de restructuration appliquées aux titulaires.

*** Les chiffres sont rajustés afin de supprimer l'effet de la création de l'ADRC à titre d'employeur distinct du domaine du noyau de la fonction publique.

On soutient parfois que les employés récemment recrutés dans certains groupes passent très rapidement d'un niveau à l'autre, ce qui fait grimper le salaire moyen. Cette opinion a été exprimée notamment au regard du groupe Économie, sociologie et statistiques (ES). Il existe bien différents programmes de recrutement et de perfectionnement qui permettent à des personnes de joindre les rangs de ce groupe au sein de la fonction publique, normalement au niveau ES 2 (rémunération minimum de 42 655 $ en 2002‑2003) puis, grâce à des affectations, de progresser en deux, trois ou quatre ans aux niveaux ES 4 ou ES 5 (rémunération minimum de 60 096 $ et 68 291 $, respectivement, en 2002‑2003).

Les lignes directrices sur la progression de carrière établies au ministère des Finances précisent que la progression du niveau d'entrée ES 2 au niveau ES 5 prend de trois ans et demi à cinq ans, selon que l'employé obtient la cote de rendement Supérieur ou Entièrement satisfaisant plus. Le but visé est de veiller à ce que les promotions au ministère des Finances soient aussi rapides, sinon plus, que dans d'autres organisations comparables. Pour 2001‑2002 et 2002‑2003, le ministère des Finances a recruté 78 économistes grâce à ce régime.

La Direction de l'information sur les nominations et de l'analyse, de la Commission de la fonction publique, a fourni un aperçu informel de l'évolution du groupe Économie, sociologie et statistiques (ES)[47]. Nous avons déjà souligné que le groupe ES arrive au troisième rang des groupes ayant connu l'expansion la plus rapide entre 1990 et 2003, avec une progression de 115 %. Deux points méritent d'être signalés :

  • Le nombre moyen de nouveaux employés nommés pour une période indéterminée a plus que doublé entre le début/milieu des années 1990 et le début des années 2000, et plus de 900  ont été embauchés en 2001‑2002 et en 2002‑2003.
  • Le nombre d'années de service cumulatif requis pour atteindre le niveau de travail actuel des ES 5 a diminué au cours de la période.
    • Les ES 1 et ES 2 embauchés en 1992 ont dû mettre entre 7 et 8 années pour atteindre ce niveau.
    • Pour la cohorte des nouvelles recrues de 1995, la durée moyenne a chuté à entre 5 et 6 années.
    • Pour la cohorte de 1998, elle n'a été que de 4 à 5 années.

Même si les diverses organisations invoquent des raisons particulières pour justifier leurs décisions en matière de classification et d'embauche, une évolution aussi distincte peut sans doute témoigner de tendances plus générales. Une des hypothèses avancées est que le groupe ES présentait de l'attrait pour les nouveaux diplômés possédant de solides habiletés analytiques à une époque marquée par le renouvellement de la demande de capacité d'analyse des politiques. Si l'on peut s'attendre à ce que l'accélération de la progression des nouveaux employés vers les niveaux supérieurs du groupe ES fasse augmenter les salaires moyens, il est impossible d'en quantifier l'effet, mais nous prévoyons qu'elle sera globalement modeste.

Effet des résultats de l'arbitrage

Étant donné que la voie de l'arbitrage a été suspendue dans le cadre du processus de négociation collective de 1991 à 2003, il est intéressant d'examiner les expériences que l'on a tirées de l'arbitrage afin de déterminer l'effet potentiel de cette pratique sur les salaires moyens. Une analyse faite par le Conseil du Trésor il y a plus de dix ans comparait les hausses salariales annuelles cumulatives moyennes découlant du processus d'arbitrage et du processus de conciliation (grève) entre 1974 et 1991 dans le noyau de la fonction publique. Bien que les résultats de l'un et l'autre processus aient divergé d'une année à l'autre, et même de plus de 1 % lors de trois années au moins, les totaux cumulatifs pour les 18 années étaient très proches; on obtient en effet une hausse totale de 218 % environ (comparativement à une inflation cumulative de 217 %) découlant du processus de conciliation (grève), et de 206 % dans le cas du processus d'arbitrage. L'arbitrage a pu être plus avantageux pour certains groupes ayant peu de pouvoir de négociation, mais cette évaluation laisse penser que les deux processus ont donné à peu près les mêmes résultats dans l'ensemble sur une période de près de deux décennies.

Bien que le processus d'arbitrage ait été suspendu de 1991 à 2001, depuis son rétablissement, seules trois décisions arbitrales ont été rendues pour le noyau de la fonction publique; toutefois, plusieurs autres dossiers étaient en cours d'arbitrage. Parmi les décisions rendues, celle de 2003 touchant le groupe Navigation aérienne (AO) a été assez coûteuse. L'augmentation économique « standard » a été majorée par suite de l'ajout de certains échelons, de l'élimination d'autres échelons et de la hausse des indemnités provisoires[48]. L'indemnité provisoire est examinée plus loin dans ce chapitre.

Du point de vue de l'employeur, la décision arbitrale rendue en 2003 à l'égard de l'unité de négociation du groupe Sciences appliquées et génie (AP) a également été généreuse, comportant une harmonisation de la structure salariale, l'ajout de certains échelons et la suppression d'autres échelons, ainsi qu'une hausse des indemnités provisoires. D'ailleurs, l'indexation de l'indemnité provisoire du groupe AP en vertu de cette décision a créé un précédent. La troisième décision, rendue à l'égard du groupe Gestion financière (FI) en 2002, était en gros conforme aux ententes conclues à cette époque.

Bien que l'expérience plutôt limitée jusqu'ici puisse laisser penser que l'arbitrage est susceptible d'engendrer des pressions à la hausse sur les salaires, il est trop tôt pour dire dans quelle mesure ce processus se rapprochera des conditions générales énoncées dans les conventions collectives conclues par la voie de la conciliation/grève. Certes, durant la période centrale visée par notre analyse (1997 à 2003), les décisions arbitrales ont peu contribué à l'évolution du salaire moyen. Il est toutefois difficile de prédire avec certitude les répercussions futures du processus d'arbitrage.

Effet des règlements au titre de la parité salariale

En vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP), les employeurs qui relèvent de la réglementation fédérale – ce qui comprend le gouvernement fédéral lui‑même et les entreprises œuvrant dans des domaines comme les services bancaires, le transport ferroviaire, aérien et maritime, les ports et le camionnage interprovincial) doivent garantir un salaire égal pour un travail d'égale valeur. Cette disposition a été édictée en 1977, notamment pour donner effet à la ratification par le Canada de la Convention n 100 de l'Organisation mondiale du travail, qui porte sur l'égalité de la rémunération. Plus précisément, l'article 11 de la LCDP précise que le fait d'instaurer ou de maintenir une disparité salariale entre les hommes et les femmes qui exécutent, dans le même établissement, un travail équivalent constitue un acte discriminatoire.

Le concept du salaire égal pour un travail d'égale valeur vise à éliminer la discrimination salariale fondée sur le sexe qui avait résulté de la sous‑évaluation systémique du travail des femmes. Il compare des postes occupés par des hommes et des femmes qui peuvent être fort différents et ce à l'aide d'une méthode d'évaluation commune qui mesure les compétences, l'effort et les attributions propres à un emploi donné, de même que les conditions dans lesquelles le travail est effectué. Ce concept est donc beaucoup plus large dans son application que celui du « salaire égal à travail égal », lequel compare un travail identique ou très similaire, parce qu'il repose sur une comparaison d'emplois différents.

Les Lignes directrices sur la parité salariale publiées par la Commission canadienne des droits de la personne en 1986 renferment des précisions sur des questions comme la définition d'établissement et les exceptions admissibles. Ces dernières comprennent :

  • la protection salariale,
  • le salaire en période de formation,
  • la rémunération au rendement,
  • les suppléments pour pénurie de main‑d'œuvre,
  • les taux de rémunération régionaux.

La façon d'appliquer ces lignes directrices est controversée, et le règlement de certains litiges a pris des années.

Depuis la fin des années 70,  divers règlements et jugements ont été rendus en matière de la parité salariale dans le noyau de la fonction publique, lesquels ont contribué à l'accroissement des salaires moyens. L'appendice H présente un bref tour d'horizon des plaintes en matière de parité salariale dans le noyau de la fonction publique qui avaient été réglées en 2003. Les plaintes non réglées à la fin de 2003 portaient principalement sur la question de savoir qui était l'employeur de différents groupes aux fins de l'application des dispositions de la Loi canadienne sur les droits de la personne touchant la parité salariale pour des fonctions équivalentes.

En résumé, le noyau de la fonction publique a réglé plus d'une douzaine de plaintes importantes depuis 1979. Les plaintes déposées les premières années avaient une portée assez limitée. Ainsi, le premier règlement, qui date de 1980, prévoyait l'harmonisation de la rémunération du groupe Bibliothéconomie (LS), composé en majorité de femmes, avec celle du groupe Recherche historique (HR), à prédominance masculine. D'autres règlements survenus au cours des premières années prévoyaient un rajustement des taux salariaux à l'intérieur de groupes donnés : les sous‑groupes à prédominance féminine du groupe Services divers (GS) comparativement aux sous‑groupes à prédominance masculine du même groupe, et les taux salariaux des infirmières et infirmiers auxiliaires autorisés par rapport à ceux des préposés aux soins au sein du groupe Services hospitaliers (HS). En 1981, une plainte portant sur l'équivalence du travail accompli par les groupes Services hospitaliers (HS) et Services divers (GS) a conduit à des rajustements au titre de la parité salariale, le Conseil du Trésor décidant d'étendre aux deux groupes la norme applicable au groupe GS.

Le premier cas fondé sur la comparaison de plusieurs groupes a été réglé en 1985 sur une base provisoire, dans l'attente des résultats des travaux du Comité mixte syndical-patronal sur la mise en œuvre de la parité salariale, examiné ci-dessous. Le groupe Nutrition et diététique (ND) et le groupe Ergothérapie et physiothérapie (OP) ont ainsi pu obtenir la comparaison de leur travail à celui de groupes à prédominance masculine.

La plainte la plus importante à cet égard fut assurément celle alléguant la discrimination et la disparité salariale fondée sur le sexe, déposée en 1984 par l'Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC) à l'égard des normes de classification des groupes Commis aux écritures et règlements (CR) et Administration des programmes (PM). En réponse, le Secrétariat du Conseil du Trésor a invité les syndicats à collaborer au sein d'un comité mixte syndical-patronal sur la mise en œuvre de la parité salariale en vue d'élaborer une approche en la matière pour l'ensemble de la fonction publique. Après l'échec de cette initiative, en raison d'un désaccord concernant le sexisme présumé des évaluations d'emploi, le Conseil du Trésor est intervenu directement pour accorder un paiement compensatoire basé sa propre évaluation de la mesure dans laquelle les groupes visés étaient sous‑payés. Un montant forfaitaire a été versé aux membres des groupes suivants :

  • Commis aux écritures et règlements (CR),
  • Soutien de l'enseignement (EU),
  • Secrétariat, sténographie et dactylographie (ST),
  • Sciences infirmières (NU).

Les membres des trois premiers de ces groupes ont aussi eu droit à des hausses salariales annuelles. Ces paiements forfaitaires ont totalisé 303 millions de dollars, soit en moyenne 4 300 $ environ par employé, tandis que les rajustements salariaux annuels (des employés ayant reçu une augmentation) ont varié entre 994 $ et 4 578 $.

Ni l'AFPC, ni l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC) n'ont été satisfaits de ce résultat et ont présenté des plaintes nouvelles ou révisées devant un tribunal constitué aux termes de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Les plaintes de l'IPFPC ont été réglées en 1995 à la suite de négociations : des paiements forfaitaires et des rajustements salariaux permanents (applicables à compter d'avril 1994) ont été accordés aux membres des groupes Nutrition et diététique (ND), Ergothérapie et physiothérapie (OP) et Sciences infirmières (NU).

La plainte de l'AFPC n'a été réglée qu'en 1999, par suite de deux décisions rendues par le Tribunal des droits de la personne, qui

  1. a conclu que les données recueillies par le Comité mixte syndical‑patronal sur la mise en œuvre de la parité salariale fournissaient un point de départ raisonnable pour évaluer la nécessité de paiements additionnels,
  2. a établi la méthode devant servir à déterminer l'existence et la taille des écarts salariaux,
  3. a ordonné le versement d'intérêts simples calculés sur les salaires nets annuels payables rétroactivement.

La méthode prescrite par le Tribunal consiste à comparer chaque niveau des groupes visés par la plainte à un ensemble d'emplois de groupes à prédominance masculine.

En vue de ce règlement, le Conseil du Trésor a intégré en 1998 des rajustements spéciaux de rémunération aux salaires des groupes CR, EU, LS, HS, ST et Traitement mécanique des données (DA). Même si le Conseil du Trésor ne les a pas explicitement associés à la parité salariale, ces rajustements ont été pris en compte aux fins d'établir le niveau de salaire final aux termes du règlement conclu en 1999 avec l'AFPC. Ils englobaient des paiements ponctuels totalisant 580 millions de dollars environ, ainsi que des hausses salariales permanentes de 2 491 $.

À la suite de ce règlement, des paiements rétroactifs (y compris les intérêts) totalisant quelque 2,85 milliards de dollars ont été versés aux employés touchés, y compris les anciens employés. Les rajustements finals ont été intégrés aux salaires des employés des groupes mentionnés au paragraphe précédent à compter de juillet 1998. En bout de ligne, les hausses salariales ont haussé la rémunération de 120 $ à 10 363 $, selon le groupe et le niveau. Le montant moyen pondéré avoisinait 1 200 $.

Des règlements ont aussi été conclus avec des groupes professionnels à prédominance féminine en fonction d'une comparaison avec sept groupes à prédominance masculine : Commerce (CO), Systèmes d'ordinateurs (CS), Soutien technologique et scientifique (EG), Économie, sociologie et statistiques (ES), Gestion financière FI), Achats et approvisionnements (PG), et Programmes de bien-être social (WP). Les employés du groupe Gestion du personnel (PE), qui ne sont pas syndiqués, ont reçu en 1999 un paiement forfaitaire calculé rétroactivement à compter de l'année de leur plainte, en 1991, et leur rémunération a été haussée. En 2003, le groupe Traduction (TR) a conclu un règlement similaire concernant sa plainte déposée en 1990.

Dépenses estimatives courantes au titre de la parité salariale

Nous avons estimé les dépenses courantes permanentes découlant des ententes sur la parité salariale pour l'exercice 2002‑2003.

Notre estimation est forcément très sommaire. Nous savons de combien les salaires ont augmenté à divers moments afin de garantir un salaire égal pour un travail d'égale valeur. Mais nous ne pouvons savoir avec certitude dans quelle mesure ces augmentations ont été maintenues ou modifiées au fil du temps, puisque les négociations salariales subséquentes ne font aucune distinction relative à la justification des hausses de salaires au sein des groupes. Par conséquent, notre estimation tient uniquement compte des plus récentes augmentations identifiables au titre de la parité salariale des groupes et niveaux touchés, ces montants étant ensuite multipliés par l'effectif concerné en mars 2003, ainsi que toute hausse économique autorisée depuis les augmentations au titre de la parité salariale.

Sur cette base, les coûts salariaux permanents liés à la parité salariale dans le noyau de la fonction publique étaient de l'ordre de 225 millions de dollars en 2002‑2003. Pour les groupes visés, cela représentait environ 13 % de l'enveloppe salariale actuelle. Comme l'indique le tableau 1013 :

  • Les coûts permanents les plus élevés, soit approximativement 165 millions de dollars, visent le groupe Commis aux écritures et règlements (CR).
  • Le montant moyen par employé du groupe CR était d'environ 5 100 $ (ou 4 700 $, compte non tenu des hausses économiques ultérieures).
  • Le montant moyen global versé aux employés des groupes admissibles à la parité salariale était d'un peu plus de 5 500 $ par année.
  • Les membres du groupe Sciences infirmières (NU) ont touché le montant par employé le plus élevé, soit environ 14 300 $, ou approximativement 23 % de l'enveloppe salariale actuelle.

Tableau 1013

Estimation* du coût salarial courant des règlements passés au titre de la parité salariale dans le noyau de la fonction publique, 2002-2003

Groupe professionnel

Population

Masse salariale
(M$)

Coûts de la parité salariale
(M$)

Pourcentage de la masse salariale

Coût moyen par employé

Commis aux écritures et règlements

32 296

1 246,6

164,6

13

5 096

Secrétariat, sténographie et dactylographie

2 039

76,9

7,3

9

3 564

Services hospitaliers

659

26,1

2,4

9

3 601

Bibliothéconomie

433

26,6

5,6

21

12 894

Traitement mécanique des données / Conversion des données

119

3,8

0,4

11

2 997

Soutien de l'enseignement

25

0,8

0,3

38

10 263

Nutrition et diététique
(anciennement Sciences domestiques)

36

2,3

0,4

17

12 400

Ergothérapie et physiothérapie

50

3,2

0,6

19

11 934

Sciences infirmières

1 622

102,2

23,3

23

14 342

Gestion du personnel

3 254

215,6

19,7

9

6 041

Total

40 533

1 704,1

224,6

13

5 537

* Les chiffres de ce tableau sont estimatifs. L'utilisation de décimales tient à la méthode d'estimation et non à la précision des résultats.

Puisque divers coûts non salariaux sont proportionnels aux salaires, l'impact des dépenses permanentes au titre de la parité salariale sur la rémunération totale pourrait être d'au moins 25 % plus élevé.

En 2002-2003, un montant modeste de l'ordre de 1,3 million de dollars a également été versé en vertu de règlements antérieurs.

Les employeurs distincts

L'ADRC faisait partie du noyau de la fonction publique à l'époque de l'important règlement sur la parité salariale conclu avec l'Alliance de la Fonction publique du Canada. Ses employés ont donc bénéficié de ce règlement. En appliquant la méthode d'estimation approximative expliquée ci-dessus pour le noyau de la fonction publique, on constate que les coûts salariaux permanents de l'ADRC au titre de la parité salariale seraient d'environ 62,5 millions de dollars en 2002‑2003. Les chiffres correspondant pour l'ACIA et Parcs Canada seraient de 3,6 et de 2,3 millions de dollars, respectivement.

L'Alliance de la Fonction publique du Canada a intenté une poursuite visant à étendre le règlement de 1999 conclu avec le Conseil du Trésor à d'autres employeurs fédéraux, y compris des employeurs distincts comme le Bureau du vérificateur général, le Bureau du surintendant des institutions financières et le Conseil de recherches en sciences humaines.

L'appendice I contient les données estimatives les plus précises disponibles au sujet des sommes versées au titre des paiements forfaitaires et des intérêts ainsi que du coût des hausses salariales permanentes entraînées par les règlements en matière de parité salariale entre 1980 et 2003. Ces données sont récapitulées au tableau 1014. La valeur totale des paiements forfaitaires au titre de la parité salariale, exprimée en dollars courants, s'est établie à environ 3,4 milliards de dollars, ce qui comprend les intérêts. Nous estimons que le coût salarial permanent des règlements au titre de la parité salariale a totalisé au moins 277 millions de dollars en 2002‑2003 pour le noyau de la fonction publique et les employeurs distincts. En fait, cela représente entre 2 % et 3 % de la masse salariale totale de ces domaines.

Tableau 1014

Sommaire des paiements et des hausses de salaires au titre de la parité salariale, 1980 à 2003

 

Noyau de la fonction publique

Employeurs distincts**

  

Coût des montants forfaitaires
(M$)*

Cumulatif, mars 2003
(M$) *

Coût récurrent
(M$)*

Coût récurrent
(M$) *

Groupes de l'AFPC

 

 

 

 

Services divers (GS)

19,4

Services hospitaliers (HS)

65,6

12,2

2,3

Commis aux écritures et règlements (CR)

1 779,7

1 265,9

149,5

57,2

Traitement mécanique des données (DA)

38,1

6,3

0,4

7,8

Soutien de l'enseignement (EU)

3,2

0,7

0,2

Bibliothéconomie (LS)

29,0

68,2

5,0

0,3

Sténographie et dactylographie (ST)

337,5

166,0

5,9

0,8

Interviewers et interviewers principaux

1,0

Intérêt et autres

911,8

      Total partiel

3 185,3

1 519,2

163,3

66,1

Groupes de l'IPFPC

 

 

 

 

Sciences infirmières (NU)

81,8

236,3

21,5

Nutrition et diététique (ND)

4,0

4,4

0,4

 

Ergothérapie et physiothérapie (OP)

1,3

7,7

0,8

Service social (SW-SCS)

0,4

1,9

0,3

 

    Total partiel

87,5

250,3

23,0

 

Autres règlements

 

 

 

 

Organisation nationale des représentants Indiens et Inuit en santé communautaire (ONRIISC)

45,7

 

 

 

Gestion du personnel (PE)

60,7

57,7

18,0

2,2

Traduction (TR)

17,3

4,5

 

    Total partiel

123,7

57,7

22,5

2,2

Total

3 396,5

1 827,2

208,8

68,3

* Selon l'effectif en septembre de chaque exercice.

** Les données relatives aux coûts antérieurs liés à la parité salariale ne sont pas disponibles pour le domaine des employeurs distincts. Toutefois, la plupart des coûts des montants forfaitaires sont inclus dans le domaine relevant du noyau de la fonction publique, vu que l'Agence des douanes et du revenu du Canada, l'Agence canadienne d'inspection des aliments et l'Agence Parcs Canada étaient visées par le règlement de l'AFPC.

Effet des nouveaux employeurs distincts

Nous devons souligner l'effet du retrait de l'ADRC, de l'AIAC et de Parcs Canada du domaine du noyau de la fonction publique au cours de la période étudiée. Étant donné la taille importante de l'ADRC, où le salaire moyen a été inférieur à celui du reste du noyau de la fonction publique, sa transformation en employeur distinct a provoqué une soudaine hausse du salaire moyen dans le domaine du noyau de la fonction publique.

Jusqu'à la fin des années 1990, le noyau des employeurs distincts se composait de plusieurs organisations dont la plupart étaient de petite taille[49]. La plus importante, le Conseil national de recherches du Canada, se distinguait nettement du noyau de la fonction publique par une structure de classification différente et le fait que ses employés, du moins une partie, étaient représentés par des syndicats différents. Ainsi, les résultats des négociations collectives auxquelles participaient les employeurs distincts ont eu peu de répercussions sur le noyau de la fonction publique, dont la taille était beaucoup plus grande. L'influence était toutefois forte dans l'autre sens, ne serait-ce que parce que les employeurs distincts qui négociaient des mandats et des conventions collectives devaient obtenir l'approbation respective du Conseil du Trésor et du gouverneur en conseil.

Escalade des salaires

Les choses ont nettement changé avec la création de l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) en 1997 et celle de l'Agence Parcs Canada et de l'Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) en 1999. Ces nouveaux employeurs distincts, en particulier l'ADRC, ont une grande taille par rapport au noyau de la fonction publique, et ils ont plus de latitude pour décider de leur politique de rémunération. Ils ont aussi hérité de la même structure de classification et des mêmes syndicats. Tout était ainsi en place pour déclencher un effet de rattrapage des niveaux de salaire, principalement entre le noyau de la fonction publique (170 000 employés) et l'ADRC (50 000 employés).

L'expérience acquise depuis 1999 laisse penser que les choses se sont déroulées ainsi jusqu'à un certain point. Les ententes entre l'ADRC, l'unité de négociation Vérification, commerce et achats (AV) et le groupe Systèmes d'ordinateurs (CS) ont exercé des pressions sur le Conseil du Trésor au regard des groupes analogues du domaine dont il est l'employeur. En retour, l'entente conclue en 2001 par le Conseil du Trésor avec l'Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC) concernant ses quatre unités de négociation a forcé l'ADRC à revoir son approche des négociations.

L'exemple du groupe AV en 2000 illustre certaines des questions en jeu. Dans le cas de l'ADRC, l'unité de négociation AV se compose d'abord de vérificateurs (environ 4 900 sur les 5 250 membres de l'unité). Il va sans dire que les vérificateurs remplissent un rôle central dans les activités de l'ADRC; or, en 2000, il y avait une vive concurrence sur le marché du travail de ces travailleurs. Il était donc tout à fait raisonnable pour l'ADRC d'accepter l'ajout d'un échelon salarial supérieur à chaque niveau pour ses vérificateurs. De plus, étant donné qu'il n'y avait que 350 autres membres des groupes de classification Commerce (CO) et Achat (PG) au sein de l'unité de négociation, l'application de cette mesure à l'ensemble de l'unité s'avérait simple.

Par contre, dans le noyau de la fonction publique, l'unité de négociation AV est constituée de quelque 3 000 membres du groupe PG, de 2 000 membres du groupe CO et de seulement une centaine de vérificateurs. Même si le Conseil du Trésor a résisté à l'idée d'ajouter un échelon à son unité AV, la possibilité que les employés de cette unité rattrapent tôt ou tard leurs collègues de l'ADRC suscite encore de grandes attentes. Cette unité de négociation a opté pour l'arbitrage dans le cadre de la ronde de négociation en cours, espérant probablement qu'un arbitre tranchera en faveur de l'ajout d'un échelon comme cela s'est fait à l'ADRC[50].

À l'opposé, la mesure d'harmonisation de la structure salariale prise par le Conseil du Trésor à l'égard des groupes Administration des programmes (PM), Services administratifs (AS) et Services d'information (IS) dans le cadre de l'entente conclue en 2001 avec le groupe de négociation Services des programmes et de l'administration (PA), représenté par l'AFPC, a amené l'ADRC à incorporer cette mesure à sa propre entente, même si cela ne répondait pas à un besoin opérationnel urgent pour l'Agence. L'approbation de deux jours de congé additionnels par le Conseil du Trésor a aussi donné des maux de tête aux responsables de l'ADRC, où il est nécessaire de remplacer le personnel absent afin de fournir les services de première ligne. (Même s'il en était de même dans le noyau de la fonction publique, la proportion globale d'employés affectés aux services de première ligne et à des quarts de travail n'est pas aussi élevée qu'à l'ADRC.)

Sans entrer dans les détails d'autres cas, il est facile de voir que chaque employeur a ses propres impératifs, ce qui explique pourquoi les résultats des négociations collectives varient. Nul doute que cette situation a concouru dans une certaine mesure à la hausse du salaire moyen, à la fois dans le noyau de la fonction publique et dans le domaine des employeurs distincts – notamment à l'ADRC – par rapport à la hausse qui aurait été nécessaire si ces deux domaines étaient davantage séparés ou gérés de façon uniforme. Le point de convergence des différentes parties, dont la structure et les syndicats se ressemblent plus ou moins, n'existe peut-être que de manière transitoire mais, entre-temps, il favorise une certaine escalade.

Indemnités provisoires de recrutement et de maintien en poste

Un avantage monétaire de taille instauré au cours de la période de 1997 à 2003 est l'indemnité de recrutement et de maintien en poste. En 2002-2003, des indemnités de ce type totalisant approximativement 77,4 millions de dollars ont été versées à un total d'environ 15 500 employés du domaine du noyau de la fonction publique.

Ces indemnités sont souvent dites « provisoires » car, en principe, elles ont été mises en place de façon temporaire en réponse aux hausses salariales accordées aux personnes dont les compétences sont en forte demande sur le marché du travail externe. Mais en pratique, une fois ces indemnités accordées, les employés, les agents de négociation et, souvent, les ministères en réclament fortement le maintien et l'intégration au barème salarial ordinaire, même si les circonstances qui justifiaient leur création ont changé.

Le premier cas récent d'établissement d'une telle indemnité, qui remonte à 1997, visait le groupe Systèmes d'ordinateurs (CS). L'explosion de la technologie de l'information à la fin des années 1990 et le défi de l'adaptation des systèmes informatiques en prévision du passage au nouveau millénaire se sont conjuguées pour justifier une telle indemnité. Des critères ont alors été définis pour évaluer la pertinence d'établir une telle indemnité pour d'autres groupes.

À la fin de 2003, plus de 16 catégories d'employés étaient admissibles à des indemnités de recrutement et de maintien en poste. Les indemnités les plus généreuses visent :

  • les psychiatres légistes de Service correctionnel Canada (SCC) (50 800 $ à 54 250 $ par année);
  • les médecins (13 850 $ à 23 750 $).
  • Les groupes les plus nombreux à toucher des indemnités provisoires sont :
  • le groupe Systèmes d'ordinateurs (CS), dont les plus de 11 300 membres peuvent toucher entre 1 668 $ et 3 420 $,
  • les groupe Ingénieurs (EN), dont les plus de 3 275 employés touchent une prime de 15 % du salaire moyen correspondant à leur niveau de classification.

Le tableau 1015 fournit des précisions sur les groupes qui bénéficient d'indemnités provisoires, la fourchette des montants auxquels ils ont droit et le coût estimatif de ces indemnités pour chaque groupe en 2002‑2003.

Des ententes conclues en 1998 ont donné lieu à l'établissement d'indemnités pour les chercheurs scientifiques du Centre de recherches sur les communications et pour les employés du groupe Services de la défense (DS). En 1999, des indemnités ont été accordées aux groupes suivants :

  • Inspection des produits primaires (PI)
  • Inspection technique (TI)
  • Navigation aérienne (AO).

En 2000, on a accordé des indemnités provisoires aux employés des groupes suivants :

  • Médecine (MD)
  • Sciences infirmières (NU)
  • Psychologie (PS), pour les employés travaillant dans les collectivités des Premières nations éloignées et isolées
  • Architecture et urbanisme (AR)
  • Génie et arpentage (EN)
  • Préposés aux brevets du groupe Réglementation scientifique (SG-PAT).

Tableau 1015

Sommaire des indemnités de recrutement et de maintien en poste (provisoires) dans le domaine du noyau de la fonction publique*, mars 2003

Groupe professionnel

Montants annuels prévus par la politique

Coût estimatif (M$), 2002‑2003

MD – Médecine

13 850 $ à 23 750 $

4,2

MD – MOF (SCC)

8 500 $ à 11 000 $

Psychiatres légistes (SCC)

50 800 $ à 54 250 $

1,7

PS – Psychologie (SCC)

2 000 $ à 12 00 $

PS – Psychologie (CFP)

2 000 $ à 7 500 $

NU – Sciences infirmières (SCC)

4 500 $

3,0

NU – Sciences infirmières

4 500 $ par année

TI – Inspection technique

2 963 $ à 11 000 $

6,8

PI – Inspection des produits primaires à la Commission des grains en C.‑B.

3 000 $ à 5 000 $

0,5

SE – Recherche scientifique

8 000 $

0,5

DS – Services scientifiques de la défense

8 000 $

4,2

CS – Systèmes d'ordinateurs

1 668 $ à 3 420 $

24,1

EN – Ingénieurs

15 % du salaire moyen

26,6

SG – PAT

15 % du salaire moyen

1,9

AR

15 % du salaire moyen

2,4

UT – Enseignement universitaire

3 000 $

0,3

Autres

 

2,5

Total

 

78,7

* Tel qu'indiqué ci-dessous, les employeurs distincts adoptent généralement des indemnités similaires pour les mêmes groupes.

En 2001, cette mesure a été étendue aux groupes suivants :

  • Enseignement universitaire (UT)
  • Services techniques (TC)
  • Recherche (RE)
  • Services de santé (SH).

Enfin, en 2003, des indemnités provisoires ont été accordées au groupe de l'unité de négociation Sciences appliquées et génie (AP), tandis que les indemnités du groupe Navigation aérienne (AO) ont été majorées.

La figure 1016 montre l'augmentation du coût des indemnités provisoires. Alors qu'il s'élevait à 11,2 millions de dollars la première année (12,4 millions de dollars constants de 2003) dans le domaine du noyau de la fonction publique, le coût a atteint 77,4 millions de dollars en 2002‑2003. Ce montant représente moins de 1 % de la masse salariale de ce domaine mais demeure important, tant en termes absolus que pour les quelque 15 500 employés qui y ont droit.

Les employeurs distincts

Les employeurs distincts recourent également à des indemnités de recrutement et de maintien en poste. À l'ADRC, plus de 3 700 employés, soit environ 7 % de l'effectif, touchent de tels paiements. Le plus important groupe de bénéficiaires est celui des Systèmes d'ordinateurs (CS) (plus de 3 300 employés). La valeur totale des paiements en 2002‑2003 a été d'environ 8,7 millions de dollars. Voici d'autres exemples :

Figure 1016
Croissance du coût des indemnités de recrutement et de maintien en poste dans le noyau de la fonction publique, 1997-1998 à 2002-2003

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Croissance du coût des indemnités de recrutement et de maintien en poste dans le noyau de la fonction publique

  • Le CNRC verse une indemnité d'environ 8 000 $ par année à ses agents de recherche et aux agents du Conseil de recherche, ce qui représente une dépense de l'ordre de 10 millions de dollars.
  • Parcs Canada a versé approximativement 680 000 $ en indemnités provisoires à 132 employés des groupes Systèmes d'ordinateurs (CS), Architecture et urbanisme (AR) et Génie et arpentage (EN).
  • L'ACIA verse des indemnités provisoires aux membres des mêmes groupes (le cas échéant) et selon les mêmes modalités que dans le noyau de la fonction publique. En 2002‑2003, l'ACIA a versé approximativement 278 000 $ à 141 employés du groupe CS.

 




SECTION TROIS - COMPARABILITÉ DE LA RÉMUNÉRATION

5. Comparaison de la rémunération fédérale totale aux indicateurs économiques, 1990 à 2003

Dans ce chapitre, nous comparons les tendances de la rémunération fédérale à la performance globale de l'économie.

Emplois et salaires au gouvernement fédéral

Le nombre d'emplois au gouvernement fédéral dans les domaines combinés du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts :

  • était d'environ 245 000 au début de 1990;
  • était inférieur à 200 000 en 1997-1998 et en 1998-1999;
  • a augmenté à environ 235 000 en 2002-2003.

Si nous ajoutons les membres réguliers des Forces canadiennes et les membres réguliers et civils de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) pendant ces années, nous aurions un total d'environ :

  • 350 000 en 1990-1991,
  • le nombre le plus bas en 1998-1999, soit environ 275 000
  • et un total d'un peu moins de 315 000 en 2002-2003.

La variation observée à partir de la première série de chiffres résulte de la tendance générale à la baisse de l'effectif des Forces canadiennes, sauf au cours des dernières années, et de l'effectif relativement stable de la GRC.

Le total des salaires pour le domaine combiné du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts s'élevait à environ 9,1 milliards de dollars courants en 1990-1991; il a diminué à 8,2 milliards de dollars en 1997-1998 et, par la suite, il a augmenté pour atteindre environ 12,5 milliards de dollars en 2002-2003. Si l'on ajoute la masse salariale des Forces canadiennes et de la GRC, nous obtenons un total de 13,3 milliards de dollars en 1990-1991, de 12,0 milliards de dollars en 1997-1998 et de 17,3 milliards de dollars en 2002-2003.

L'évolution des salaires moyens est présentée au tableau 1017.

Tableau 1017

Évolution du salaire moyen

Domaine

1990-1991
Salaire brut moyen

1997-1998
Salaire brut moyen

2002-2003
Salaire brut moyen

Noyau de la fonction publique et employeurs distincts

37 500 $

 41 500 $

 52 800 $

Forces canadiennes

35 000 $

42 600 $

52 700 $

GRC

45 400 $

50 800 $

59 900 $

 

Domaine

Dollars constants de 2002-2003

1990-1991
Salaire brut moyen

1997-1998
Salaire brut moyen

2002-2003
Salaire brut moyen

Noyau de la fonction publique et employeurs distincts

47 600 $

46 300 $

52 800 $

Forces canadiennes

44 500 $

47 500 $

52 700 $

GRC

57 600 $

56 700 $

59 900 $

Notre première analyse de la comparabilité consiste à résumer la situation générale de l'économie canadienne et de l'emploi et des revenus depuis 1990-1991. Par la suite, nous comparons les taux de croissance de l'emploi, de la masse salariale et du salaire moyen dans le secteur public fédéral avec les grandes tendances dans l'économie canadienne en général. L'appendice J renferme les données à l'origine des chiffres présentés dans ce chapitre pour illustrer les tendances des indicateurs économiques.

Indicateurs économiques généraux pour le Canada

Les grandes tendances macroéconomiques au Canada entre 1990 et 2003 témoignent essentiellement d'une saine économie. La figure 1018 donne plus de précisions au sujet de plusieurs indicateurs économiques clés. La figure 1019 regroupe ces indicateurs dans un même graphique sous forme d'indices (1990-1991=100). Nous présentons ci-après une brève description de l'évolution de ces indicateurs.

Figure 1018
Indicateurs économiques clés au Canada, 1990-1991 à 2002-2003

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Indicateurs économiques clés au Canada, 1990-1991 à 2002-2003

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Indicateurs économiques clés au Canada, 1990-1991 à 2002-2003

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Indicateurs économiques clés au Canada, 1990-1991 à 2002-2003

Produit intérieur brut (PIB) nominal

Il s'agit de la valeur totale des biens et services produits pendant l'année au Canada exprimée en dollars courants. Entre 1990 et 2003, le PIB est passé d'environ 680 milliards de dollars à plus de 1,22 billion de dollars, soit une augmentation de 79 %. Cette croissance a été assez stable d'une année à l'autre, mais avec des ralentissements au début des années 1990 et en 2001-2002.

Figure 1019
Comparaison du taux de variation des indicateurs économiques clés du Canada, 1990-1991 à 2002-2003

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Comparaison du taux de variation des indicateurs économiques clés du Canada, 1990-1991 à 2002-2003

Population

Même si la population canadienne totale n'est pas un indicateur économique en soi, c'est une variable essentielle pour présenter la taille du gouvernement en perspective. De 1990 à 2003, on estime que la population canadienne a augmenté d'environ 27,74 millions à 31,39 millions d'habitants, soit une croissance de 13 %.

Chômage

Il s'agit de la principale mesure de la pénurie d'emplois sur le marché du travail canadien et de la concurrence pour les travailleurs en général. Le chômage était élevé au début des années 1990, puis il a diminué au cours de la seconde moitié de la décennie pour se stabiliser entre 7 % et 7,5 % après 1999.

Déficit fédéral

Il s'agit de la mesure de la santé des finances fédérales. Le déficit fédéral est demeuré inférieur à 30 milliards de dollars par année durant la première moitié des années 1990 et il a atteint plus de 40 milliards de dollars en 1992-1933 et 1993-1994. Au cours de la seconde moitié des années 1990, le déficit est devenu un excédent allant d'un minimum de près de 3 milliards de dollars en 1998-1999 à un maximum de plus de 9 milliards de dollars en 2000-2001.

Inflation

Cette mesure indique le niveau de stabilité des prix dans l'économie. De plus de 5 % dans les années 1990, le taux d'inflation a chuté au cours des années suivantes pour se maintenir à l'intérieur de la fourchette cible de 1 % à 3 % l'an fixée par la Banque du Canada depuis 1995.

Logements mis en chantier

Il s'agit d'un indicateur clé de la confiance et de la tendance à court terme de l'économie. Le nombre de logements mis en chantier s'est élevé en moyenne à environ 150 000 par an pendant ces années. L'activité a été modérée en 1995, 1996 et 1998, tombant à un minimum de 111 000 en 1995. Les résultats ont été exceptionnels en 1992, 2001 et plus particulièrement en 2002, année où il y a eu 205 000 mises en chantier.

Emploi et revenus au Canada

Cette deuxième série de données concerne encore l'économie en général, mais elle se concentre sur les indicateurs de l'emploi et des revenus. Encore une fois, la tendance générale pour la période de 1990 à 2003 est positive, avec une croissance importante de l'emploi et du revenu par habitant. La figure 1020 montre les variations du niveau d'emploi dans l'ensemble de l'économie et dans les secteurs privé et public respectivement, ainsi que certains indicateurs choisis des niveaux de revenu. La figure 1021 regroupe ces indicateurs dans un même graphique qui montre leur croissance relative depuis 1990 sous forme d'indice (1990-1991=100). Nous présentons dans ce qui suit un bref commentaire au sujet de chacun de ces indicateurs.

Figure 1020
Emploi et revenus au Canada, 1990-1991 à 2002-2003

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Emploi et revenus au Canada, 1990-1991 à 2002-2003

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Emploi et revenus au Canada, 1990-1991 à 2002-2003

Nombre total d'emplois

Le nombre de personnes ayant un emploi au Canada a augmenté d'environ 13 millions en 1990-1991 à près de 15,6 millions en 2002-2003, une croissance de 19 %. Cela se compare favorablement à l'augmentation de 13 % de la population sur la même période. À l'exception de 1991-1992 et de 1992-1993, l'emploi total a augmenté à chaque année durant cette période.

L'emploi dans le secteur public

L'emploi du secteur public englobe les fonctionnaires des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, ainsi que les employés des municipalités, des commissions scolaires, des établissements de santé et des hôpitaux, des universités et des entreprises appartenant à l'État. Malgré la croissance de la population canadienne et de l'emploi en général, cet indicateur est demeuré assez stable, oscillant dans une fourchette restreinte de 2,65 millions en 1997-1998 et 1998-1999 à 2,94 millions en 2002-2003.

Figure 1021
Comparaison du taux de variation des indicateurs clés de l'emploi et des revenus au Canada, 1990-1991 à 2002-2003

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Comparaison du taux de variation des indicateurs clés de l'emploi et des revenus au Canada, 1990-1991 à 2002-2003

L'emploi dans le secteur privé

Cet indicateur correspond à la différence entre l'emploi total et l'emploi dans le secteur public. Étant donné que l'emploi dans le secteur public a très peu varié de 1990 à 2003, l'emploi dans le secteur privé a clairement dominé le secteur de l'emploi en général. Le nombre de postes dans le secteur privé est passé de 10 millions au début des années 1990 à 12,6 millions en 2002-2003, une augmentation de près de 23 %.

PIB nominal par habitant

Il s'agit de l'indicateur le plus général des variations du revenu par personne. Cet indicateur a augmenté, passant de 24 450 $ en 1990-1991 à 38 700 $ en 2002-2003, soit une hausse de près de 60 % en dollars courants. La croissance correspondante en chiffres réels a été d'environ 30 %. L'augmentation s'est produite en grande partie à compter de 1996-1997 (sauf en 2001-2002 où il y a eu une légère diminution. Soixante-dix pour cent de l'augmentation réelle a eu lieu durant cette période de sept ans.

Gains hebdomadaires moyens

Il s'agit d'une mesure générale des gains hebdomadaires (excluant le temps supplémentaire) pour l'ensemble des employés. En 1990-1991[51], les gains hebdomadaires moyens au Canada étaient évalués à 520,89 $. Ce montant est passé à 662,47 $ en 2002-2003, soit une augmentation d'environ 27 %. Comme l'indique la figure 1020, la croissance a été assez stable pendant cette période.

En principe, les gains horaires moyens constituent une meilleure mesure. Cet indicateur permet d'éviter certains pièges inhérents aux gains hebdomadaires moyens tels que la définition de semaine. Cependant, les données sont disponibles uniquement à compter de 1996-1997, de sorte que notre figure présente l'indicateur qui offre une série de données plus complète. À compter de 1996-1997, les gains horaires moyens ont augmenté, passant de 15,61 $ à 18,04 $ en 2002-2003, un taux de croissance de 16 % – qui est beaucoup plus élevé que l'augmentation de 11 % des gains hebdomadaires moyens observée pendant cette période de sept ans.

Revenu familial médian après impôt

Il s'agit d'un indicateur général important du revenu réellement disponible pour les familles, exprimé en dollars constants de 2002. Après une légère diminution au début des années 1990, cet indicateur est demeuré stable entre 36 000 $ et 37 000 $ jusqu'en 1998-1999 et il a augmenté régulièrement par la suite. En 2002-2003, l'indicateur a atteint 41 300 $, soit une augmentation d'environ 8 % depuis 1990-1991. Par rapport au creux de 1996-1997 (35 900 $), cela représente une hausse de 15 %.

Comparaison des variations dans l'emploi et les salaires, secteur public fédéral et ensemble de l'économie canadienne

Nous examinons d'abord l'emploi dans notre comparaison de l'évolution de l'emploi et des salaires dans le secteur public canadien à la performance de l'ensemble de l'économie. La figure 1022 fait voir les tendances de l'emploi au gouvernement fédéral de 1990-1991 à 2002-2003. La figure 1023 compare ces tendances à l'économie canadienne en général.

Nous présentons deux perspectives sur l'emploi au gouvernement fédéral. La première est une mesure générale que nous appelons l'« emploi dans le secteur public fédéral ». Cette mesure inclut les employés du noyau de la fonction publique, des employeurs distincts, des Forces canadiennes, ainsi que les membres réguliers et civils de la Gendarmerie royale du Canada. Elle n'inclut pas les entreprises fédérales, les sociétés d'État à vocation culturelle, les réservistes et les groupes spéciaux tels que les juges de nomination fédérale, les parlementaires, les employés du Parlement, les ministres et les étudiants. Nous appellerons la deuxième mesure la « Fonction publique et les employeurs distincts ». Celle-ci inclut les principaux ministères et organismes qui composent les domaines du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts.

Pour ce qui est de la première mesure, nous pouvons constater que le nombre d'emplois dans le secteur public fédéral

  • s'élevait à plus de 350 000 au début des années 1990,
  • a chuté à environ 275 000 en 1998-1999 et, par la suite,
  • a augmenté pour atteindre 315 000 en 2002-2003.

Figure 1022
Tendances de l'emploi fédéral et de l'emploi total au Canada, 1990-1991 à 2002-2003

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Tendances de l'emploi fédéral et de l'emploi total au Canada, 1990-1991 à 2002-2003

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Tendances de l'emploi fédéral et de l'emploi total au Canada, 1990-1991 à 2002-2003

Pour la mesure plus étroite visant les domaines du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts, nous constatons une tendance similaire avec

  • un total d'environ 245 000 emplois au début des années 1990,
  • une diminution en deçà de 200 000 emplois en 1997-1998 et 1998-1999 et,
  • de nouveau, une augmentation à environ 235 000 emplois en 2002-2003.

La figure 1023 présente un aperçu très clair de la manière dont les variations de l'emploi fédéral se comparent à celles de l'ensemble de l'économie. Selon les deux mesures que nous présentons, il est évident que le nombre d'emplois au gouvernement fédéral a diminué de façon beaucoup plus marquée que dans le reste de l'économie. Depuis 1998-1999, le taux de croissance dans le secteur public fédéral a été plus élevé que dans l'ensemble de l'économie. Néanmoins, même pour la mesure dont la hausse est la plus rapide – celle des domaines combinés du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts – l'emploi au gouvernement fédéral n'avait pas retrouvé en 2002-2003 son niveau de 1990-1991. Par contre, l'emploi dans le secteur privé en 2002-2003 était presque 23 % plus élevé que le niveau de 1990-1991, tandis que l'emploi dans l'ensemble du secteur public était 7 % plus élevé.

Figure 1023
Comparaison des tendances de l'emploi fédéral par rapport à l'emploi total au Canada, 1990-1991 à 2002-2003

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Comparaison des tendances de l'emploi fédéral par rapport à l'emploi total au Canada, 1990-1991 à 2002-2003

L'indicateur qui fournit peut-être le plus d'information sur la situation de l'emploi dans l'administration fédérale au sein de l'économie canadienne est l'emploi dans le secteur public fédéral en pourcentage de l'emploi total au Canada. La proportion était d'environ 2,7 % au début des années 1990, puis elle a chuté à 1,9 % en 1999-2000 et a augmenté modérément depuis pour se situer à 2,0 %.

Le prochain élément de comparaison est la masse salariale totale. La figure 1024 décrit la masse salariale pour les définitions élargies et restreintes du secteur public fédéral employées dans la section précédente, ainsi que la masse salariale totale au Canada et les totaux correspondants pour le secteur privé, le secteur public provincial et territorial et le secteur public municipal au sens large. Comme dans les sections précédentes, la figure 1025 présente tous ces indicateurs en comparant leurs variations sous forme d'indice (1990-1991=100).

Tel qu'indiqué, nous faisons une distinction entre la fonction publique fédérale élargie, que nous définissons comme étant les domaines du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts, les Forces canadiennes et les membres réguliers et civils de la GRC, ainsi qu'une version plus restreinte se limitant aux domaines du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts.

Pour la fonction publique fédérale élargie, la masse salariale s'est maintenue pendant une décennie dans une fourchette assez étroite, variant d'un maximum de 13,3 milliards de dollars en 1993-1994 à un minimum de 12 milliards de dollars en 1997-1998. Par la suite, la masse salariale totale a augmenté sensiblement, atteignant 17,3 milliards de dollars en 2002-2003. Du niveau le plus bas en 1997-1998 au niveau le plus élevé en 2002-2003, l'augmentation représente 43 %. Si nous examinons la définition plus restreinte de la fonction publique, nous constatons une tendance très similaire puisque la masse salariale varie d'un maximum de 9,8 milliards de dollars en 1993-1994 à un minimum de 8,2 milliards de dollars en 1997-1998, suivi d'une hausse progressive jusqu'à 12,4 milliards de dollars en 2002-2003, ce qui représente des taux de croissance de 36 % de 1990-1991 à 2002-2003 et de 51 % de 1997-1998 à 2002-2003.

Figure 1024
Masses salariales des gouvernements fédéral, provinciaux, municipaux et pour l'ensemble du Canada, 1990-1991 à 2002-2003

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Masses salariales des gouvernements fédéral, provinciaux, municipaux et pour l'ensemble du Canada, 1990-1991 à 2002-2003

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Masses salariales des gouvernements fédéral, provinciaux, municipaux et pour l'ensemble du Canada, 1990-1991 à 2002-2003

La masse salariale totale au Canada a augmenté encore plus rapidement, avec des gains à chaque année. Le total s'élevait à 335 milliards de dollars en 1990-1991 et à 527 milliards de dollars en 2002-2003, une augmentation de 57 %. La croissance dans le secteur privé canadien a été encore plus marquée à 69 %. Par contre, l'augmentation globale dans le secteur public canadien s'est élevée à environ 29 %.

Figure 1025
Comparaison des variations des masses salariales des gouvernements fédéral, provinciaux, municipaux et pour l'ensemble du Canada, 1990-1991 à 2002-2003

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Comparaison des variations des masses salariales des gouvernements fédéral, provinciaux, municipaux et pour l'ensemble du Canada, 1990-1991 à 2002-2003

Nous avons examiné plus particulièrement le secteur public provincial et territorial élargi[52]. La masse salariale dans ce secteur a augmenté de 36 %, passant de 46,6 milliards de dollars en 1990-1991 à environ 63,2 milliards de dollars en 2002-2003. Tout comme le secteur public fédéral, le secteur public provincial et territorial a été très stable pendant plusieurs années, oscillant entre 49 milliards de dollars et 51 milliards de dollars de 1991-1992 à 1998-1999. Comme dans le cas du secteur public fédéral, l'augmentation de la masse salariale a eu lieu, en grande partie, au cours des dernières années.

Une tendance très semblable s'applique au secteur public municipal en général[53]. De 1992-1993 à 1998-1999, la masse salariale totale au niveau municipal au Canada s'est située entre 34,8 milliards de dollars et 35,6 milliards de dollars. Par la suite, cet indicateur a grimpé à 40,4 milliards de dollars en 2002-2003. Comparativement au niveau de 31,0 milliards de dollars enregistré en 1990-1991, ce secteur a augmenté de 30 %.

Si nous examinons la figure 1025, nous pouvons observer ces divers indicateurs comparés sur une base indicielle(1990-1991=100). De 1990-1991 à 2002-2003, la masse salariale totale au gouvernement fédéral a augmenté moins que le total des salaires au Canada ou que la masse salariale du secteur privé, un peu plus rapidement que le secteur public municipal élargi et environ dans la même proportion que le secteur public provincial en élargi. Cependant, si nous examinons uniquement la période débutant en 1997-1998, le taux d'accroissement des deux indicateurs de la masse salariale fédérale a été plus élevé[54] que toute autre mesure.

La masse salariale totale est un indicateur important, mais elle combine l'effet de deux tendances : la croissance des gains moyens et l'augmentation du nombre d'employés[55]. Nous avons déjà examiné les changements relatifs des niveaux d'emploi. Nous examinons maintenant les indicateurs de changement des salaires moyens.

La figure 1026 montre l'évolution des salaires moyens de 1990-1991 à 2002-2003 dans le secteur public fédéral élargi et celui plus restreint que nous avons utilisés dans cette section, ainsi que les gains hebdomadaires moyens[56] et les gains horaires moyens[57] dans le secteur privé canadien et les hausses salariales négociées pour des employeurs des secteurs public et privé dont l'effectif est syndiqué et compte au moins 500 employés. La figure 1027 présente tous ces indicateurs sous forme d'indices aux fins de comparaison[58].

Figure 1026
Aperçu de l'évolution des gains et des salaires moyens dans le secteur public fédéral et l'économie canadienne, 1990-1991 à 2002-2003

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Aperçu de l'évolution des gains et des salaires moyens dans le secteur public fédéral et l'économie canadienne, 1990-1991 à 2002-2003

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Aperçu de l'évolution des gains et des salaires moyens dans le secteur public fédéral et l'économie canadienne, 1990-1991 à 2002-2003

Figure 1027
Comparaison des changements des salaires moyens en termes réels dans le secteur public fédéral et de certains indicateurs généraux de l'économie canadienne, 1990-1991 à 2002-2003

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Comparaison des changements des salaires moyens en termes réels dans le secteur public fédéral et de certains indicateurs généraux de l'économie canadienne, 1990-1991 à 2002-2003

Nous définissons le salaire moyen comme étant la masse salariale totale pour un groupe particulier divisée par le nombre d'employés. Pour le secteur public fédéral élargi, le salaire moyen en dollars courants est passé d'environ 37 000 $ en 1990-1991 à près de 54 900 $ en 2002-2003, une augmentation de 47 %. Pour les domaines combinés du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts, la variation a été légèrement moins importante. Les salaires moyens dans ce contexte ont augmenté de 37 500 $ en 1990-1991 à environ 52 800 $ en 2002-2003, soit une hausse de 41 %. Les taux d'accroissement correspondant en dollars constants a été de 15,8 % pour le secteur public fédéral élargi et de 11,0 % pour les domaines combinés du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts.

En examinant les graphiques de la figure 1026 pour ces deux indicateurs des salaires moyens au gouvernement fédéral, nous notons un point mentionné dans le Volume Deux, à savoir que presque toutes les augmentations observées ont eu lieu à partir de 1998-1999, notamment en termes réels.

Alors comment ces augmentations se comparent-elles, du point de vue macroéconomique, aux tendances dans l'économie canadienne en général? Nous avons présenté précédemment dans ce chapitre des données sur les gains hebdomadaires moyens, à l'exclusion du temps supplémentaire, et les gains horaires moyens. Ces données sont reproduites à la figure 1026. Les gains hebdomadaires moyens ont augmenté d'environ 27 % de 1991-1992 à 2002-2003. À compter de 1996-1997, lorsque les deux indicateurs sont disponibles, les gains horaires moyens ont augmenté plus rapidement[59]. Toutefois, en termes réels, les deux indicateurs n'ont pratiquement pas augmenté depuis 1991-1992. (Le meilleur taux d'accroissement s'observe pour les gains horaires moyens, qui ont augmenté de façon minime, soit d'environ 2 % en termes réels entre 1996-1997 et 2002-2003.)

Si nous examinons exclusivement le secteur privé, nous notons qu'il y a très peu de différence au niveau de la tendance observée des gains hebdomadaires moyens alors que l'augmentation s'élevait à 29,4 % en valeur nominale mais à 1,9 % en termes réels pendant les années visées par l'examen. Pour ce qui est des gains horaires moyens, nous constatons un taux de croissance semblable dans le secteur privé en comparaison de l'ensemble de l'économie. En termes réels, le secteur privé a enregistré une légère augmentation de 2,9 % des gains horaires moyens entre 1996-1997 et 2002-2003.

Enfin, nous examinons les augmentations salariales annuelles dans les secteurs public et privé pour les employeurs dont l'effectif est syndiqué et compte au moins 500 travailleurs rémunérés[60]. Pour le secteur public canadien en général, les augmentations cumulatives en valeur nominale de 1990-1991 à 2002-2003 s'élevaient à 27,2 %; pour le secteur privé, l'augmentation cumulative correspondante représentait 36,5 %. En termes réels, ces hausses cumulées atteignaient 0,2 % et 7,5 %, respectivement, pour le secteur public et le secteur privé.

Nous regroupons ces comparaisons sous forme d'indices à la figure 1027. Il est à noter que la figure présente tous les indicateurs en termes réels (c'est-à-dire en dollars constants). Nous pouvons observer que pendant toute la période écoulée depuis 1990-1991, les hausses salariales annuelles négociées pour les gros employeurs du secteur privé étaient supérieures à celles négociées dans le secteur public en général. Par ailleurs, il en était de même notamment pour les changements de la rémunération moyenne dans le secteur public fédéral jusqu'en 1999-2000, alors que notre mesure générale[61] de la variation de la rémunération moyenne dans le secteur public fédéral a excédé la variation cumulative des hausses salariales annuelles prévues dans les conventions en vigueur dans le secteur privé. En 2001-2002, la rémunération moyenne dans les domaines combinés du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts a aussi dépassé l'indicateur du secteur privé. Les gains hebdomadaires moyens dans le secteur privé ont augmenté plus rapidement que la rémunération moyenne au gouvernement fédéral au début et au milieu des années 1990. Globalement, nous pouvons constater que la rémunération moyenne dans le secteur public fédéral a augmenté sensiblement en termes réels depuis 1997-1998 alors qu'aucun autre indicateur n'a augmenté.

Il y a deux mises en garde importantes concernant cette analyse de la rémunération moyenne. Premièrement, le chapitre 4 nous a appris que l'augmentation de la rémunération moyenne dans la fonction publique fédérale résultait, en partie, de l'évolution de la composition de l'effectif. Cette tendance vers une proportion plus importante de travailleurs ayant des connaissances spécialisées dans la fonction publique et d'un travail plus complexe dans l'ensemble de l'administration publique a contribué à des salaires plus élevés en moyenne. Nous avons estimé dans le Volume Deux qu'environ dix points de pourcentage de l'augmentation de 41 % de la rémunération moyenne nominale dans les domaines combinés du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts entre 1990-1991 et 2002-2003 résultaient de ce phénomène. Nous ne disposons pas de données comparables qui nous permettraient d'évaluer dans quelle mesure un changement semblable dans la composition et le niveau des postes d'autres employeurs s'est également produit.

Deuxièmement, l'utilisation d'un indice pour comparer les taux de variation des divers indicateurs ne nous renseigne pas sur la manière dont le point de départ de la rémunération moyenne se comparait avec le secteur privé. Dans le cadre de nos recherches, nous avons consulté une évaluation qui offre une certaine perspective sur cet aspect. Une étude du Secrétariat du Conseil du Trésor d'octobre 1991 indique qu'à l'échelle nationale, la rémunération moyenne dans la fonction publique fédérale accusait un retard de 8,3 % sur le secteur privé[62]. Comparativement au secteur public provincial, le salaire moyen au gouvernement fédéral accusait un retard de 2,4 %. Ces estimations reposent sur des rapports du Bureau de recherche sur les traitements (BRT)[63], qui a mené des études sur la correspondance des postes dans certaines professions avec les employeurs du secteur privé et d'autres employeurs du secteur public.

Nous ne sommes pas en mesure de déterminer exactement comme ces écarts ont été calculés, ni d'évaluer la crédibilité ou la rigueur de la méthodologie d'échantillonnage. Nous savons toutefois que, selon les représentants des employeurs, ces échantillons du BRT penchaient fortement en faveur des gros employeurs dont l'effectif est syndiqué. Si nous considérons que cette information correspond à la comparaison la plus défavorable, la figure 1027 devrait montrer un point de départ moins élevé (91,7) pour le salaire moyen dans le secteur public fédéral, ce qui réduirait mais n'éliminerait pas l'écart entre cette ligne et l'indice des hausses salariales annuelles selon les conventions en vigueur dans le secteur privé. En d'autres termes, même si nous présumons le pire scénario – un retard de 8,3 % du secteur public fédéral en 1990-1991 – nous pouvons raisonnablement conclure qu'en 2002-2003, les augmentations salariales cumulatives dont bénéficiaient les fonctionnaires fédéraux avaient comblé tout écart pouvant exister avec l'économie canadienne en général. Si l'écart original était en fait plus faible, comme il semble ressortir de la comparaison avec l'ensemble du secteur privé, cela voudrait dire qu'une légère prime en faveur du secteur public fédéral est apparue au début des années 2000.

En plus de cette comparaison de l'évolution de la rémunération moyenne, nous avons également examiné les écarts dans la répartition des salaires au sein de la fonction publique fédérale comparativement à l'économie canadienne dans son ensemble. Avec l'aide de Statistique Canada, nous avons comparé la répartition des gains tels qu'ils figurent dans le recensement de 2000 pour quatre groupes d'employés dans le secteur public fédéral et dans l'ensemble du secteur privé canadien[64]. Au niveau le plus général, nous avons observé la répartition suivante des gains :

 

Fédéral

Privé

Moins de 40 000 $

34 %

52 %

Entre 40 000 $ et 100 000 $

64 %

40 %

Plus de 100 000 $

2 %

8 %

Total

100 %

100 %

La figure 1028 présente une comparaison plus détaillée pour des tranches de revenu de 20 000 $, encore une fois selon le recensement de 2000. La figure 1029 présente la même comparaison pour les quatre groupes de professions : gestionnaires, professionnels, secrétaires et commis. Les données des figures 1028 et 1029 concernent les travailleurs permanents à temps plein (au moins 48 semaines par an) pour des postes dont le recensement compte au moins 400 observations dans l'administration fédérale et dans le secteur privé.

Figure 1028
Gains annuels au gouvernement fédéral et dans le secteur privé par tranches de 20 000 $ de revenu, selon le recensement de 2000

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Gains annuels au gouvernement fédéral et dans le secteur privé par tranches de 20 000 $ de revenu, selon le recensement de 2000

Figure 1029
Gains annuels au gouvernement fédéral et dans le secteur privé par tranches de 20 000 $ de revenu pour les gestionnaires, les professionnels, les secrétaires et les commis, selon le recensement de 2000

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Gains annuels au gouvernement fédéral et dans le secteur privé par tranches de 20 000 $ de revenu pour les gestionnaires, les professionnels, les secrétaires et les commis, selon le recensement de 2000

Figure 1030
Écarts salarial en pourcentage entre le gouvernement fédéral et le secteur privé pour les hommes et les femmes de plus et de moins de 40 ans, selon les recensements de 1990 et de 2000

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Écarts salarial en pourcentage entre le gouvernement fédéral et le secteur privé pour les hommes et les femmes de plus et de moins de 40 ans, selon les recensements de 1990 et de 2000

Le profil général révèle une proportion beaucoup plus faible d'employés fédéraux dont le salaire est inférieur à 40 000 $ que dans le secteur privé, une part beaucoup plus élevée d'employés dont le salaire se situe entre 40 000 $ et 80 000 $, une part semblable d'employés dont le salaire se situe entre 80 000 $ et 100 000 $ et une part relative progressivement plus faible pour les tranches de revenus supérieures à 100 000 $. Lorsque nous examinons les quatre groupes, nous constatons que ce profil général est plus prononcé pour les gestionnaires et les professionnels. Pour les secrétaires et les commis, les revenus inférieurs à 40 000 $ prédominent dans le secteur privé tandis qu'un niveau de revenu supérieur est beaucoup plus fréquent au gouvernement fédéral.

Plus précisément, nous observons qu'environ 83 % des gestionnaires fédéraux ont un revenu se situant entre 40 000 $ et 100 000 $, alors que dans le secteur privé seulement 50 % environ se situent dans cette tranche de revenus. Les professionnels au gouvernement fédéral sont même plus concentrés puisque environ 78 % d'entre eux gagnent un revenu se situant entre 40 000 $ et 80 000 $; dans le secteur privé, on retrouve plus de professionnels dont le revenu est inférieur à 40 000 $ ou supérieur à 80 000 $.

Un facteur important qui influence le profil général est que les données du recensement montrent que les femmes appartenant à ces groupes dans le secteur public fédéral gagnent un salaire plus élevé que leurs homologues du secteur privé. À l'exception des femmes gestionnaires et des femmes professionnelles âgées de plus de 40 ans, ce phénomène était plus prononcé dans le recensement de 2000 que dans celui de 1990. La figure 1030 illustre ces points. Pour les femmes gestionnaires âgées de plus de 40 ans au gouvernement fédéral, l'écart en 1990 était d'environ 12 %; en 2000, l'écart était négligeable. Pour les femmes professionnelles âgées de moins de 40 ans travaillant au gouvernement fédéral, l'écart a grimpé de 11 % en 1990 à environ 13 % en 2000. Pour les femmes secrétaires et les agentes d'administration de moins de 40 ans, l'écart a augmenté, passant d'environ 20 % en 1990 à 27 % en 2000. L'écart correspondant pour les commis de sexe féminin âgées de plus de 40 ans a augmenté, passant de 18 % en 1990 à 28 % en 2000.

Conclusion au sujet des comparaisons générales entre le secteur public fédéral et l'ensemble de l'économie canadienne

Dans ce chapitre, nous avons présenté divers indicateurs sur l'évolution de l'emploi et des revenus dans l'économie canadienne en général. Dans ce contexte, nous avons fait une comparaison très générale entre le secteur public fédéral et l'ensemble de l'économie canadienne pour ce qui est de l'évolution de l'emploi, de la masse salariale, du salaire moyen et de la répartition des gains par tranches de revenus de 20 000 $. À la lumière de cette description et de ces analyses, nous avons tiré cinq conclusions.

La part de l'emploi total et de la population au Canada représentée par l'emploi fédéral a diminué

Premièrement, le niveau d'emploi actuel dans le secteur public fédéral représente une proportion beaucoup plus faible de l'emploi total au Canada que par le passé, malgré la croissance relativement rapide des dernières années. L'emploi dans le secteur public fédéral représentait 2,7 % de l'emploi total au début des années 1990; la proportion a chuté à 1,9 % en 1999-2000, avant de remonter à 2,0 % en 2002-2003. Si l'on voulait rétablir l'emploi dans le secteur public fédéral au niveau qui prévalait au début des années 1990, il faudrait que l'effectif fédéral compte au moins 100 000 employés de plus.

De même, le secteur public fédéral a diminué en proportion de la population canadienne. Alors qu'en 1990-1991, il y avait 12,65 travailleurs dans le secteur public fédéral[65] par 1 000 Canadiens, ce ratio avait chuté à 9,99 en 2002-2003. Même si les rôles joués par le gouvernement fédéral ont évolué durant ces années (en délaissant diverses responsabilités opérationnelles telles que le contrôle de la circulation aérienne, par exemple), il semble que le rendement du service public fédéral par travailleur ou résidant canadien se soit amélioré au cours des années visées par l'examen.

Les salaires fédéraux ont crû plus rapidement que ceux du secteur privé

Deuxièmement, la rémunération moyenne dans le secteur public fédéral a augmenté de façon cumulative depuis 1990-1991 dans une proportion plus élevée (15,8 % en dollars constants) que les hausses salariales annuelles prévues dans les conventions collectives en vigueur dans le secteur privé (7,5 % en termes réels).

La rémunération dans le secteur public fédéral a aussi augmenté beaucoup plus rapidement que les gains hebdomadaires moyens dans le secteur privé, qui ont connu une hausse réelle minime de seulement 1,9 % jusqu'en 2002-2003. Le taux de croissance plus élevé dans le secteur public fédéral est concentré sur la période postérieure à 1997-1998.

Il y a une modeste prime salariale en faveur du secteur public fédéral

Troisièmement, à ce niveau global de comparaison entre les secteurs, il y a tout au plus une légère prime en faveur de la rémunération versée dans le secteur public fédéral en comparaison du secteur privé au Canada. Si nous acceptons comme pire scénario les calculs du Secrétariat du Conseil du Trésor de 1992 fondés sur les données du Bureau de recherche sur les traitements indiquant qu'à l'échelle nationale, la rémunération moyenne dans la fonction publique fédérale accusait un retard de 8,3 % sur le secteur privé, les hausses de salaires cumulatives des fonctionnaires fédéraux jusqu'en 2002-2003 auraient comblé tout écart entre leur rémunération moyenne et celle de l'ensemble de l'économie canadienne[66].

Les salaires fédéraux sont relativement égalitaires

Quatrièmement, la répartition des salaires dans le secteur public fédéral par niveau de gains annuels est plus concentrée que dans le secteur privé canadien en général. Comme l'illustre la figure 1024, la rémunération d'environ 60 % des travailleurs dans le secteur public fédéral se situait entre 40 000 $ et 80 000 $, selon les données du recensement de 2000, par rapport à seulement 35 % environ des employés du secteur privé. En ce sens, on serait en droit d'affirmer que la répartition des salaires dans le secteur public fédéral est relativement égalitaire. Ce profil a prévalu au moins depuis la Commission Glassco, dont le rapport observait la même tendance à verser un salaire égal ou plus élevé aux niveaux subalternes de la fonction publique fédérale que celui versé pour des postes comparables dans le secteur privé, tandis que les postes administratifs et professionnels de niveau supérieur (les postes de cadre) étaient particulièrement désavantagés sur le plan monétaire par rapport au secteur privé.

Les femmes sont mieux rémunérées dans le secteur public fédéral que dans le secteur privé

Cinquièmement, un facteur contribuant au profil décrit dans le paragraphe précédent est qu'en général les femmes sont relativement mieux payées dans la fonction publique fédérale que dans le secteur privé. Ce point est bien illustré à la figure 1026, qui révèle des écarts importants en faveur des femmes dans la fonction publique fédérale par rapport au secteur privé, notamment pour les postes de commis et de secrétaires.

Ceci complète notre comparaison générale des indicateurs de l'emploi et de la rémunération dans la fonction publique fédérale et dans l'économie canadienne en général.

 




6. Études comparant la rémunération dans l'administration fédérale à celles du secteur privé et du secteur public élargi

Dans la première partie de ce chapitre, nous examinons trois études qui présentent des comparaisons générales entre la rémunération dans le secteur public fédéral et l'économie externe. Dans la seconde partie, nous examinons les études établissant de telles comparaisons par rapport à certains groupes et domaines professionnels.

Comparaison du secteur public fédéral au marché du travail externe

Nous examinons deux types d'études, le premier utilisant des données du recensement de 2001 et le second utilisant des données de l'Enquête sur la population active de la fin des années 90 et du début des années 2000. Dans ce dernier cas, nous utilisons aussi des modèles économétriques pour produire des comparaisons tout en neutralisant les écarts imputables à certaines caractéristiques de la population active.

Études du FCEI utilisant les données du recensement

La première étude de notre échantillon et la plus générale a été publiée par la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI)[67]. Fondée sur le recensement de 2001, il s'agit de la quatrième d'une série d'études basées sur les données des recensements de 1986, 1991, 1996 et 2001. Selon la FCEI, les principales constatations de la plus récente étude concernant le secteur public fédéral sont les suivantes :

Prime salariale

Les employés de l'administration publique fédérale bénéficient d'une prime salariale de 15,1 % par rapport à leurs homologues du secteur privé – 23,3 % lorsqu'on prend en compte les avantages sociaux.

On observe une augmentation globale significative de la prime salariale en faveur des employés fédéraux au cours de la période 1995-2000. ... Même si les primes salariales dans le secteur public fédéral sont tombées à 8,9 % en 1995, elles avaient augmenté de façon spectaculaire pour atteindre 15,1 % en 2000.

En comparaison, les employés des administrations provinciales bénéficient d'une prime salariale de 9,1 % par rapport à leurs homologues du secteur privé – 14,8 % si l'on tient compte des avantages sociaux. Entre 1995 et 2000, les primes salariales au niveau provincial ont baissé pour s'établir sous leur niveau de 1990.

Variations régionales

Les primes salariales en faveur de l'administration publique fédérale varient beaucoup selon les provinces... passant d'un sommet de plus de 25 % au Nouveau-Brunswick et au Manitoba à 7,1 % en Alberta, 11,5 % en Colombie-Britannique et 13,5 % en Ontario[68]. Dans les régions métropolitaines, la prime était la plus élevée à Winnipeg (25 %) et la moins élevée à Calgary (2,1 %).

Population

En plus des hausses importantes des primes salariales depuis 1995, l'effectif de la fonction publique fédérale s'est accru de plus de 20 % entre 1998 et le premier trimestre de 2003. Cet accroissement est venu annuler les réductions du milieu des années 1990.

La prime au niveau municipal était de 11,4 % pour les salaires et de 14,2 % en incluant les avantages sociaux. La prime salariale au niveau municipal était donc en baisse par rapport à 1995 (11,8 %).

Définition des emplois

La méthodologie utilisée par la FCEI consiste à comparer de façon plus précise des emplois définis qui peuvent se trouver facilement dans les secteurs privé et public. On a également exclu les emplois qui démontrent des différences salariales excessives[69] entre les secteurs. Seuls les employés à temps plein toute l'année ont été inclus. Au niveau national, 257 emplois ont été inclus (sur un total de 514 groupes professionnels définis dans le système de « classification type des professions »). Pour parvenir à une estimation globale, les résultats au niveau des professions ont été pondérés en fonction des populations pertinentes.

En tant que mesure générale des variations au niveau de la rémunération relative en particulier, des études comme celles publiées par la FCEI sont intéressantes, notamment parce qu'elles soulignent les tendances qu'il faut comprendre. Ces études offrent un point d'accès soulevant des questions qui méritent un examen plus approfondi. De plus, elles nous rappellent que la rémunération totale nécessite tout autant l'attention que les salaires pour comparer les secteurs.

Cependant, les études comme celles menées par la FCEI présument que les exigences en matière de compétences et d'expérience pour les divers postes sont les mêmes dans différents secteurs, ce qui n'est sans doute pas le cas. Ces études de ce genre sont publiées depuis de nombreuses années. Une publication interne du Secrétariat du Conseil du Trésor datant de 1984 indiquait que :

On établit fréquemment des comparaisons entre les gains, les augmentations salariales et la rémunération de la Fonction publique et ceux d'autres secteurs de l'économie canadienne... ces comparaisons ne se fondent pas sur un appariement des tâches... elles se concentrent sur des groupes professionnels généraux comme les économistes, les ingénieurs ou les commis... Ces comparaisons générales ont pour principal défaut de ne pas tenir compte des différents éléments qui entrent en jeu dans la composition des professions ou des métiers que l'on compare... il n'y a aucune raison valable pour que la rémunération ou les taux d'augmentation de groupes généraux comme les ingénieurs... soient les mêmes dans différentes industries ou organisations, si les compétences qu'elles exigent de ces personnes sont différentes de celles exigées dans d'autres industries ou organisations[70].

Comme nous pourrons le constater ultérieurement dans cette section, plus les particularités de certains emplois sont contrôlées pour comparer la rémunération, plus les prétendues « primes » diminuent. Par conséquent, le caractère global des études menées par la FCEI suggère que nous devons les interpréter avec prudence.

De plus, le secteur privé comprend des employeurs très différents. Il est raisonnable d'inclure les employeurs de toutes les tailles et de toutes les catégories dans les évaluations globales. Mais, lorsqu'il faut interpréter les résultats, nous devons tenir compte du fait que le gouvernement fédéral est un gros employeur dont l'effectif est principalement syndiqué. Il est probable qu'il offrira toujours de meilleurs salaires, de meilleurs avantages et une meilleure sécurité d'emploi que la majorité des petites et moyennes entreprises dans le secteur privé tout comme le font les plus gros employeurs dans le secteur privé dont l'effectif est syndiqué.

Comparaison du revenu médian et du revenu moyen

Une deuxième critique a trait à la sélection par la FCEI du revenu moyen comme élément de base pour la comparaison entre les secteurs. La justification est la suivante :

Comme la moyenne arithmétique des revenus peut être faussée par les variations extrêmes causées par les valeurs aberrantes, on utilise les revenus d'emploi médians de chaque profession pour calculer les primes salariales[71].

Figure 1031
Moyenne par rapport à l'avantage salarial médian par région selon les données du recensement de 2001

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Moyenne par rapport à l'avantage salarial médian par région selon les données du recensement de 2001

Bien que ce point de vue soit valable, il en résulte une prime salariale plus élevée que celle calculée à partir du salaire moyen. À l'aide d'une méthodologie semblable à celle utilisée dans le cadre de l'étude de la FCEI, le Secrétariat du Conseil du Trésor a établi une prime salariale de 9,6 % dans le secteur public fédéral au niveau national en ayant recours à des moyennes arithmétiques. Ce résultat, qui est plus d'un tiers plus élevé que la prime indiquée dans l'étude de la FCEI, tient au fait que la répartition des salaires dans le secteur public est beaucoup plus égalitaire que dans le secteur privé. Étant donné que la grande disparité des revenus est une caractéristique fondamentale du secteur privé, l'utilisation de la médiane tend à amplifier les écarts dans la comparaison des niveaux de revenu entre les deux secteurs.

La figure 1031 illustre le fait que l'écart au niveau des primes salariales mesurées à la moyenne par rapport aux gains moyens est assez frappant dans certaines régions, notamment en Alberta, en Ontario et dans la région de la Capitale nationale. L'écart semble plus marqué en Alberta et en Ontario, les régions du pays où l'économie privée est plus développée et axée sur l'entreprise.

L'anomalie dans les données de 2000 imputable à l'équité salariale

La troisième observation critique a trait à un important problème de synchronisation qui semble avoir augmenté artificiellement les revenus dans la fonction publique fédérale indiqués dans le recensement de 2001. L'année 2000, pour laquelle les revenus ont été mentionnés dans le recensement de 2001, était une année inhabituelle pour les gains dans le secteur public fédéral. Comme nous l'avons indiqué dans le Volume Deux, une part importante (environ 1,3 milliard de dollars) des revenus a été versée en 2000 à titre de versements rétroactifs et de paiements d'intérêts aux employés visés par le règlement en 1999 de la plainte déposée par l'Alliance de la fonction publique du Canada relativement à l'équité salariale, ainsi que d'autres règlements salariaux. Statistique Canada nous a confirmé que les traitements et les salaires indiqués par les commis au gouvernement fédéral dans le cadre de l'Enquête annuelle sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR) démontrent définitivement une anomalie en 2000, comparativement aux années immédiatement avant et après[72]. Le tableau 1032 offre les éléments probants détaillés.

Tableau 1032

Traitements et salaires moyens des commis et des autres fonctionnaires fédéraux, Enquête sur la dynamique du travail et du revenu, 1998 à 2001

 Année

Commis

Autres

Tous

Hommes

Femmes

Tous

Hommes

Femmes

1998

31 201

38 064

1998

31 201

38 064

1998

1999

36 124

40 020

1999

36 124

40 020

1999

2000

45 570

46 090

2000

45 570

46 090

2000

2001

36 428

40 218

2001

36 428

40 218

2001

Les commis féminins et masculins constituaient plus de 20 % de l'effectif du domaine combiné du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts. Afin de supprimer l'effet des montants forfaitaires versés en 2000 au titre de l'équité salariale, les salaires et traitements annuels des commis du gouvernement fédéral doivent être dégonflés selon un ratio de 35/45 pour les femmes et de 40/46 pour les hommes. Tenant compte de cette correction, il n'y a plus d'augmentation de l'écart salarial dans la fonction publique fédérale par rapport au secteur privé entre 1995 et 2000. La correction fait en sorte que les données visant les commis équivalent à celles des autres fonctionnaires pour qui les données de l'EDTR ne montrent pas d'augmentation salariale transitoire.

En approfondissant cette analyse, Statistique Canada a calculé que si nous ne corrigeons pas les données compte tenu de la réception des versements rétroactifs liés à l'équité en emploi, l'écart salarial pour les commis entre le secteur fédéral et le secteur privé augmente, passant de 12 % en 1990 à 14 % en 2000. Toutefois, si nous corrigeons les données en utilisant les facteurs de réduction susmentionnés, l'écart salarial pour ce groupe diminue, passant de 12 % en 1990 à 6 % en 2000. La conclusion de cette analyse est qu'on appuie très peu la notion voulant que l'écart salarial entre le secteur fédéral et le secteur privé ait augmenté pour les travailleurs du groupe incluant les secrétaires et les agents d'administration, les commis et les professionnels. Enfin, nous notons que si nous appliquons l'analyse de la FCEI en tenant compte du sexe, l'écart salarial entre le secteur public fédéral et le secteur privé était beaucoup plus élevé pour les employés de sexe féminin (18,1 %) plutôt que pour les employés de sexe masculin (3,2 %). En effet, « la prime salariale » dans l'ensemble du gouvernement fédéral reflète principalement les salaires relativement plus élevés des femmes qui, eux-mêmes, traduisent en partie diverses politiques sociales fédérales, notamment l'équité salariale et les politiques favorables aux familles comme le supplément de revenu à l'assurance-emploi à hauteur de 93 % du revenu annuel pour une période allant jusqu'à un an au titre du congé de maternité et du congé parental combinés.

Ce point soulève une question importante quant à la manière dont nous devrions interpréter les niveaux et les pratiques de rémunération dans le secteur privé en tant que norme de comparabilité. Le secteur privé reflète sans aucun doute les réalités du marché au moment de déterminer les niveaux de salaire. Toutefois, le marché lui-même peut traduire certaines attitudes et pratiques discriminatoires qui désavantagent les femmes. Par conséquent, une politique équitable en matière de « comparabilité » doit tenir compte de ce phénomène.

Études du RCRPP et de Gunderson fondées sur les données de l'Enquête sur la population active

Un deuxième genre d'étude « globale » utilise les données des enquêtes sur la population active et un modèle économétrique pour établir des comparaisons en matière de rémunération qui rectifient les écarts au niveau des caractéristiques de la main-d'œuvre dans les secteurs qui font l'objet d'une comparaison. Les Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques ont publié ce genre d'étude en 2000[73]. En 2003, le Secrétariat du Conseil du Trésor a demandé à Morley Gunderson de mener une étude de suivi[74]. Notre attention porte principalement sur l'étude la plus récente.

Parmi les constatations les plus pertinentes de ces études, mentionnons les suivantes :

Gains plus élevés

Après une vérification des autres variables permettant de déterminer les traitements telles que la formation, l'âge, les états de service, le sexe, la portée de la convention collective et la taille de l'établissement, les employés du secteur public gagnent toujours plus que les employés du secteur privé qui ont les mêmes autres caractéristiques déterminant les salaires.

Aux trois paliers de gouvernement, la prime salariale dans le secteur public a augmenté de 1997 à 2003. L'augmentation a été plus marquée au gouvernement fédéral, passant de 6,9 % en 1997 (autour de la moyenne du secteur public) à 16,2 % en 2003 (au haut de l'échelle).

La prime salariale au gouvernement fédéral en 2003 représente 12,4 % si l'on tient compte de la portée de la négociation collective et de 47 professions, et 23 % si l'on ne tient pas compte de la portée de la convention collective ou des groupes professionnels.

Primes plus élevées pour certains groupes

La prime salariale au gouvernement fédéral, comme c'est le cas pour la plupart des éléments du secteur public, est généralement plus élevée pour les femmes que pour les hommes et pour les postes de service peu rémunérés. Elle est moins élevée (souvent négative) pour les métiers, les travailleurs manuels et les professions du secteur primaire et autour de la moyenne pour les postes de gestionnaires et de professionnels et les postes de commis, de secrétaires et de soutien administratif.

Autres primes dans le secteur public

En ordre décroissant, voici les primes observées dans le secteur public : services d'utilité publique 17 %, gouvernement provincial 16,7 %%, gouvernement fédéral 16,2 %, gouvernement local 13,5 %, autres services publics 9,0 p. 10, santé 7,4 % et enseignement 6,7 %.

Dans l'étude de RCRPP en 2000, Gunderson, Hyatt et Riddell discutent de la relativité interne du recensement et de l'Enquête sur la population active (EPA) en tant que sources de données pour comparer la rémunération dans le secteur public et dans le secteur privé. Les deux enquêtes sont éprouvées, elles existent depuis longtemps et ont une réputation bien établie au sein de Statistique Canada et dans d'autres ministères. Elles comportent un vaste éventail de variables, de contrôle. Le recensement inclut des indicateurs du statut de minorités visibles ou d'immigrants, qui ne sont pas disponibles dans d'autres enquêtes. Toutefois, aux fins de cette analyse, la variable « catégorie de travailleur » incluse dans l'Enquête sur la population active, mais non dans le recensement, est plus pertinente.

En général, Gunderson et ses collaborateurs préfèrent l'Enquête sur la population active. Les principales raisons qu'ils citent incluent trois points :

  • L'Enquête sur la population active mesure les taux horaires et permet de tenir compte des écarts au niveau des heures travaillées alors que le recensement mesure la rémunération annuelle.
  • L'Enquête sur la population active est fondée sur des entrevues au téléphone. Grâce aux interviewers expérimentés, il est moins probable qu'il y ait des erreurs que si les répondants répondent à un questionnaire d'enquête et le retournent comme c'est le cas pour le recensement.
  • Bien que le recensement compte beaucoup plus d'observations que l'Enquête sur la population active, celle-ci offre des renseignements actualisés chaque mois alors que les données du recensement ne sont pas publiées aux fins d'utilisation par le public avant trois ans ou plus après la période visée[75].

Ces deux études présentent une approche empirique intéressante pour explorer des données complexes aux fins de comparaison. Elles consistent à élaborer des équations économétriques qui permettent au chercheur d'utiliser la base de données pertinente de Statistique Canada afin d'évaluer l'incidence de certaines variables telles que l'âge, les états de service, l'éducation, la syndicalisation sur les gains. Cette méthode peut être utilisée pour comparer le secteur fédéral et le secteur privé ou les industries. De cette façon, le chercheur tente d'éliminer les facteurs qui peuvent « légitimement » expliquer les différences au niveau des gains entre les secteurs. Après avoir tenu compte de ces variables, si l'écart salarial favorise le secteur public, il est possible d'interpréter cette variable comme une prime salariale. En effet, les études de Gunderson soutiennent que la prime salariale au gouvernement est une rente économique qui est établie par le secteur public en plus des traitements qui sont déterminés sur le marché du travail canadien en général.

Les primes salariales dans le secteur privé

Comme l'ont indiqué Gunderson et ses collaborateurs, les études globales ne sont pas sans limites importantes. Le point le plus important est l'hypothèse que le modèle économétrique établi par les chercheurs inclut toutes les variables essentielles qui déterminent les salaires offerts sur le marché et qui peuvent expliquer les écarts entre les secteurs public et privé. Afin de déterminer si c'est le cas, les analystes du Secrétariat du Conseil du Trésor ont reproduit le modèle de Gunderson et ont décomposé le secteur privé. L'objectif était de déterminer s'il y a des écarts salariaux importants entre les différents domaines d'activité du secteur privé qui demeurent inexpliqués par les autres variables du modèle.

En supposant que les salaires offerts dans le secteur privé sont dictés par le marché du travail en général et que le modèle inclut toutes les variables explicatives pertinentes, les écarts salariaux dans le secteur privé devraient être relativement faibles. Par contre, des primes salariales importantes et inexpliquées entre les différents domaines d'activité du secteur privé peuvent indiquer que les principaux facteurs déterminants des salaires offerts sur le marché sont absents dans les équations. Par conséquent, l'écart qui demeure entre les secteurs public et privé n'indiquerait pas nécessairement une prime salariale ou que les traitements dans le secteur public ne « correspondent pas » au marché.

En fait, les estimations du Secrétariat du Conseil du Trésor indiquent que de nombreux écarts salariaux entre les domaines d'activité du secteur privé étaient plus élevés que la différence entre le secteur privé dans son ensemble et le secteur public fédéral. Le tableau 1033 présente les résultats de cette analyse. Nous remarquons, par exemple, que l'écart entre les postes professionnels et dans le domaine des finances dans le secteur privé et le secteur minier et le secteur pétrolier est beaucoup plus important que l'écart entre le secteur public fédéral et le secteur privé dans son ensemble. Ces résultats suggèrent que des facteurs clés autres que ceux indiqués dans les équations de Gunderson pourraient expliquer les variations dans le secteur privé et pourraient également aider à expliquer l'écart entre les secteurs public et privé.

Tableau 1033

Écarts salariaux entre les domaines d'activité du secteur privé selon les données de l'Enquête sur la population active*

Domaine d'activité dans le secteur privé

Écart salarial en % par rapport au groupe Professionnels / Finances, en utilisant 10 groupes professionnels

Écart salarial en % par rapport au groupe Professionnels / Finances, en utilisant 47 groupes professionnels

Professionnels / Finances (groupe de référence)

Agriculture

-11,2

-4,8

Secteur minier et pétrolier

19,8

17,7

Construction

12,0

9,0

Secteur manufacturier

0,4

2,0

Commerce de gros

3,5

-2,9

Commerce de détail

-14,5

-10,1

Entreposage

-0,6

-2,2

Divers

-14,6

-10,9

Gouvernement fédéral

13,9

12,2

* Source : Division de la politique de rémunération du SCT.

Professions étroitement correspondantes dans les secteurs privé et public

Gunderson met l'accent sur les résultats des régressions utilisant seulement dix groupes professionnels définis en termes généraux, même s'il calcule les résultats en utilisant également 47 groupes professionnels. En utilisant cette dernière approche, la prime calculée dans le secteur public fédéral diminue de presque 4 points de pourcentage pour s'établir à 12,4 %.

Gunderson et ses collaborateurs ont suggéré que le fait d'utiliser 47 professions pourrait entraîner une sous-estimation des écarts salariaux parce que le gouvernement peut avoir tendance à surclassifier les postes de manière à verser des salaires plus élevés. Cela pourrait s'appliquer si la stratification verticale était un facteur important dans les données, par exemple, si les données relatives aux postes de niveau subalterne et de niveau supérieur pour le même genre de travail étaient présentées comme s'il s'agissait de professions distinctes à ce niveau de désagrégation. Cependant, un examen sommaire des données indique que ce n'est pas le cas. De plus, presque 97 % des postes au gouvernement fédéral dans l'échantillon analysé sont concentrés dans 20 des 47 professions. Selon l'analyse du Secrétariat du Conseil du Trésor, l'utilisation de 47 professions réduit également les écarts salariaux dans les domaines d'activité du secteur privé, ce qui porte à croire que plus vous jumelez les postes et moins il y a d'écart. Ces éléments soutiennent le point de vue selon lequel l'utilisation des 47 professions peut permettre de mieux utiliser toutes les données disponibles pour évaluer l'existence et l'importance d'une prime salariale.

La mesure des variations régionales et saisonnières des écarts salariaux

Les salaires dans le secteur gouvernemental sont généralement identiques pour le même genre de travail, peu importe l'endroit. Par contre, la base de données de l'Enquête sur la population active (EPA) renferme de façon disproportionnée des domaines où les salaires du secteur privé sont relativement faibles en comparaison des grandes régions métropolitaines. Il en est ainsi parce que l'échantillon de l'EPA surpondère les petites localités[76] afin de pouvoir en divulguer les résultats. Puis, afin de permettre l'agrégation des observations provenant des régions qui ne sont pas représentées de façon proportionnelle dans l'échantillon, la méthodologie de l'enquête attribue des facteurs de pondération plus petits aux localités de plus petite taille qui sont sur-représentées dans l'échantillon. L'analyse de régression de l'étude de Gunderson ne tenait pas compte des facteurs de pondération de l'échantillon propres aux micro-données de l'EPA.

L'analyse de régression de l'étude de Gunderson n'a pas tenu compte des poids d'échantillonnage inclus dans les micro-données de l'Enquête sur la population active.

Afin d'évaluer les répercussions si l'on ignore les poids d'échantillonnage, le Secrétariat du Conseil du Trésor a d'abord répété les régressions non pondérées effectuées par Gunderson et ses collaborateurs et a reproduit avec succès leurs résultats[77]. Par la suite, le SCT a appliqué les régressions qui intégraient les poids d'échantillonnage des micro-données de l'Enquête sur la population active. Les résultats ont été les suivants :

  • Selon les données d'avril 2003, la prime salariale au gouvernement fédéral lorsqu'on utilise 10 professions est évaluée à 14,5 %, soit une baisse de 1,7 point de pourcentage par rapport à la prime estimée de 16,2 % en utilisant les données non pondérées.
  • Lorsqu'on utilise 47 professions, la prime salariale tombe à 10,9 % comparativement à 12,4 % en utilisant l'approche non pondérée.
  • De même, lorsqu'on utilise les données d'avril 1997, la prime salariale associée aux modèles utilisant 10 professions et 47 professions diminue de 2,0 et de 1,5 point de pourcentage, respectivement.

Nous en avons conclu que l'utilisation des facteurs de pondération de l'échantillonnage de l'Enquête sur la population active pour rendre les données plus représentatives de la répartition régionale de la population canadienne réduisait considérablement la prime salariale. L'écart se situait entre un minimum de 1,6 point de pourcentage (pour les 47 groupes professionnels selon les données d'avril 1997) et 3,2 points de pourcentage (pour les 47 groupes professionnels selon les données d'avril 2004).

Nous avons aussi observé que Gunderson et ses collaborateurs utilisaient seulement les données de l'Enquête sur la population active recueillies en avril pour leur analyse. Afin de vérifier la stabilité de l'estimation dans le temps, nous avons examiné les données recueillies en octobre 2002, octobre 2003 et avril 2004 en comparaison avec les données recueillies par Gunderson en avril 2003. Étant donné que seulement un sixième de l'échantillon de l'Enquête sur la population active est renouvelé chaque mois, l'utilisation de périodes de référence à six mois d'intervalle offre des échantillons dont les observations diffèrent complètement. Le tableau 1034 résume les résultats de la vérification des variations saisonnières. Voici en résumé nos constatations :

  • Si l'on utilise 47 groupes professionnels, la prime salariale estimative au gouvernement fédéral (non pondérée) diminue, passant de 12,4 %, selon les données recueillies en avril 2003 et présentées dans le rapport de Gunderson et coll., à 11,2 % et à 8,8 % selon les données d'octobre 2002 et d'octobre 2003, respectivement.

Si l'on intègre aussi les facteurs de pondération de l'échantillonnage, la prime salariale diminue davantage, passant de 10,9 % si on utilise les données recueillies en avril 2003 à 8,7 % et 6,6 % si on utilise les données recueillies en octobre 2002 et en octobre 2003 respectivement.

Tableau 1034

Écarts salariaux entre le gouvernement fédéral et le secteur privé selon les données de l'Enquête sur la population active d'octobre et d'avril pour certaines années, en utilisant des régressions pondérées et non pondérées

 

Écart salarial en pourcentage

 

Régressions non pondérées

Régressions pondérées

 

en utilisant 10 groupes professionnels

en utilisant 47 groupes professionnels

en utilisant 10 groupes professionnels

en utilisant 47 groupes professionnels

Octobre 2002

14,3

11,2

11,6

8,7

Avril 2003

16,2*

12,4*

14,5

10,9

Octobre 2003

12,4

8,8

10,2

6,6

Avril 2004

15,3

12,3

12,3

9,1

* Résultats figurant dans le rapport Gunderson.

Les primes salariales semblent être assez sensibles aux facteurs saisonniers. Une explication probable est que le mois d'avril se situe dans la période de pointe des déclarations d'impôt, lorsque l'Agence des douanes et du revenu du Canada a recours à des milliers de travailleurs saisonniers dans des postes de commis pour lesquels il y a une prime salariale relativement élevée par rapport au secteur privé.

Les études de Gunderson et coll., tout comme l'étude des RCRPP fondée sur les recensements, soulèvent des points importants nécessitant un examen plus approfondi. Nonobstant les questions méthodologiques qu'elles soulèvent, il faut prendre au sérieux la tendance à la hausse de la prime salariale dans le secteur public fédéral qui ressort des études de la FCEI et de Gunderson.

Étude de l'Institut de la statistique du Québec jumelant les emplois

L'Institut de la statistique du Québec (ISQ) a le mandat de comparer la rémunération des employés syndiqués dans « l'administration québécoise » provinciale à celle des autres employeurs au Québec, ce qui comprend la fonction publique, les conseils scolaires et les cégeps, les hôpitaux et les autres fournisseurs de services de santé et de services sociaux, et celle offerte par d'autres employeurs syndiqués et non syndiqués du Québec. L'étude comparative annuelle effectuée par l'Institut examine la moyenne des salaires (rajustée pour les heures travaillées) et la rémunération globale. L'analyse s'appuie sur un appariement de certains postes au moyen d'un sondage annuel auprès des établissements comptant 200 employés ou plus. Des comparaisons distinctes avec des employés du secteur privé et du gouvernement fédéral sont aussi présentées dans le rapport.

Le rapport de l'Institut pour 2003[78] présente les points suivants concernant le secteur public fédéral :

  • Les salaires des employés de l'administration québécoise étaient environ 9,1 % de moins que ceux des employés de l'administration fédérale et 7,5 % % pour la rémunération globale[79].
  • La variation relative en comparaison avec le rapport de 2002 indiquait que l'écart s'accentuait entre l'administration québécoise et l'administration fédérale, augmentant de 1,1 % au niveau des salaires et de 0,9 %% au niveau de la rémunération globale.
  • L'administration québécoise accusait un retard par rapport au secteur privé du Québec de 10,6 % au niveau des salaires et de 3,5 % au niveau de la rémunération globale. Pour les entreprises dans le secteur privé dont l'effectif est syndiqué, les écarts étaient plus élevés, soit 13,9 % pour les salaires et 10,8 % pour la rémunération globale. Pour les entreprises dans le secteur privé au Québec dont l'effectif n'est pas syndiqué, les écarts étaient beaucoup moins élevés, soit 4,4 % et la parité respectivement.

Dans son annexe sur la méthodologie jointe au rapport de 2003, l'ISQ a fourni une vaste description de la manière dont il compare les postes et la rémunération[80]. Les comparaisons sont fondées sur 60 emplois repères, représentant 20 % de l'administration publique québécoise, par exemple les professionnels en administration financière, les ingénieurs, les techniciens de laboratoire, le personnel de soutien administratif, les mécaniciens d'automobiles et les cuisiniers. Pour la plupart de ces emplois, deux ou trois niveaux de complexité et de responsabilité ont été analysés. Pour le secteur privé, les comparateurs proviennent des employeurs comptant au moins 200 travailleurs.

Les formes de rémunération visées dans l'évaluation de la rémunération globale incluaient les salaires, les cotisations à un régime de retraite, les assurances de tout genre et les programmes législatifs. Les primes, le temps supplémentaire et la sécurité d'emploi ne font pas partie de l'analyse. Les comparaisons sont faites en fonction des dépenses de l'employeur pour les différentes composantes de la rémunération globale. Les heures normales de travail sont prises en compte pour le rajustement des comparaisons. Le secteur public fédéral comptait les plus longues heures de travail parmi les groupes examinés par l'ISQ.

Comparaison des salaires fédéraux à ceux du secteur privé

Les données détaillées présentées dans l'étude de l'ISQ permettent de comparer les salaires des employés du gouvernement fédéral et ceux des employés du secteur privé du Québec. La comparaison générale avec le secteur privé provincial peut être appliqué au secteur privé canadien dans son ensemble en tenant compte des écarts salariaux entre le secteur privé au Québec et le secteur privé dans l'ensemble du pays. Selon les données de l'Enquête sur la population active de juin 2003, les salaires dans le secteur privé québécois des entreprises comptant 100 employés ou plus étaient 5,5 % moins élevés que la moyenne nationale dans le secteur privé pour la même catégorie d'employés[81].

Le tableau 1035 résume la comparaison entre les salaires au gouvernement fédéral et ceux dans le secteur privé au Québec en utilisant les données de l'ISQ. L'écart salarial total et les écarts salariaux pour les catégories professionnelles sont des moyennes pondérées fondées sur les effectifs réels du gouvernement fédéral[82] pour les postes inclus dans le sondage de l'ISQ. Ces données peuvent différer considérablement de celles indiquées par l'ISQ parce qu'elles sont fondées sur les effectifs du gouvernement fédéral plutôt que sur les effectifs du gouvernement provincial. Cependant, les données sur la rémunération pour les postes servant à calculer ces agrégats et l'appariement des postes sont tirées des travaux effectués par l'ISQ.

Tableau 1035

Écarts salariaux entre les employés du gouvernement fédéral et les employés de niveau comparable dans le secteur privé au Québec, 2003

 

Nombre d'employés,
gouv. fédéral

Salaires,
gouv. fédéral

Salaires,
secteur
privé

Écart salarial

Rémunération totale, gouv. Fédéral, taux horaire

Rémunération
totale, secteur privé, taux horaire

Écart de la rémunération totale

Professionnels

9 484

62 052 $

62 672 $

-1,0 %

45,79 $

43,78 $

4,6 %

Techniciens

9 299

52 044 $

49 262 $

5,6 %

39,20 $

34,84 $

12,5 %

Personnel de bureau

22 175

36 987 $

36 319 $

1,8 %

28,23 $

26,45 $

6,7 %

Services

962

32 626 $

29 258 $

11,5 %

22,51 $

17,13 $

31,4 %

Métiers

1 638

41 295 $

54 568 $

-24,3 %

29,82 $

37,93 $

-21,4 %

Total

43 558

45 725 $

45 350 $

0,8 %

34,33 $

32,24 $

6,5 %

Source : Données sur les salaires dans le secteur privé, l'appariement des emplois et la rémunération totale de l'Institut de la Statistique du Québec.

Selon cette approche, les employés du gouvernement fédéral gagnaient, en 2003, en moyenne 0,8 % de plus que les employés de niveau comparable dans le secteur privé au Québec. L'écart salarial oscillait entre -24,3 % pour les métiers et un taux élevé de 11,5 % pour les employés des services, principalement des cuisiniers et des employés dans les cafétérias. Si l'on tient compte de l'écart au niveau de la moyenne des salaires entre le secteur privé provincial et le secteur privé national, on peut raisonnablement estimer que ces résultats indiquent que les employés du gouvernement fédéral étaient en moyenne payés moins (environ 5 %) que les employés du secteur privé travaillant pour des entreprises comptant 200 employés ou plus.

Toutefois, lorsque tous les autres avantages liés à la rémunération sont inclus (par exemple, les cotisations des employeurs au régime de retraite) et que les salaires sont rajustés pour tenir compte du nombre d'heures travaillées, l'écart au niveau de la rémunération procure un avantage de 6,5 % aux employés du gouvernement fédéral par rapport aux employés du secteur privé au Québec. L'écart total au niveau de la rémunération variait de - 21,4 % pour les métiers à 31,4 % dans le secteur des services.

La principale mise en garde à l'égard de cette comparaison est que les emplois utilisés pour la comparaison étaient limités par les données de l'ISQ. Les postes-repères faisant l'objet du sondage par l'ISQ ont été sélectionnés pour représenter la vaste gamme des postes dans « l'administration québécoise ». Ces postes ne correspondent pas à la structure des postes dans la fonction publique fédérale. Par conséquent, cette comparaison des salaires entre le gouvernement fédéral et le secteur privé devrait être uniquement perçue à titre d'indication de l'écart salarial réel entre les employés du gouvernement fédéral et les employés du secteur privé.

Commentaires au sujet des études « globales »

Nous avons examiné, dans cette section, trois approches distinctes en vue de la comparaison des salaires et de la rémunération globale dans tous les secteurs de l'économie.

Premièrement, la comparaison la plus générale, une étude de la FCEI tirée des données du recensement de 2000, a établi un écart salarial relativement important (15,1 % pour les traitements et 23,3 % pour la rémunération globale) entre le secteur public fédéral et le secteur privé au Canada.

Deuxièmement, Gunderson et ses collaborateurs ont noté un écart salarial un peu plus élevé au gouvernement fédéral (16,2 % pour les salaires), à l'exception de 2003[83], selon les données de l'Enquête sur la population active. Toutefois, cet écart a été établi lorsqu'on mettait l'accent sur dix grands groupes professionnels. Lorsqu'on utilisait 47 professions, l'écart salarial entre le secteur public fédéral et l'ensemble du secteur privé chutait à 12,4 % en 2003.

Troisièmement, en ce qui a trait au rapport de 2003 de l'ISQ, nous avons une évaluation fondée sur une comparaison directe de certains postes. À ce niveau de comparaison détaillé, nous pouvons constater un écart négligeable entre les salaires dans le secteur public fédéral et ceux dans le secteur privé au Québec et, par conséquent, l'ensemble du marché du travail canadien. En général, ces résultats suggèrent le principe général voulant que plus nous définissons rigoureusement les caractéristiques de certaines professions et de certains emplois pour comparer la rémunération et moins nous observons une « prime » salariale générale dans le secteur public fédéral.

Plus tôt dans ce chapitre, nous avons conclu qu'il n'y avait aucune indication que les salaires dans la fonction publique fédérale étaient inférieurs à ceux du secteur privé canadien. Nous en sommes venus à cette conclusion pour deux raisons. Premièrement, le calcul figurant dans l'étude de 1992 du Secrétariat du Conseil du Trésor, fondé sur les travaux du Bureau de recherche sur les traitements pendant les dernières années de son existence, indiquant que sur une échelle nationale, la rémunération moyenne dans la fonction publique fédérale était inférieure de 8,3 % à celle du secteur privé. Deuxièmement, nous avons remarqué que la rémunération moyenne dans le secteur public fédéral avait augmenté plus rapidement à la fin des années 1990 et au début des années 2000 que les indicateurs généraux des augmentations salariales dans le secteur privé. En réunissant ces deux points, nous avons pu conclure qu'au niveau global, la rémunération dans la fonction publique fédérale n'était pas en général inférieure ni clairement supérieure à celle de la fonction publique canadienne.

Même si les études de la FCEI et de RCRPP / Gunderson révèlent une prime salariale importante dans la fonction publique fédérale comparativement au secteur privé canadien, nous avons constaté que les deux études surestiment peut-être l'importance d'un éventuel écart salarial moyen. Par exemple, dans l'étude de la FCEI, la plus grande partie de l'écart salarial s'explique par l'utilisation du salaire moyen au lieu du salaire médian et le montant forfaitaire versé en 2000 au titre de l'équité salariale. Pour l'étude de RCRPP / Gunderson, nous observons que le fait d'utiliser 47 catégories professionnelles au lieu de 10 réduit la prime salariale du quart environ. L'ISQ a constaté une avance très faible dans le secteur public fédéral par rapport au secteur privé, à partir de l'analyse de certains appariements de postes pour 60 postes-repères. En tenant compte de tous les éléments probants, nous concluons qu'en 2003, la prime salariale globale dans la fonction publique fédérale était probablement bien inférieure à 10 %[84].

Toutefois, il est important de noter que toutes les études indiquent une augmentation relative des salaires dans le secteur public fédéral au cours des dernières années comparativement à divers groupes comparables. Selon l'étude de la FCEI, la prime salariale fédérale est passée de 8,9 % en 1995 à 15,1 % en 2000. Dans l'étude de Gunderson et coll., elle a augmenté de 6,9 % en 1997 à 16,2 % en 2003. Pour l'ISQ, l'écart salarial entre l'administration fédérale et celle du Québec a augmenté de 1,1 % entre 2002 et 2003.

Peu importe l'écart absolu réel dans les niveaux de salaires entre le secteur public fédéral et d'autres secteurs, notre propre analyse dans le présent rapport confirme également un taux de croissance relativement rapide (et sans précédent au cours des dernières années) de la rémunération moyenne réelle dans le secteur public fédéral. Si les salaires moyens dans le secteur public fédéral continuent d'augmenter plus rapidement que les salaires dans le secteur privé ou dans d'autres secteurs de l'économie, il y aura certainement une prime salariale en faveur du secteur public fédéral.

Les études globales ne sont pas des outils précis pour évaluer dans quelle mesure un vaste secteur d'emploi accuse un retard ou est en tête par rapport à d'autres secteurs. Toutefois, elles sont clairement utiles pour indiquer les changements d'orientation. Elles peuvent également servir à soulever les questions nécessitant une analyse plus approfondie. Toutefois, nous devons en bout de ligne compléter les analyses globales par des études attentives de certains groupes professionnels. Nous nous attarderons maintenant à décrire et à évaluer plusieurs études menées au cours des dernières années.

Études comparant la rémunération de certains groupes professionnels

Dans cette section, nous examinons quatre études portant sur la rémunération de certains groupes professionnels.

La première est une étude conjointe patronale-syndicale concernant l'unité de négociation des Services de l'exploitation (SV).

La deuxième est une étude concernant l'unité de négociation du Service extérieur (FS) menée conjointement au nom du syndicat, des principaux ministères employeurs et du Secrétariat du Conseil du Trésor.

La troisième est une étude entreprise par un ministère employeur, Transports Canada, à l'égard de l'unité de négociation de la Navigation aérienne (AO).

Le quatrième type d'études englobe deux études parrainées par le Secrétariat du Conseil du Trésor à titre d'employeur. Les groupes visés sont les Systèmes d'ordinateurs (CS) et les groupes de la Direction (EX).

Le cinquième type englobe les études traitant de la rémunération à la GRC.

Pour conclure cette section, nous décrivons brièvement les études pilotes sur la rémunération menée à l'égard de certains groupes professionnels par Statistique Canada au nom du Comité consultatif mixte sur la rémunération du Conseil national mixte pour les syndicats et l'employeur.

Étude conjointe patronale-syndicale (du groupe Services de l'exploitation)

Le meilleur exemple d'une étude conjointe patronale-syndicale menée récemment sur la rémunération pour un groupe de négociation en particulier est l'enquête nationale sur la rémunération de Morneau-Sobeco pour le groupe Services de l'exploitation (SV). Ce groupe inclut une grande variété de professions axées sur les métiers telles que les pompiers, les équipages de navire, les travailleurs des services hospitaliers, les manœuvres, les électriciens, les plombiers, les menuisiers, les préposés au ménage / concierges, les mécaniciens et ainsi de suite. L'étude portait sur les traitements et les avantages sociaux d'un groupe de 31 postes représentant plus de la moitié des 12 000 employés environ de l'unité de négociation (SV)[85]. Le questionnaire de l'enquête a été envoyé à 700 employeurs des secteurs privé et public à travers le pays. Les répondants représentaient au total 172 organismes, environ deux tiers du secteur privé, employant en tout 38 000 travailleurs.

Pour chacun des 31 postes, le rapport Morneau-Sobeco présente le taux horaire moyen ainsi que le 10e, 25e, 50e (médian), 75e et 90e centiles de même que le nombre de titulaires inclus dans l'échantillon pour ce poste. Le rapport documente de la même façon des éléments tels que les heures de travail, les congés et l'accès à un régime d'assurance offert par l'employeur, les régimes de retraite et d'autres avantages sociaux.

Le rapport lui-même ne compare pas ses résultats au taux de rémunération actuel pour les employés des Services de l'exploitation du gouvernement fédéral. Selon l'Alliance de la fonction publique du Canada[86] :

Comme nous l'expliquerons plus loin, la rémunération horaire moyenne des 31 postes qui ont fait l'objet de l'enquête de Morneau-Sobeco s'élève à 21,41 $ (pondérée en fonction du nombre de titulaires de ces postes à la fonction publique fédérale). Actuellement, les titulaires de ces postes, membres de la Table 2, gagnent en moyenne 17,78 $ l'heure, c'est-à-dire 3,63 $ de moins que les travailleuses et travailleurs du marché externe. Exprimée en pourcentage, la moyenne externe est de 20 % supérieure à celle de la Table 2[87].

Dans une évaluation interne, le Secrétariat du Conseil du Trésor a fait l'observation suivante[88] :

En général, les résultats de l'étude conjointe suggèrent que pour plusieurs postes, les taux dans la fonction publique fédérale sont comparables et même supérieurs à ceux des marchés externes (8 postes sur 31)... Toutefois, pour la plupart des postes, les taux dans la fonction publique fédérale sont inférieurs à ceux des marchés externes (23 postes sur 31). Il est important de souligner toutefois que plus de la moitié des comparaisons suggérant que les taux dans la fonction publique sont plus élevés doivent être interprétées avec prudence étant donné les écarts importants au niveau de la répartition régionale entre la population de l'unité SV et la population de l'étude conjointe[89], ce qui peut créer un biais[90]. (TRADUCTION; p. 1 de l'anglais)

Cette évaluation interne faisait la comparaison entre les résultats de l'étude de Morneau-Sobeco avec des données d'autres sources telles que le recensement de 2001 et l'enquête sur les justes salaires menée régulièrement par la Direction générale du travail de Développement des ressources humaines Canada pour des métiers de la construction. Pour 16 des 31 postes, l'évaluation du Conseil du Trésor a déterminé que les traitements étaient moins élevés dans l'une des autres sources, parfois beaucoup moins élevés. Par exemple, pour les manœuvres, l'étude Morneau-Sobeco a établi un écart de 26,3 % par rapport au marché externe alors que l'enquête de DRHC a indiqué un écart de seulement 4,7 %. Il est intéressant de noter que pour les préposés au ménage et les concierges, l'étude conjointe indiquait un écart de 29,4 %, mais l'information sur les salaires dans le recensement de 2001 suggère que les taux dans la fonction publique fédérale et dans le secteur privé sont comparables.

Une autre mise en garde du Secrétariat du Conseil du Trésor est la fiabilité de l'information provenant d'organismes comptant moins de 10 employés pour 15 postes sur 31. Des sources aussi peu représentatives comportent un risque important d'erreurs.

Mais avant tout le rapport de l'enquête de Morneau-Sobeco ne décrit pas explicitement la réalité voulant que les traitements pour les emplois axés sur les métiers varient considérablement à l'échelle régionale au Canada. Le principal rapport présente les taux horaires pour divers rangs centiles comme nous l'avons déjà indiqué mais l'étude n'essaie pas de pondérer les traitements au niveau régional afin de tenir compte des endroits où les employés fédéraux du groupe SV travaillent réellement. En fait, pour 22 des 25 postes payés actuellement en fonction des zones de rémunération, la répartition de la population échantillonnée pour l'enquête variait d'au moins 10 % dans au moins une zone par rapport à la répartition de la population du groupe SV[91]. Pour les cuisiniers, par exemple, seulement 23 % des travailleurs faisant l'objet de l'étude étaient dans la zone 2, alors que 70 % des cuisiniers dans la fonction publique travaillaient dans cette zone.

L'Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC) a toujours indiqué clairement qu'elle visait à éliminer les écarts salariaux au niveau régional et elle a obtenu un succès considérable au moyen de la négociation collective au fil des ans. Néanmoins, le marché du travail externe dans l'ensemble du Canada n'est pas homogène pour la plupart des métiers. Donc, logiquement, on devrait accorder aux métiers des taux régionaux correspondant aux marchés locaux ou du moins conformes aux taux nationaux ou aux taux des zones reflétant la répartition géographique réelle des fonctionnaires fédéraux dans le groupe SV.

Notre examen de l'enquête de Morneau-Sobeco au sujet du groupe des Services de l'exploitation est utile. Il s'agit manifestement d'un travail sérieux. L'enquête appuie certainement la notion générale voulant que les salaires des employés fédéraux occupant des métiers sont inférieurs à ceux du marché externe[92]. Toutefois, la question de déterminer avec précision cet écart peut être débattue longuement. Nul doute que l'étude au sujet du groupe SV contribue de façon utile au débat, mais elle ne règle pas définitivement la question de comparabilité relativement au personnel spécialisé des métiers dans la fonction publique.

Étude parrainée conjointement par le syndicat, l'employeur et les principaux ministères touchés

Nous examinons ici brièvement deux études qui ont été menées au cours des dernières années en collaboration entre le syndicat pertinent, les principaux ministères employeurs et le Secrétariat du Conseil du Trésor à titre d'employeur officiel. La première étude porte sur l'unité de négociation du Service extérieur (FS) et la deuxième, sur le groupe de la Navigation aérienne (AO).

Étude sur le groupe Service extérieur

PricewaterhouseCoopers (PwC) a mené l'étude sur le Service extérieur pour le compte du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, de Citoyenneté et Immigration Canada, du Secrétariat du Conseil du Trésor et de l'Association professionnelle des agents du service extérieur[93]. Il s'agissait d'une vaste étude portant sur des questions autres que la rémunération en soi, notamment l'incidence des affectations à l'étranger par rotation sur les conjoints et les parents âgés des agents du service extérieur, le recrutement et l'avancement de la carrière.

Pour ce qui est de la rémunération, le rapport décrivait comment les échelles salariales du Service extérieur (FS) se comparent à celles d'autres groupes de classification dans la fonction publique fédérale tels que Économie, sociologie et statistiques (ES), Commerce (CO), Administration des programmes (PM), Droit (LA), Services administratifs (AS), Cours et affectations de perfectionnement (CA) et Stagiaires en gestion (MM). PWC a également présenté les résultats d'une enquête sur la rémunération et d'autres conditions d'emploi pour d'autres services extérieurs, des organismes internationaux et des entreprises du secteur privé.

Pour ce qui est de la comparabilité interne, les groupes comparables établis avaient des niveaux de classification dont le maximum de la rémunération était considérablement plus élevé que celui du groupe FS. Parmi les pays qui ont transmis des données au sujet de la rémunération de leurs agents du service extérieur, cinq d'entre eux ont indiqué qu'ils versaient des salaires plus élevés que le Canada, dont deux ayant des salaires 60 % plus élevés. Six pays avaient des niveaux de salaire assez semblables et trois versaient des salaires un peu moins élevés.

Ce qui est le plus frappant dans cette étude du groupe FS, c'est son orientation imprécise. En effet, une grande variété de renseignements qui pouvaient être pertinents ou non ont été recueillis, mais sans théorie précise quant aux comparateurs les plus appropriés et pourquoi. Par exemple, l'étude n'indiquait pas clairement s'il fallait choisir entre l'équité interne et la concurrence externe en tant que principal facteur pour établir les salaires. Pour ce qui est des agents du service extérieur, leur travail ressemble plus à celui d'autres fonctionnaires que tout autre groupe externe canadien. Pourtant, il n'est pas évident de savoir avec quel groupe analogue de la fonction publique nous devrions comparer les salaires du service extérieur. Les employés du groupe FS et leur travail réel regroupent les aspects du travail des économistes, des avocats, des agents de commerce, des administrateurs de programmes et des agents des services administratifs.

Les comparaisons avec les services extérieurs des autres pays ou avec des organismes internationaux sont, en principe, logiques pour ce qui est de la nature du travail. Toutefois, il y a très peu d'éléments indiquant qu'on a pris soin d'assurer des appariements exacts des postes; des postes-repères trop génériques couvrent un large éventail de la valeur éventuelle des postes et peuvent poser des problèmes d'interprétation. Quoi qu'il en soit, chaque pays a son propre niveau de vie et son approche pour ce qui est de la rémunération des fonctionnaires. Le fait que les employés des Nations Unies ou les diplomates représentant les États-Unis ou la Suisse[94] gagnent considérablement plus que les diplomates canadiens a une certaine valeur de propagande. Cependant, cela est très peu pertinent pour déterminer les salaires des Canadiens. De plus, le recours à la simple conversion des devises pour comparer ces salaires ou d'autres salaires est trop simple. Tous les pays fondent leur rémunération sur les influences du marché du travail dans le pays d'origine qui peuvent varier grandement d'un pays à l'autre.

Étude sur le groupe Navigation aérienne

À la fin des années 1990, certains emplois spécialisés sont devenus très en demande sur le marché du travail externe à un point tel que les ministères employeurs ont entrepris des examens sur la rémunération afin de régler des problèmes de recrutement et de maintien en poste de personnel qualifié. Cette décision résultait, en grande partie, de la position du Secrétariat du Conseil du Trésor indiquant qu'il envisagerait des indemnités temporaires de recrutement et maintien en poste pour certains groupes lorsqu'un ministère pouvait présenter des arguments convaincants quant aux problèmes qu'il rencontrait pour assurer une réserve adéquate d'employés compétents.

Un bon exemple est l'étude de Pricewaterhouse Coopers au sujet du groupe des inspecteurs de l'aviation civile demandée en 1998 par Transports Canada[95]. L'étude a été menée dans le contexte de l'expansion de l'industrie aéronautique et de l'industrie du transport aérien à la fin des années 1990 qui a donné lieu à un optimisme général à l'égard de la croissance. Suite à ces attentes, PwC a mené une enquête auprès de 25 exploitants aériens en utilisant 3 postes-repères. Les 14 compagnies qui ont répondu à l'enquête ont été regroupées en 4 volets : les transporteurs nationaux, les affréteurs nationaux, les transporteurs régionaux et les exploitants de services de navette aérienne. Comparativement à tout le groupe de répondants, l'enquête de PwC a établi que les salaires à Transports Canada (groupe de la Navigation aérienne) se situaient entre le 21e et le 31e centile.

Le Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT) a jugé que les données de l'enquête de PwC concernant le marché n'étaient pas valides ni fiables pour plusieurs raisons. Tout d'abord, l'appariement des emplois pour les trois postes-repères a été considéré faible. Deuxièmement, les analystes du SCT ont estimé que les comparaisons salariales ne prenaient pas en considération les questions relatives à la rémunération des heures supplémentaires, les indemnités provisoires actuelles, les différences au niveau des avantages sociaux et les conditions de travail moins stressantes d'un exploitant réglementé par le gouvernement par rapport aux pilotes opérationnels employés par des compagnies aériennes. En résumé, le SCT a soutenu que l'enquête ne satisfaisait pas au simple test de validité apparente en raison de la disparité entre les postes du groupe AO et le marché du travail en général qui était prétendument énorme. Si cela avait été le cas, il y aurait eu un exode à Transports Canada; toutefois, il n'y a pas eu de départs importants.

Par suite des désaccords fondamentaux quant à la validité de l'étude de PwC, les négociations avec l'unité de négociation du groupe AO ont été prolongées pendant plusieurs années. Cela rendait évidente la vulnérabilité des études : le caractère éphémère des marchés du travail effervescents. Au lendemain des événements du 11 septembre 2001 et de la restructuration subséquente des industries internationales et canadiennes du transport aérien, toutes les prévisions de pénuries de pilotes et d'augmentation rapide des salaires ont été inversées alors qu'il y a eu des mises à pied au lieu du recrutement et que les salaires ont diminué.

Études menées pour le noyau de la fonction publique

Dans cette rubrique, nous examinons deux études assez différentes menées pour le compte du Secrétariat du Conseil du Trésor à titre d'employeur pour le noyau de la fonction publique. La première étude porte sur l'unité de négociation du groupe des Systèmes d'ordinateurs (CS) et la deuxième porte sur le groupe de classification Direction (EX) pour lesquels le Conseil du Trésor établit les échelles salariales à partir des recommandations d'un groupe consultatif externe.

Étude de Watson Wyatt sur le groupe Systèmes informatiques

En prévision de la ronde de négociations de 2002-2005 pour le groupe de négociation CS, le Secrétariat du Conseil du Trésor a demandé à Watson Wyatt d'examiner les enquêtes publiées au sujet des salaires dans le domaine de l'informatique[96]. Malgré leurs limites intrinsèques, ces études peuvent aider à situer la rémunération dans la fonction publique dans le contexte du marché du travail général. À partir de résumés des emplois décrivant succinctement les fonctions de 15 emplois grandement utilisés dans l'industrie, Watson Wyatt a recueilli des données d'enquêtes publiées et des données de différentes sources sur la rémunération de postes externes comparables, qui ont été rajustées à une date commune (septembre 2002). Parmi les enquêtes, mentionnons celles effectuées par Watson Wyatt, Mercer, Morneau-Sobeco, la Chambre de commerce de Toronto et Towers Perrin.

L'étude examinait le salaire de base et la rémunération globale en espèces qui incluait, dans le cas de la fonction publique fédérale, l'indemnité de recrutement et de maintien en poste. Pour ce qui est du salaire de base, on a constaté que la fonction publique fédérale versait à peu près le même salaire que celui du marché externe pour les postes faisant partie des trois premiers niveaux de classification du groupe des Systèmes d'ordinateurs (c'est-à-dire, CS1 à CS3), mais un salaire moins élevé aux niveaux CS4 et CS5. Pour ce qui est de la rémunération globale, Watson Wyatt a observé qu'il y avait une prime salariale dans la fonction publique fédérale aux trois premiers niveaux de classification du groupe CS et un écart de plus en plus important aux niveaux CS4 et CS5.

Il est important de souligner que les études de ce genre comparent essentiellement les structures de salaires plutôt que les salaires réels. Afin d'apporter une plus grande précision, Watson Wyatt a fourni de l'information au sujet des échelles salariales au 25e, 50e et 75e centile ainsi que la moyenne arithmétique. Malgré leurs limites intrinsèques, ces études peuvent aider à situer la rémunération dans la fonction publique dans le contexte du marché du travail général. En général, Watson Wyatt a conclu ce qui suit :

Nous sommes en mesure de dire que le secteur public [fédéral] offre des salaires suffisants aux niveaux CS 1 à CS 3. Toutefois, le secteur public offre des salaires insuffisants aux niveaux CS 4 et CS 5. Cette conclusion est fondée sur la comparaison du salaire de base et celle de la rémunération globale. (TRADUCTION)

Il est intéressant de souligner que cette étude n'avait pas discerné les répercussions sur les négociations importantes qui ont eu lieu, par la suite, avec l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC) représentant le groupe de négociations CS. Le règlement éventuel n'a fait aucune distinction dans les rajustements salariaux entre les niveaux CS 1 à CS 3 et CS 4 et CS 5. D'un autre côté, la tenue de cette étude peut avoir eu des répercussions sur le processus de négociation, par exemple, en rendant l'IPFPC quelque peu réticent à recourir à un comité de conciliation lorsqu'il aurait dû s'opposer aux constatations du rapport de l'enquête[97].

Étude de Hay Associates sur le groupe EX

Enfin, nous présentons une comparaison de la rémunération des cadres de direction avec celle des cadres de direction dans le secteur privé et le secteur public général effectuée par Hay Associates en 2001[98]. L'étude a été menée pour le compte du Secrétariat du Conseil du Trésor à l'appui du travail du Comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction. Le marché de comparaison comprenait deux sous-marchés :

  • Le premier était un groupe de 75 organismes dans le secteur public élargi, y compris les municipalités, les provinces, les universités, les commissions scolaires, les collèges, les établissements de santé, les sociétés d'État, les organismes gouvernementaux et les organismes sans but lucratif.
  • Le deuxième comprenait 283 entreprises privées dans la catégorie industrielle et financière faisant partie de la base de données sur la rémunération du Groupe Hay.

Le système Hay permettant d'évaluer la portée et la difficulté des postes a été utilisé pour assurer la comparaison des postes au même niveau de difficulté. Les éléments de rémunération inclus dans l'analyse étaient les suivants :

  • le salaire;
  • les primes;
  • la valeur actuarielle des avantages payés par l'employeur;
  • les avantages indirects et les congés payés;
  • la valeur actuarielle en cours des incitatifs à long terme[99].

Les constatations (utilisant les médianes aux fins de comparaison) étaient les suivantes :

  • Les salaires des cadres de la fonction publique fédérale différaient de plus ou moins 5 % de ceux dans la fonction publique canadienne en général, à l'exception du niveau 2 de sous-ministre (DM) où il y avait un écart de 13 %[100]. (TRADUCTION, p. 30 de l'anglais)
  • Toutefois, comparativement au secteur privé canadien, il y avait un écart de 10 % dans le secteur public pour des postes comparables équivalant au niveau EX 1, où l'écart augmentait d'un niveau à l'autre pour atteindre 42 % au niveau EX 5 et 84 % au niveau DM 2[101]. (TRADUCTION; p. 31 de l'anglais)
  • Les objectifs exprimés en pourcentage pour les primes au rendement dans la fonction publique fédérale représentaient, en général, la moitié des objectifs dans le secteur privé canadien et étaient égaux ou inférieurs à ceux dans le secteur public canadien en général[102]. (TRADUCTION; p. 32 de l'anglais)
  • Les incitatifs à long terme (c'est-à-dire, les options d'achat d'actions) n'étaient pas offerts dans la fonction publique fédérale et étaient relativement rares dans le secteur public élargi. Toutefois, ils étaient fréquents dans le secteur privé, notamment à des niveaux plus élevés de la haute direction. La valeur médiane actuelle au niveau équivalent de DM 2 était de 35 % du salaire[103]. (TRADUCTION; p. 33 de l'anglais)
  • Pour ce qui est des avantages non monétaires (proportionnellement à la rémunération de base), les cadres de la fonction publique avaient des salaires plus élevés que dans le secteur public élargi, notamment au niveau équivalent de DM 2. Comparativement avec le secteur privé, la fonction publique fédérale accusait un léger retard[104]. (TRADUCTION; pages 34-36 de l'anglais)
  • Pour ce qui est de la rémunération globale, le Groupe Hay a constaté qu'elle était plus élevée, allant de 2 % au niveau EX 3 à 8 % au niveau EX 1 pour la fonction publique fédérale par rapport au secteur public élargi au Canada. Comparativement au secteur privé canadien, toutefois, la fonction publique affichait un retard et les écarts devenaient progressivement plus importants, commençant à 17 % au niveau EX 1 et s'élevant à 147 % au niveau DM 2[105]. (TRADUCTION; p. 37 de l'anglais)

Il s'agit d'une étude crédible fondée sur une méthodologie éprouvée et très répandue. Il y a certains éléments subjectifs qui pourraient faire l'objet de critiques.

  • Premièrement, le système Hay permettant d'évaluer les postes peut être appliqué différemment dans différentes circonstances. Par exemple, le Groupe Hay déduit les notations par point dans la fonction publique fédérale en divisant par un facteur de 1,113 pour les normaliser aux fins de comparaison avec les notations des postes dans sa base de données à l'échelle du Canada.
  • Deuxièmement, les méthodes servant à évaluer les avantages sociaux appliquent les méthodes normalisées du système Hay et cette approche pourrait être certainement débattue. À titre d'exemple, le Groupe Hay n'attribue pas de valeur à la protection au titre des soins médicaux et des soins dentaires puisque cette protection est « rare dans le marché général ».

Néanmoins, les mises à jour annuelles de cette comparaison de la rémunération globale pour les cadres de direction offrent un point de comparaison uniforme pour le Comité consultatif sur le maintien en poster et la rémunération du personnel de direction pour formuler des recommandations à l'égard des rajustements à apporter à la rémunération des cadres au gouvernement fédéral.

Étude de Mercer sur la GRC

À compter de 1993, et par la suite chaque année depuis 1998, William M. Mercer a produit pour le Conseil de la solde de la GRC une comparaison annuelle de la rémunération globale des principaux services de police au Canada. Comme nous l'avons décrit dans le chapitre 7, cette enquête vise six grands services de police municipaux à travers le pays, les deux services de police provinciaux ainsi que la GRC. Le rapport fournit des précisions au sujet de la rémunération en espèces, des heures de travail, des congés, des régimes de retraite et des régimes d'épargnes, des avantages sociaux collectifs de tout genre et autre rémunération, des indemnités et des avantages directs. Cette information permet de déterminer les rajustements au niveau des salaires et des avantages qu'il faudrait recommander au Conseil du Trésor aux fins d'approbation.

Cette enquête suit une méthode très factuelle. Un nombre peu élevé de groupes comparables appropriés sont entièrement documentés. On peut se demander si le travail de tous ces services de police est strictement le même. La GRC, par exemple, combine ce qu'on pourrait appeler des services de police provinciaux et municipaux « classiques » jouant un rôle national qui va bien au-delà du rôle que d'autres services assument, notamment dans des domaines tels que la sécurité nationale. Néanmoins, il est probable que les similitudes sont aussi importantes qu'elles peuvent l'être dans d'autres études comparatives.

Commentaires généraux au sujet des études à plus petite échelle

Contrairement aux études globales décrites dans la section précédente du présent chapitre, les études à plus petite échelle peuvent être très utiles, en principe, pour comparer les pommes avec des pommes en ce qui a trait à la rémunération. Toutefois, comme nous avons pu le constater en examinant les enquêtes et les études très différentes qui ont été analysées dans cette section, il n'y a aucune approche ni aucune norme établie qui ont été appliquées uniformément dans la tenue de ces études. Comme on peut s'y attendre, les études ont tendance à être menées sur demande en vue de la négociation collective ou d'un autre processus de détermination de la rémunération plutôt que d'un calendrier régulier. La plupart des études sont, de par leur nature, spéciales, entreprises une seule fois et non reproduites, ce qui réduit considérablement leur utilité. Ce qui est problématique, c'est que dans certains cas, ces études paraissent déséquilibrées puisqu'elles semblent souligner des points de comparaison qui sont avantageux pour les initiateurs des études.

On a reconnu depuis longtemps la nécessité de rétablir de façon permanente la capacité de mener des études sur la rémunération de certains groupes dans la fonction publique fédérale afin d'aider à établir une base de données commune pour la négociation collective. La Loi sur la modernisation de la fonction publique, adoptée par le Parlement en novembre 2003, prévoit l'établissement d'une unité de recherches sur les traitements au sein de la nouvelle Commission des relations de travail dans la fonction publique.

Au cours des dernières années, le Conseil national mixte a demandé à un Comité consultatif conjoint sur la rémunération (CCCR) représentant les syndicats et la direction d'entreprendre le travail de défrichage pour des études systématiques sur la rémunération. Depuis 2001, tout particulièrement, le CCCR a travaillé de concert avec Statistique Canada en vue de préparer une enquête pilote sur la rémunération dans des établissements privés comptant au moins 50 employés, le secteur public fédéral et le secteur public élargi en Ontario[106]. Le projet pilote prévoit la tenue d'une enquête auprès d'un échantillon d'environ 2 900 organismes, dont 1 650 dans le secteur privé et 800 dans le secteur public non fédéral. La méthode de collecte comportera des entrevues individuelles utilisant un questionnaire pour près de 90 % des répondants, et pour le reste, des organismes plus éloignés feront l'objet d'une enquête au moyen d'entrevues par téléphone.

Il est trop tôt pour pouvoir prédire le niveau de succès de l'enquête. Toutefois, c'est encourageant de plusieurs façons. L'approche a été élaborée par Statistique Canada en étroite collaboration avec des représentants du Conseil du Trésor et des agents négociateurs. Soit dit en passant, il semble que tous les participants aient répondu de façon très professionnelle. La limite de 50 employés est raisonnable. Des employeurs dont l'effectif est syndiqué et d'autres dont l'effectif n'est pas syndiqué seront inclus. La méthode d'échantillonnage devrait donner des résultats représentatifs. Les entrevues en personne ou par téléphone devraient permettre de produire un rapport fiable et uniforme.

Par contre, le processus a été extrêmement long. À partir du début du travail conjoint sur le projet pilote jusqu'à l'obtention des premiers résultats, il se sera écoulé au moins trois ans et demi. Il est raisonnable et nécessaire de prendre le temps d'investir dans une méthodologie rigoureuse et d'établir la confiance dans un tel domaine. Toutefois, pour que le processus soit utile à long terme, il sera nécessaire de produire des résultats plus rapidement. On peut craindre également que la direction ou les syndicats puissent rejeter le processus si les résultats initiaux ne leur plaisent pas.

Nous terminons par ces remarques notre examen des études de comparabilité de la rémunération au niveau global et sur une petite échelle, notamment en ce qui a trait aux questions relatives aux salaires et aux traitements.

 




7. Comparaison des régimes de pension

Les prestations de pension de retraite et autres avantages en 2002-2003 représentaient un ajout d'au moins 39 p .100 aux salaires versés aux fonctionnaires fédéraux. Pour ce qui est des avantages, le régime de pension (que l'on nomme également régime de pension de retraite) est de loin l'élément le plus important, tant du point de vus de la valeur pour les employés que du coût pour l'employeur[107].

Il existe plusieurs régimes de pension pour les employés du secteur public fédéral. Le régime de pension de la fonction publique s'applique au noyau de la fonction publique et à la plupart des employeurs distincts. Il y a aussi le régime de pension de retraite des Forces canadiennes, le régime de pension de retraite de la Gendarmerie royale canadienne ainsi que le régime de pension de retraite des juges de nomination fédérale et des députés[108].Les trois premiers régimes sont très semblables pour ce qui est des prestations et des mécanismes de financement, mais il y a des différences importantes. Cette section porte principalement sur le régime de pension de retraite de la fonction publique et inclut des renvois pertinents aux autres régimes.

Aperçu du contexte des régimes de pension au Canada

Afin de mettre en contexte le régime de pension de la fonction publique fédérale et sa comparabilité avec d'autres régimes, nous présentons d'abord un portrait-éclair du contexte général des régimes de pension au Canada[109]. Le système canadien de revenu de retraite comprend notamment trois composantes :

  • les régimes de retraite de l'État, principalement la Sécurité de la vieillesse et le Régime de pensions du Canada et le Régime de rentes du Québec;
  • les régimes de retraite offerts par l'employeur et
  • les placements personnels à l'abri de l'impôt.

La première et la troisième composantes sont accessibles pour tous les Canadiens.

Sécurité de la vieillesse

Les prestations de sécurité de la vieillesse sont versées à presque tous les résidants canadiens âgés de 65 ans ou plus qui habitent au Canada depuis au moins 10 ans après avoir atteint l'âge de 18 ans. Les prestations s'élevaient à un maximum de 467 $ par mois (juillet à septembre 2004), incluant un supplément pouvant atteindre 555 $ par mois pour les personnes âgées à faible revenu. Les prestations sont « récupérées » par le régime fiscal lorsque le revenu du bénéficiaire dépasse 57 000 $ et jusqu'au recouvrement intégral lorsque le revenu atteint 92 400 $.

Régime de pensions du Canada/Régime de rentes du Québec

Presque tous les travailleurs canadiens sont tenus de cotiser au Régime de pensions du Canada ou au Régime de rentes du Québec, selon leur province de résidence. En 2003, la première tranche de 3 500 $ était exemptée) et la cotisation salariale représentait 4,95 % du revenu salarial entre 3 500 $ et 39 900 $. L'employeur verse la cotisation équivalente. Les prestations sont fondées sur les gains antérieurs et le nombre d'années à tire de cotisant. Le maximum en 2004 s'élevait à 814 $ par mois pour les personnes retraitées et à 993 $ par mois pour les personnes qui ont été déclarées invalides.

Régime enregistré d'épargne-retraite

Le principal abri fiscal pour l'épargne-retraite individuelle est le Régime enregistré d'épargne-retraite. Selon la Loi de l'impôt sur le revenu, les Canadiens pouvaient contribuer un montant jusqu'à concurrence de 14 500 $ par année en 2003. Le capital et les intérêts ne sont pas imposables jusqu'à ce que les prestations soient versées à titre de revenu.

Régimes de retraite parrainés par l'employeur ou le syndicat

La deuxième composante, les régimes de retraite offerts par l'employeur ou le syndicat, inclut les régimes de pension agréés (RPA), les régimes enregistrés d'épargne-retraite collectifs (REER collectifs) et les régimes de participation différée aux bénéfices (RPDB). Naturellement, pour avoir accès à ces régimes, il faut avoir un emploi auprès d'un employeur (ou être membre d'un syndicat) qui a décidé de parrainer un tel régime ou de tels régimes.

Au début de 2003, 5,5 millions de travailleurs rémunérés participaient à 14 376 régimes de pension agréés. C'était la cinquième année consécutive que l'adhésion augmentait et cette croissance est attribuable, en grande partie, à la participation des femmes sur le marché du travail, notamment dans le secteur public. En général, le nombre de travailleurs rémunérés au Canada participant à un RPA représentait environ 40 % en 1992[110].

Les RPA peuvent inclure des cotisations de l'employeur et de l'employé (appelés régimes « contributifs ») ou de l'employeur seulement (« non contributif »). En général, environ 58 % des régimes en 2002, visant environ 73 % des participants, étaient contributifs. Presque tous les régimes non contributifs se trouvaient dans le secteur privé ou environ 49 % des participants étaient visés par de tels régimes. Cette proportion avait quelque peu diminué par rapport au niveau d'environ 53 % au début et au milieu des années 1990.

En 2002, le total des cotisations patronales et salariales à des régimes enregistrés d'épargne-retraite s'élevait à 23,5 milliards de dollars. Ce pourcentage était environ 14 % (ou près de 3,1 milliards de dollars en dollars constants de 2002) plus élevé que l'année précédente. Ce total était le plus élevé depuis 1991. Les cotisations patronales ont augmenté de 18 %, pour atteindre 15,6 milliards de dollars alors que les cotisations salariales ont augmenté de 5 %, pour atteindre 7,9 milliards de dollars.

Comparaison des régimes de pension dans les secteurs public et privé

Comme l'illustre la figure 1036, l'écart entre le secteur privé et le secteur public au niveau de l'adhésion s'est accentué au cours des dernières années. Après une diminution importante du nombre de participants dans le secteur public au milieu des années 1990, le nombre de participants à des RPA dans le secteur public a augmenté de 5 % entre 1998 et 2000 (de janvier à janvier) pour atteindre 2,5 millions de participants. Ce pourcentage était plus ou moins égal au niveau d'adhésion à la fin des années 1994 avant la réduction importante des effectifs. En revanche, après une augmentation marquée entre 1998 et 2001, le nombre de participants à des RPA dans le secteur privé s'est stabilisé en 2001 et représente environ 2,9 millions de travailleurs.

Les régimes dans le secteur public sont, en général, beaucoup plus importants que ceux du secteur privé. Même si seulement 9 % des RPA sont dans le secteur public, ils représentaient en janvier 2002 près de la moitié (46 %) de tous les participants à des RPA.

Figure 1036
Employés participant à un régime de pension agréé dans les secteurs public et privé, 1992-2002

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Employés participant à un régime de pension agréé dans les secteurs public et privé, 1992-2002

Source : Statistique Canada, Régimes de pensions au Canada, 2002.

La distinction la plus importante à l'égard des RPA se trouve entre les régimes à cotisations déterminées (appelés également « RCD ») et les régimes à prestations déterminées (RPD).

Le profil de la participation à des régimes à prestations déterminées et à des régimes à cotisations déterminées diffère entre le secteur public et le secteur privé.

Comme l'illustre la figure 1037, les deux types de régimes enregistrés ont diminué considérablement au niveau du nombre.

Figure 1037
Nombre de régimes de pension agréés et de participants au Canada, 1992 à 2002

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Nombre de régimes de pension agréés et de participants au Canada, 1992 à 2002

Étant donné le nombre relativement stable de participants à des RPP, il est évident que la réduction du nombre de régimes actifs a touché principalement les régimes moins importants.

Régimes à prestations déterminées

Les régimes à prestations déterminées prévoient des prestations de pensions dont le montant est établi selon une formule énoncée dans le texte du régime. En général, les cotisations patronales ne sont pas fixées à l'avance, mais sont calculées en fonction des évaluations actuarielles, c'est-à-dire, qu'elles sont établies en tenant compte du coût des prestations prévues, réduit du montant des cotisations salariales, le cas échéant.

Au cours des dernières années, les régimes à prestations déterminées ont continué de dominer quant au nombre d'employés visés.

  • 82 % de tous les participants à un régime de pension agréé cotisaient à des régimes de prestations déterminées, soit une diminution par rapport au pourcentage de 90 % en 1992.
  • Les régimes à prestations déterminées ont diminué, passant de 7 870 en 1992 à 6 777 en 2003.
  • Les participants à un régime de pension à prestations déterminées totalisaient 4,5 millions, une baisse de 5 % par rapport aux 4,78 millions de participants recensés en 1992, mais en hausse par rapport au creux de 4,35 millions de participants en 1999.

Même si les régimes couvrant 500 employés ou moins représentaient, en 2002, plus de 87 % des régimes à prestations déterminées, plus de la moitié des participants cotisaient à des régimes qui visaient 30 000 employés et plus. En effet, comme l'indique le tableau 1038, les régimes de grande taille dominent l'adhésion à des régimes à prestations déterminées, notamment dans les gouvernements fédéral et provinciaux, y compris les enseignants et les municipalités.

Au début de 2000, 69 % des membres du secteur public participaient à l'un des 13 régimes à prestations déterminées du secteur public, représentant au moins 30 000 participants.

Le rajustement automatique des prestations déterminées pour compenser l'inflation est courant dans le secteur public, mais rare dans le secteur privé. En 2002, comme l'illustre la figure 1039 ci-après, environ la moitié des régimes dans le secteur public couvrant environ 79 % des participants bénéficiaient d'une indexation automatique. Plus de 30 % des participants dans le secteur public obtenaient une pleine compensation pour les variations de l'indice des prix à la consommation (IPC) et un autre 41 % recevaient une compensation partielle. Cependant, dans le secteur privé, plus de 80 % des participants n'avaient pas le droit automatiquement à un rajustement par suite de variations de l'IPC. Un peu plus de 2 % des participants du secteur privé bénéficiaient d'une indexation intégrale à l'IPC.

Tableau 1038

Nombre de RPA et de participants selon la taille de l'établissement, 2002

Taille de l'établissement
(nombre d'employés)

Régimes

Participants

Nombre

%

Nombre

%

0 - 9

2 435

38,7

4 624

0,1

10 - 49

1 050

16,7

28 457

0,6

50 - 99

667

10,6

48 001

1,1

100 - 499

1 345

21,4

312 403

6,9

500 - 999

354

5,6

250 267

5,5

1 000 – 4 999

335

5,3

691 330

15,2

5 000 – 9 999

46

0,7

321 709

7,1

10 000 – 29 000

34

0,5

592 297

13,1

30 000 et plus

23

0,4

2 285 853

50,4

Total

6 289

100,0

4 534 941

100,0

Figure 1039
Répartition en pourcentage des participants à un RPA (régimes à prestations déterminées seulement) selon la politique d'indexation des prestations de pension à l'inflation et le secteur, 2002

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Répartition en pourcentage des participants à un RPA (régimes à prestations déterminées seulement)

RPA à cotisations déterminées

Les régimes à cotisations déterminées engagent l'employeur ainsi que les employés, dans le cas de régimes contributifs, à verser un pourcentage précis des gains ou un montant particulier par heure de travail ou par année de service. Les prestations de pension dans le cas des régimes à cotisations déterminées varient selon le montant des cotisations accumulées et le rendement de ces fonds. De même, les régimes de participation aux bénéfices sont un genre de régime à cotisations déterminées, sauf que les cotisations sont exprimées en pourcentage des bénéfices.

  • En janvier 2003, 83 % des participants à un régime à cotisations déterminées travaillaient dans le secteur privé.
  • Les régimes à cotisations déterminées ont diminué d'environ 16 %, passant de 8 713 à 7 347 pendant la décennie depuis janvier 1993.

Le nombre d'employés couverts par des régimes à cotisations déterminées a connu une hausse constante, passant de 469 100 en 1992 à 830 000 en 2002, soit une augmentation de 77 %.

En 2002, environ 60 % des participants cotisaient à des régimes comptant moins de 1 000 participants. Comme le montre le tableau 1040, plus de 98 % des régimes à cotisations déterminées comptaient moins de 1 000 participants.

Tableau 1040

Nombre de RPA et de participants selon la taille de l'établissement, 2002

Taille de l'établissement 
(nb d'employés)

Nombre de RPA

%

Nombre de membres

%

0 - 9

1 814

24,8

8 342

1,0

10 - 49

3 142

43,0

78 112

9,8

50 - 99

995

13,6

68 966

8,7

100 - 499

1 109

15,2

224 266

28,2

500 - 999

139

1,9

96 782

12,2

1 000 - 4 999

103

1,4

209 859

26,4

5 000 – 9 999

2

0,0

11 480

1,4

10 000 - 29 000

6

0,1

98 281

12,3

30 000 et plus

0

0,0

0

0,0

Total 7 310 100,0 796 088 100,0

RPA des secteurs public et privé

Le taux de cotisation des employés diffère considérablement entre les secteurs public et privé. Comme l'indique le tableau 1041, le taux de cotisation de près des deux tiers des employés du secteur public participant à un RPA correspond à moins de 7 % des gains (supérieurs au MGAP) et pour moins de 3 % des employés, le taux de cotisation correspond à moins de 5 % des gains. Par contre, dans le secteur privé, le taux de cotisation de plus de 40 % des employés couverts représente moins de 5 % des gains et pour moins de 2 % des employés, le taux de cotisation correspond à plus de 7 % des gains[111].

Au cours des dernières années, les taux de cotisation ont eu tendance à être moins élevés dans les secteurs public et privé. Dans le secteur public, pour environ10 % des participants, le taux de cotisation a changé depuis le milieu des années 1990; il correspondait à plus de 7 % des gains et il se situe maintenant entre 5 % et 6,9 %. Dans le secteur privé, on a connu la même tendance pendant la même période, le taux de cotisation correspondant à environ 7 % des gains passant à un taux se situant entre 5 % % et 6,9 % des gains et à moins de 5 %.

Tableau 1041

Taux de cotisation salariale (supérieur au MGAP) à des régimes contributifs par secteur, 1992 à 2002

Année

Public

Privé

Tous

<5 %

5,0-6,9 %

>7 %

<5 %

5,0-6,9 %

>7 %

<5 %

5,0-6,9 %

>7 %

1992

0,8

26,6

72,6

34,4

64,6

1,0

10,3

37,4

52,3

1993

0,9

24,5

74,6

32,8

65,7

1,4

10,1

36,3

53,6

1994

1,4

21,0

77,6

35,3

63,6

1,0

11,0

33,0

56,0

1995

1,5

20,5

78,0

36,2

62,4

1,4

11,2

32,2

56,7

1996

1,6

21,1

77,3

35,3

63,3

1,4

11,3

33,3

55,4

1997

2,6

19,7

77,8

35,9

62,7

1,3

12,3

32,3

55,3

1998

2,1

21,3

76,6

36,7

61,7

1,6

12,3

33,3

54,4

1999

2,2

29,8

68,0

37,4

60,9

1,7

12,9

39,3

47,7

2000

2,3

33,0

64,7

38,7

59,6

1,7

14,0

41,5

44,5

2001

2,5

31,7

65,8

40,8

57,6

1,5

14,9

40,1

45,0

2002

2,7

31,4

65,9

41,8

56,3

1,8

15,2

39,3

45,4

En général, les taux de prestation sont plus élevés dans le secteur public et ils correspondent probablement à des taux de cotisation salariale plus élevés dans le secteur public, tel qu'il est indiqué à la figure 1042. De plus, on peut observer une tendance au niveau des taux de prestation pour les régimes du secteur public alors qu'il n'est pas possible de déterminer une telle tendance dans le secteur privé. Par exemple, dans le secteur public en 2002, plus de 90 % des employés pouvaient prévoir une pension représentant 2 % ou plus de leurs gains admissibles par année de service. Par contre, seulement environ 20 % des participants à un RPA dans le secteur privé pouvaient prévoir des prestations à ce niveau. Le nombre de participants dans le secteur privé n'ayant pas de prestations déterminées, de prestations supérieures à 2 %, de prestations égales à 2 % ou plus, de prestations mensuelles déterminées ou toute autre formule se situait entre 10 % et 25 %.

Figure 1042
Répartition en pourcentage des participants à un régime de pension agréé selon la formule de calcul des prestations et le secteur, janvier 2002

Répartition en pourcentage des participants à un régime de pension agréé selon la formule de calcul des prestations et le secteur, janvier 2002

Observations générales sur la comparabilité des régimes de pension

Voilà qui termine notre examen du contexte des régimes de pensions au Canada. En résumé, les points généraux les plus pertinents pour notre étude sont les suivants.

Les employés du secteur public ont une plus grande probabilité de participer à un régime de pension agréé

Seulement environ deux cinquièmes des travailleurs rémunérés au Canada participaient à un régime de pension agréé en 2003. Parmi ce 40 % de la main-d'œuvre canadienne qui participait à un régime de pension agréé, environ 85 % des employés participaient à un régime à prestations déterminées en 2002. Néanmoins, le nombre de travailleurs participant à des régimes à cotisations déterminées a augmenté plus rapidement.

Dans le secteur public, la couverture des régimes de pension agréés dépasse 90 %.

Dans le secteur public, de gros régimes / dans le secteur privé, de petits régimes

Les régimes de grande taille, couvrant 30 000 participants ou plus, prédominent dans le secteur public, alors que les régimes plus petits sont plus courants dans le secteur privé. Cette situation traduit la différence de taille des organismes des secteurs public et privé.

Les employés du secteur public contribuent davantage aux régimes agréés

Deux tiers des employés dans le secteur public versaient un taux de cotisation d'au moins 7 % des gains en 2002 pour leur régime de pension agréé. En revanche, plus de 40 % des travailleurs dans le secteur privé participant à de tels régimes versaient un taux de cotisation de moins de 5 % des gains.

Les régimes publics offrent de meilleures prestations et une protection contre l'inflation

Tout comme les taux de prestations élevés, les taux de cotisation sont plus élevés dans le secteur public. Plus de 90 % des employés dans ce secteur étaient admissibles à des pensions correspondant à 2 % ou plus par année de service. Seulement environ 20 % des participants à un régime de pension agréé dans le secteur privé pouvaient s'attendre à recevoir des prestations équivalentes.

Quatre cinquièmes des participants à un régime dans le secteur public obtenaient des rajustements automatiques pour tenir compte en partie ou entièrement de l'inflation. C'était le contraire dans le secteur privé où 80 % des employés n'avaient pas droit automatiquement à de tels rajustements.

Ces constatations tirées des enquêtes menées par Statistique Canada offrent le contexte permettant de pondérer la relativité interne des régimes de pension dans la fonction publique fédérale[112]. Nous nous penchons maintenant plus particulièrement sur le Régime de pension de retraite de la fonction publique et sur sa comparabilité avec les autres principaux régimes de pension agréés des secteurs public et privé.

Comparaison du Régime de pension de retraite de la fonction publique avec d'autres grands régimes publics et privés

Étant donné que les fonctionnaires fédéraux font partie des 40 % des travailleurs rémunérés au Canada qui participent à un régime de pension agréé, ils se trouvent dans une situation plus avantageuse que les Canadiens qui doivent compter uniquement sur les régimes de pension généraux du gouvernement tels que le Régime de pensions du Canada, le Régime de rentes du Québec et la Sécurité de la vieillesse ainsi que les épargnes à l'abri de l'impôt au moyen de programmes tels que les régimes enregistrés d'épargne-retraite. Par contre, les cotisations au régime de pension dans la fonction publique fédérale étaient relativement élevées en 2002-2003, soit 7,5 % des gains supérieurs au maximum des gains annuels ouvrant droit à pension pour le Régime de pensions du Canada et le Régime de rentes du Québec et 4 % pour des gains inférieurs à ce montant. Cette section vise à regrouper l'information disponible qui nous permet de situer plus rigoureusement le Régime de pension de retraite de la fonction publique en comparaison avec d'autres régimes.

Malheureusement, il n'existe aucune étude définitive récente qui mesure les avantages et les coûts relatifs des divers régimes selon une méthode généralement reconnue. Plus particulièrement, le contexte des régimes dont il faut faire la comparaison varie d'une étude à l'autre, selon les précisions concernant le régime que l'organisme effectuant l'analyse peut obtenir. De plus, l'importance que nous devrions accorder à certaines caractéristiques des régimes et la meilleure méthode d'évaluation de leur valeur sont subjectives, du moins en partie. Cependant, certaines études menées au cours des dernières années ont comparé le régime de la fonction publique fédérale avec les régimes provinciaux ou ceux des principaux employeurs dans le secteur privé. Lorsqu'on les regroupe, ces études nous permettent d'offrir une perspective comparative raisonnable en utilisant la valeur de la pension annuelle versée par l'employeur et la valeur combinée pour l'employeur et l'employé à titre de normes générales de comparaison.

Pour rédiger cette section, nous avons utilisé principalement quatre études.

Towers Perrin, 1997[113]

Cette évaluation a été faite dans le contexte de la réduction des effectifs de la fonction publique conformément à l'examen des programmes. Un aspect de cette réduction consistait à transférer des fonctionnaires fédéraux aux gouvernements provinciaux. Cette étude visait à comparer le coût estimatif des régimes de pension de retraite des fonctionnaires provinciaux.

Buck Consultants, 2001[114]

Cette étude a été menée dans le but de comparer le Régime de pension de retraite de la fonction publique aux prestations estimatives des régimes à cotisations déterminées.

Buck Consultants, 2002

La deuxième étude menée par Buck Consultants, une présentation en Power Point préparée pour le Comité consultatif sur la pension de la fonction publique, un comité patronal-syndical nommé par le président du Conseil du Trésor afin de donner des conseils au sujet de la politique sur les pensions, comparait le Régime de pension de la fonction publique et huit régimes provinciaux.[115]

Towers Perrin, 2004[116]

Cette étude comparait les prestations du Régime de pension de retraite de la fonction publique fédérale à un groupe de référence d'autres régimes inclus dans la base de données exclusive à Towers Perrin.

Notre examen de l'information disponible inclura :

  • la formule pour calculer la pension de base,
  • les dispositions en vue de l'intégration au Régime de pensions du Canada et au Régime de rentes du Québec,
  • les prestations « complémentaires » telles que la retraite anticipée, (y compris les prestations de raccordement »,
  • la disponibilité et le montant des prestations de survivant
  • et l'indexation en vue de tenir compte de l'inflation.

Nous examinerons, par la suite, le taux de cotisation salariale, le coût pour l'employeur et la valeur totale du régime de pension de retraite.

Enfin, nous présenterons une perspective de la comparabilité générale du Régime de pension de retraite de la fonction publique avec les régimes de retraite offerts par d'autres grands employeurs.

Prestations de pension de base

Habituellement, les prestations sont calculées de la façon suivante :

Taux annuel d'accumulation des prestations  x  Années de service  x  Gains moyens

Pour la fonction publique fédérale, le taux annuel d'accumulation des prestations est normalement fixé à 2 %[117]. Des régimes de ce genre désignent souvent des régimes intégrés de 2 %. Tel qu'il a été indiqué précédemment, selon Statistique Canada, plus de 90 % des régimes de pension dans le secteur public offre des prestations fondées sur 2 % au moins des gains moyens admissibles par année de service en 2000. La proportion correspondante dans le secteur privé était d'environ 20 %.

Selon les données actuelles de Towers Perrin, qui indiquent le taux d'accumulation des prestations pour 67 principaux régimes de pension de retraite dans les secteurs public et privé au Canada (et tous ces régimes comportent des cotisations salariales), dans 75 % des cas, le taux d'accumulation des prestations pour les gains supérieurs au maximum des gains annuels ouvrant droit à pension (MGAP) couvert par le Régime de pensions du Canada et le Régime de rentes du Québec s'élevait à 2 %. Le seul autre niveau important se situait entre 1,6 % et 1,9 % qui s'appliquait dans 14 cas (21 %).[118]

L'autre facteur indiqué dans la politique de l'employeur est la « rémunération moyenne ». Selon l'étude de Towers Perrin menée en 1997, toutes les provinces, à l'exception de l'Île-du-Prince-Édouard et du Régime de rentes du Québec pour les cadres de direction, utilisaient la « moyenne des gains des cinq meilleures années » pour calculer les gains afin de déterminer la pension.[119]

À titre d'évaluation générale de la prestation de pension de base, l'étude menée en 2002 par Buck Consultants a analysé le Régime de pension de retraite de la fonction publique par quartile par rapport à 8 régimes provinciaux et 101 régimes salaire moyen de fin de carrière, pour les niveaux de prestation associés aux différentes combinaisons d'âge au moment de l'inscription au régime et de salaire. Pour chaque scénario examiné, le régime fédéral s'est classé à la limite du deuxième et du troisième quartile pour ce qui est de la valeur des prestations à l'âge de 55 ans ou de 60 ans pour la pension de base.

Intégration au Régime de pensions du Canada et au Régime de rentes du Québec

La politique de l'employeur sur la façon d'intégrer son régime de pension au Régime de pensions du Canada / Régime de rentes du Québec est importante pour pouvoir déterminer le montant total des prestations de retraite. La plupart des régimes de pension agréés, y compris le régime de la fonction publique, utilisent un taux de prestation moins élevé par année de service pour les revenus inférieurs au maximum des gains annuels ouvrant droit à pension (MGAP) pour le RPP et le RCP que pour les revenus supérieurs à ce montant.

À l'âge de 65 ans, la pension de la fonction publique est réduite pour tenir compte des prestations prévues provenant du Régime de pensions du Canada / Régime de rentes du Québec. Toutefois, les prestations combinées du Régime de pension de retraite de la fonction publique et du Régime de pensions du Canada ou du Régime de rentes du Québec ne compenseront pas nécessairement pour cette réduction.

En général, l'accumulation des prestations en vertu du RPC / RRQ peut différer considérablement des régimes de pension agréés réguliers. Par exemple, le RPC / RRQ a inclus graduellement une période de travail relativement longue (31 ans en 2003 et ce nombre devrait s'élever à 40 ans d'ici 2012) pour l'obtention de prestations maximales. Cette période se compare à la période de 30 à 35 ans qui s'applique habituellement à ceux et celles qui prennent leur retraite en vertu du Régime de pensions de retraite de la fonction publique. Par ailleurs, le RPC / RRQ tient compte différemment des variations dans les éléments de revenu tels que les congés sans solde ou le temps supplémentaire par rapport au régime de pension fédéral pour calculer les droits à pension. La figure 1043 à la page suivante illustre la combinaison du Régime de pension de retraite de la fonction publique et du Régime de pensions du Canada ou le Régime de rentes du Québec pour déterminer le total des prestations de retraite d'un employé.

Figure 1043
Interaction du Régime de pension de retraite de la fonction publique et du RPC/RRQ afin d'établir le total des prestations de retraite d'un employé avant et après 65 ans

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Interaction du Régime de pension de retraite de la fonction publique et du RPC/RRQ afin d'établir le total des prestations de retraite d'un employé avant et après 65 ans

Le Régime de pension de retraite de la fonction publique utilise efficacement un taux de prestation de 1,3 % par année de service pour les salaires inférieurs au MGAP. À compter de 2008 au plus tard, les prestations du RPC / RRQ, lorsqu'elles seront combinées au Régime de pension de retraite de la fonction publique, seront habituellement moins élevées que ce qu'un taux ordinaire de « 2 % par année de service » aurait offert. Afin de réduire ou d'éliminer un tel écart, il serait avantageux pour les employés que le taux d'accumulation de la pension pour les salaires inférieurs au MGAP soit supérieur à 1,3 %, et par conséquent « l'écart » à combler pour le RPC / RRQ serait moins grand.

Le tableau 1044 indique l'éventail des taux d'accumulation des prestations (pour les salaires inférieurs au MGAP) dans un groupe de 32 régimes offerts par l'employeur dans le secteur privé et qui incluent au moins 1 000 participants[120]. Dans cet échantillon, plus de la moitié (18 sur 32) des régimes prévoient un taux de prestation par année de service supérieur au taux d'accumulation de 1,3 % utilisé pour le Régime de pension de retraite de la fonction publique et 9 régimes prévoient un taux de 1,5 % ou plus.

Tableau 1044

Formule de calcul des prestations accumulées pour les salaires inférieurs au maximum des gains annuels ouvrant droit à pension aux fins du RPC/RRQ pour un échantillon de grands employeurs du secteur privé

Taux d'accumulation –
Salaire inférieur au MGAP

Nombre de régimes

1,00 % – 1,09 %

1

1,20 % – 1,29 %

4

1,30 %

9

1,31 % – 1,39 %

4

1,40 %

5

1,41 % – 1,49 %

0

1,50 % – 1,59 %

2

1,60 % – 1,69 %

1

1,70 % – 1,79 %

3

1,80 % – 1,89 %

0

1,90 % – 1,99 %

0

2,00 %

3

Total

32

Retraite anticipée et transition

Parmi les avantages les plus importants que l'on décrit habituellement comme étant « complémentaires » à la pension de base est l'accès à une retraite anticipée. Le Régime de pension de retraite de la fonction publique permet une pension non réduite à l'âge de 55 ans pour ceux et celles qui comptent 30 années de service ou à l'âge de 60 ans lorsque les employés comptent au moins 2 années de service. Jusqu'à l'âge de 65 ans, le régime prévoit des prestations équivalant à 2 % par année de service pour les salaires supérieurs et inférieurs au MGAP. Les employés peuvent prendre leur retraite dès l'âge de 50 ans et recevoir une « indemnité annuelle » qui est une pension réduite en fonction de leur âge ou de leurs années de service.

Selon le rapport de Towers Perrin de 2004, le Régime de pension de retraite de la fonction publique renferme des ...

dispositions généreuses en vue de la retraite anticipée en raison de ces éléments : i) une date normale de retraite à l'âge de 60 ans (alors qu'on utilise habituellement 65 ans) et une prestation de raccordement avant l'âge de 65 ans sans aucune réduction (alors que de nombreuses entreprises n'offrent pas une telle prestation) ». (TRADUCTION)

À l'aide de la base de données de Towers Perrin[121] aux fins de comparaison, un examen de 33 régimes contributifs comparables dans le secteur privé prévoyant un taux de 2 % et couvrant 1 000 participants ou plus indique qu'il existe un large éventail de formules de calcul utilisées par d'autres employeurs. Certaines formules permettent de prendre sa retraite seulement à l'âge de 65 ans (21 %) ou à l'âge de 62 ans (6 %) alors qu'au moins un régime permet de prendre sa retraite à l'âge de 55 ans après 25 années de service.

Selon l'étude de Buck Consultants en 2002, le Régime de pension de retraite de la fonction publique fédérale se compare très avantageusement aux régimes de grands employeurs. Il se situe dans le premier ou le deuxième quartile pour ce qui est des prestations de retraite anticipée, selon le scénario analysé en fonction de l'âge au moment de l'inscription au régime et en fonction du salaire.

Prestations de survivant

Le Régime de pension de retraite de la fonction publique prévoit des prestations de survivant pour les conjoints survivants et les enfants à charge. Le conjoint survivant d'un participant au régime de pension fédéral touche une prestation égale à 1 % par année des années de service d'un pensionné décédé, multipliée par la rémunération moyenne des cinq meilleures années. Une nuance importante est que la prestation de survivant n'est pas réduite pour tenir compte de l'intégration au RPC/ RRQ.

Pour les enfants à charge, 20 % du montant pour le conjoint est payable à chaque enfant jusqu'à concurrence de 80 %. S'il n'y a pas de conjoint, les enfants à charge reçoivent deux fois ce montant. Si les employés qui décèdent n'ont aucun survivant, le régime prévoit le plus élevé des deux montants suivants : i) le remboursement des cotisations avec intérêt ou ii) cinq années des prestations que l'employé aurait reçu s'il avait été admissible à la retraite.

Les données provenant de la base de données actuelle de Towers Perrin confirment qu'on pourrait s'attendre, en raison d'une exigence minimale de la loi, à des prestations de survivant après la retraite représentant 60 % des prestations de base pour les retraités dans toutes les provinces à l'exception du Manitoba où ce pourcentage s'élève à 66,7 %. Dans l'échantillon de 33 régimes contributifs dans le secteur privé prévoyant un taux de 2 % pour au moins 1 000 employés, 80 % des régimes prévoient des prestations de survivant se situant entre 60 % et 66,7 % des prestations de base pour les retraités ou un pourcentage plus élevé. Plusieurs régimes maintiennent la prestation intégrale d'un retraité pendant une période déterminée de cinq ou dix ans–dans certains cas, le régime verse même ce montant à la succession d'un conjoint survivant qui décède pendant cette période de transition–et le montant réduit est versé au conjoint survivant pendant toute sa vie.

La disposition la plus courante prévoit que la succession toucherait régulièrement les prestations de pension pour la partie restante (après le décès du retraité) d'une période garantie de prestation, le plus souvent fixée à cinq ou dix ans. Lorsqu'il n'y a pas de conjoint, dans 6 des 33 régimes (18 %), il n'y a aucune prestation versée à la succession du retraité.

Selon la comparaison de Buck Consultants en 2002 entre le Régime de pension de retraite de la fonction publique et 8 régimes provinciaux et 101 autres régimes « salaire moyen de fin de carrière »[122], le régime fédéral se classe dans le premier quartile au niveau de la valeur des prestations de survivant[123].

Indexation

Le Régime de pension de retraite de la fonction publique prévoit l'indexation intégrale automatique de toutes les prestations chaque année afin de tenir compte de l'inflation qui est mesurée en fonction de l'indice des prix à la consommation (IPC).

L'indexation intégrale pour tenir compte de l'inflation est rare. Selon la comparaison de la base actuelle de Towers Perrin dont il est question dans la section précédente, seulement 5 des 33 régimes (15 %) prévoient l'indexation intégrale en fonction de l'IPC. Les politiques le plus souvent mentionnées dans la base de données étaient « une tendance irrégulière » dans 8 régimes (24 %) et se situaient entre 40 % et 66,7 % de l'IPC dans 7 régimes (21 %). Dans la comparaison de Buck Consultants en 2002, le régime fédéral prévoyait environ une indexation de 70 % et ce pourcentage se situe directement sur la ligne qui divise le bas du premier quartile du haut du deuxième quartile en comparaison avec les 8 régimes provinciaux, mais clairement dans le premier quartile si on le compare avec les 8 régimes provinciaux et les autres 101 régimes « salaire moyen de fin de carrière ».

Cotisations de l'employé

Pour le Régime de pension de retraite de la fonction publique, les employés versent une cotisation de 4 % des gains inférieurs au « maximum des gains annuels ouvrant droit à pension » aux fins du RPC / RRQ (39 900 $ en 2003) et de 7,5 % des gains supérieurs à ce montant pendant une période maximale de 35 ans. La figure 1045 illustre cette tendance.

En général, parmi les régimes contributifs à prestations déterminées au Canada en 2002, deux tiers des participants au régime du secteur public versaient une cotisation de 7 % ou plus des gains et le tiers d'entre eux versaient une cotisation se situant entre 5 % des gains et 6,9 %. Dans le secteur privé, plus de 40 % des participants versaient moins de 5 % des gains et 56 % d'entre eux versaient une cotisation se situant entre 5 % et 6,9 %.

Figure 1045
Niveau des cotisations des employés au Régime de pension de retraite de la fonction publique et au RPC/RRQ selon les gains annuels de l'employé

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Niveau des cotisations des employés au Régime de pension de retraite de la fonction publique et au RPC/RRQ selon les gains annuels de l'employé

Les données provenant de la base de données actuelle de Towers Perrin concernant les régimes ayant un taux d'accumulation de 2 % par année de service (comme c'est le cas pour le Régime de pension de retraite de la fonction publique) indiquent que les taux moyens de cotisation pour divers types de régimes dans les secteurs privé et public sont ceux figurant dans le tableau 1046. Cet échantillon démontre de façon distincte des taux de cotisation salariale moins élevés en moyenne que dans le secteur public fédéral, soit un taux de 3,8 % des gains inférieurs au MGAP et, un taux de 5,4 % des gains supérieurs à ce niveau.

Tableau 1046

Taux de cotisation de l'employé et de l'employeur et ratios de partage des coûts des principaux régimes de pension des gouvernements provinciaux en 2003

Régimes Taux de cotisation moyen Nombre de régimes
Revenu  inférieur au MGAP Revenu supérieur au MGAP

Tous les secteurs

4,2 %

5,8 %

44

Secteur privé uniquement

3,8 %

5,4 %

35

Secteur public uniquement

5,8 %

7,3 %

9

Régimes privés visant plus de 1 000 employés

4 %

5,5 %

28

Régimes privés visant moins de 1 000 employés

3,2 %

4,8 %

7

Fonction publique fédérale

4 %

7,5 %

 

Les régimes du secteur public examinés dans l'échantillon sont très semblables à celui de la fonction publique fédérale, le taux de cotisation étant de 7,3 % des gains supérieurs au MGAP, mais beaucoup plus élevé à 5 % des gains inférieurs au MGAP. Le tableau 1047 offre des renseignements précis au sujet des cotisations salariales aux principaux régimes de retraite provinciaux en décembre 2003[124]. Comparativement au Régime de pension de retraite de la fonction publique fédérale, tous ces régimes exigent des cotisations salariales beaucoup plus élevées pour les revenus inférieurs au MGAP aux fins du Régime de pension du Canada / Régime de rentes du Québec et plusieurs régimes prévoient également un taux de cotisation plus élevé pour les revenus supérieurs au MGAP. Les taux de cotisation pour les revenus inférieurs au MGAP sont tout particulièrement substantiels puisque les deux tiers environ de l'ensemble de la masse salariale se trouvent dans cette tranche de revenus[125].

Tableau 1047

Taux moyens de cotisation de l'employé et de l'employeur à certains régimes de pension agréés du secteur public

  Taux de cotisation régulier, employé
(service courant)
Taux de cotisation régulier, employeur
(service courant)
Ratio de partage des coûts (% de l'employeur / % de l'employé)
Province/régime Revenu inférieur à l'EBA◊
%
Revenu se situant entre l'EBA et le MGAP◊
%
Revenu supérieur au MGAP
%
Revenu inférieur au MGAP
%
Revenu supérieur au MGAP
%

Colombie-Britannique

5,50

5,50

7,00

6,50

8,00

55 / 45

Alberta

 

 

 

 

 

 

    Employés réguliers

6,17

6,17

8,81

Équivalent

50 / 50

    Cadres

9,50

9,50

9,50

13,10

13,10

58 / 42

Saskatchewan

 

 

 

 

 

 

    Fonction publique*

5,75

5,75

5,75

Équivalent

50 / 50

Manitoba

6,00

6,00

7,00

Au besoin

47 / 53

Ontario

 

 

 

 

 

 

    Fonction publique**

6,40

6,40

8,00

Équivalent

50 / 50

   Employés municipaux***

7,30

7,30

9,80

Équivalent

50 / 50

    Hôpitaux

6,90

6,90

9,20

1,26 fois le taux des employés

56 / 44

Québec

 

 

 

 

 

 

    Fonction publique

7,25

5,45

7,25

Équivalent

50 / 50

Nouveau-Brunswick

5,80

5,80

7,50

7,30

9,49

57 / 43

Nouvelle-Écosse

5,40

5,40

7,00

Équivalent

50 / 50

Île-du-Prince-Édouard

8,75

6,95

8,75

Équivalent****

50 / 50

Terre-Neuve-et-Labrador

8,60

6,80

8,60

Équivalent

50 / 50

Fonction publique fédérale

4,00

4,00

7,50

 

 

72 / 28

Notes : L'EBA est « l'exemption de base de l'année » en vertu du Régime de pensions du Canada / Régime de rentes du Québec. Sous ce niveau de revenu (3 500 $ en 2003), aucune contribution n'est perçue pour le RPC / RRQ.

Le MGAP est le « maximum des gains annuels ouvrant droit à pension » en vertu du Régime de pensions du Canada / Régime de rentes du Québec. C'est le niveau maximal de revenu (39 900 $ en 2003) sur lequel des cotisations sont perçues ou des prestations versées.

* 90 % des employés participent à un régime à cotisations déterminées.

** En vigueur depuis 2005.

*** Retraite à l'âge de 60 ans.

**** En plus d'un paiement forfaitaire spécial en 2004.

Coût pour l'employeur et ratios de partage des coûts

Nous passons maintenant au coût pour l'employeur et aux ratios de partage des coûts entre l'employeur et l'employé pour divers régimes de pension agréés. Le point le plus important au sujet des cotisations patronales dans le contexte des régimes de pension à prestations déterminées est que l'employeur doit verser la différence entre la cotisation salariale selon la formule de calcul et l'estimation actuarielle de la cotisation nécessaire pour financer les prestations prévues acquises par les employés pendant leurs années de service. Par conséquent, le montant versé peut varier considérablement, notamment en raison des variations dans les hypothèses actuarielles résultant des changements prévus au niveau d'importantes variables économiques telles que le taux d'intérêt réel ou les changements dans les gains annuels.

À l'échelle du Canada, le total des cotisations patronales au début de 2002[126] à des régimes de pensions agréés pour le service courant s'élevait à 14,8 milliards de dollars. Les employés versaient des cotisations s'élevant à environ 7,3 milliards de dollars. Le ratio global de partage des coûts pour le régime de pension entre l'employeur et les employés représentait alors environ 51 % / 49 %.

Pour le secteur public à lui seul, les cotisations patronales pour le service courant s'élevaient à environ 6,7 milliards de dollars et les cotisations salariales totalisaient 4,9 milliards de dollars, pour un ratio de partage des coûts de 58 % / 42 %.

En 2002-2003, les cotisations patronales au régime de pension du gouvernement fédéral pour le service courant totalisaient environ 2,7 milliards de dollars ou 18 % des cotisations patronales totales au Canada pour les régimes de pension agréés. Le ratio de partage des coûts pour le Régime de pension de retraite de la fonction publique fédérale entre l'employeur et les employés au cours des dernières années était de l'ordre de 72 % / 28 %.

Il est à noter qu'une faible part de ce montant (environ 250 millions de dollars) ne représente pas les cotisations réelles du gouvernement mais constitue plutôt une estimation de la part des coûts du régime de pension assumée par le gouvernement et consignée aux comptes internes du régime de pension gouvernemental. Ces montants sont appelés cotisations pour simplifier les comparaisons même s'ils n'entraînent pas de déboursés réels.

Selon l'étude de Buck Consultants de 2002, le Régime de pension de retraite de la fonction publique se classe dans le premier quartile[127] au niveau des coûts pour l'employeur des régimes contributifs pour tous les scénarios examinés en fonction de l'âge au moment de l'inscription et du salaire en ce qui a trait à un groupe de référence de 8 régimes de retraite provinciaux et de 101 autres régimes de retraite « salaire moyen de fin de carrière ». Les données présentées dans le tableau 1047 indiquent que la plupart des régimes provinciaux sont financés à partir de l'appariement des coûts des régimes de pension pour l'employeur et les employés. Seuls les régimes de pension de la Colombie-Britannique, des cadres de l'Alberta, du Nouveau-Brunswick et des hôpitaux de l'Ontario prévoient que l'employeur assumera essentiellement plus de la moitié des coûts et la part ne doit pas être plus élevée que 58 %.

Valeur totale et classement général

La valeur totale d'un régime de pension est l'évaluation des prestations générales offertes à un employé dans le cadre du régime. Comme nous avons pu le constater en examinant diverses prestations de base et complémentaires du Régime de pension de retraite de la fonction publique, certaines prestations sont plus généreuses que d'autres régimes importants, certaines sont plus importantes et d'autres sont assez comparables. La valeur totale vise à regrouper les prestations afin de permettre une évaluation sommaire.

L'étude la plus récente portant tout particulièrement sur la relativité interne du régime de la fonction publique fédérale est l'étude de Towers Perrin en 2004 fondée sur la banque de données sur les avantages sociaux Benval® exclusive à l'entreprise. Cette étude a positionné le Régime de pension de retraite de la fonction publique par rapport au régime de pension offert par 14 principaux employeurs dans les secteurs privé et public au Canada. En général, l'étude présentait les conclusions suivantes :

  • Le Régime de pension de retraite de la fonction publique fédérale représentait un coût total pour l'employeur de 8,0 % de la masse salariale connexe. En tenant compte des cotisations de l'employé, cela représente une valeur totale de 13,1 %. Le régime se classe donc au 4e rang parmi les 15 principaux régimes offerts par l'employeur.
  • Le taux de cotisation patronale était jugé relativement moins élevé par rapport au taux de cotisation salariale élevé, c'est-à-dire, 5,1 % comparativement à la moyenne de 3 % du groupe visé par l'étude.
  • En excluant les régimes d'épargne-retraite de l'étude et en comparant uniquement les régimes de pension de retraite (à prestations déterminées et à cotisations déterminées), le régime du gouvernement fédéral se classait au 3rang pour ce qui est du taux de cotisation patronale et au 2rang pour la valeur totale, y compris les cotisations salariales.
  • Lorsque la comparaison porte uniquement sur les régimes à prestations déterminées, le régime du gouvernement du Canada se classe au 87e centile pour ce qui est de la valeur offerte par l'employeur et au 96e centile pour ce qui est de la valeur totale, incluant les cotisations des employés.
  • Dans une autre étude plus importante réalisée aussi par Towers Perrin, le taux de cotisation était de 8 % du salaire de base et les prestations de pension de l'employeur au gouvernement fédéral permettaient de classer le régime au 73e centile d'un groupe de 123 entreprises pour la valeur offerte par l'employeur. Le classement montait au 84e centile en incluant les cotisations de l'employé.

Selon une étude de Buck Consultants réalisée en 2002, la valeur totale du Régime de pension de retraite de la fonction publique se classait nettement dans le premier quartile comparativement aux 8 régimes provinciaux[128] et aux 101 régimes de pension « salaire moyen en fin de carrière ». En faisant la comparaison du régime fédéral avec les huit régimes provinciaux, cette étude a permis de constater que le régime fédéral se classait entre le deuxième et le quatrième rang. Comparativement aux régimes provinciaux et aux 101 régimes « salaire moyen en fin de carrière », le fait d'adhérer plus tôt au régime (et la retraite à l'âge de 55 ans) classe le régime fédéral à un niveau encore plus avantageux.

Estimations des coûts relatifs des régimes de pension

Le Secteur des pensions et des avantages sociaux du Secrétariat du Conseil du Trésor (SPAS/SCT) a fait ses propres estimations du coût du Régime de pension de retraite de la fonction publique en tant que pourcentage des gains ouvrant droit à pension applicables. En utilisant des hypothèses démographiques et économiques différentes de celles de l'étude de Towers Perrin en 2004, le SPAS/SCT a évalué que le coût du régime de pension fédéral représentait 17,3 % de la masse salariale[129]. Nous présentons les estimations différentes du SPAS afin de proposer deux autres perspectives : le coût relatif des principaux régimes de pension du secteur public fédéral et le coût relatif des principaux éléments du régime de pension.

Jusqu'à maintenant, nous avons limité notre analyse au principal Régime de pension de retraite de la fonction publique. Le tableau1048 fait la comparaison du coût estimatif des cinq principaux régimes de pension du gouvernement fédéral et il montre que les autres régimes de pension plus petits sont plus généreux puisqu'une plus grande part des coûts est assumée par l'employeur. Il est probable que si nous examinions séparément ces régimes, ils se compareraient même très avantageusement à d'autres régimes de pension de grands employeurs au Canada.

Les montants enregistrés au titre des cotisations aux fonds du CPRFP, du CPRFC et du CPRGRC proviennent du Trésor et sont destinés à être investis à l'extérieur. La part versée par le gouvernement représente approximativement le coût du service courant consigné aux fins de la comptabilité en regard des excédents annuels. Les montants consignés au titre des cotisations au Compte d'allocations de retraite des parlementaires et au Compte des conventions de rémunération de retraite des parlementaires représentent aussi approximativement le coût pour le gouvernement du service courant mais, bien qu'ils soient inscrits comme tels, il ne s'agit pas de cotisations au vrai sens du terme. Comme dans le cas de la partie des cotisations au CPRFP, au CPRFC et au CPRGRC consignée aux Comptes de pension de retraite pour le service antérieur à 2000, le régime des parlementaires est essentiellement non capitalisé puisqu'il s'agit de comptes internes des Comptes du Canada. Dans le cas du régime de retraite en vertu de la Loi sur les juges, aucun compte de pension n'est maintenu dans les Comptes du Canada et les dépenses sont consignées pour la première fois lorsque les prestations sont versées à même le Trésor. Nonobstant le mécanisme de financement ou de « financement théorique », le gouvernement consigne néanmoins les coûts et les obligations au titre des pensions pour l'ensemble de ces régimes sur la base de la comptabilité d'exercice pour l'ensemble des opérations.

Tableau 1048

Comparaison des cotisations versées aux principaux régimes de pension du secteur public fédéral en 2002-2003

Principaux régimes de pension

LPFP*

LPRFC*

LPRGRC*

LARP**

Loi sur les juges

Salaires estimatifs qui donnent droit à pension (M$)

14 373

3 216

1 151

53

221

Cotisations (M $) :

 

 

 

 

 

     Employé

738

157

64

4

12

     Employeur

1 868

552

191

20

53

     Total

2 607

709

255

24

64

Cotisations exprimées en % des salaires

 

 

 

 

 

     Employé

5,1 %

4,9 %

5,6 %

7,4 %

5,3 %

     Employeur

13,0 %

17,2 %

16,6 %

38,1 %

23,8 %

     Total

18,1 %

22,0 %

22,1 %

45,4 %

29,1 %

Partage des coûts

 

 

 

 

 

     Employé

28,3 %

22,2 %

25,2 %

16,2 %

18,2 %

     Employeur

71,7 %

77,8 %

74,8 %

83,8 %

81,8 %

* Inclut uniquement les cotisations versées à leurs fonds de pension respectifs.

** Aucun régime n'inclut de convention de retraite, à l'exception de la LARP.

Note : Il faut noter plusieurs points explicatifs concernant les sources du tableau 1048. Pour le régime de pension en vertu de la Loi sur les juges, il n'y a essentiellement pas de compte et les prestations sont versées directement à même le Trésor. Le montant des cotisations est tiré des Comptes publics de 2002-2003, à l'exception du montant en vertu de la Loi sur les juges, qui provient du rapport actuariel publié en 2001 par le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) au sujet du régime de retraite des juges de nomination fédérale. Pour ce qui est des données concernant les salaires ouvrant droit à pension, nous avons utilisé la base de données du Secrétariat du Conseil du Trésor pour le Régime de pension de retraite de la fonction publique, à l'exclusion des sociétés d'État, les estimations internes de la Défense nationale et de la GRC pour le régime de pension de retraite des Forces canadiennes et celui de la Gendarmerie royale du Canada, respectivement; encore une fois, nous avons utilisé le rapport actuariel publié en 2001 par le BSIF au sujet du régime de retraite des juges de nomination fédérale et un rapport semblable du BSIF pour le régime de retraite des parlementaires.

Il est intéressant d'examiner le coût estimatif relatif des différentes composantes du Régime de pension de retraite de la fonction publique, excluant le compte pour une convention de retraite (CCR). Les coûts estimatifs de ces divers aspects du régime ont été fournis par le Bureau du surintendant des institutions financières et peuvent être répartis comme suit :

Composante

Coût en pourcentage des gains ouvrant droit à pension

Retraite normale et retrait

7,5 %

Indexation des prestations pour compenser l'effet de l'inflation

5,0 %

Retraite anticipée (1,3 % par année de service jusqu'à l'âge de 65 ans)

2,3 %

Raccordement (0,7 % par année de service jusqu'à l'âge de 65 ans)

1,2 %

Prestations de survivant

0,8 %

Prestations d'invalidité      

0,5 %

Total

17,3 %

Note :Ce chiffre est légèrement inférieur au montant apparaissant au tableau 1048 ci-dessus en raison de l'inclusion de quelques paiements pour service antérieur dans l'autre tableau.

Il est donc évident que les principaux facteurs de coût du Régime de pension de retraite de la fonction publique fédérale (autres que les prestations de base) sont l'indexation et les prestations de raccordement. Nous n'avons pas les données qui nous permettraient de comparer les coûts de ces composantes du régime à d'autres régimes importants. Toutefois, l'étude de Towers Perrin menée en 2004 a permis de déterminer que les prestations de retraite anticipée du régime de pension fédéral (notamment la prestation de raccordement avant l'âge de 65 ans) et l'indexation intégrale automatique des prestations après la retraite sont relativement rares pour d'autres employeurs et sont, par conséquent, les facteurs clés dans la conclusion indiquant que la valeur totale des prestations déterminées offertes par le gouvernement du Canada est relativement généreuse.

L'étude de Buck Consultants publiée en 2001 offrait une autre perspective au sujet de la comparabilité. Elle portait sur le calcul de la valeur du Régime de pension de retraite de la fonction publique en tant que multiple des derniers salaires pour différents scénarios au niveau de l'âge au moment de l'inscription et du salaire. Il s'agissait d'évaluer d'abord la rente viagère payable à l'âge de 65 ans et d'ajouter ensuite successivement la valeur des éléments suivants :

  • rente viagère non réduite et pension de raccordement à partir de 60 ans;
  • indexation intégrale après la retraite à l'augmentation de l'IPC;
  • indexation intégrale avant la retraite à l'augmentation de l'IPC;
  • prestations de décès et prestations d'invalidité;
  • dispositions pour la retraite anticipée avant l'âge de 60 ans.

La figure 1049 donne un exemple de l'analyse de Buck Consultants. Des graphiques semblables sont présentés dans le rapport pour d'autres combinaisons de l'âge au moment de l'inscription, du salaire actuel et des années de service.

Figure 1049
Cumul de la valeur du régime en vertu de la Loi sur la pension de la fonction publique fondée sur les multiples du dernier salaire à l'âge de 25 ans, pour 5 années de service et un salaire actuel de 38 000 $

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Cumul de la valeur du régime en vertu de la Loi sur la pension de la fonction publique fondée sur les multiples du dernier salaire à l'âge de 25 ans, pour 5 années de service et un salaire actuel de 38 000 $

La firme Buck Associates a résumé son évaluation des résultats obtenus comme suit[130] :

  • Le total de l'épargne-retraite est assez important, excédant 11 fois le dernier salaire pour les participants comptant de nombreuses années de service et dont les salaires sont élevés et atteint un sommet au moment de l'admissibilité à une pension immédiate non réduite.
  • La valeur des prestations complémentaires (retraite anticipée subventionnée, pension de raccordement, indexation, etc.) peut représenter jusqu'à concurrence de quatre fois la valeur de la rente viagère payable à compter de 65 ans ou 80 % de la valeur totale.
  • Le total de l'épargne-retraite ne varie guère en raison du sexe, principalement parce que des prestations généreuses de décès sont offertes.
  • Le profil de l'âge et du service a... une incidence majeure. Par exemple, l'épargne-retraite à l'âge de 55 ans pour un participant ayant 35 années de service ouvrant droit à pension est deux fois plus élevée que celle d'un membre ayant 25 années de service ouvrant droit à pension.

Ces résultats correspondent à ceux indiqués précédemment quant à l'importance des prestations complémentaires en vertu du Régime de pension de retraite de la fonction publique, notamment la retraite anticipée (y compris, l'option d'une pension de raccordement) et l'indexation. Cette étude n'offre pas de comparaison avec d'autres régimes de pension. Toutefois, elle fait la comparaison entre le régime fédéral à prestations déterminées et le régime à cotisations déterminées, selon différents scénarios. Ils ont trait aux LPFP/CCR, qui signifient la Loi sur la pension de la fonction publique et le Compte de conventions de retraite. Ensemble, ils englobent la plus grande partie des droits à pension des fonctionnaires fédéraux. Voici l'évaluation de cette étude :

  • Le régime à cotisations déterminées peut être plus avantageux que le régime en vertu de la LPFP/CCR seulement pour les personnes plus jeunes et les montants sont peu élevés alors que le régime en vertu de la LPFP/CCR est plus avantageux pour les personnes plus âgées.
  • La valeur du régime à cotisations déterminées est évidemment très sensible aux [variations dans les hypothèses quant au taux de rendement futur] mais, même si les hypothèses prévoient un taux de rendement réel élevé (par exemple, un taux de rendement de 8,25 % par rapport à un taux d'inflation de 3 %), le régime à cotisations déterminées est rarement plus avantageux que le régime en vertu de la LPFP/CCR.

Conclusions au sujet de la comparabilité des régimes de pension

Il est donc évident que le Régime de pension de retraite de la fonction publique se compare favorablement aux principaux régimes de pension dans les secteurs public et privé au Canada. Bien que les cotisations salariales soient, en général, plus élevées que celles des employés participant aux principaux régimes du secteur privé, les prestations offertes par le régime fédéral sont également meilleures que celles offertes par tous les régimes du secteur privé, à l'exception de quelques-uns. C'est tout particulièrement le cas pour les prestations complémentaires telles que les dispositions concernant la retraite anticipée et le raccordement avant l'âge de 65 ans et l'indexation intégrale pour compenser l'effet de l'inflation. Comparativement aux principaux régimes du secteur public, le Régime de pension de retraite de la fonction publique fédérale offre des prestations comparables ou meilleures, mais les cotisations salariales sont moins élevées, notamment lorsque le revenu est inférieur au seuil des revenus aux fins du Régime de pensions du Canada et du Régime de rentes du Québec. En général, il est raisonnable de considérer que le Régime de pension de retraite de la fonction publique fédérale se situe dans la première tranche de 10 % de tous les régimes de pensions agréés au Canada au niveau de sa valeur pour les employés. De plus, on peut raisonnablement tirer la même conclusion pour ce qui est du coût pour l'employeur. Les prestations au titre du service courant en vertu de la LPFP et des autres régimes fédéraux coûtent beaucoup plus au CT, en dollars réels exprimés en pourcentage des salaires, que celles acquises dans la grande majorité des autres régimes à prestations déterminées au pays.

 




8. Comparabilité des autres avantages

Nous résumerons dans ce chapitre l'information disponible au sujet des avantages autres que la retraite comparativement à ceux offerts par d'autres gros employeurs des secteurs public et privé. Tout comme pour les pensions, il n'y a malheureusement aucune étude récente sur certains ou l'ensemble des avantages autres que la retraite. Nous examinerons d'abord le Régime de soins de santé de la fonction publique (RSSFP) et ensuite, plus brièvement, le régime de soins dentaires, le régime d'assurance-vie et le régime d'assurance-invalidité, l'indemnité de départ et les droits aux congés.

Avant de poursuivre, nous devons souligner que la comparabilité « réelle » englobe tous les éléments de la rémunération d'un groupe d'employés par rapport à un autre. Dans ce chapitre, nous décomposons différents avantages importants afin de comprendre comment les employeurs diffèrent dans la conception de ces régimes.

Régime de soins de santé de la fonction publique

Nous avons deux documents pour nous aider à évaluer les prestations offertes dans le cadre du Régime de soins de santé de la fonction publique (RSSFP). La première étude, appelée « Étude comparative de Mercer », a été menée à la demande la Fiducie du RSSFP[131] représentant les syndicats, la direction et les pensionnés établie en 2000 afin d'assurer la gestion du régime au nom des intéressés et de superviser le travail de la compagnie Sun Life chargée d'administrer les prestations du régime. Le tableau 1050 ci-dessous résume les résultats de l'étude de Mercer. La deuxième étude est une série de tableaux sur les prévalences produits par Watson Wyatt chaque année à partir de l'information recueillie auprès de divers employeurs canadiens[132].

L'étude de Mercer portait sur 25 employeurs, représentant 380 000 employés des secteurs privé et public. Environ le tiers des employeurs provenaient du secteur public et les autres, à l'exception d'un organisme sans but lucratif, du secteur privé. Voici quelques points d'intérêt généraux :

  • La moitié des organisations visées par l'enquête offraient des avantages variables aux employés actuels et certaines offraient ce choix aux pensionnés. Le RSSFP offre seulement un ensemble déterminé d'avantages à tous ses membres.
  • La majorité des organisations offrent une carte-médicaments aux employés. Le RSSFP exige que les employés paient eux-mêmes les médicaments et en demandent ensuite le remboursement.
  • Le RSSFP comporte une franchise annuelle de 60 $ pour une personne et de 100 $ pour une famille. Pour les régimes « traditionnels » qui n'offrent pas de flexibilité pour le choix d'options de protection, seulement 4 régimes sur 17 comportaient des franchises inférieures ou égales à ce niveau.

Tableau 1050

Sommaire comparatif des prestations du Régime de soins de santé

Disposition

Modalité du RSSFP

RSSFP comparable aux autres régimes

 

Commentaires

Définition du terme conjoint

Couple en union libre, depuis 12 mois

*

Définition comparable aux autres régimes

Définition du terme enfant

Enfant en famille d'accueil, enfant adopté, enfant du conjoint

*

Peu de régimes couvrent les enfants en famille d'accueil

Période d'attente

1er du mois suivant la date d'embauche

– à √

*

59 % des régimes commencent la couverture à la date d'embauche

Partage des coûts

• Actifs

100 % des frais assumés par l'employeur, sauf les soins hospitaliers de niveau II et III

*

Dans bien des régimes traditionnels, l'employeur assume 100 % des coûts; dans le RSSFP, la contribution requise pour les soins hospitaliers de niveau II et III représente une faible part du coût des primes.

• Retraités

Célibataire, 88 %;
famille, 79 % au niveau I

*

La plupart des régimes pour retraités comportent un élément de partage des coûts; le RSSFP est supérieur aux autres régimes au premier niveau de couverture. des soins hospitaliers.

Franchise

Célibataire, 60 $;
famille, 100 $

_

*

Beaucoup de régimes traditionnels n'ont pas de franchise; lorsqu'il y a franchise, elle est inférieure à celle du RSSFP.

Niveaux de remboursement

• Médicaments, actifs

80 %

- à √

*

De nombreux régimes traditionnels prévoient une couverture à 100 %, mais une co-assurance à 80 % est plus fréquente dans les régimes flexibles.

• Médicaments, retraités

80 %

*

Habituellement, remboursement à 80 % pour les retraités.

• Frais hospitaliers

100 %

*

La majorité des régimes remboursent au même niveau que le RSSFP.

• Soins paramédicaux, actifs

80 %

- to √

*

59 % des régimes traditionnels prévoient une co-assurance plus élevée que le RSSFP (90 % ou 100 %).

• Soins paramédicaux, retraités

80 %

*

Un taux de co-assurance de 80 % est plus fréquent dans les régimes pour retraités.

• Urgence à l'étranger

100 %

*

Le remboursement à 100 % est plus fréquent.

• Vision, actifs

80 %

-

*

La plupart des régimes remboursent à 100%.

Médicaments

Définition du terme médicament

Ordonnance requise par la loi

*

La plupart des régimes remboursent les médicaments qui requièrent une ordonnance en vertu de la loi; quelques-uns comportent un autre formulaire.

• Carte médicaments

Non fournie

-

*

76 % des régimes étudies fournissent une carte-médicaments.

• Limites pour certains médicaments

Couverture

√ à +

*

Certains régimes ne couvrent pas les médicaments axés sur le mode de vie.

Hospitalisation

Chambre d'hôpital, actifs

60 $, 100 $, 150 $

-

*

76 % des régimes pour actifs et 69 % des régimes pour retraités offrent une protection illimitée en chambre semi-privée.

Chambre d'hôpital, retraités

60 $, 100 $, 150 $

- à √

*

Les niveaux de couverture peuvent être inéquitables entre les provinces.

Convalescence à l'hôpital, actifs

60 $, 100 $, 150 $

*

76 % des régimes traditionnels offrent cette protection.

Convalescence à l'hôpital, retraités

60 $, 100 $, 150 $

√ à +

*

Moins de régimes pour retraités offrent cette protection.

Soins de longue durée à l'hôpital

Non couverts

*

La couverture varie et, souvent, cette protection n'est pas offerte.

Soins paramédicaux

• Professionnels inclus

Liste standard

*

Comparable pour les employés actifs et les retraités.

• Maximums

 

 

 

 

- physiothérapeute

400 $ et plus de 800 $

- à √

*

Le RSSFP est moins avantageux aux paliers inférieurs de la couverture.

- psychologue

800 $/année

√ à +

*

Plus de 50 % des régimes traditionnels ont une limite inférieure à celle du RSSFP.

- chiropraticien

400 $/année

*

Le RSSFP est plus avantageux pour les retraités : seulement 30 % des régimes pour retraités ont une meilleure protection.

- autre prestateur de soins paramédicaux

240 $/année

-

*

Le plafond de 240 $ est inférieur à celui des dispositions équivalentes d'autres régimes.

Soins infirmiers en pratique privée, actifs

12 000 $/année

-

*

70 % des régimes traditionnels offrent une meilleure protection.

Soins infirmiers en pratique privée, retraités

12 000 $/année

*

Couverture comparable pour les retraités.

Urgence hors du pays

100 000 $
40 jours par voyage

-

*

Le RSSFP comporte un maximum et un plafond quotidien moins élevés.

Appareils auditifs

400 $/5 ans

- à √

*

La plupart des régimes comportent un plafond de 500 $ et plus.

Orthèses

1 paire/année

*

Niveau de couverture comparable.

Chaussures orthopédiques

120 $/année

-

*

Faible niveau de remboursement en vertu du RSSFP.

Fournitures pour diabétiques

Couvertes

*

La plupart des régimes pour actifs remboursent ces fournitures.

Soins de la vue

Lunettes et verres de contact

160 $/24 mois

-

*

Habituellement, frais de 200 $ à 300 $ remboursés par période de 24 mois.

Chirurgie au laser

Non couverte

-

*

Un plus grand nombre de régimes offrent cette protection au même niveau que pour les lunettes et les verres de contact.

Maximum viager

Aucun

*

Le maximum viager n'est pas une disposition observée fréquemment.

Extension de la couverture

Prévue

*

71 % des régimes traditionnels pour actifs offrent cette couverture.

Subvention au régime d'assurance-maladie provincial

Oui

*

57 % des régimes comportent une subvention à l'assurance-maladie.

√ signifie que la couverture du RSSFP est comparable à celle des autres régimes.
-      signifie que la couverture du RSSFP est inférieure à celle des autres régimes.
+     signifie que la couverture du RSSFP est supérieure à celle des autres régimes.

Le RSSFP ne rembourse que 80 % des dépenses admissibles. Pour ce qui est des médicaments, 12 des 17 régimes traditionnels offrent un remboursement plus élevé. La politique la plus courante (60 % des régimes) est de rembourser toutes les dépenses admissibles. La tendance pour les services paramédicaux est semblable.

Pour bien décrire certains avantages, nous examinons les éléments de coût les plus importants du RSSFP en 2002 : les médicaments, les professionnels de la santé, la garantie-hospitalisation et les soins de la vue.

Les médicaments

Les médicaments, qui représentaient environ 63 % des coûts du RSSFP en 2002, sont un volet du régime où les coûts augmentent rapidement. Environ le tiers des régimes visés par l'étude exigeaient l'utilisation de médicaments génériques pour remplir les ordonnances ou d'un médicament figurant sur un formulaire[133]. Le RSSFP était relativement plus généreux dans le cas des médicaments destinés à cesser de fumer, les inducteurs d'ovulation et les médicaments anti-obésité, puisque 40 % environ des régimes n'incluaient pas ces catégories couvertes par le RSSFP. Tout comme le RSSFP, la plupart des régimes visés par l'étude ne remboursaient pas le médicament pour la dysfonction érectile, Viagra[134]. L'étude de Mercer souligne que le taux de remboursement de 80 % des médicaments est relativement faible dans le cas des employés actifs, notamment pour les régimes traditionnels, mais qu'il se compare avantageusement pour les retraités. En revanche, plusieurs régimes visés par l'étude percevaient une franchise pour chaque médicament d'ordonnance (allant de 0,35 $ à 9,00 $), mais non le RSSFP.

Les professionnels de la santé

L'expression « professionnels de la santé » signifie généralement les fournisseurs de services qualifiés dans des domaines tels que la physiothérapie, la chiropratique, la massothérapie ou les traitements psychologiques. Le RSSFP n'englobe pas les services d'acupuncteurs bien que plusieurs régimes visés par l'étude remboursaient ces services. Le RSSFP impose des plafonds annuels pour chaque catégorie de services. Par contre, il ne fixe aucun plafond annuel combiné. Cela protège en partie les participants au régime, mais empêche aussi l'arbitrage entre les catégories de dépenses. Les divers plafonds de dépenses du RSSFP étaient équivalents ou meilleurs que ceux de la plupart des régimes pour les services de psychologues, mais la protection maximale du RSSFP était inférieure à celle de la plupart des régimes examinés pour la plupart des autres services. Pour les retraités, le RSSFP se compare favorablement à plusieurs régimes qui n'offrent pas de protection de ce genre.

Garantie-hospitalisation

Trois niveaux de garantie-hospitalisation sont offerts par le RSSFP. Le premier niveau est offert automatiquement et est entièrement financé par l'employeur. Les employés participant au régime payent la prime supplémentaire pour les deux niveaux supérieurs, qui vise à subventionner le coût des chambres à un lit et à deux lits, respectivement. La majorité des régimes examinés pour les employés actifs et les retraités offrent le remboursement intégral pour les chambres à deux lits alors que le RSSFP limite le remboursement à 60 $ par jour au niveau I et à 100 $ par jour au niveau II.

Soins de la vue

Pour les soins de la vue, le RSSFP rembourse jusqu'à concurrence de 160 $ (c'est-à-dire, 80 % de 200 $) à tous les deux ans. La plupart des régimes examinés offraient une meilleure protection variant, en général, entre 200 $ et 300 $ à tous les deux ans.

Selon l'étude de Mercer, les employeurs payaient le coût intégral des primes des soins de santé dans les trois quarts des 17 régimes traditionnels examinés. Même si le RSSFP exige une contribution de l'employé pour les deux niveaux supérieurs de la garantie-hospitalisation, cela représente une faible proportion du coût total du régime. Dans le cas des personnes retraitées, le RSSFP se compare aux régimes examinés pour la garantie-hospitalisation de niveau I, mais est moins avantageux pour les deux niveaux supérieurs. Près de la moitié des régimes examinés offerts aux retraités étaient entièrement financés par l'employeur tandis que 23 % étaient entièrement défrayés par les employés.

Au-delà des comparaisons détaillées, la meilleure façon d'intégrer l'analyse est de comparer les coûts réels par employé / retraité pour différents employeurs. Ces coûts révèlent non seulement les différences entre les régimes, mais aussi celles au niveau de l'effectif (par exemple, l'âge et le sexe) et la salubrité du lieu de travail.

Nous disposons d'une série limitée de données sur ces coûts pour un échantillon de dix gros employeurs des secteurs public et privé[135]. Pour les quatre années de 2000 à 2003 inclusivement, le coût moyen par personne de ces 10 employeurs s'élevait à 823 $. Fait à noter, le coût moyen par personne du RSSFP pour la même période était presque identique. Toutefois, l'échantillon comptait quatre régimes dont le coût était moins élevé et quatre régimes dont le coût par personne était beaucoup plus élevé. Les coûts variaient de 495 $ à 1 243 $ par personne. Le groupe dont le coût était le plus bas a payé entre 495 $ et 586 $, tandis que le groupe dont le coût était le plus élevé a payé entre 1 024 $ et 1 243 $. La hausse du coût par personne du RSSFP a été de 8,5 % en moyenne sur la période de trois ans de 2000-2001 à 2002-2003. Le coût des régimes offerts par les autres employeurs a augmenté plus rapidement durant la même période, soit de 12,2 % l'an.

En conclusion, le rapport de l'étude réalisée par Mercer en 2003 pour la Fiducie du Régime de soins de santé de la fonction publique faisait les observations suivantes :

En général, les prestations de soins de santé offertes aux employés actifs par le RSSFP se comparent à celles des organisations examinées dans l'étude. On peut considérer que le RSSFP est un peu moins concurrentiel sur certains points seulement[136]. Il s'agit notamment de l'absence d'une carte-médicaments, des niveaux de remboursement et des franchises, de la garantie-hospitalisation, des plafonds imposés pour les services de nombreux spécialistes paramédicaux, des plafonds imposés pour les soins de la vue et les soins infirmiers privés et, enfin, de la protection offerte à l'extérieur du pays.

Contrairement au RSSFP, peu d'employeurs offrent le même niveau de protection aux employés retraités qu'aux employés actifs. Il en résulte que le RSSFP offre une protection très avantageuse aux retraités notamment pour ce qui est de la couverture et du partage des coûts de la garantie-hospitalisation au niveau I.

Régime de soins dentaires de la fonction publique

Pour ce qui est du régime de soins dentaires, nous avons également deux sources d'information sur la comparabilité du régime de la fonction publique fédérale[137] et la protection offerte par d'autres grands employeurs au Canada. La première source est une étude comparative effectuée en 2004 par Mercer Human Resources Consulting[138] pour le Secrétariat du Conseil du Trésor. Cette étude a utilisé les bases de données de Mercer sur plus de 90 employeurs et le site Web du gouvernement de la Colombie-Britannique. La deuxième source est l'information tirée de la base de données de Towers Perrin sur les avantages offerts par 191 employeurs comptant au moins 1 000 employés[139].

Voici un résumé des principaux points de comparaison. Les premiers commentaires dans chaque cas proviennent de l'étude Mercer. Nous ajoutons au besoin d'autres précisions provenant de la base de données Towers Perrin.

Période d'attente

La période de trois mois prévue dans le régime du Conseil du Trésor excédait la norme la plus fréquente, soit l'entrée en vigueur de la protection dès l'embauche de l'employé.

Partage des coûts

Le Conseil du Trésor compte parmi les 80 % des employeurs examinés qui payent le coût intégral du régime de soins dentaires. Dans l'échantillon de Towers Perrin, environ 40 % des employeurs exigent une contribution des employés au régime de soins dentaires.

Franchises

Le régime du Conseil du Trésor impose une franchise annuelle de 25 $ pour un employé et de 50 $ pour une famille et se distingue de plus de 80 % des employeurs examinés qui n'imposent pas de franchise.

Remboursement

Pour les services de diagnostic et les services préventifs, environ le tiers seulement des employeurs de l'échantillon offraient un taux de remboursement plus élevé que celui de 90 % du Conseil du Trésor. Selon la base de données de Towers Perrin, 55 % des employeurs offraient le remboursement intégral de ces dépenses.

Pour les restaurations majeures telles que des prothèses ou des couronnes, le taux de remboursement de 50 % du régime du Conseil du Trésor était équivalent ou supérieur à celui de la majorité des employeurs de l'échantillon.

Pour les services d'orthodontie, environ 20 % seulement des employeurs de l'échantillon offraient un taux de remboursement supérieur au taux de 50 % du Conseil du Trésor. Dans la base de données de Towers Perrin, le pourcentage des employeurs offrant un taux de remboursement supérieur pour les services d'orthodontie était encore moins élevé, soit environ 11 %.

Maximum remboursable

Le maximum annuel de 1 400 $ (en 2003) pour le total des réclamations pour des services de base et des services majeurs du régime du Conseil du Trésor était moins généreux que celui de la majorité des régimes des employeurs de l'échantillon. Pour les services d'orthodontie, le maximum viager de 2 500 $ du régime de la fonction publique était plus généreux que les trois quarts des régimes des employeurs de l'échantillon.

Fréquence des examens de rappel

Moins de 10 % des employeurs offraient des examens de rappel plus fréquents que le délai de neuf mois prévu dans le régime du Conseil du Trésor.

Mise à jour des barèmes de frais dentaires

La plupart des employeurs appliquaient des barèmes de frais dentaires courants, tandis que le Conseil du Trésor était un an en retard dans la mise à jour des tarifs approuvés. Cependant, en pratique, il semble que les dentistes facturent généralement les fonctionnaires fédéraux en utilisant les taux qui n'ont pas été mis à jour.

Protection des pensionnés

Pour les deux tiers des régimes inclus dans la base de données de Towers Perrin qui comprend 192 organisations comptant au moins 1 000 employés, l'assurance des soins dentaires prend fin à l'âge de 65 ans alors que les pensionnés du gouvernement fédéral ont le choix de maintenir leur assurance soins dentaires pour une période indéfinie.

En général, l'étude de Mercer est arrivée à la conclusion qu'il y a des secteurs où le Conseil du Trésor est moins concurrentiel, comme la période d'attente, les franchises et le maximum combiné pour les services dentaires de base et majeurs. Cependant, le Conseil du Trésor est plus concurrentiel pour le maximum viager applicable aux services d'orthodontie.

Régimes d'assurance-vie et d'assurance-invalidité

Assurance-vie

Pour ce qui est de l'assurance-vie, l'analyse comparative de Mercer a fait ressortir les points suivants :

Date d'entrée en vigueur

Comme les trois quarts des employeurs de l'échantillon, le régime d'assurance-vie offert par le Conseil du Trésor s'applique à compter de la date d'embauche.

Partage des coût

Pour ce qui est du partage des coûts, la part de 17 % du coût de l'assurance-vie de base assumée par le Conseil du Trésor est bien inférieure à celle de presque tous les employeurs de l'échantillon. En fait, 85 % des employeurs assumaient le coût intégral de leur régime. Selon la base de données de Towers Perrin qui englobe 193 régimes comptant au moins 1 000 employés, environ 70 % des régimes étaient défrayés entièrement par l'employeur.

Niveau d'assurance-vie

Le niveau d'assurance-vie offert par le Conseil du Trésor représentant deux fois le salaire annuel était équivalent ou meilleur que celui des trois quarts des employeurs composant l'échantillon.

Le Conseil du Trésor comptait parmi le tiers environ des employeurs de l'échantillon qui ne fixent aucune prestation maximale d'assurance-vie.

En résumé, les modalités du régime d'assurance-vie offert par le Conseil du Trésor se comparent favorablement à celles des autres employeurs, mais le ratio du partage des coûts est relativement peu avantageux pour les employés.

Assurance-invalidité de longue durée

Pour ce qui est de l'assurance-invalidité de longue durée, l'étude de Mercer a fait ressortir les observations qui suivent.

Date d'entrée en vigueur

Le Conseil du Trésor inscrit les employés dès la date d'embauche aux fins de l'assurance-invalidité de longue durée, comme le font les deux tiers des employeurs de l'échantillon.

Partage des coûts

Soixante-dix pour cent des employeurs de l'échantillon assumaient le coût intégral de cette forme d'assurance alors que le Conseil du Trésor n'en paye que 85 %.

Niveau des prestations

Avec un niveau de prestations équivalant à 70 % du revenu avant l'invalidité, le régime offert par le Conseil du Trésor est équivalent ou supérieur à celui de plus de la moitié des employeurs de l'échantillon.

Protection maximale

Le régime du Conseil du Trésor ne prévoit aucun montant mensuel maximal et est sur ce point très avantageux; seulement 30 % des employeurs de l'échantillon offrent une protection aussi généreuse.

Revenu maximal de toutes sources

Selon l'étude de Mercer, le revenu maximal de toutes sources pendant la période d'invalidité variait de 75 % à 100 % du revenu avant l'invalidité et la limite la plus souvent observée était de 85 %. Il est difficile d'évaluer la politique à cet égard puisqu'elle est liée à d'autres aspects tels que l'imposition des prestations et l'indexation. Le régime de la fonction publique fédérale est intégré à d'autres régimes tels que le régime d'indemnisation des accidents du travail et le régime de pension de retraite. Mais d'autres revenus peuvent être permis au-delà du niveau général des prestations de 70 % du revenu avant l'invalidité.

Coût de la vie

Les prestations d'invalidité de longue durée offertes par le régime du Conseil du Trésor sont indexées au coût de la vie à un taux annuel maximal de 3 %. Cette indexation est équivalente ou meilleure que celle offerte par les deux tiers des régimes des employeurs de l'échantillon. Dans la base de données de Towers Perrin composée de 193 organisations comptant au moins 1 000 travailleurs, environ la moitié des régimes n'offraient aucune indexation à l'inflation.

Période d'attente

Le régime du Conseil du Trésor prévoit une période d'attente de 13 semaines, c'est-à-dire, la période minimale d'attente avant qu'un employé admissible ne puisse toucher des prestations. Il s'agissait de la période la plus courte parmi les employeurs figurant dans l'échantillon de Mercer.

Définition de l'invalidité

En conformité avec la plupart des employeurs de l'échantillon, la définition de l'invalidité dans le régime du Conseil du Trésor est l'incapacité d'un employé d'exercer les fonctions de son poste pendant deux ans et, par la suite, celles de tout autre poste.

En général, le régime d'assurance-invalidité de longue durée offert par le Conseil du Trésor se compare avantageusement à celui des gros employeurs de l'échantillon de Mercer, notamment pour ce qui est du niveau des prestations, de l'indexation à l'inflation et de la protection maximale. Les deux compagnies d'assurance qui administrent les prestations des régimes de la fonction publique fédérale sont d'avis que ces régimes sont non seulement concurrentiels, mais généreux en comparaison avec d'autres clients. En revanche, le partage des coûts pour l'employé est relativement moins généreux.

Nous n'avons pas inclus de renseignements précis concernant la comparabilité à la politique d'assurance-invalidité de courte durée du Conseil du Trésor, puisque les régimes varient considérablement d'une organisation à l'autre. Pour les fonctionnaires fédéraux, la principale composante de la protection de courte durée est qu'ils peuvent accumuler des congés de maladie d'une année à l'autre. Des avances de congé peuvent être autorisées, au besoin.

Indemnité de départ

Les travailleurs du secteur public fédéral sont, en général, admissibles à une indemnité de départ lorsque leur emploi prend fin. Cette indemnité varie entre la moitié d'une semaine et une semaine complète de rémunération par année de service, jusqu'à un maximum de 28 ou 30 semaines, habituellement. Bien que nous ne puissions confirmer cette information, nous croyons comprendre qu'une indemnité de départ officielle est plutôt rare parmi les employeurs dont l'effectif est non syndiqué.

Pour ce qui est des travailleurs syndiqués, nous avons pu consulter la base de données des conventions collectives visant au moins 500 employés maintenue par la Direction générale du travail, de Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC). Dans les établissements syndiqués, environ la moitié des conventions collectives prévoient une indemnité de départ pour les travailleurs dont l'emploi prend fin au sein de l'organisation. Ces conventions s'appliquent à environ 62 % (1,36 million de travailleurs) des employés dont la convention collective figure dans la base de données de RHDCC. Environ 75 % des fonctionnaires provinciaux ont droit à une telle indemnité, alors que seulement 20 % des travailleurs municipaux y ont droit. Les fonctionnaires fédéraux constituent au moins le quart de tous les travailleurs canadiens syndiqués qui sont admissibles à une indemnité de départ.

Parmi les employés ayant droit à une indemnité de départ, environ 90 % reçoivent un montant qui augmente avec le nombre d'années de service de l'employé. Les autres reçoivent un montant forfaitaire.

Droits à des congés

Voici les droits à des congés dans la fonction publique fédérale :

  • 11 jours fériés sont reconnus;
  • les nouveaux employés ont droit à 15 jours de congé annuel (vacances); le nombre de jours de congé augmente avec les années de service jusqu'à un maximum de 30 jours après 28 ans (pour la plupart des employés);
  • les congés de maladie s'accumulent à raison de 15 jours par année moins le nombre de jours de congé utilisés;
  • les employés peuvent demander jusqu'à cinq jours de congé pour obligations familiales; de plus, la plupart des employés syndiqués peuvent prendre un jour de congé personnel ou un jour de congé pour bénévolat par année);
  • un congé de maternité et un congé parental est accordé en conformité avec les droits à des congés prévus par la Loi sur l'assurance-emploi.

Nous avons été en mesure d'obtenir de l'information comparative sur les politiques de congés d'autres grands employeurs. Pour ce qui est des congés annuels, l'étude comparative de Mercer de 2004 faisait état des pratiques à cet égard dans le secteur des finances et des assurances. Pour les employés salariés, le crédit initial moyen était de 11,5 jours; après 20 ans de service, la moyenne était de 24,8 jours.

Nous avons pu aussi consulter la base de données de Towers Perrin englobant environ 290 employeurs. Durant la première année d'emploi, les crédits de congé annuel atteignaient 13 jours ou moins pour plus de la moitié des organisations examinées. Environ 5 % d'entre elles offraient plus de 15 jours. À l'autre extrémité, le nombre d'années de service requis pour prendre 30 jours de congé variait de 7 % environ des organisations exigeant 20 années de service ou moins à 31 % exigeant entre 21 et 25 années de service et à 43 % qui n'accordaient pas un tel nombre de congés annuels.

Pour ce qui est du report des congés annuels, la politique de la fonction publique fédérale se compare à celle des deux tiers des employeurs inclus dans l'étude comparative de Mercer de 2004, la plupart d'entre eux fixant un nombre maximum de jours pouvant être reportés. Cependant, la fonction publique fédérale va plus loin que les deux tiers des employeurs visés par l'étude en permettant aux employés de demander le paiement en argent des congés annuels non utilisés.

La fonction publique fédérale ne permet pas aux employés récemment embauchés de conserver le niveau de crédits de congés acquis antérieurement. Selon l'étude de Mercer, plus du tiers des employeurs examinés permettent aux cadres et aux gestionnaires de le faire, mais la proportion chute à 12 % pour les employés réguliers. Selon la base de données de Towers Perrin, environ le quart des employeurs permettent aux employés de maintenir le niveau de crédits de congés annuels acquis durant leurs années de service auprès d'autres employeurs.

Nous avons des données comparatives pour seulement un autre type de congé, soit le congé de maternité et le congé parental. L'étude comparative de Mercer de 2004 révèle que dans le secteur des finances et des assurances, environ les trois quarts des employeurs offrent un supplément aux prestations d'assurance-emploi pour congé de maternité, bien que la moitié d'entre eux imposent une exigence de service minimal (36 semaines en moyenne) pour y être admissible. Toutefois, seulement 12 % des employeurs environ offrent un supplément semblable pour le congé parental en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi. Les organisations sans but lucratif et celles du secteur public qui composent l'échantillon offraient, en général, un supplément pour le congé de maternité et le congé parental, mais imposait une exigence de service minimal d'environ 41 semaines en moyenne. Par contre, la fonction publique fédérale offre un supplément pour le congé de maternité et le congé parental à hauteur de 93 % des revenus réguliers, pour une durée maximale combinée d'une année sans exigence de service antérieur.

À la lumière de l'information présentée, nous en venons à la conclusion que la fonction publique fédérale est, de façon générale, plus généreuse dans ses politiques de congés annuels, de congé de maternité et de congé parental que la plupart des employeurs visés par l'étude.

 




9. Conclusions au sujet de la comparabilité

Dans cette section du Volume Un, nous avons regroupé et examiné un large éventail de données et d'analyses sur la question générale de savoir comment la rémunération dans la fonction publique se compare à celle offerte pour un travail similaire dans le secteur privé ou le secteur public élargi au Canada. Il nous faut maintenant rassembler tous ces éléments et proposer une évaluation globale.

Limites et considérations

En raison des contraintes de temps et de ressources, nous n'avons pu mener nos propres sondages ou d'autres recherches. Nous nous sommes donc limités à examiner les études ou les bases de données existantes. Chaque source comporte des limites importantes. Néanmoins, en les examinant globalement, nous pouvons présenter une évaluation équilibrée de la situation de la fonction publique fédérale par rapport à celle d'autres grands employeurs au Canada.

Dans le cadre de l'analyse, il aurait été utile d'établir un profil de la rémunération totale qui nous aurait permis de convertir les diverses formules de rémunération et d'avantages sociaux offertes par différents employeurs au dénominateur commun de la valeur monétaire. Cette mesure aurait facilité la comparaison de régimes de rémunération qui diffèrent passablement.

Cependant, nous avons rejeté cette approche pour deux raisons, l'une pratique et l'autre conceptuelle. Sur le plan pratique, nous n'avons simplement pas les données nécessaires pour faire une comparaison détaillée des employeurs. Et il ne serait pas facile non plus de recueillir de telles données de façon à produire des comparaisons fiables et probantes.

Deuxièmement, et ce qui est plus important, ces calculs exigent que nous choisissions une comparaison axée sur le coût pour l'employeur ou sur la valeur estimative pour les employés. Dans l'étude, nous avons mis l'accent sur le coût pour l'employeur, surtout parce que cet élément est moins ambigu et plus facile à déterminer[140]. De plus, la valeur de tous les régimes de rémunération peut varier considérablement entre les groupes d'employés ou entre les personnes au sein d'un groupe, ou encore pour une même personne dont les circonstances personnelles changent. Par exemple, les parents ont une perspective différente des prestations de survivant ou de la protection offerte pour des services d'orthodontie de celle de la plupart des employés célibataires. Par conséquent, peu importe la méthode d'évaluation choisie, la précision apparente découlant d'une réduction d'éléments de rémunération disparates en termes monétaires entraînera nécessairement des divergences d'interprétation.

Nous devons donc évaluer la rémunération offerte dans la fonction publique fédérale en la comparant à celle offerte par d'autres employeurs à partir d'un jugement global enrichi par les diverses perspectives examinées dans le présent chapitre.

Mise en contexte de la fonction publique fédérale

Depuis la période ayant suivi immédiatement la Première Guerre mondiale lorsque le Parlement a, pour la première fois, légiféré en vue d'établir le recrutement en fonction du mérite dans la fonction publique fédérale, la situation n'a essentiellement pas changé au fil des décennies. Les déclarations successives sur l'objectif de la rémunération dans la fonction publique visaient à maintenir la comparabilité avec le secteur privé et le secteur public au sens large. Toutefois, au moment de déterminer les salaires et les avantages sociaux dans la fonction publique, la comparabilité a continuellement cédé la place à des préoccupations plus pragmatiques telles que le respect des relativités internes entre les groupes, la conclusion d'une convention collective, la démonstration par l'exemple d'un employeur avisé, ou la manière de contrôler les dépenses ou l'inflation.

Dans le contexte plus vaste de l'évolution de l'économie canadienne et du marché du travail canadien depuis 1990, plusieurs points ressortent :

  • Emploi – De 1990 à 2003, l'emploi dans le secteur privé a augmenté de près de 23 % alors que l'emploi total dans le secteur public fédéral[141] a diminué d'environ 10 %. Proportionnellement à l'emploi total au Canada, le secteur public fédéral a reculé, passant d'environ 2,7 % en 1990 à environ 2,0 % en 2003.
  • Masse salariale totale – La masse salariale totale dans le secteur privé a augmenté de près de 70 % depuis 1990, reflétant en partie la hausse de l'emploi. Comparativement à 1990, la masse salariale de la fonction publique fédérale en 2003 avait augmenté d'un peu plus de 30 %.
  • Salaires moyens – Nous avons sélectionné les gains hebdomadaires et horaires moyens comme principaux indicateurs des salaires dans le secteur privé, ainsi que les augmentations de salaires annuelles prévues dans les conventions collectives du secteur privé. Les deux premiers indicateurs n'ont guère changé de 1990 à 2003. Les hausses annuelles de salaires négociées étaient environ 8 % plus élevées sur ces 13 années. Les salaires moyens dans le secteur public fédéral ont augmenté d'environ 16 % au cours de la même période. Toutes ces augmentations sont exprimées en dollars constants, c'est-à-dire après inflation.

L'élément le plus frappant dans la comparaison entre le secteur public fédéral et le secteur privé canadien n'est pas l'expérience vécue durant ces 13 années, mais la tendance depuis la fin de l'Examen des programmes en 1997-1998. Le taux d'augmentation pour chacun des éléments mentionnés, notamment les salaires moyens, a été sensiblement plus rapide au cours des cinq à six dernières années que dans l'ensemble de l'économie ou dans le secteur privé.

La comparaison des taux d'augmentation soulève la question de savoir si le point de départ était comparable[142]. La seule source d'information que nous avons obtenu au sujet de la comparabilité des salaires moyens dans la fonction publique fédérale par rapport à ceux du secteur privé au début des années 1990 était une étude du Conseil du Trésor datant de 1992 qui concluait, à partir de données du Bureau de recherche sur les traitements, que la rémunération moyenne dans la fonction publique fédérale accusait un retard de 8,3 % par rapport au secteur privé à l'échelle nationale[143]. Fait à noter, il s'agit presque exactement du pourcentage par lequel l'augmentation cumulative des salaires moyens dans le secteur public fédéral a excédé les augmentations dans le secteur privé (selon les hausses salariales annuelles négociées dans ce secteur) entre 1990 et 2003.

Comparabilité des salaires

Les études examinées ont servi à comparer la valeur des salaires et des avantages sociaux offerts dans la fonction publique fédérale directement ou indirectement avec le secteur privé canadien et le secteur public élargi. Deux de ces études, un rapport produit par la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI) en 2003 et une analyse effectuée pour le compte du Secrétariat du Conseil du Trésor (en 2003 également) par Morley Gunderson de l'Université de Toronto indiquent qu'il existait une « prime salariale » importante en faveur de la fonction publique fédérale en comparaison avec le secteur privé. Fait plus important, les études révélaient que cet avantage avait augmenté au cours des dernières années.

Nous en arrivons à la conclusion qu'en raison de problèmes de méthodologie, les primes salariales mentionnées sont discutables, bien que la tendance à la hausse de la situation relative de la rémunération dans la fonction publique fédérale corresponde à notre propre analyse et à d'autres rapports (comme celui de 2003 de l'Institut de la statistique du Québec sur la rémunération). Notre évaluation indique que la prime dont fait état l'étude de la FCEI pourrait découler en grande partie de problèmes de méthodologie, et notamment de l'inclusion par inadvertance dans le revenu de la fonction publique des paiements rétroactifs forfaitaires liés à la parité salariale en 2000 et de l'utilisation des données sur le revenu médian au lieu du revenu moyen.

Dans le cas de l'étude Gunderson, nous avons noté que la prime salariale présumée diminuait lorsqu'un nombre croissant de professions étaient intégrées au modèle économétrique utilisé pour l'analyse. Le fait de passer de 10 à 47 professions réduisait l'écart salarial entre le secteur public fédéral et le secteur privé de 16,2 % à 12,4 %. Bien sûr, cet écart est encore important. Toutefois, lorsque nous avons étendu notre examen pour inclure les résultats de l'enquête annuelle sur la rémunération de l'Institut de la statistique du Québec, nous avons noté qu'un appariement détaillé des postes éliminait largement l'écart salarial entre le secteur public fédéral et le secteur privé au Québec.

Notre examen de ces études générales nous incite à conclure que la preuve d'une prime salariale importante en faveur de la fonction publique fédérale était faible. Ces études essaient d'intégrer trop de renseignements disparates, ce qui se traduit par un niveau d'abstraction ou d'artificialité offrant une base peu probante pour établir la comparabilité. Ainsi le risque de comparer des groupes de travailleurs passablement distincts est élevé.

Néanmoins, ces études permettent de soulever des questions qui requièrent une analyse plus approfondie. Plus particulièrement, le rapport unanime d'un taux d'augmentation de la rémunération dans le secteur public fédéral supérieur à la tendance générale du marché du travail canadien nécessite un suivi. Le besoin de mieux comprendre dans quelle mesure et pourquoi les salaires dans la fonction publique fédérale ont connu une augmentation relativement rapide a motivé en partie la présente étude.

Cette critique des études globales suppose que des analyses ciblées de la rémunération de postes spécifiques seraient plus informatives et fiables. Bien que cet argument soit convaincant en théorie, notre examen de plusieurs études de ce genre révèle des lacunes qui compromettent leur utilité. Mais surtout, il n'y a aucune norme établie ni aucune méthodologie acceptée pour encadrer ce travail. Le fait que la plupart des études sont menées au cours de la période précédant des négociations collectives ne contribue pas à leur crédibilité. Même les études qui semblent rigoureuses peuvent négliger des questions importantes. Ainsi, l'étude sur la rémunération de certains métiers menée conjointement par l'Alliance de la fonction publique du Canada et le Secrétariat du Conseil du Trésor a, en grande partie, ignoré les écarts régionaux même si les échelles salariales locales constituent une caractéristique bien établie de la rémunération de ces postes.

Afin de disposer d'un fondement rigoureux et éclairé pour déterminer la rémunération dans la fonction publique fédérale, nous devons recueillir des renseignements détaillés au sur les taux courants du marché du travail externe. À la fin de 2003, le Parlement a approuvé la Loi sur la modernisation de la fonction publique qui prévoit l'établissement d'une fonction de recherche sur la rémunération au sein de la nouvelle Commission des relations de travail dans la fonction publique. Il sera essentiel de respecter des normes d'objectivité uniformes et rigoureuses et de soumettre des rapports selon un calendrier prévisible.

Tenant compte de toute l'information disponible, voici notre évaluation sommaire :

Tout au plus, il y avait en 2003 une modeste prime globale au niveau des salaires dans le secteur public fédéral par rapport au secteur privé canadien, pour un travail semblable. Toutefois, si la croissance plus rapide des salaires moyens observée au cours des dernières années dans le secteur public fédéral persiste, les salaires dans le secteur fédéral dépasseront prochainement ceux versés dans le secteur privé.

Comparabilité de la parité salariale

Nous avons seulement des données incomplètes et difficiles à interpréter sur la façon dont l'expérience du secteur public fédéral au chapitre de la parité salariale se compare à celle d'autres grands employeurs des secteurs public et privé au Canada. Il faudrait accomplir un imposant travail de recherche, qui irait bien au-delà des ressources de cet examen, pour recueillir et évaluer des données exhaustives. Par conséquent, nous nous limitons dans cette section à présenter des renseignements anecdotiques qui, à tout le moins, donnent une idée de l'expérience d'autres secteurs.

Législation provinciale

Les lois en matière de parité salariale adoptées au Canada par différentes administrations varient. Six provinces ont adopté des versions d'une approche proactive[144]. Il s'agit du Manitoba, du Nouveau-Brunswick, de l'Île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Écosse, de l'Ontario et du Québec. Les deux dernières provinces constituent les principaux exemples. Les quatre autres provinces ont eu recours à la législation sur les droits de la personne ou sur les normes du travail.

Ontario

L'Ontarioa été la première province à promulguer une loi proactive qui s'appliquait aux secteurs public et privé. Selon Morley Gunderson, qui a publié de nombreux articles à ce sujet, la parité salariale en Ontario peut être classée parmi les plus avancée au monde[145]. Le modèle de l'Ontario repose sur des comités conjoints de parité salariale qui élaborent et mettent en application des plans de parité salariale de concert avec chaque agent de négociation. Les critères permettant de déterminer la prédominance masculine ou féminine sont souples, y compris la référence à l'occupation historique des postes et aux stéréotypes traditionnels qui s'y rattachent. Diverses méthodes de rajustement du salaire sont permises, y compris la méthode de comparaison avec des organisations externes qui permettent à des groupes à prédominance féminine sans comparateur masculin évident de se comparer à des groupes appropriés dans un autre établissement.

La législation ontarienne limite la valeur monétaire des rajustements au titre de la parité salariale à un maximum de 1 % de la masse salariale par année. Elle reconnaît des exceptions aux fins de l'évaluation des disparités salariales, telles que les pénuries de main-d'œuvre et le pouvoir de négociation des syndicats. On juge que la parité salariale est atteinte lorsqu'une catégorie d'emplois à prédominance féminine a le même salaire que la catégorie d'emplois à prédominance masculine au bas de l'échelle salariale, pour un travail de valeur égale. Les lacunes perçues de l'expérience vécue en Ontario incluent notamment un faible taux de conformité, plus particulièrement parmi les petits employeurs, et l'absence de dispositions législatives sur le maintien de la parité salariale une fois la politique mise en oeuvre.

Québec

Le Québeca enchâssé la parité salariale dans sa Charte des droits et libertés de la personne en 1975. La province a élaboré sa loi sur la parité salariale de 1996 en s'inspirant du modèle ontarien. La loi au Québec renferme une plus vaste gamme de méthodes acceptables de rajustement des salaires et la possibilité d'adopter un plan sectoriel ou pour l'ensemble d'une industrie. Le maintien de la parité doit être pris en compte au moment du renouvellement d'une convention collective. La Commission de l'équité salariale a le pouvoir de mener des enquêtes. La disposition visant à accepter les programmes de relativités salariales déjà en vigueur avant l'adoption de la loi a été jugée inconstitutionnelle.

Tout comme l'Ontario, le Québec est considéré comme ayant un taux de conformité relativement faible et comme la plupart d'employeurs en sont encore à l'étape initiale, peu sont obligés d'appliquer les dispositions de maintien.

Mise en œuvre de la parité salariale par les autres employeurs

Nous n'avons pu trouver d'évaluation systématique de la façon dont la parité salariale a été mise en œuvre par d'autres grands employeurs au Canada ni des augmentations salariales qui en ont résulté. Des données ont été présentées dans le chapitre 4 du rapport final du Groupe de travail sur l'examen de la législation sur la parité salariale présidé par Beth Bilson[146]. En explorant les répercussions des approches proactives sur la mise en œuvre de la parité salariale, le rapport du groupe de travail Bilson dévoile certains chiffres au sujet des augmentations salariales résultant de l'application du principe d'un salaire égal pour un travail de valeur égale. Au Manitoba, par exemple, dont la législation de 1985 est présentée comme un modèle, le pourcentage de la masse salariale consacré à la mise en œuvre de la parité salariale variait de 2 % % pour les sociétés d'État de la province à 3,3 % pour la fonction publique.

En vertu de la Loi sur l'équité salariale de l'Ontario, les rajustements salariaux pour les organisations comptant 500 employés ou plus représentaient 0,6 % de la masse salariale dans le secteur privé et 2,2 % dans le secteur public[147]. Dans la fonction publique ontarienne, le rajustement salarial initial sur la période de deux ans allant de 1990 à 1991 a donné lieu à une augmentation de la masse salariale d'environ 120 millions de dollars dans la fonction publique qui comptait alors environ 80 000 employés[148]. À la suite de plaintes et de rajustements subséquents, un montant additionnel d'environ 9 millions de dollars s'est ajouté au total. Les coûts permanents ont été intégrés à la rémunération des catégories d'emplois à prédominance féminine et, une décennie plus tard, ils ne peuvent être mesurés avec précision.

Au Québec, l'investissement total du secteur public au titre de la parité salariale entre 1990 et 2006 a été évalué à environ 8 milliards de dollars. Ce montant englobe le secteur public et parapublic, qui compte quelque 500 000 employés. Les dépenses annuelles depuis 2000 sont évaluées à plus de 530 millions de dollars, montant qui avait grimpé à quelque 785 millions de dollars en 2005 par suite de règlements subséquents[149].

Deux autres points concernant les dépenses des gouvernements provinciaux à ce poste ont trait à la Saskatchewan et à la Colombie-Britannique. En 2003, un montant de 65 millions de dollars devait être versé à 25 000 travailleuses de la santé de la Saskatchewan. En Colombie-Britannique, plus de 40 000 travailleuses de la santé ont reçu environ 100 millions de dollars à l'automne 2000 à titre de rajustement rétroactif pour la parité salariale[150].

Bien qu'incomplètes, ces données font néanmoins ressortir quelques points de comparaison entre la fonction publique fédérale et la situation générale au Canada au chapitre de la parité salariale :

  • Les investissements de la fonction publique fédérale au titre de la parité salariale semblent aussi ou plus élevés que ceux d'autres paliers de gouvernement.
  • Le pourcentage de la rémunération qui s'ajoute à la masse salariale des autres paliers de gouvernement semble être similaire à celui du gouvernement fédéral.

De façon plus générale, il semble que les répercussions de la parité salariale sur la rémunération des travailleuses en Ontario ne ressortent pas encore clairement. Comme Morley Gunderson l'a fait observer en 2002 :

Malheureusement, nous en savons remarquablement peu au sujet de l'efficacité générale des initiatives comme les programmes de parité salariale en Ontario. Nous savons que l'Ontario est un chef de file mondial en matière de parité salariale et nous savons que ce système est devenu complexe, mais nous avons étonnamment peu de données pour répondre à la question fondamentale – La parité salariale a-t-elle réussi à combler l'écart salarial ou à atteindre d'autres objectifs sociaux[151]?

Comparabilité des pensions et des avantages

Après les salaires, les pensions constituent l'élément le plus important du régime de rémunération des fonctionnaires fédéraux et représentent le coût le plus élevé pour l'employeur.

Les fonctionnaires fédéraux comptent parmi les deux cinquièmes (40 %) des travailleurs rémunérés au Canada qui bénéficient d'un régime de pension agréé offert par l'employeur ou le syndicat. En général, les autres travailleurs comptent sur d'autres sources telles que les régimes enregistrés d'épargne-retraite privés, les régimes d'épargne-retraite collectifs, les placements personnels, les REER ou le RPC/RRQ et la Sécurité de la vieillesse. Ces instruments sont accessibles à tous les Canadiens, y compris les fonctionnaires fédéraux.

Le Régime de pension de retraite de la fonction publique fédérale compte parmi les meilleurs au Canada

Dans une étude réalisée en 2004 par Towers Perrin, parmi les régimes à prestations déterminées, le régime offert par le gouvernement du Canada se classait au 87e centile pour ce qui est de la valeur offerte par l'employeur et au 96e centile pour la valeur totale lorsque les cotisations salariales étaient incluses. Ce qui différencie tout particulièrement le régime fédéral des autres régimes ce sont les dispositions concernant la retraite anticipée et les prestations de raccordement et la politique d'indexation intégrale à l'inflation. D'autres régimes de pension fédéraux tels ceux des Forces canadiennes, de la Gendarmerie royale du Canada, des parlementaires et des juges de nomination fédérale offrent des régimes encore plus généreux à leurs membres.

Tout comme les autres régimes du secteur public, le Régime de pension de retraite de la fonction publique fédérale exige une cotisation salariale relativement élevée : 4 % des gains de la partie du salaire qui est inférieure au montant du MGAP du RPC/RRQ et 7,5 % de la rémunération supérieure à ce montant. Toutefois, ces cotisations sont moins élevées que celles exigées par les régimes de la fonction publique provinciale. C'est le cas de tous les régimes provinciaux pour les salaires inférieurs au maximum couvert par le RPC/RRQ et, dans un grand nombre de ces régimes, pour les salaires supérieurs à ce niveau. Globalement, les fonctionnaires fédéraux versent des cotisations représentant au plus 28 % du coût du service courant de leur pension, un niveau largement inférieur aux parts de 40 % à 50 % de la plupart des autres régimes du secteur public au Canada.

Le tableau des avantages autres que la pension de retraite est encore plus mitigé, comme nous l'expliquons brièvement ci-dessous.

Le Régime de soins de santé de la fonction publique est concurrentiel mais il est inférieur sur certains points

En général, Mercer Human Resources Consulting a constaté que le RSSFP offre une protection équivalente à celle offerte par d'autres grands employeurs dans les secteurs public et privé au Canada. Toutefois, certains éléments sont relativement moins généreux pour les employés actifs, notamment les franchises et le niveau de remboursement, la garantie-hospitalisation, l'absence d'une carte-médicaments, les limites imposées pour un grand nombre de spécialistes paramédicaux et les soins de la vue, ainsi que les soins infirmiers privés et la protection à l'extérieur du pays.

Sur la base d'un échantillon restreint des coûts réels par personne pour les autres employeurs, le RSSFP se classait dans la moyenne, les coûts s'élevant à 823 $ annuellement par membre. Dans l'ensemble, les coûts variaient de 495 $ à 1 243 $.

Peu d'employeurs offrent le même niveau de protection aux pensionnés qu'aux employés actifs. Le RSSFP est très avantageux quant à la protection offerte aux pensionnés.

Le Régime de soins dentaires de la fonction publique est concurrentiel, mais il est inférieur sur certains points

Encore une fois, le régime fédéral est globalement concurrentiel, mais il est inférieur à celui offert par les employeurs les plus généreux pour certains éléments tels que le niveau maximal annuel de remboursement et les franchises. Par contre, le RSDFP est plus généreux pour ce qui est des niveaux de remboursement à vie des services d'orthodontie et la protection des pensionnés.

Les régimes d'assurance-vie et d'assurance-invalidité sont à la fois supérieurs et inférieurs aux autres régimes

Comme pour les régimes précédents, les mesures fédérales sont à la fois supérieures et inférieures à celles des autres employeurs. Dans la majorité des cas, les autres employeurs assument tous les coûts du régime ou un montant plus élevé que ceux défrayés par le Conseil du Trésor. Par contre, l'indexation des pensions d'invalidité de longue durée (jusqu'à concurrence d'une limite annuelle de 3 %) est supérieure à celle offerte par la plupart des employeurs.

L'indemnité de départ est offerte principalement dans le secteur public

L'indemnité de départ est offerte principalement dans le secteur public. Ainsi, la fonction publique fédérale offre une indemnité qui augmente en fonction du nombre d'années de service de l'employé, tout comme la plupart des autres employeurs offrant une telle indemnité. Nous n'avons pu obtenir de données détaillées permettant de comparer le montant de l'indemnité accordée dans la fonction publique fédérale à celui offert par d'autres employeurs.

Les crédits de congé sont généreux

Selon l'information figurant dans la base de données de Towers Perrin, la fonction publique fédérale offre plus de congés annuels que la plupart des grands employeurs pour un même nombre d'années de service. La fonction publique fédérale est particulièrement généreuse pour ce qui est de la durée (jusqu'à concurrence d'un an) des prestations complémentaires de congé de maternité et de congé parental qui portent les prestations d'assurance-emploi à 93 % du revenu régulier.

Conclusion générale – La rémunération dans le secteur public fédéral se compare favorablement avec celle des autres secteurs

En rassemblant tous ces éléments, nous pouvons conclure seulement que la situation générale des fonctionnaires fédéraux se compare favorablement à celle des travailleurs du secteur privé et du secteur public élargi au Canada.

Selon certains rapports publiés en 2003[152], le fait que les salaires dans le secteur public fédéral sont supérieurs en moyenne à ceux versés pour un travail similaire dans le secteur privé donne lieu à une prime générale importante. À notre avis, cela reste à prouver. Plus nous comparons les salaires pour des postes spécifiques, plus cet avantage diminue. En fait, le rapport de 2003 de l'Institut de la statistique du Québec, utilisant une méthodologie d'appariement des postes, révèle que les salaires dans la fonction publique fédérale correspondaient généralement à ceux versés dans le secteur privé au Québec, qui sont semblables (à 5,5 % près) à la moyenne des salaires dans le secteur privé canadien.

Néanmoins, toutes les études générales passées en revue dans le cadre de cet examen et notre propre analyse de la rémunération dans la fonction publique fédérale indiquent un taux d'augmentation des salaires dans la fonction publique fédérale depuis 1998 supérieur au taux d'augmentation moyen dans le secteur privé. S'il n'y avait tout au plus qu'une petite prime en 2002-2003, elle deviendra certainement importante si le taux de croissance relativement élevé des salaires se poursuit dans la fonction publique fédérale.

Naturellement, ce point de vue général masque des distinctions importantes. Pour ce qui est des salaires, nous savons par exemple que les cadres occupant un poste supérieur au premier niveau reçoivent une rémunération globale inférieure à celle de leurs homologues du secteur privé pour le même niveau de responsabilité. De plus, tout semble indiquer que les gens des métiers sont moins bien rémunérés que dans le secteur privé. Par contre, le personnel de soutien administratif comme les commis et les secrétaires gagne plus en général que les employés ayant des fonctions semblables dans le secteur privé.

On croit généralement que les salaires relativement plus élevés des postes de soutien administratif résultent de la parité salariale. Le gouvernement fédéral a certes versé des montants élevés pour régler les plaintes relatives au principe du salaire égal pour un travail de valeur égale. Et la part actuelle de la masse salariale reliée à la parité salariale varie généralement entre 2 % et 3 %. Toutefois, la tendance fondamentale dans la fonction publique à verser des salaires plus élevés que les autres employeurs aux niveaux subalternes, des salaires moins élevés aux niveaux supérieurs et variables aux niveaux intermédiaires a persisté pendant des décennies. Cette situation a présidé à la Commission Beatty en 1930 et à la Commission Gordon en 1946. Les deux commissions ont d'ailleurs souligné la nécessité d'améliorer la rémunération et les perspectives de carrière des employés du groupe scientifique et administratif (la direction, de nos jours) dans la fonction publique. Le rapport de la Commission Glassco a décrit ainsi cette tendance :

Dans l'ensemble, les échelles de salaires pour les postes inférieurs de l'administration sont égales ou même supérieures à celles des emplois correspondants dans l'industrie privée. Les échelles de salaires pour les emplois supérieurs à ces niveaux accusent certaines différences, surtout dans les hauts postes administratifs ou professionnels où le gouvernement est nettement désavantagé, au point de vue financier, par rapport à l'industrie privée[153].

Il est évident que les éléments non salariaux de la rémunération fédérale se comparent très favorablement aux avantages offerts dans le secteur privé canadien. Même si nous n'avons pu recueillir les données nécessaires pour comparer la rémunération globale en attribuant une valeur monétaire à tous les éléments pour divers employeurs comparables, l'accumulation des comparaisons mène inévitablement à cette conclusion.

Plus particulièrement, les régimes de pension de retraite de la fonction publique fédérale se situaient dans la tranche supérieure de 10 % au Canada en termes de valeur globale. Les dispositions concernant la retraite anticipée et l'indexation sont tout particulièrement avantageuses. Les régimes de soins de santé et de soins dentaires ne sont pas les plus généreux au Canada, mais ils offrent une très bonne protection. Ils sont aussi offerts aux fonctionnaires retraités et la protection accordée est supérieure à celle que la plupart des employeurs du secteur privé offrent à leurs pensionnés.

Des commentaires semblables s'appliquent à l'assurance-vie et à l'assurance-invalidité, bien que les fonctionnaires fédéraux payent une plus grande partie du coût de ces assurances que les employés de la plupart des grandes entreprises privées. L'indemnité de départ est principalement une prestation offerte dans le secteur public et la politique de la fonction publique fédérale est généreuse. Les crédits de congé dans la fonction publique fédérale se comparent avantageusement à ceux offerts en moyenne dans le secteur privé.

En général, les employés dans les postes subalternes reçoivent une rémunération très avantageuse, combinant des salaires supérieurs à ceux offerts dans le secteur privé, un excellent régime de pension et des avantages sociaux intéressants. Pour les fonctionnaires au niveau intermédiaire, où il est plus probable que les salaires correspondent à ceux du secteur privé, la rémunération est globalement très bonne lorsque le régime de pension de la fonction publique et les avantages sociaux sont pris en compte, Pour ce qui est des hauts fonctionnaires, dont les salaires sont inférieurs à ceux des cadres du secteur privé, le régime de pension de retraite et les autres avantages (offerts pendant les années d'emploi actif et pendant la retraite) représentent une rémunération intéressante. Cependant, plus le poste occupé est élevé, moins il en est ainsi. Il est plus probable que ces fonctionnaires seront motivés par d'autres facteurs tels que la valeur de servir le public, la portée et l'importance des défis à relever, ou encore la possibilité d'exercer une influence sur l'avenir du pays.

 




SECTION QUATRE - RECOMMANDATIONS

10. Contexte des recommandations

Dans ce dernier chapitre, nous situons nos observations dans le contexte plus général des politiques et nous présentons des recommandations spécifiques en vue d'assurer une gestion plus délibérée et efficace de la rémunération dans le secteur public fédéral.

Le message essentiel est que comme la rémunération constitue une part substantielle des dépenses discrétionnaires du gouvernement fédéral (plus du tiers de ces dépenses) et comme les composantes de la rémunération sont étroitement liées, l'ensemble de ce secteur devrait être géré de manière cohérente et stratégique de manière à avoir la fonction publique dont nous avons besoin. En rédigeant ce rapport, nous nous sommes aperçus à quel point notre régime de gestion actuel demeure fragmentaire, en dépit des récents efforts déployés pour en accroître la cohérence. Même les données nécessaires pour répondre aux questions de base dans ce domaine reposent sur des définitions confuses et des rapports hétéroclites. Vu l'importance des sommes en jeu, l'information communiquée sur les coûts de la rémunération du gouvernement fédéral doit être claire, tout comme l'obligation connexe de rendre compte. Une gestion publique l'exige.

Dans les années à venir, la rémunération doit continuer à être régie principalement par les principes de comparabilité externe et de cohérence et d'équité internes, à la fois pour les employés et les contribuables. Nous devons appliquer ces principes afin de pouvoir répondre à nos besoins opérationnels futurs et faire face aux réalités opérationnelles de demain. Notre régime de rémunération doit être assez généreux pour que nous puissions attirer, maintenir en poste et motiver les personnes talentueuses dont nous avons besoin, et assez modeste pour garantir la prudence financière, tout en reflétant notre engagement collectif de rester un employeur socialement responsable. Parvenir à un tel équilibre ne peut jamais être facile et exigera toujours de faire des choix. Une meilleure information et une gestion plus systématique nous permettront de concilier tous ces éléments de la meilleure façon possible.

Nous commençons ce chapitre par un résumé des facteurs qui ont entraîné la hausse des coûts liés à la rémunération entre 1997‑1998 et 2002‑2003 et par une brève description de certaines tendances clés susceptibles d'influer sur la nature de la fonction publique au cours de la décennie ou des deux décennies à venir. Il est essentiel de bien comprendre ces deux perspectives pour pouvoir établir la politique de rémunération de demain. Dans les chapitres qui suivant, nous présentons 17 séries de recommandations (77 propositions en tout) réparties entre cinq thèmes :

  1. Transparence et reddition de comptes;
  2. Gestion cohérente de la rémunération;
  3. Enjeux importants en matière de rémunération touchant aux salaires;
  4. Enjeux importants en matière de rémunération touchant aux pensions et aux autres avantages sociaux;
  5. Domaines possibles d'actualisation du cadre législatif.

Nous présentons aussi, au chapitre 15, une esquisse de plan de mise en œuvre possible. Le chapitre 16 renferme nos observations finales.

Facteurs influant sur les recommandations

Déterminants des coûts de la rémunération

En formulant nos recommandations, nous nous sommes fondés d'abord sur notre évaluation des principaux facteurs à l'origine de la hausse des dépenses de rémunération, surtout depuis la fin, en 1997‑1998, des gels salariaux et des réductions des effectifs associés à l'Examen des programmes. En gros, comme le résume l'appendice de l'Aperçu de ce rapport, les salaires ont représenté les deux tiers de la hausse d'environ 8 milliards de dollars de la rémunération totale du secteur public fédéral entre 1997‑1998 et 2002‑2003. Le tableau 1051 résume les principaux facteurs de changement durant cette période.

En ce qui concerne les salaires, à partir de la combinaison du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts comme pôle d'analyse, la hausse peut être attribuée à cinq grands facteurs, comme l'illustre le diagramme circulaire de la figure 1052. Tout d'abord, à un taux cumulatif de 11,6 % entre 1997‑1998 et 2002‑2003, à elle seule l'inflation a eu pour effet d'accroître la masse salariale de cette partie du secteur public fédéral de 8,2 à presque 9,2 milliards de dollars.

Tableau 1051

Principaux déterminants des hausses des coûts de la rémunération dans le secteur public fédéral depuis la fin de l'Examen des programmes, soit entre 1997‑1998 et 2002‑2003

  Dépenses Différence
Éléments de coûts (milliards de $) (milliards de $) %

 

1997-1998

2002-2003

 

 

Salaires

12,0

17,2

5,2

66

Cotisations aux régimes de pension

1,3

2,5

1,2

15

Retenues salariales

0,4

0,9

0,5

6

Régime de santé / soins dentaires

0,7

1,1

0,4

5

Indemnités

0,4

0,8

0,4

5

Autres (net)

0,9

1,1

0,2

3

Total*

15,7

23,6

7,9

100

* À noter que les totaux indiqués ici sont légèrement inférieurs à ceux présentés ailleurs dans ce rapport. Ils excluent les sommes comme les paiements rétroactifs ou les prestations non liées à la pension versées aux pensionnés de la fonction publique. Dans d'autres cas, nous n'avons pas réussi à obtenir les données détaillées nécessaires pour effectuer une analyse à ce niveau. Nous avons donc limité la portée de l'analyse aux données figurant à l'appendice de l'Aperçu de ce rapport.

Pour ce qui est des salaires, en utilisant les domaines combinés du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts comme unité d'analyse, les hausses peuvent être attribuées à cinq grands facteurs, tel qu'illustré dans le diagramme en secteurs de la figure 1052. Premièrement, avec un total cumulatif de 11,6 % entre 1997-1998 et 2002-2003, l'inflation à elle seule aurait accru la masse salariale de cette part du secteur public fédéral d'un milliard de dollars, soit de 8,2 milliards à près de 9,2 milliards de dollars.

Deuxièmement, après l'inflation, le facteur le plus important a été la hausse du nombre d'employés. Environ 1,8 milliard de la hausse totale de 4,2 milliards de dollars de la masse salariale de l'effectif combiné du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts est attribuable à l'embauche de nouveaux employés. Parce que le recrutement est étalé sur les cinq années, il est difficile d'isoler la composante liée à l'inflation. Une estimation raisonnable de la contribution après inflation des salaires des nouveaux employés serait de 1,7 milliard de dollars.

Figure 1052
Principales composantes des hausses salariales dans le domaine combiné du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts, 1997‑1998 à 2002‑2003

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Principales composantes des hausses salariales dans le domaine combiné du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts, 1997-1998 à 2002-2003

Troisièmement, une partie des hausses salariales est attribuable aux résultats des négociations collectives dépassant le taux d'inflation. À la fin de la période de cinq ans, la masse salariale avait progressé d'environ 0,8 milliard de dollars, plus ou moins à parts égales en raison de l'octroi de hausses économiques en sus du taux réel d'inflation et des hausses résultant des changements apportés à la structure salariale de divers groupes.

Quatrièmement, les changements touchant à la composition de l'effectif de la fonction publique ont représenté environ 0,5 milliard de dollars de la hausse cumulative de la masse salariale. Enfin, les règlements au titre de la parité salariale expliquent environ 0,2 milliard de dollars de la hausse.

À part les salaires, le seul autre facteur ayant exercé une influence réellement importante sur les coûts dans l'ensemble du secteur public fédéral entre 1997‑1998 et 2002‑2003 a été la hausse de la part de l'employeur des cotisations pour service courant aux régimes de pension. Cette hausse s'est chiffrée à 1,2 milliard de dollars, soit 15 % de la hausse globale de 8 milliards de dollars des coûts de la rémunération du gouvernement fédéral.

Par ailleurs, certaines catégories de dépenses de rémunération ont augmenté beaucoup plus rapidement en pourcentage. Par exemple, le coût total de la rémunération au rendement a triplé, quoiqu'à partir d'une base très limitée. En outre, les retenus salariales ont plus que doublé. Enfin, le coût des régimes de soins de santé et de soins dentaires ont augmenté d'environ 50 %, soit plus du double du taux d'augmentation de l'effectif.

Certaines des augmentations résultaient des pressions socioéconomiques ressenties par tous les employeurs. À ce titre, on compte l'inflation, évidemment, mais aussi une part substantielle des changements survenus dans la composition de l'effectif à mesure que les employeurs ont accordé plus d'importance au savoir, ainsi que la parité salariale, la hausse des retenues salariales et une bonne partie de la hausse des coûts des régimes de soins de santé et de soins dentaires parallèlement à l'augmentation de l'âge moyen des employés et de la poussée des coûts des médicaments. De plus, une partie de la hausse des coûts, pour l'employeur, des régimes de pension pour le service courant est imputable à la baisse des taux d'intérêt réels. Au total, ces composantes de la hausse des coûts de la rémunération auraient représenté environ 3,5 milliards de dollars sur la hausse totale de 8 milliards de dollars observée entre 1997‑1998 et 2002‑2003.

Cela laisse la plus grande partie de la hausse des dépenses aux composantes sur lesquelles l'employeur exerçait un contrôle. La réalité de la négociation collective impose toutefois des contraintes au contrôle qu'il peut exercer sur les coûts de rémunération. À partir de cette analyse, nous avons mis l'accent, dans nos recommandations, sur plusieurs mesures susceptibles de favoriser une gestion plus rigoureuse de l'augmentation du nombre d'employés et des hausses salariales en particulier, en commençant par la promotion de la transparence, et une gestion plus cohérente de ce type de croissance.

En plus de tenir compte des facteurs relatifs qui expliquent l'évolution antérieure des coûts, nous avons envisagé l'avenir, en nous demandant régulièrement si le régime de rémunération actuel permettra à la fonction publique fédérale d'attirer et de maintenir en poste les spécialistes et les leaders dont elle aura besoin pour répondre aux attentes des Canadiens de la prochaine génération. Nous avons donc proposé un examen sous divers plans de la pertinence de ce qui s'est produit depuis 1967, année où la négociation collective a fait son entrée dans la fonction publique fédérale.

La fonction publique de demain

Bien que nous ne puissions, dans ce rapport, analyser en profondeur l'évolution possible de l'administration publique dans les années à venir, nous devons faire état de certaines des tendances susceptibles d'influencer l'avenir de la fonction publique. Les attentes croissantes en matière de qualité du service et les pressions incessantes qui s'exercent en vue de réduire les coûts d'administration obligeront les gouvernements, quels qu'ils soient, à réévaluer fréquemment leurs fonctions et compétences de base et à revoir la façon dont ils s'acquittent de leurs responsabilités. La nature de ces responsabilités est en soi susceptible de changer en fonction de l'évolution de l'attitude du public, ce qui, à son tour, entraînera une évolution des rôles qu'assume le gouvernement fédéral. On peut s'attendre à ce que cette remise en cause continue du gouvernement se poursuive et entraîne des changements dans la nature du travail et des compétences des employés. Il s'ensuit qu'il faudra rajuster le régime de rémunération en fonction de ces changements.

Dans la société en général, nous pouvons nous attendre à ce que les tendances liées aux changements démographiques et technologiques, à l'importance accordée aux droits, à la mondialisation et à l'interconnectivité jouent des rôles clés.

Changements démographiques

Le vieillissement général de la population va se poursuivre. La croissance de la population et du marché du travail va dépendre de plus en plus de l'immigration. On prévoit que, d'ici 2020, cette croissance sera entièrement attribuable à l'immigration. La diversité ethnique et culturelle va augmenter.

Progrès technologiques

Les percées rapides favorisant l'ubiquité de l'information et sa vitesse de diffusion vont se poursuivre. La production de la plupart des biens sera assurée par des robots et autres moyens automatisés, et de nouveaux services verront le jour pour stimuler l'emploi. L'union de la biologie et de la technologie va changer notre conception de la vie.

Accent mis sur les droits

Plus de domaines d'action seront marqués par des demandes de reconnaissance des droits et un désir d'égalité entre les groupes. Le nombre de litiges et de cas de médiation complexes augmentera comme moyens de résoudre les conflits.

Mondialisation

Même si l'on peut s'attendre à une certaine hostilité envers la montée de la convergence mondiale, on peut aussi prévoir que la mode, les normes et l'actualité seront de plus en plus influencées par une conscientisation commune à l'échelle mondiale.

Interconnectivité

Les problèmes cadrent de moins en moins bien avec les structures conceptuelles et institutionnelles que nous avons établies pour mettre de l'ordre dans l'administration publique et y promouvoir la reddition de comptes. Il en découle un besoin de plus en plus reconnu de traiter les dossiers horizontalement et par delà les frontières habituelles.

Cette liste est assez conventionnelle. En effet, on y extrapole les tendances des 10 ou 20 dernières années. Elle ne tient pas compte de discontinuités majeures possibles résultant, par exemple, de menaces comme le terrorisme, la guerre, des températures extrêmes ou une pandémie. Quoi qu'il en soit, que les tendances actuelles s'accélèrent ou qu'un phénomène imprévu joue un rôle déterminant, le gouvernement du Canada devra de plus en plus prévoir et interpréter des changements rapides et imprévisibles et s'y adapter. Il devra absorber, comprendre et utiliser une information de plus en plus vaste et complexe. Il devra réussir plus facilement à se réorganiser de manière à pouvoir réagir rapidement à l'évolution des demandes.

Conséquences pour notre mode de gestion des gens dans l'avenir

Ce genre de phénomène laisse entrevoir plusieurs répercussions sur notre mode de gestion des gens. Dans la fonction publique de l'avenir, il sera nécessaire de reconnaître l'importance des compétences, de maintenir un équilibre entre le personnel permanent et le personnel temporaire en fonction des possibilités et des priorités, de conserver une certaine souplesse au niveau des structures et des gens et, enfin, de réduire au minimum les hiérarchies.

L'importance des compétences

Il sera de plus en plus nécessaire de recourir à des compétences spécialisées. Le secteur public fédéral devra recruter les diplômés universitaires les plus talentueux dont il aura besoin. En outre, il devra attirer des travailleurs plus chevronnés qui auront acquis une expérience et des connaissances essentielles en dehors du gouvernement. Ces besoins s'appliqueront à la plupart des domaines de spécialisation.

L'accent doit être mis sur l'apprentissage continu. Les fonctionnaires en exercice devront consacrer une part substantielle de leur temps à approfondir leurs connaissances, dans leur domaine d'expertise initial ou dans de nouveaux domaines.

Équilibre entre personnel permanent et personnel temporaire 

Pour assurer la pérennité des valeurs et préserver le savoir de l'organisation, il sera essentiel de maintenir en poste un noyau substantiel de fonctionnaires qui resteront toute leur carrière (ou presque) dans la fonction publique. L'innovation ou de nouvelles tâches nécessiteront toutefois un apport constant de nouveaux employés. On peut s'attendre à ce que plus de fonctionnaires entrent à la fonction publique, ou la quittent, au fil des ans, selon les possibilités qui s'offriront et les priorités de l'heure, peut-être plusieurs fois au cours de leur carrière.

Conserver des structures souples

Le paradigme fondamental de l'organisation stable fait obstacle à la capacité d'adaptation à l'évolution des priorités. Les gens ont besoin d'un port d'attache bien défini et d'une relation claire avec l'organisation. Cependant, il sera essentiel d'accroître grandement la souplesse structurelle pour réussir à relever rapidement les défis qui se présenteront. Sous l'aiguillon de la nécessité, les règles en vigueur sont interprétées avec souplesse, mais la norme sous-jacente de stabilité constitue de plus en plus un obstacle à l'efficacité tandis que les aspirations des employés à cet égard deviennent une source de frustration inutile.

Flexibilité dans les affectations

Comme dans le cas des structures, la souplesse est essentielle du côté du personnel. De plus en plus, nous devrons constituer et dissoudre différents groupes de personnes, pour répondre à des besoins précis. Les systèmes de classification actuels supposent que les emplois sont relativement fixes et que les employés peuvent être affectés de manière stable dans les rôles connexes. De plus en plus, cependant, ces notions nuisent au fonctionnement d'un appareil d'État en constante évolution.

Équilibrer le ratio des spécialistes aux généralistes est un autre moyen clé de maintenir une certaine souplesse au niveau des employés. Les connaissances spécialisées seront cruciales, tout comme la capacité de synthétiser l'information entre différentes disciplines de manière innovatrice. Cela accroîtra l'importance des compétences des généralistes, non pas comme substituts des spécialistes, mais plutôt comme compléments à ceux‑ci. Il sera enfin essentiel de pouvoir appliquer les connaissances entre secteurs.

Réduire au minimum les hiérarchies

Nous devrons veiller à ce qu'il y ait moins de hiérarchies dans la fonction publique fédérale. Corollaire des tendances décrites jusqu'ici, il faudra relier plus directement les experts et les décideurs. Moins on dispose de temps pour réagir, moins il doit y avoir d'intermédiaires. Et leur rôle doit être davantage de permettre aux divers spécialistes de se comprendre plutôt que d'interposer des niveaux multiples d'approbation. Les cadres supérieurs et les gestionnaires devront être tout aussi doués dans l'art de la diplomatie et de la persuasion, de la gestion des relations humaines, de la promotion de l'esprit d'équipe et du consensus inter-organisationnel, et de la gestion des projets et du rendement, que les experts doivent exceller dans leurs domaines de spécialité respectifs.

Il est important de souligner que ces tendances valent sensiblement pour tous les secteurs et à tous les niveaux de la fonction publique. On pense souvent que les expressions comme « travailleurs du savoir » ne s'appliquent qu'à des spécialistes très instruits. À vrai dire, la quantité de connaissances requises pour faire n'importe quel travail augmente sans cesse. Pour exercer aujourd'hui un métier, par exemple, il faut de plus en plus savoir se servir d'appareils électroniques, installer et réparer une large gamme d'équipements fabriqués sur mesure et suivre une formation spécialisée et souvent longue. Pour faire du travail de bureau et de secrétariat, il faut de plus en plus savoir coordonner divers services afin de soutenir des équipes de travail constamment remaniées et il faut maîtriser des logiciels complexes. Ainsi, bien que la portée et la nature des tendances précitées varieront entre différents groupes de fonctionnaires, pratiquement aucune partie du secteur public fédéral (tout comme de la société et de l'économie canadienne dans son ensemble) ne sera à l'abri de leurs effets sur le milieu de travail et la nature du travail.

À titre d'observation finale, on peut émettre des hypothèses sur la taille future du secteur public fédéral. Nous avons indiqué au chapitre 5 dans quelle mesure le secteur public fédéral avait diminué proportionnellement à la population active canadienne au cours de la dernière décennie. Bien que l'on ait observé une croissance relativement rapide, surtout dans le noyau de la fonction publique, entre 1997‑1998 et 2002‑2003, cette croissance a suivi une réduction considérable des effectifs durant la première partie des années 90. Si on se tourne vers l'avenir, le scénario le plus probable est que la taille du secteur public fédéral restera environ la même qu'aujourd'hui et, partant, son pourcentage par rapport à l'ensemble de la population active canadienne diminuera encore. Certaines fonctions dans le domaine des services (p. ex., dans le domaine du traitement de l'assurance-emploi) seront assurées électroniquement, avec pour conséquence des réductions de personnel. Il se peut que d'autres fonctions soient privatisées ou transférées à d'autres paliers de gouvernement. Par ailleurs, on peut prévoir que certaines fonctions fédérales de base, comme les Forces canadiennes, prendront de l'expansion et que divers types de nouveaux programmes nécessitent le recrutement d'employés supplémentaires.

Les phénomènes décrits dans cette section nécessiteront sans doute des interventions dans le domaine de la politique et des pratiques de rémunération. À mesure que nous présenterons, dans le reste de cette partie, nos recommandations sur les moyens à prendre pour renforcer la gestion de la rémunération dans le secteur public fédéral, nous tenterons autant que possible de nous appuyer sur les tendances attendues, mises en relief ici, comme points de référence pour orienter notre démarche.

 




11. Recommandations sur la transparence et la reddition de comptes

À l'heure actuelle, peu de gens ont une vision globale de la rémunération fédérale. En effet, les données factuelles à ce sujet se trouvent dans des bases de données difficiles d'accès et incohérentes qui sont maintenues dans diverses parties de la fonction publique. Il est vrai que les Comptes publics font état d'une somme totale consacrée aux dépenses en personnel (article courant 01). Pour 2002‑2003, cette somme s'est élevée à 25,1 milliards de dollars[154]. Elle se compare étroitement au total que nous avions indiqué pour 2002‑2003, soit environ 24,8 milliards de dollars. Cependant, les Comptes publics ou les autres rapports ordinaires du gouvernement ne donnent que peu de détails connexes. Par ailleurs, aucun rapport ne précise comment les dépenses à ce titre ont fluctué d'année en année, ou n'explique les facteurs à l'origine de ces fluctuations.

Il s'ensuit que le contexte des délibérations au sujet des dossiers entourant la rémunération fédérale est, au mieux, flou. De fait, la question fait rarement l'objet d'un débat public. La principale exception se produit durant les grèves occasionnelles au sein de la fonction publique, quand les médias reprennent essentiellement les positions de négociation rendues publiques par le syndicat menant la grève en question. Les syndicats font naturellement état des données qui étayent le mieux leurs revendications. Pour sa part, le gouvernement fédéral tarde habituellement à présenter ses arguments. Et tout comme les syndicats, le gouvernement présente les données les plus favorables à sa position dans la négociation en cours. Il ne reste aux médias qu'à essayer de décortiquer toute cette information, étant donné qu'ils n'ont habituellement pas accès aux données complètes qui leur permettraient de formuler leurs propres interprétations.

De temps à autre, d'autres nouvelles font la manchette, presque toujours sans le bénéfice d'une perspective plus étendue. Nous entendons des critiques de la rémunération au rendement versée aux cadres de direction, par exemple, mais pas grand-chose au sujet de la comparabilité de leur rémunération à celle versée dans le secteur privé, ni du rôle que la rémunération conditionnelle joue dans la comparabilité. Les syndicats se plaignent naturellement que les augmentations économiques qu'obtiennent leurs membres sont peu élevées, mais nous entendons rarement parler des autres modalités contractuelles qui se répercutent sur la rémunération, ni de l'évolution globale des salaires moyens que touchent effectivement les employés. Nous entendons dire que les fonctionnaires fédéraux sont en moyenne mieux rémunérés que leurs homologues du secteur privé, mais on ne parle pas beaucoup des limites des études fondées sur des données globales comme celles du Recensement ou de l'Enquête sur la population active.

Le fait que les médias et le public n'ont pas une vue d'ensemble du domaine de la rémunération fédérale est en soi préoccupant. Mais, de fait, le gouvernement lui-même n'a pas systématiquement un aperçu des niveaux et des tendances des diverses composantes de la rémunération fédérale. Pour autant que nous le sachions, cette étude est la première compilation et description complète du sujet depuis au moins le Rapport Glassco publié au début des années 1960, il y a plus de 40 ans.

Cette situation semble résulter de plusieurs facteurs. Tout d'abord, comme nous l'avons appris en rédigeant le présent rapport, il est difficile d'avoir accès à l'information requis pour brosser un tableau complet de la situation, à un niveau de détail utile.

Deuxièmement, une bonne partie des services d'analyse en place au gouvernement fédéral avant l'Examen des programmes ont été démantelés au début et au milieu des années 1990. Le Bureau de recherches sur les traitements (qui relevait de la Commission des relations de travail dans la fonction publique) a été aboli en 1992, en partie pour économiser et en partie parce que l'employeur considérait apparemment les enquêtes du Bureau comme biaisées. Fait intéressant, les agents négociateurs émettaient eux-mêmes des réserves à l'endroit des conclusions du Bureau, quoique d'une perspective différente. Au Secrétariat du Conseil du Trésor, la suspension, pendant six ans, de la négociation collective et de l'arbitrage a entraîné le départ d'experts clés et la réaffectation des personnes qui sont restées à la fonction publique à des dossiers plus urgents. La reconstitution de la capacité à ce titre est bien amorcée, mais est loin d'être terminée[155].

Enfin, il est difficile d'échapper à l'impression que, tacitement, les parties ont trouvé plus simple de faire en sorte que la rémunération reste un domaine hermétique. Dans un tel environnement où le public n'exerce qu'une surveillance limitée, des ententes peuvent être conclues plus facilement et les conflits difficiles, réduits au minimum.

Rapport annuel sur la rémunération

La qualité de l'information est le fondement même de la qualité de la gestion. En conséquence, la mesure qui, à elle seule, serait la plus efficace pour améliorer la gestion de la rémunération au sein de l'administration fédérale serait de compiler, d'analyser et de publier régulièrement les données les plus importantes. Un rapport annuel sur la rémunération fédérale serait le produit le plus visible et le principal moteur d'un régime amélioré de transparence et de reddition de compte à l'égard de la rémunération fédérale.

Le rapport annuel mettrait à jour et suivrait une série d'indicateurs clés et rendrait compte des principaux changements survenus, au cours de l'année, dans les niveaux d'emploi, les conventions collectives et les politiques et dépenses de rémunération. Idéalement, on y ferait aussi, chaque année, une analyse plus approfondie de l'évolution d'un thème particulier. La détermination de la structure exacte du Rapport annuel dépasse la portée de ce projet.

Le rapport annuel sera le plus efficace si l'on se contente d'y donner un aperçu succinct des niveaux de la rémunération fédérale et des tendances dans ce domaine, sans devenir impénétrable en en multipliant les détails et la complexité. Par ailleurs, pour ceux qui désirent effectivement avoir des détails ou qui s'y intéressent en tant que spécialistes, il devrait être facile d'avoir accès, par Internet, à des sources de données plus détaillées. Le défi le plus important, sur le plan conceptuel, sera de choisir un ensemble limité, mais utile, d'indicateurs clés à suivre. Ceux‑ci devraient être véritablement des indicateurs, c'est‑à-dire qu'ils devraient résumer des renseignements importants de façon que même les non-spécialistes puissent discerner les tendances et les problèmes naissants.

La portée du rapport annuel devrait être la même que celle du présent rapport, c'est‑à-dire le noyau de la fonction publique (dont le Conseil du Trésor est l'employeur ), les employeurs distincts, les Forces canadiennes, les membres réguliers et civils de la GRC, ainsi que les groupes spéciaux comme les juges nommés par le gouvernement fédéral, les parlementaires, les employés du Parlement, le personnel des cabinets de ministres et les étudiants. Nous avons exclu les entreprises publiques fédérales et autres sociétés d'État parce que seule une partie relativement limitée de leurs coûts en personnel est financée au moyen de crédits parlementaires et qu'il leur revient d'établir leurs propres politiques en matière de personnel. Le rapport devrait faire état de toutes les formes de rémunération, en fonction de leurs coûts pour l'employeur plutôt que de la valeur qu'elles représentent pour l'employé[156].

Parmi les indicateurs clés, on compterait les dépenses totales consacrées aux salaires et à la rémunération totale, le nombre d'employés, les salaires moyens, l'évolution de la composition de la main-d'œuvre, les reclassifications, la rémunération au rendement, la valeur des augmentations salariales négociées ou gérées, les cotisations aux régimes de pension, les autres formes de rémunération versée, les assurances et dépenses de santé et les contributions aux programmes législatifs.

Dépenses totales consacrées aux salaires et à la rémunération totale

Il s'agit là des mesures les plus globales des tendances en matière de rémunération. Nous avons signalé dans le Volume Deux que les salaires et les traitements dans le secteur public fédéral sont passés de 12,5 milliards de dollars en 1997‑1998 à 17,9 milliards en 2002‑2003, soit une hausse de 43 %. Pour sa part, la rémunération totale a crû encore plus rapidement, passant de 16,6 milliards de dollars en 1997‑1998 à 24,8 milliards en 2002‑2003, une hausse de 49 %. Ces montants devraient être publiés à la fois en dollars courants et en dollars constants.

Nombre d'employés

Un important facteur dont il faut tenir compte pour interpréter les variations de la masse salariale et de la rémunération totale est la fluctuation du nombre des employés fédéraux. En indiquant la hausse ou la baisse de cet indicateur, le Rapport annuel devrait résumer les principales causes de variation. On devrait y faire état à la fois des décisions du Conseil du Trésor d'autoriser l'embauche de nouveaux employés (ou de réduire les effectifs) et les variations totales découlant des décisions prises par le ministère de réaffecter une partie des budgets non salariaux aux budgets salariaux. On pourra ainsi suivre l'évolution de la taille de la fonction publique et en débattre.

Salaires moyens

C'est là un indicateur particulièrement intéressant, bien que non exempt de controverse. Le salaire moyen est une mesure brute obtenue en divisant la masse salariale par le nombre d'employés. Entre 1997‑1998 et 2002‑2003, les salaires moyens ont augmenté beaucoup plus vite que l'inflation. Quoique cela soit en partie imputable à l'octroi d'augmentations économiques supérieures au taux cumulatif d'inflation, la hausse est également le résultat d'autres changements apportés aux structures salariales, comme l'ajout ou la suppression d'échelons dans une échelle salariale particulière, ainsi que de l'évolution de la composition de la main-d'œuvre fédérale.

Cet indicateur pourrait faire l'objet de critiques, en ce sens qu'il a pour effet d'exagérer les fluctuations des salaires fédéraux, puisqu'une part importante de l'augmentation récente des salaires moyens résulte de l'évolution de la composition de l'effectif. Le fait reste, cependant, que le suivi des fluctuations des salaires au sein de la fonction publique est intuitivement important et permet de regrouper utilement les différents effets d'influences disparates, dont certaines mériteraient un examen plus approfondi.

Évolution de la composition de la main-d'œuvre

Comme nous l'avons décrit au chapitre 4, la composition de la fonction publique fédérale a évolué sensiblement au cours des années 1990 et au début des années 2000. La taille de groupes relativement bien rémunérés, comme les groupes Systèmes d'ordinateurs (CS), Droit (LA) et Économie, sociologie et statistique (ES), a plus que doublé sur un peu plus d'une décennie. À l'opposé, la taille de groupes plus axées sur l'exploitation, comme les groupes Secrétariat, sténographie et dactylographie (ST), Services divers (GS), Manœuvres et hommes de métier (GL) et Commis aux écritures et règlements (CR), a diminué dans des proportions considérables (de 82 % à 28 %) sur la même période. Le suivi de ces changements est essentiel pour comprendre la rémunération fédérale.

Reclassifications

Nous avons souligné plus tôt qu'il existe des raisons valables de reclassifier les postes. Cependant, il importe aussi de suivre les tendances dans ce domaine et de faire les vérifications appropriées pour s'assurer que le système est bien géré. Les coûts supplémentaires qui résultent des reclassifications devraient aussi être rapportés.

Rémunération au rendement 

Il faudrait résumer les dépenses totales au titre de la rémunération au rendement ainsi que la valeur par personne de cette forme de rémunération pour les fonctionnaires fédéraux admissibles. Il faudrait aussi faire état du pourcentage de personnes qui touchent le montant normal (dans le cas des cadres de direction aux niveaux 1 à 3, par exemple, jusqu'à 7 %)[157], et la proportion de celles qui touchent davantage.

Valeur des augmentations salariales négociées ou gérées

Pour la plupart des employés, les conventions collectives déterminent comment leurs salaires changeront. Le rapport annuel devrait totaliser les augmentations cumulatives des salaires moyens résultant des négociations collectives. Il faudrait inclure à la fois les augmentations économiques, qui sont bien connues, et la valeur moyenne des autres changements moins bien connus, comme l'ajout ou la suppression d'un échelon à une échelle salariale. Il faudrait indiquer ces renseignements dans une annexe pour toutes les conventions collectives conclues au cours de l'année. Le Rapport annuel devrait contenir de brèves explications sur les changements non conformes aux tendances générales.

Cotisations aux régimes de pension

Les dépenses de rémunération les plus importantes après les salaires sont les cotisations aux régimes de pension. Le montant total cotisé par le gouvernement et les membres des régimes devrait être déclaré pour chaque volet du secteur public fédéral, ainsi que le ratio de ces cotisations.

Cette information est actuellement publiée dans les Comptes publics et les rapports annuels sur les principaux régimes de pension, mais son inclusion dans un Rapport annuel d'ensemble sur la rémunération dans le secteur public fédéral situerait cet aspect important de la rémunération dans un contexte approprié.

Autres formes de rémunération versée

Le Rapport annuel devrait résumer la valeur de toute autre forme de rémunération versée, comme les indemnités, le paiement des heures supplémentaires, l'indemnité de départ, les paiements tenant lieu de congés et les règlements au titre de la parité salariale. Tout changement important du niveau ou de la nature de ces composantes devrait être noté.

Assurances et dépenses de santé

Les dépenses totales au titre de l'assurance-vie, de l'assurance-invalidité et des régimes de soins de santé et de soins dentaires devraient être déclarées. En raison de leur importance, on devrait faire état des dépenses par personne au titre du Régime de soins de santé de la fonction publique (RSSFP). Chaque année, on pourrait donner des détails sur les changements apportés à l'un des autres régimes, ainsi que des détails supplémentaires, tous les deux ou trois ans, sur les différentes composantes des coûts du RSSFP.

Contributions aux programmes législatifs 

On devrait faire état des dépenses totales dans ce domaine, en expliquant tout changement important.

Conformément à l'approche générale du gouvernement en matière de rapports financiers, l'information financière figurant dans le Rapport annuel proposé devrait être présentée sur la base de la comptabilité d'exercice et inclure des détails sur les dépenses courantes, au besoin. Cela facilitera les comparaisons utiles d'un exercice à l'autre.

On devrait faire état des mêmes renseignements pour les groupes suivants dont les salaires sont déterminés sans négociation collective : les cadres de direction, les personnes nommées par le gouverneur en conseil, y compris les dirigeants des sociétés d'État, les autres employés non représentés, dont les agents de personnel (PE), les membres des Forces canadiennes, les membres réguliers et civils de la GRC, les juges nommés par le gouvernement fédéral et les parlementaires.

Pour les employés, il serait utile de produire une version simplifiée adaptée à leur propre situation. Le Secrétariat du Conseil du Trésor leur fournit actuellement un rapport annuel personnalisé très informatif sur leurs avantages sociaux. On pourrait en élargir la portée en faisant état des cotisations que l'employeur paie au nom de l'employé ainsi que des tendances générales de la rémunération fédérale.

On court certainement le risque que le Rapport annuel proposé ne soit lu qu'en partie et que les taux de rémunération et les politiques de rémunération dans le secteur public fédéral fassent l'objet d'attaques injustes. Toute forme de transparence comporte le risque que l'information fournie soit mal utilisée. Cependant, une présentation complète des données, mise à jour annuellement, est en soi la meilleure défense contre les critiques non équilibrées. En conséquence, voici notre première et plus importante recommandation :

Recommandation 1

1.1 Le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait présenter annuellement au Parlement un rapport sur la rémunération fédérale. Ce rapport devrait contenir des données sur les indicateurs comme ceux décrits dans la présente section, à la fois pour l'année en cours et dans une perspective historique. Le rapport lui-même devrait être bref et facile à lire, et faire amplement emploi d'aides visuelles.

1.2 Les annexes devraient renfermer des renseignements plus détaillés sur les résultats des négociations collectives pour des groupes clés, sur les décisions relatives à la rémunération des groupes non représentés, ainsi que sur les changements de politique touchant à la rémunération. Il serait utile d'inclure chaque année une étude plus approfondie d'un thème particulier. Des données plus détaillées sur les groupes professionnels et les groupes de classification particuliers, ainsi que sur les différents employeurs distincts, devraient être accessibles en direct.

1.3 Un résumé du rapport devrait être inclus dans le rapport annuel sur les avantages sociaux remis aux employés.

Cadre budgétaire possible

En plus de faire état de l'évolution de la rémunération, le gouvernement devrait envisager de traiter dans le Budget de son orientation générale en matière de rémunération afin d'alimenter le débat public[158]. La hausse ou la baisse attendue des dépenses consacrées à la rémunération devrait faire l'objet d'une prévision, comme c'est le cas d'autres catégories de dépenses clés. Le montant présenté devrait être le total des hausses prévues en raison de l'évolution du niveau et de la composition de l'emploi dans le secteur public fédéral et des variations des niveaux de salaire, quelle qu'en soit la cause, et des dépenses liées à tous les autres aspects de la rémunération – des pensions à l'assurance-maladie.

À l'heure actuelle, le gouvernement établit une réserve pour la rémunération dans le cadre financier[159]. Cette réserve ne sert pas à assumer les coûts supplémentaires liés à l'augmentation de la taille du secteur public fédéral, mais seulement les coûts de la hausse des salaires ou des avantages sociaux. Les coûts liés aux régimes de pension sont aussi gérés séparément de la réserve pour la rémunération. Le montant de la réserve est tenu secret parce que les négociateurs ne doivent pas dévoiler leur jeu avant de conclure une entente avec les syndicats du secteur public. Même pour les groupes non représentés comme les membres des Forces canadiennes ou les membres réguliers et civils de la GRC, on pourrait craindre que la divulgation de cette donnée fausse les discussions entre le Secrétariat du Conseil du Trésor et le ministère de la Défense nationale et la GRC si les montants théoriques prévus pour la rémunération étaient rendus publics.

Évidemment, il serait irréfléchi de publier des détails sur les résultats attendus des négociations. Ce que nous suggérons, est de publier dans ce rapport des prévisions globales des fluctuations des dépenses liées au personnel, y compris l'impact de l'évolution du nombre et des types de personnes employées. Bien que la divulgation de telles prévisions ne soit pas sans risque, elle comporte les avantages suivants :

  • Implicitement, une telle démarche met en valeur la recherche d'un équilibre entre l'embauche d'employés supplémentaires et l'octroi d'une rémunération plus élevée aux employés en place, ainsi qu'entre les salaires et les avantages sociaux.
  • Ainsi, en établissant pour ainsi dire une enveloppe de rémunération cible, on contribuera à la rigueur des discussions au sujet de la rémunération.
  • Afin d'établir et de défendre ses prévisions, le gouvernement devra se doter d'une capacité stratégique pour gérer la rémunération comme un tout, comme nous le proposons plus loin dans ce chapitre.
  • Point le plus important, il faudra coordonner de façon cohérente les divers processus qui entraînent des changements dans les dépenses de rémunération.

Les prévisions proposées peuvent contribuer à l'établissement d'un système permanent de transparence et de reddition de comptes au sujet de la gestion de la rémunération par le gouvernement. Mais elles ne doivent pas être vues comme un carcan rigide interdisant une gestion sensée en fonction de l'évolution de la situation. Les prévisions peuvent être comparées aux résultats qu'on publierait dans le Rapport annuel sur la rémunération fédérale recommandé dans la section précédente de ce chapitre. Il y aurait normalement de bonnes raisons pour expliquer les différences observées, par exemple les fluctuations du taux d'inflation ou une situation du marché du travail nettement différentes de celles prévues, information qui devrait être communiquée au public. En effet, en établissant une enveloppe des dépenses de rémunération proposées, et en rendant compte des résultats effectivement obtenus, on créerait un cycle de planification et de responsabilisation à l'égard de la rémunération dans le secteur public fédéral.

Sur la base de ce raisonnement, nous recommandons ce qui suit :

Recommandation 2

2.1 Le ministère des Finances devrait envisager d'inclure dans le Budget fédéral annuel une estimation des dépenses totales en personnel dans le secteur public fédéral, à l'exception des sociétés d'État. Cette estimation devrait combiner les variations des dépenses prévues en raison de l'augmentation ou de la diminution du nombre d'employés, des changements des salaires moyens, quelle qu'en soit la cause, et des fluctuations de toutes les catégories d'avantages sociaux.

Gestion des données sur la rémunération

Sur le plan pratique, le principal obstacle à la production d'un rapport annuel fiable est l'état insatisfaisant des données relatives à la rémunération fédérale. Plusieurs problèmes sont devenus manifestes durant cette étude : définitions incohérentes, données et rapports incompatibles, et information incomplète.

Les problèmes relatifs aux définitions abondent. Notamment, nous avons dû aborder quatre grands problèmes, dont l'établissement des domaines du secteur public, l'interprétation des composantes de la rémunération, les calendriers et les périodes de déclaration.

Composition des domaines du secteur public fédéral

Dans ce rapport, nous avons distingué six domaines :

  1. le noyau de la fonction publique, qui comprend les principaux ministères et organismes énumérés à la partie I de l'annexe I de la Loi sur la gestion des finances publiques, dont le Conseil du Trésor est l'employeur;
  2. les employeurs distincts, tels qu'énumérés à la partie II de l'annexe I de la LGFP;
  3. les membres des Forces canadiennes;
  4. les membres réguliers et civils de la GRC;
  5. les entreprises publiques fédérales et autres société d'État;
  6. un domaine résiduel englobant les juges nommés par le gouvernement fédéral, les parlementaires, les employés du Parlement, le personnel des cabinets de ministres et les étudiants.

Nous avons choisi ces catégories parce qu'elles correspondent à d'importantes distinctions sur le plan de la gouvernance et, partant, sur le plan des politiques et des pratiques de rémunération. Nous avons constaté toutefois qu'il était difficile de confirmer la liste exacte des organisations relevant de chaque domaine particulier.

Interprétation des composantes de la rémunération

Bien que ce rapport tienne compte de toutes les composantes de la rémunération fédérale, des salaires aux crédits de congé en passant par les heures supplémentaires, les indemnités, les cotisations aux régimes de pension et les régimes d'assurance et de soins de santé, il est difficile de présenter de l'information uniforme sur cette base. Des détails portant sur certains des domaines sont disponibles dans le système des Comptes publics ou les rapports tirés de l'information sur la paie produits par Travaux publics et Services gouvernementaux Canada. Dans le cas des Forces canadiennes et de la GRC, les systèmes de rapports internes sont la source d'importants détails. Tous ces renseignements sont résumés dans les rapports de Statistique Canada. Cependant, il n'y a pas uniformité de terminologie et d'interprétation entre ces différentes sources.

Des problèmes similaires se posent en ce qui concerne les rapports sur le niveau de l'emploi dans l'administration fédérale.

Traiter de la question des estimations

La réponse à l'une des questions les plus simples s'avère d'une complexité extrême. Combien a‑t‑on dépensé pour un élément donné, ou en rapport avec un groupe particulier, au cours d'une période particulière? De même, il est difficile de répondre à la question suivante : Combien de personnes travaillaient au sein d'une organisation ou d'un groupe particulier, pendant une période donnée ou à un moment particulier? Le problème fondamental est que l'effectif de la fonction publique fluctue constamment. Des gens y entrent ou la quittent chaque jour. Certains travaillent à temps partiel. Les salaires ou les avantages sociaux sont octroyés, puis périodiquement corrigés, à différents moments pour différentes périodes. En raison de la pratique habituelle qui consiste à verser les salaires toutes les deux semaines, il est rare que les périodes de paie correspondent exactement aux périodes de déclaration, comme les mois ou les années.

Ces exemples suffisent pour illustrer pourquoi chaque statistique agrégée sur la rémunération et l'emploi est en fait une estimation fondée sur une méthode donnée permettant de calculer approximativement le total réel. Ainsi, une façon d'estimer le nombre d'employés au cours d'une période donnée est de relever ce nombre à divers points et d'en faire la moyenne. Même cette façon de faire est plus difficile à appliquer qu'il n'y paraît, en ce sens qu'à n'importe quel point donné les personnes ayant le statut juridique d'employé peuvent entrer dans différentes catégories, dont travail à temps plein, travail à temps partiel, congé rémunéré, congé de maladie, congé non payé, etc.

Ces complications font que chaque nombre à estimer doit être calculé à l'aide d'une méthode d'estimation particulière. Dans ce contexte, ce qui importe le plus est de définir et d'appliquer uniformément une méthode d'estimation raisonnable.

Définir la période de déclaration

Un dernier point nécessitant un effort de normalisation, ou du moins plus de clarté, est celui de la période de déclaration. Certaines données sont présentées en fonction de l'exercice financier et d'autres, de l'année civile. Quoique les différences entre ces périodes soient normalement petites et les tendances à long terme passablement similaires[160], il serait moins mêlant d'utiliser une seule période de référence, probablement l'exercice financier, étant donné qu'il est à la base de la comptabilité publique.

Besoin de préciser la responsabilité

Dans une large mesure, le problème des données et rapports incompatibles résulte de la fragmentation des responsabilités pour la gestion des divers aspects du système de rémunération. En l'absence d'une culture de collaboration, les définitions variées abondent. Dans de nombreux cas, plusieurs organisations font rapport sur ce qui semble être le même thème, mais avec des résultats contradictoires. Un cas notable qui s'est présenté durant la préparation du présent rapport a trait aux reclassifications dans le domaine du noyau de la fonction publique. La Commission de la fonction publique a tenu des données sur ce point, fondées sur ses rapports de dotation; de même, la Direction de la modernisation de la gestion des ressources humaines, de l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada, a colligé de l'information à partir de ses dossiers sur la classification des postes. Au départ, leurs résultats étaient largement différents, variant d'environ 4 800 aux environs de 8 800 pour 2002‑2003. Après des efforts conjoints difficiles pour rapprocher ces chiffres, les deux groupes se sont entendus sur un total de près de 6 700, dont nous avons fait état au chapitre 4[161].

Pour tous les éléments de données importants, il importe de s'entendre sur l'organisation à qui il reviendra de définir l'élément, puis d'en rendre compte avec cohérence. Toute autre organisation intéressée à un élément donné devrait pouvoir faire connaître son point de vue à l'organisation responsable, mais en intégrer les résultats à son propre travail.

En réalité, les données incomplètes sont aussi un problème qui résulte des difficultés liées aux définitions. Pour divers thèmes, nous n'avons pas réussi à trouver des données similaires fiables pour différentes organisations.

En l'absence d'une entente sur une façon judicieuse de faire état des niveaux de rémunération, il n'est pas surprenant que certains renseignements aient été difficiles à trouver. Il existe des protocoles régissant la répartition des dépenses dans les Comptes publics. Cependant, ils sont conçus dans une optique de comptabilité financière, et non dans celui de l'analyse et de la compréhension des questions de rémunération. Une fois que les définitions seront normalisées pour appuyer la production du Rapport annuel sur la rémunération fédérale recommandé, les systèmes de rapports financiers qui alimentent les Comptes publics devront être harmonisés en conséquence.

Dans ce domaine comme dans tout autre, des données fiables, cohérentes et complètes sont indispensables à la mise en place d'un système réaliste de transparence et de reddition de comptes. Quand on recueille des données complexes, il est inévitable que se produisent des erreurs et des incohérences. Ce qui compte, c'est de prendre des mesures responsables pour réduire au minimum ces risques et de se doter des moyens d'assurer un suivi longitudinal permettant de détecter les problèmes éventuels. En conséquence, notre troisième série de recommandations porte sur ce point : 

Recommandation 3

3.1 Le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait définir en détail chaque élément de donnée à inclure dans le Rapport annuel sur la rémunération fédérale. Dans le cas des éléments qu'il faut estimer, la définition devrait préciser la méthode à employer. Les sources de données devraient être indiquées pour tous les éléments. Les définitions devraient être rendues publiques sur le site Web du Secrétariat et mises à jour au besoin.

3.2 En établissant et en révisant les définitions des éléments de données sur la rémunération, le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait consulter tous les groupes ayant un intérêt professionnel pour la question, y compris l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada et le Bureau du contrôleur général au sein du portefeuille du Conseil du Trésor, ainsi que Statistique Canada, Finances Canada, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, la Commission de la fonction publique, les employeurs distincts, les Forces canadiennes, la GRC, la Commission des relations de travail dans la fonction publique, les syndicats de la fonction publique et les universitaires intéressés. En l'absence d'un consensus, le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait prendre une décision appropriée.

3.3 Le Conseil du Trésor devrait autoriser les investissements dans les systèmes et les services analytiques requis pour mettre en place une méthode cohérente d'estimation et de déclaration des éléments de données sur la rémunération. Compte tenu de la taille de ce poste de dépenses fédérales (environ 25 milliards de dollars en 2002‑2003) et de sa croissance annuelle, des investissements appropriés[162] visant à bien comprendre comment sont dépensés les budgets de rémunération et leur évolution se paieront presque certainement d'eux-mêmes plusieurs fois.

Rapports sur la comparabilité

Comme il ressort du chapitre 6 du présent volume, il n'est pas facile de situer la rémunération fédérale dans l'ensemble du marché du travail canadien. Cependant, malgré les défis que soulève, sur le plan conceptuel et pratique, l'évaluation de la comparabilité, aucun système de transparence et de reddition de comptes à l'égard de la rémunération fédérale ne pourra être crédible sans tenir compte directement de cette perspective.

La Loi sur la modernisation de la fonction publique, adoptée en novembre 2003[163], prévoit la mise sur pied d'un service de recherche et d'analyse sur la rémunération, qui relèvera de la nouvelle Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP). Ce service effectuera des enquêtes sur la rémunération, compilera et analysera l'information connexe et la mettra à la disposition des parties[164] et, dans des cas particuliers, au public. Il effectuera aussi des recherches sur la rémunération axées sur le marché. Un comité consultatif aidera le président de la CRTFP à établir les normes et les méthodes d'analyse du nouveau service.

Logiquement, le nouveau service qui relèvera de la CRTFP devrait être la principale source publique d'information sur la comparabilité, pour le noyau de la fonction publique et les employeurs distincts dont les employés sont syndiqués. Il ne sera pas facile cependant d'en arriver au point où ce service fonctionnera de manière satisfaisante.

La plus grande difficulté sera de trouver des méthodes d'enquête et d'analyse crédibles à la fois pour les employeurs fédéraux et les syndicats de la fonction publique fédérale ainsi que pour les critiques externes. Bien qu'on dise habituellement que l'ancien Bureau de recherches sur les traitements (BRT), dont le mandat était similaire, a été aboli en 1992 afin de réduire les coûts, selon l'histoire orale le manque de confiance dans l'objectivité des méthodes d'enquête du BRT a joué un rôle au moins aussi important dans la décision de fermer celui-ci. Ainsi, le principe qu'appliquait le BRT de n'enquêter qu'auprès des grands employeurs dont les effectifs étaient syndiqués était perçu comme faussant indûment les résultats.

Au cours des dernières années, le Secrétariat du Conseil du Trésor et les syndicats de la fonction publique fédérale ont collaboré, sous l'égide du Comité consultatif mixte sur la rémunération du Conseil national mixte, à la réalisation d'un projet pilote portant sur des enquêtes de comparabilité de la rémunération. Statistique Canada s'est chargé de la conception des enquêtes et des essais pilotes au nom des parties. Statistique Canada et le CCMR ont commencé à analyser les premiers résultats de ce projet pilote dans le but de mettre au point une méthodologie approuvée par toutes les parties qui pourrait servir au déroulement d'enquêtes nationales sur la rémunération. La responsabilité du projet a récemment été confiée au CRTFP. Jusqu'à ce que le projet pilote soit terminé, il sera difficile d'évaluer cette expérience menée en collaboration. Cependant, il y a des signes encourageants au moins dans la mesure où les parties ont réussi à s'entendre sur une approche conforme aux normes professionnelles d'enquête de Statistique Canada.

En dépit de ce départ positif, personne ne devrait sous-estimer les difficultés inhérentes à la compilation régulière de données sur la comparabilité d'une vaste gamme d'emplois dans tout le pays. Les difficultés à résoudre vont des problèmes politiques, comme choisir les catégories d'employeurs qui serviront d'éléments de comparaison, en passant par les problèmes méthodologiques, comme la façon de choisir des emplois comparables, aux problèmes pratiques, comme la façon de convaincre les employeurs du secteur privé de fournir les données nécessaires. Aucun de ces problèmes n'est facile à résoudre. Les défis ne font que se multiplier quand la tâche s'élargit (comme elle le doit si l'on veut que les comparaisons soient vraiment utiles), en passant de la simple comparaison des salaires et des traitements à une approche axée sur la rémunération totale, où l'on comparerait l'ensemble du régime de rémunération.

Il est essentiel que les employeurs fédéraux[165] invitent leurs cadres supérieurs à contribuer à la prise de décisions sur les principales politiques et méthodes d'analyse du service de recherche sur la rémunération de la nouvelle CRTFP. Une énergie considérable au niveau analytique et conceptuel doit être consacrée à l'établissement d'une approche rigoureuse dès le point de départ. Aussi tentant qu'il puisse paraître de céder sur des points contestés afin d'accélérer le processus, il vaut mieux débattre des concepts et des méthodes d'entrée de jeu, plutôt qu'après la compilation et la communication des données. Par le passé, on a peut-être eu tendance à adopter une approche en apparence pragmatique pour la réalisation de diverses études conjointes portant sur des groupes particuliers. Toutefois, comme nous l'avons expliqué au chapitre 6, les études qui en ont résulté n'avaient trop souvent que peu de crédibilité pour l'employeur, même si elles paraissaient entérinées par les deux parties. La confusion subséquente n'était pas propice à une négociation efficace.

Il ne fait pas de doute que nous pourrons parvenir où il faut, à condition que les parties y accordent toute l'attention nécessaire et fassent preuve de bon sens. L'exemple de l'Institut de la statistique du Québec (lui-même en quelque sorte un descendant de l'ancien Bureau fédéral de recherches sur les traitements) montre qu'il est possible de créer un service professionnel et crédible. Mais il a été difficile pour l'Institut aussi de convaincre le gouvernement en tant qu'employeur et les syndicats à se fier à ses résultats. Il sera essentiel que la CRTFP résiste aux pressions exercées par l'une ou l'autre des parties pour « négocier en fonction de la réalité ».

En se fondant sur le temps requis pour préparer et réaliser les enquêtes pilotes du Conseil national mixte, on peut s'attendre à ce qu'il faille plusieurs années pour mettre en place progressivement un cycle convenable d'établissement de rapports de comparabilité. Entre-temps, des pressions s'exerceront pour que quelque chose de significatif soit dit sur la façon dont la rémunération dans le secteur public fédéral se compare à celle offerte par d'autres employeurs au pays. On peut s'attendre à ce que des organisations comme la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante publient tous les cinq ans un survol de la rémunération dans le secteur public par opposition au secteur privé, en fonction des résultats du recensement quinquennal. Comme nous l'avons montré au chapitre 6, la portée de telles études est si générale que leur utilité est douteuse, sauf pour suivre les tendances manifestes.

Plutôt que de laisser entièrement le champ à ce genre d'évaluations privées, le Conseil du Trésor ou même la CRTFP devrait envisager de publier son propre aperçu global de la comparabilité tous les deux ou trois ans, en se servant des données disponibles. Il serait logique que le Conseil du Trésor, peut-être en partenariat avec les syndicats de la fonction publique membres du Conseil national mixte, commande des études sur divers aspects de la comparabilité, touchant par exemple les pensions, les avantages sociaux et les congés, d'ici à ce que la CRTFP soit prête à les réaliser elle-même.

Nos observations s'appliquent essentiellement au noyau de la fonction publique et aux employeurs distincts dont le personnel est syndiqué. Pour les groupes non syndiqués et non représentés, il est important d'effectuer des études comparatives externes. Les études comparatives consacrées aux cadres de direction que l'on mène depuis longtemps devraient se poursuivre. Cependant, il serait bon d'en revoir la méthodologie pour en confirmer la validité. En particulier, il faudrait vérifier si des comparaisons rigoureuses aux niveaux supérieurs au premier niveau du groupe de la direction (EX) justifieraient d'accorder des hausses de salaire aux employés visés. D'autres observations sur la rémunération du personnel de direction sont présentées plus loin dans ce chapitre. Les groupes spécialisés non syndiqués, comme les agents du personnel (PE), devraient être comparés au secteur privé à intervalles réguliers.

Pour d'autres groupes, il importe tout autant de publier des données sur la comparabilité. Les rapports du Conseil de la solde de la GRC semblent fondamentalement rigoureux, quoiqu'il serait bon d'en revoir la méthodologie étant donné que le premier rapport de ce genre a été publié il y a environ 10 ans. Dans le cas des Forces canadiennes, il faut repenser la méthode de comparaison de la rémunération totale avec celle du noyau de la fonction publique. Elle est onéreuse sans être convaincante ni pour l'état-major et les membres des Forces canadiennes, ni pour le Secrétariat du Conseil du Trésor. Comme nous l'expliquons plus loin à la recommandation 13.4, la mise en place d'un comité consultatif sur la rémunération des forces canadiennes aiderait le Conseil du Trésor à déterminer la rémunération équitable qu'il conviendrait d'accorder aux membres de nos forces armées. Une des premières tâches du nouveau comité pourrait être de recommander une méthode simplifiée et crédible d'évaluation de la comparabilité de la solde militaire à la rémunération du noyau de la fonction publique, étant donné que les comparaisons directes avec le marché du travail extérieur ne semblent pas plus convaincantes qu'elles ne l'étaient par le passé.

Avant de conclure sur ce sujet, nous devons prendre en considération deux autres dimensions de la comparabilité qui sont à la fois controversées et difficiles, sur le plan conceptuel, à intégrer à une évaluation de la comparabilité. Le premier aspect porte sur la sécurité relative des emplois. Le public en général a l'impression que les fonctionnaires sont essentiellement casés pour la vie dès qu'ils deviennent des employés permanents, tandis que les personnes qui travaillent dans le secteur privé sont susceptibles de perdre leur emploi sans préavis ou recours. Les deux volets de ce tableau sont exagérés, tout en étant encore apparemment plus vrais que faux.

Dans la fonction publique fédérale, les réductions d'effectifs qui ont fait suite à l'Examen des programmes au milieu des années 1990 ont entraîné des milliers de départs hâtifs à la retraite non planifiés et d'autres pertes d'emploi. Cependant, les méthodes employées (le Programme d'encouragement à la retraite anticipée et la Prime de départ anticipé décrits dans le Volume Deux) pour procéder à la réduction des effectifs étaient généreuses à la fois sur le plan financier et à la fois parce qu'elles permettaient à ceux qui voulaient partir de se substituer à ceux dont les postes étaient abolis mais qui voulaient rester. Il est également vrai qu'il est relativement rare que des fonctionnaires soient congédiés, le plus grand nombre de départs volontaires étant attribuables aux renvois en cours de stage[166].

Dans le secteur privé, la sécurité d'emploi varie de faible (essentiellement le préavis de licenciement de quelques semaines exigé par les lois sur les normes de travail) à grande, selon l'employeur. Les employés syndiqués bénéficient habituellement de la plus grande sécurité d'emploi et des meilleures indemnités de licenciement. Mais même les meilleures conventions collectives permettent les mises à pied et les médias annoncent régulièrement des centaines ou des milliers de mises à pied lors de fermetures d'usines.

Le deuxième thème est celui de l'attrait relatif des emplois à la fonction publique. En théorie, on peut mesurer cet attrait de deux façons : le nombre de personnes qui postulent pour les postes vacants ouverts au grand public et le taux de départs volontaires. Sur ces deux plans, la fonction publique fédérale semble se comparer avantageusement au secteur privé. Les postes à la fonction publique fédérale annoncés à l'extérieur attirent souvent des centaines de candidatures, quoique la proportion des candidats qualifiés n'ait pas été jusqu'à maintenant documentée de façon systématique. Le taux d'attrition (exception faite des départs à la retraite) est très faible à 1,5 % en 2002‑2003, par exemple. La proportion des départs volontaires dans le secteur privé est évidemment très variable, mais a varié en gros autour de 10 à 15 % en 2003[167].

Tant la sécurité d'emploi relative que l'attrait relatif de l'employeur représentent une valeur pour les employés, même s'ils sont difficiles à quantifier. À tout le moins, il faudrait documenter et divulguer la situation globale de la fonction publique fédérale sur ces deux plans comparativement au secteur privé et à l'ensemble du secteur public au Canada. Si l'évaluation présentée ici voulant que la fonction publique fédérale bénéficie d'une position relativement favorable sur ces plans est exacte, cela implique que les salaires et les avantages sociaux offerts dans l'administration fédérale pour le même travail pourraient, raisonnablement, être un peu plus bas que ceux offerts dans le secteur privé. Cela serait évidemment très difficile à négocier dans le cadre des négociations collectives, mais on pourrait au moins en discuter franchement et ouvertement.

En résumé, voici nos recommandations concernant la communication de l'information sur la comparabilité :

Recommandation 4

4.1 De concert avec les syndicats du secteur public, le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait aider activement la Commission des relations de travail dans la fonction publique à établir, dès que possible, une fonction de recherche sur la rémunération faisant autorité. La portée des rapports sur la question devrait englober tous les aspects de la rémunération et non uniquement les traitements et salaires.

4.2 Le Secrétariat du Conseil du Trésor et ses partenaires devraient prendre le temps et le soin nécessaires pour réfléchir aux questions méthodologiques dès le départ et en discuter à fond, en reconnaissant aussi qu'il faut apprendre de l'expérience. Les parties devraient s'assurer de recommander des représentants qualifiés, y compris des experts indépendants, pour siéger au Comité consultatif créé pour veiller à ce que l'on utilise une méthodologie de recherche de haut calibre.

4.3 Les dirigeants de la Commission des relations de travail dans la fonction publique devraient consulter pleinement les représentants de l'employeur et des syndicats en vue de l'établissement et de la gestion de la nouvelle fonction de recherche sur la rémunération autorisée par la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Cependant, en tirant des leçons de l'expérience de l'Institut de la statistique du Québec et de celle du Comité consultatif établi en vertu de la Loi, la CRTFP devrait elle-même s'assurer du bien-fondé des méthodes adoptées pour mener les enquêtes comparatives et présenter les rapports connexes.

4.4 Jusqu'à ce que la CRTFP soit prête à publier des renseignements suffisamment complets sur la comparabilité de la rémunération fédérale par rapport à l'ensemble du marché du travail canadien, le Secrétariat du Conseil du Trésor (si possible en partenariat avec les syndicats du secteur public sous l'égide du Conseil national mixte) devrait publier au moins tous les trois ans des macro-perspectives pertinentes sur la comparabilité.

4.5 En ce qui a trait aux autres groupes d'employés fédéraux non syndiqués ou non représentés, le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait commander et publier des études de comparabilité à intervalles convenables. Pour les rapports de ce type qui existent déjà, comme ceux ayant trait aux cadres de direction de la fonction publique ou aux membres réguliers et civils de la GRC, des experts en rémunération indépendants et objectifs devraient revoir la méthode de comparaison avec le marché du travail externe pour s'assurer qu'elle demeure valable et pertinente à la situation.

4.6 En complément à la documentation sur la comparabilité des salaires et des avantages sociaux, des données sur la sécurité d'emploi et l'attrait du travail chez les employeurs étudiés devraient être compilées et publiées.

Le premier groupe de quatre recommandations est à la fois le plus important et le plus réalisable. En faisant rapport annuellement sur les principales tendances en matière de rémunération dans le secteur public fédéral, en veillant à ce que les données sous-jacentes reposent sur des définitions et des méthodes d'estimation claires, et en fournissant de l'information valable, sur le plan analytique, quant à la façon dont le secteur public fédéral se compare à l'ensemble du marché du travail canadien, on établira au profit de tous le contexte requis pour bien gérer la rémunération fédérale. Cependant, la mise en œuvre de nos recommandations sur la transparence et la reddition de comptes suppose, et même exige, que des changements soient apportés à notre façon de gérer la rémunération dans le secteur public fédéral. La prochaine série de recommandations aborde ce thème.

Le premier groupe de quatre recommandations est à la fois le plus important et le plus réalisable. En faisant rapport annuellement sur les principales tendances en matière de rémunération dans le secteur public fédéral, en veillant à ce que les données sous-jacentes reposent sur des définitions et des méthodes d'estimation claires, et en fournissant de l'information valable, sur le plan analytique, quant à la façon dont le secteur public fédéral se compare à l'ensemble du marché du travail canadien, on établira au profit de tous le contexte requis pour bien gérer la rémunération fédérale. Cependant, la mise en œuvre de nos recommandations sur la transparence et la reddition de comptes suppose, et même exige, que des changements soient apportés à notre façon de gérer la rémunération dans le secteur public fédéral. La prochaine série de recommandations aborde ce thème.

 




12. Gestion cohérente de la rémunération fédérale

Pour assurer une gestion cohérente de la rémunération dans le secteur public fédéral, il faut établir un cadre stratégique clair en matière de rémunération, gérer soigneusement les fluctuations de la taille et de la composition de la fonction publique, appliquer une approche plus uniforme pour la négociation des divers éléments de la rémunération totale, se doter d'une capacité centrale d'analyse et de leadership stratégique afin de superviser l'application de ce cadre et adopter une politique plus pratique en matière de relations entre les différents employeurs distincts au gouvernement fédéral. Bref, le gouvernement doit voir la rémunération comme un tout, chacune de ses composantes influant sur les autres et exigeant une gestion systématique de l'ensemble. Dans ce chapitre, nous examinons tour à tour chacun de ces sujets.

Cadre stratégique de la rémunération fédérale

Depuis plusieurs années, le Secrétariat du Conseil du Trésor souhaite instaurer une politique sur la rémunération dans le secteur public fédéral. Ce projet a toutefois pris du retard pour des raisons qui s'expliquent. Immédiatement après l'Examen des programmes, à la fin des années 1990, la priorité était de restaurer la capacité d'analyse et de négociation essentielle pour relancer le processus de négociation collective après six ans de gel salarial et de conditions de travail imposées par la loi. Un projet de politique a failli être approuvé en 2000, mais en raison de changements au niveau de la haute direction, il a été mis de côté. En 2003, le Secrétariat du Conseil du Trésor a fait circuler parmi les intervenants clés, pour commentaires, un document intitulé Vers un cadre stratégique de rémunération à l'intention de la fonction publique fédérale[168]. Des consultations ont été tenues en 2003 et au début de 2004 et des rajustements ont été apportés au texte. Toutefois, la nomination d'un nouveau cabinet en janvier 2006 et le désir de tenir compte des résultats du présent examen ont mené à la décision de retarder l'entrée en vigueur de la politique proposée.

Le temps est maintenant venu d'adopter et de publier le cadre stratégique proposé. L'énoncé de ce cadre figure à l'appendice B. Il définit les principaux points à prendre en considération au moment de déterminer la rémunération dans le secteur public fédéral. Comme tout employeur, le gouvernement fédéral doit aligner son régime de rémunération sur les marchés du travail externes, assurer l'équité interne entre les groupes connexes d'employés, reconnaître, le cas échéant, le rendement individuel et collectif et veiller à ce que le régime soit abordable.

En outre, en sa qualité de très grande institution publique jouant un rôle de chef de file national dans les sphères économique et sociale, le gouvernement fédéral doit modifier ses intérêts normaux, en tant qu'employeur, en tenant compte d'objectifs de politique publique plus vastes dans l'établissement des niveaux de rémunération, notamment les objectifs généraux de sa politique financière, y compris les attentes au sujet de l'inflation, le leadership en matière de politiques sociales, comme la promotion d'un congé parental après la naissance ou l'adoption d'un enfant en subventionnant les prestations d'assurance-emploi, l'observation des lois pertinentes, comme les prescriptions de la Loi canadienne sur les droits de la personne concernant le paiement d'un salaire égal pour un travail de valeur égale et l'évaluation non sexiste des emplois, et la réaction aux attentes et aux pressions du public comme pour tout autre domaine de politique.

On dit parfois que le gouvernement fédéral devrait simplement payer ce que le secteur privé paie pour le même travail. L'argument en ce sens est que les salaires dans le secteur privé sont régis par la discipline du marché. S'ils sont trop élevés, l'entreprise risque de ne pas survive. S'ils ne le sont pas assez, l'entreprise ne sera pas en mesure d'embaucher les candidats doués dont elle a besoin. Ainsi, en alignant la rémunération fédérale sur ce qu'offre le marché du travail est la fois juste pour le contribuable et l'employé.

C'est un raisonnement convaincant, mais il suppose l'existence d'un monde plus simple que celui dans lequel nous vivons. D'une part, le marché ne fixe pas souvent un niveau salarial précis. La rémunération offerte pour essentiellement le même travail peut varier dans le secteur privé selon l'importance de ce travail pour l'entreprise concernée, la taille de l'entreprise, la syndicalisation du secteur d'activité ou de l'entreprise, la localisation et bien d'autres facteurs. D'autre part, de nombreux emplois au gouvernement ont peu de contrepartie directe dans le secteur privé. Enfin, les politiques et d'autres considérations peuvent pousser le gouvernement fédéral à s'écarter de la norme du marché.

Le défi consiste donc à concilier les intérêts du gouvernement, en sa qualité d'employeur, et ses responsabilités en tant que chef de file pour l'ensemble du pays. Cela relève davantage de l'art que de la science. Aucune formule simple ne permet de déterminer la meilleure façon d'atteindre l'équilibre souhaité. La recherche d'une correspondance avec le marché du travail externe aura toujours une certaine influence, mais il sera probablement toujours difficile de concilier adéquatement les différentes considérations.

Cette vérité est renforcée par la réalité que la plupart des salaires et des autres modalités de la rémunération sont déterminés, directement ou indirectement, par la négociation collective avec les syndicats de la fonction publique. Et dans le contexte de cette réalité, le point de référence pour l'établissement des niveaux de rémunération en pratique est ce sur quoi le Conseil du Trésor s'entend de temps à autres avec les grands syndicats, particulièrement l'Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) et, dans une moindre mesure, l'Institut professionnel de la fonction publique (IPFP). Il se peut donc, dans ce contexte, que le pouvoir de négociation et l'opportunisme à court terme aient préséance sur les autres considérations de principe pour façonner l'issue du processus.

Devant ces faits, il peut sembler inutile d'adopter un cadre de politique en matière de rémunération au sein de la fonction publique. Des considérations multiples relatives à l'employeur et à l'intérêt public s'affrontent et elles sont toutes vulnérables aux compromis nécessaires pour conclure une convention collective. En d'autres occasions, un objectif de politique prioritaire, comme la suppression d'un sérieux déficit budgétaire, peut mener à l'imposition de niveaux de rémunération particuliers, sans qu'on tienne vraiment compte de l'incidence de cette décision sur les autres principes de rémunération.

Cependant, avec le temps, on peut voir croître et décroître l'influence des divers objectifs. Après un gel des salaires ou une hausse salariale imposée par une loi, par exemple, on constate que les considérations relatives la comparabilité externe ont tendance à s'imposer à nouveau. Si la relativité interne est faussée, on peut s'attendre à ce que de fortes augmentations soient accordées aux groupes qui ont pris du retard.

La divulgation régulière de données sur les indicateurs clés des divers facteurs liés à l'employeur et à l'intérêt public qui doivent être pris en compte dans la gestion de la rémunération aidera à maintenir un équilibre judicieux entre ces facteurs. Il importe d'avoir des échanges continus, au sein du gouvernement et dans l'opinion publique, sur les facteurs qui devraient prédominer à un moment donné et pourquoi. Le cadre stratégique de la rémunération à la fonction publique fédérale, dont on propose l'élaboration, fournira un contexte rigoureux pour orienter ces échanges au moyen d'informations pertinentes et fiables[169].

Les échanges doivent nécessairement aller au‑delà des indicateurs eux-mêmes pour englober la meilleure façon de les interpréter. Ainsi, pour un groupe professionnel donné, si la rémunération offerte sur le marché du travail externe est supérieure à celle offerte dans la fonction publique fédérale, il faut encore évaluer la pertinence de cet écart. Si, en dépit de salaires ou d'avantages sociaux moins élevés, le gouvernement fédéral est capable d'attirer un bassin suffisant de candidats qualifiés, une augmentation n'est peut-être pas justifiée.

Par ailleurs, la façon dont on comprend un élément donné dépend manifestement de sa perception. La question de l'abordabilité en est un bon exemple. D'aucuns voient la capacité de payer du gouvernement fédéral comme étant pratiquement sans limite. À l'occasion, les arbitres ont apparemment adopté ce point de vue. Pour les gestionnaires financiers par contre, le terme « abordabilité » est souvent un euphémisme pour dire que d'autres secteurs de dépenses ont une priorité plus élevée. Dans cette optique, le fardeau des restrictions à imposer pour maintenir l'ensemble du budget à un niveau donné (actuellement, que les revenus soient au moins égaux aux dépenses) devrait reposer davantage sur la rémunération (dépenses pour l'appareil gouvernemental) que sur d'autres secteurs, notamment ceux dont les citoyens bénéficient plus directement. À notre avis, un débat public sur les indicateurs les plus pertinents et l'interprétation appropriée à leur donner dans un contexte historique donné aboutira, notamment après des années de discussions soutenues, à l'application équilibrée et raisonnable des facteurs en question.

Voici donc nos recommandations au sujet de la politique de rémunération :

Recommandation 5

5.1 Le Conseil du Trésor devrait approuver le projet de Cadre stratégique de rémunération à l'intention de la fonction publique fédérale en tant qu'expression publique des éléments à prendre en considération dans l'élaboration de l'approche du gouvernement fédéral en matière de rémunération.

5.2 Afin de faciliter un débat public continu sur l'équilibre approprié entre les facteurs influant sur la rémunération, le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait publier une fois l'an un résumé des indicateurs les plus pertinents touchant chacun de ces facteurs. Idéalement, ce résumé pourrait constituer une annexe au Rapport sur les plans et les priorités que le Secrétariat du Conseil du Trésor doit déposer annuellement au Parlement, normalement en février ou en mars.

On a expliqué dans cette section la complexité des facteurs dont il faut tenir compte dans une politique sur la rémunération dans le secteur public fédéral. Quoiqu'un cadre stratégique ne précise pas quel est le meilleur équilibre entre les facteurs à prendre en considération dans une situation donnée, on peut néanmoins s'attendre à ce qu'il rehausse le niveau à la fois du débat public et de la compréhension générale. Il est clair que l'application responsable et intelligente du cadre au fil du temps exigera l'adoption d'un mode de gestion durable et complet de ce domaine. Avant d'aborder ce point, toutefois, nous préconisons de mieux contrôler les fluctuations de la taille et de la composition des effectifs du secteur public fédéral et de trouver des moyens de négocier les avantages non salariaux sous forme de concessions au moins partielles des augmentations salariales.

Gérer les fluctuations de la taille et de la composition des effectifs du secteur public fédéral

Dans le Volume Deux, nous montrons qu'environ 40 % (un montant estimatif de 1,8 milliard de dollars sur un total de 4,2 milliards de dollars) de la croissance de la masse salariale du noyau de la fonction publique et des employeurs distincts entre 1997‑1998 et 2002‑2003 peut être attribué à l'augmentation du nombre d'employés après l'Examen des programmes. Nous avons aussi indiqué qu'environ le tiers de la hausse du salaire moyen réel (en neutralisant l'effet de l'inflation) durant cette période résultait de l'évolution de la composition des effectifs. En effet, le nombre de membres des groupes mieux rémunérés comme Systèmes d'ordinateurs (CS), Économique, statistique et sociologie (ES) et Droit (LA) a augmenté rapidement, tandis que celui des membres de groupes moins bien rémunérés comme Secrétariat, sténographie et dactylographie (ST), Commis aux écritures et règlements (CR) et Manœuvres et hommes de métier (GL) a diminué.

Ces deux phénomènes reflètent des changements réels dans la société et les politiques. Le Conseil du Trésor a approuvé l'accroissement des effectifs pour une myriade de raisons, allant de la nécessité de renforcer les mesures de sécurité à la suite des événements du 11 septembre 2001 à New York, jusqu'à la mise en œuvre de nouveaux programmes sociaux. La composition de la fonction publique a évolué en fonction de besoins comme le recours accru aux technologies de l'information et aux systèmes connexes, l'accent mis sur l'analyse des politiques et l'augmentation du nombre de litiges relatifs aux droits des Autochtones et à la Charte.

Cependant, durant les années qui ont suivi immédiatement l'Examen des programmes, il n'y a eu qu'une gestion ou un suivi central limité de la croissance des effectifs dans la fonction publique fédérale ou des changements dans la composition des effectifs. Étant donné que les décisions connexes devaient être approuvées par le Conseil du Trésor, l'opinion dominante était que ces questions devaient être gérées au cas par cas. Les hausses des budgets salariaux devaient être approuvées par le Conseil du Trésor, mais personne ne faisait une synthèse des résultats de ces décisions d'une manière qui aurait permis de poser un jugement global sur leur importance cumulative.

Dans les cas où la haute direction des ministères pouvait aussi prendre ses propres décisions dans ces domaines, les choses étaient laissées à sa discrétion. Les fonds approuvés pouvaient être transférés entre les budgets non salariaux et les budgets salariaux à condition de prévoir une majoration de 20 % (facteur de conversion) pour couvrir le coût des avantages sociaux connexes. Les postes existants pouvaient être reclassifiés à condition que la difficulté des tâches rattachées à ces postes ait augmenté suffisamment. Les nouveaux postes pouvaient être classifiés à des niveaux plus élevés que les postes existants pour les mêmes raisons. Même si les coûts supplémentaires de ces décisions normalement prises au niveau local étaient consignés fidèlement dans les systèmes comptables de l'État et que l'on s'assurait que les budgets approuvés étaient suffisants pour les assumer, on a peu examiné leur effet combiné sur les coûts de rémunération à l'échelle du ministère ou du gouvernement.

Avant le début des années 1990, des mesures centrales de contrôle étaient exercées sur le nombre d'employés et les reclassifications faisaient l'objet d'un suivi systématique. Les effectifs étaient limités à un nombre précis d'équivalents à temps plein[170]. Les reclassifications étaient contrôlées après coup dans le cadre des vérifications cycliques du Secrétariat du Conseil du Trésor. C'est la frustration éprouvée par les sous-ministres à l'endroit de la rigidité de ce système de contrôle qui a mené à la délégation de pouvoirs accrus aux gestionnaires. Ces derniers ont ainsi pu gérer, dans le cadre de budgets de fonctionnement approuvés englobant toutes les dépenses salariales et les frais de fonctionnement, en permettant des virements entre les affectations pour les dépenses salariales et les dépenses non salariales, moyennant le facteur de conversion précité.

Aujourd'hui, la solution n'est pas de réimposer des mesures de contrôle rigides. Immédiatement après l'arrivée au pouvoir du gouvernement Martin en décembre 2003, des mesures de contrôle ont été appliquées à titre provisoire afin de permettre aux nouveaux ministres d'évaluer la situation. Ces mesures ont été supprimées l'année suivante car on s'est aperçu qu'elles gênaient l'instauration de nouvelles mesures.

Nous proposons la mise en place d'un système que l'on pourrait qualifier de délégation gérée. Il permettrait tout d'abord au Conseil du Trésor d'avoir une idée de l'évolution de la taille et de la composition des effectifs du secteur public fédéral. Les principales tendances seraient publiées dans le rapport annuel sur la rémunération fédérale. Au moins une fois l'an également, les ministres du Conseil du Trésor examineraient les tendances globales. Cet examen établirait le contexte pour l'étude de cas particuliers de demande d'approbation d'une hausse des budgets salariaux et servirait à déterminer les stratégies de réaffectation. Ainsi, les cas individuels pourraient encore être évalués objectivement, mais toujours en tenant compte de la situation globale.

Deuxièmement, les ministères conserveraient le pouvoir de virer des fonds entre les budgets non salariaux et les budgets salariaux, mais ces virements feraient l'objet d'un suivi et d'un rapport au Conseil du Trésor au moins annuellement. Si le niveau des virements était jugé excessif, le secrétaire du Conseil du Trésor avertirait en conséquence les sous-ministres.

Cependant, il semble que le facteur de conversion de 20 % utilisé pour les virements entre budgets non salariaux et salariaux soit beaucoup trop bas. En examinant les chiffres globaux sur la rémunération en 2002‑2003 présentés dans le Volume Deux, nous observons que sur une masse salariale de 9 milliards de dollars pour le noyau de la fonction publique, 3,4 milliards de dollars de plus ont été consacrés aux dépenses non salariales connexes, soit l'équivalent de 36,6 % de la masse salariale. Certains des montants inclus dans cette somme de 3,4 milliards de dollars (par exemple, pour les heures supplémentaires) sont déjà payés à même les budgets ministériels. En outre, certains montants visent un plus grand nombre d'employés que ceux faisant partie du noyau de la fonction publique. En tenant compte de ces points, nous pensons qu'un facteur de conversion d'environ 30 % serait raisonnable[171].

La raison pour laquelle il faudrait augmenter le facteur de conversion pour qu'il corresponde de façon plus réaliste aux dépenses non salariales rattachées à l'effectif de l'employeur est simple. En fixant artificiellement un prix trop bas, on incite les acheteurs à acheter plus que nécessaire. Un facteur de conversion plus exact constituerait un frein naturel à ce type de virements et ralentirait la croissance de la fonction publique, sans que l'on ait à adopter des règles plus strictes à cet égard.

Troisièmement, l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada mettrait en œuvre un programme de vérification systématique de la reclassification des postes existants et de la classification des nouveaux postes, et les résultats de ces vérifications seraient communiqués annuellement au Conseil du Trésor et au Parlement. Depuis 2004, le Conseil du Trésor oblige les ministères à afficher sur Internet les détails relatifs aux mesures de classification qu'ils ont prises. Cette mesure favorisera sans doute l'application responsable du pouvoir délégué de classifier les postes. Cependant, seul un programme régulier de vérification permettra réellement de vérifier si le pouvoir de délégation est appliqué de manière judicieuse dans un ministère. On a commencé à faire ce genre de vérification en 2003, comme il est mentionné dans le Volume Deux. Plus récemment, l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada a mis au point un outil pour évaluer les risques que présentent les petits ministères et organismes et elle a commencé à l'appliquer pour déterminer les vérifications à faire en priorité. Le temps est maintenant venu de passer à un cycle régulier de vérifications et de rapports dans ce domaine pour toutes les parties du noyau de la fonction publique. Les employeurs distincts doivent veiller à ce que des examens similaires aient lieu afin d'assurer l'intégrité du système de classification.

Il convient de souligner que l'objectif de cette démarche n'est pas de faire obstacle aux changements dans la composition de la fonction publique, qui sont inévitables compte tenu de l'évolution du rôle du gouvernement fédéral et de la complexité croissante de l'application des politiques publiques et de l'exécution des programmes. Il est plutôt de s'assurer que toutes les décisions en matière de classification soient bien fondées et que les hausses des coûts de la rémunération qui en résultent soient raisonnables.

En résumé, voici nos recommandations dans ce domaine :

Recommandation 6

6.1 Le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait tenir et intégrer des dossiers détaillés sur les hausses approuvées des budgets salariaux et leurs justifications.

6.2 Les sous-ministres devraient conserver la capacité de transférer des fonds des budgets non salariaux approuvés aux budgets salariaux. Cependant, le facteur de majoration de ces transferts devrait être porté de 20 % à 30 %, et ce taux devrait être revu annuellement et rajusté en fonction du coût réel cumulatif des avantages sociaux non salariaux.

6.3 Les sous-ministres devraient conserver le pouvoir de classifier les postes jusqu'au niveau EX 3, ainsi que les postes de niveau EX 4 et EX 5 faisant déjà partie de l'effectif ministériel. L'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada devrait appliquer à toutes les parties du noyau de la fonction publique son modèle de vérification, axé sur les risques, des décisions ministérielles en matière de reclassification de postes existants et de classification de nouveaux postes.

6.4 Au moins une fois l'an, un aperçu et une analyse des tendances des niveaux d'emploi et de la composition de l'effectif de la fonction publique et de la qualité des décisions en matière de classification des ministères devraient être présentés au Conseil du Trésor. Le Rapport annuel sur la rémunération fédérale devrait résumer les résultats de cette analyse à l'intention du Parlement et du public.

Élargir la portée de la négociation

À l'heure actuelle, la portée de la négociation collective dans la fonction publique fédérale est à la fois étroite et fragmentée et elle favorise l'accroissement des dépenses globales au titre de la rémunération. Cette réalité contraste avec la situation qui prévaut dans le secteur privé et dans la plus grande partie du secteur public où toutes les questions qui doivent être réglées conjointement sont traitées dans une même convention collective.

En pratique, au cours du processus régulier de négociation collective, le gouvernement fédéral négocie avec ses syndicats presque exclusivement les échelles salariales, les indemnités, les primes et les droits aux congés. Les autres avantages sociaux comme l'assurance-vie, l'assurance-invalidité et les régimes de soins de santé et de soins dentaires font l'objet de négociations distinctes. Parfois, certains de ces avantages sont négociés avec un syndicat particulier (par exemple avec l'Alliance de la Fonction publique du Canada pour le régime de soins dentaires), mais plus souvent avec tous ou la plupart des syndicats de la fonction publique, par l'entremise du Conseil national mixte. Le Régime de pension de retraite de la fonction publique n'est pas assujetti à la négociation, étant donné que ses modalités sont prescrites par une loi, la Loi sur la pension de la fonction publique.

La raison pour laquelle on procède ainsi de manière fragmentée pour déterminer le niveau global de la rémunération dans la fonction publique semble être le désir à la fois de contrôler les coûts et d'établir un cadre essentiellement commun pour régir l'emploi dans le secteur public fédéral. En appliquant une méthode largement unifiée de détermination des avantages sociaux, nous nous épargnons le fardeau administratif de gérer des produits distincts pour différents employés, qui, de fait, travaillent dans le même ministère ou organisme. En souscrivant des régimes d'avantages sociaux analogues pour d'importants groupes d'employés, nous pouvons nous attendre à obtenir des offres avantageuses des agents qui les administrent. Un tel résultat s'explique par la capacité de ces entreprises de répartir leurs frais généraux fixes entre un grand nombre de clients et par le simple fait que le nombre prévisible de demandes de règlement varie moins lorsque la taille du groupe assuré augmente. En offrant à la plupart des employés des avantages normalisés, il est plus facile de les faire passer d'une organisation ou d'un groupe professionnel à un autre et de promouvoir un sentiment d'appartenance à la fonction publique dans son ensemble.

Les avantages escomptés ne sont cependant pas sans inconvénients. Le principal coût tient au fait qu'en déterminant les avantages sociaux par des méthodes fragmentées et distinctes, il est impossible de négocier des compromis entre les diverses formes de rémunération. Paradoxalement, ce que nous parvenons à épargner en frais généraux en conservant des régimes d'avantages sociaux largement unifiés, nous pouvons plus que le perdre à cause des pressions qui s'exercent pour bonifier les avantages aux diverses tables, dans l'intérêt des bonnes relations patronales-syndicales, sans pouvoir compenser les hausses consenties à cet égard par des rajustements salariaux à la baisse.

Ainsi, chaque fois qu'il est temps de renouveler le régime de soins de santé ou le régime de soins dentaires, les négociateurs syndicaux s'attendent à ce qu'ils soient bonifiés au‑delà de ce qui est nécessaire pour simplement rattraper l'augmentation essentiellement « automatique » des coûts attribuables à la hausse des honoraires des praticiens ou du prix des médicaments. Les requêtes en ce sens ne tiennent jamais explicitement compte des récentes augmentations salariales ou autres augmentations négociées au cours des séances « régulières » de négociation collective. De fait, à chaque table de négociation, la partie syndicale invite le gouvernement à offrir quelque chose qui permettra d'améliorer les avantages dont leurs membres bénéficient déjà (et, soit dit en passant, de bien faire paraître les dirigeants syndicaux). Simplement égaler la hausse des coûts, même s'ils progressent beaucoup plus vite que l'inflation (le prix des médicaments en est un exemple notoire), est jugé insatisfaisant.

Un exemple plus difficile a trait au Régime de pension de retraite de la fonction publique. Au cours des années 1990, comme nous l'avons démontré dans le Volume Deux, la part des coûts rattachés au service courant assumée par l'employeur est passée d'environ 50 % à plus de 70 %. Bien que la Loi sur la pension de la fonction publique ait permis au Conseil du Trésor, depuis 2004, de hausser le taux de cotisation des employés pendant plusieurs années pour qu'il atteigne environ 40 %, les préoccupations entourant l'application de cette hausse dans le contexte de la négociation collective « normale » semblent avoir retardé jusqu'à l'été 2005 la décision de hausser le taux en question. Comme nous l'avons indiqué, le Régime de pension de retraite de la fonction publique est l'un des meilleurs au Canada. Il aurait été sage que le taux de cotisation des employés au Régime commence plus tôt à augmenter pour qu'il atteigne éventuellement 40 %, dans le cadre d'un rééquilibrage plus vaste de la rémunération globale à la fonction publique.

Il existe de bonnes raisons de garder le Régime de pension de retraite de la fonction publique à l'abri des changements en vogue ou fréquents qui pourraient résulter de son intégration à la négociation collective. Les employés doivent pouvoir compter sur un régime stable pendant de nombreuses années, soit durant leurs années actives et à la retraite. Cependant, ce principe n'oblige pas le gouvernement à s'en tenir rigoureusement à sa politique de séparer les modalités du Régime de pension de retraite de la négociation collective. À la fin des années 1990, le Conseil du Trésor a failli conclure une entente avec les syndicats de la fonction publique afin de cogérer le Régime, ce qui aurait supposé le partage des responsabilités à l'égard du financement du Régime et des prestations à long terme. À la suite de l'échec des efforts visant à conclure un tel accord, le Comité consultatif patronal-syndical sur les pensions a été réactivé depuis 2000 afin de servir de tribune pour débattre des questions de politique touchant aux pensions.

Tandis que la fragmentation des méthodes de détermination de la rémunération fédérale a apparemment eu pour effet de pousser à la hausse l'ensemble des coûts assumés par l'employeur, pour les employés il en a résulté une rigidité excessive du régime. Par exemple, alors que le Régime de soins de santé de la fonction publique est un régime intermédiaire décent, il est loin d'être le meilleur qui existe. Soit qu'il exclut divers services professionnels de plus en plus importants, allant de la massothérapie aux services psychologiques, soit qu'il en restreint l'accès. Il n'y a pas de protection contre le fait que la quote-part de 20 % des employés devienne trop lourde lorsqu'ils sont tenus d'acheter des médicaments extrêmement coûteux mais essentiels à leur santé. Tant que l'employeur assumera la totalité des coûts du régime et ne pourra pas négocier de concessions en échange des hausses salariales ou d'autres avantages sociaux, il est douteux que plus que des changements minimes soient apportés au régime.

Nous ne devrions pas non plus être trop enchantés par le fait que tous les employés bénéficient des mêmes avantages sociaux. La notion de la famille dans la société canadienne a évolué, tout comme les préférences des individus. Un plus grand choix d'avantages conviendrait probablement mieux à la diversité des employés. Le besoin d'attirer de nouveaux employés dans la fonction publique à divers stades de leur carrière, tout en continuant à constituer un choix de carrière pour probablement encore la majorité des fonctionnaires, représente une raison stratégique de favoriser l'élargissement de la gamme des avantages sociaux.

Il faudrait procéder à un examen poussé, qui dépasse la portée du présent examen, pour trouver la meilleure façon de formuler une approche plus complète en matière de négociation collective dans la fonction publique fédérale. Le désir de contenir autant que possible les frais d'administration est un objectif valable. Le maintien d'un niveau minimum commun de mesures de protection à l'intention de la fonction publique fédérale est aussi probablement utile pour promouvoir un sentiment d'appartenance parmi les fonctionnaires fédéraux. Cependant, les progrès des technologies de l'information ouvrent de possibilités nouvelles pour permettre une différenciation efficiente entre divers groupes et personnes. La négociation de l'ensemble du régime de rémunération serait plus réaliste, plus susceptible de faciliter le contrôle de l'ensemble des coûts et plus responsable à la fois de la part du gouvernement fédéral et des syndicats. La formulation de la meilleure approche à adopter à cet égard exigerait la réalisation d'une étude consacrée essentiellement à ce sujet.

En envisageant l'expansion de la portée de la négociation collective, une question connexe serait l'effet qu'elle pourrait avoir sur le rôle éventuel du Conseil national mixte (CNM). Comme nous l'avons noté plus tôt, certains avantages sociaux comme le Régime de soins de santé et le Régime de soins dentaires sont actuellement négociés sous l'égide de cette tribune patronale-syndicale. Même si l'élargissement de la portée de la négociation habituelle réduisait le rôle du CNM, il continuerait à remplir des fonctions importantes en facilitant un dialogue multilatéral élargi entre les employeurs et les syndicats fédéraux et en parrainant diverses directives sur des sujets comme les voyages, la réinstallation, les allocations de service extérieur et de poste isolé.

Voici donc en résumé notre recommandation dans ce domaine :

Recommandation 7

7.1 Le président du Conseil du Trésor devrait constituer un Groupe consultatif de haut niveau pour examiner la portée de la négociation collective dans la fonction publique fédérale. Le Groupe aurait pour mandat de recommander la meilleure façon d'élargir la portée de la négociation collective habituelle afin qu'elle s'applique à la plupart ou à la totalité des éléments du régime de rémunération, sauf ceux ayant trait aux cotisations de l'employeur aux programmes d'application générale comme l'assurance-emploi. Le Groupe devrait inclure d'anciens hauts fonctionnaires, des dirigeants syndicaux et des experts externes et devrait être présidé par un éminent Canadien qui connaît bien les pratiques en matière de négociation collective dans le secteur public et dans le secteur privé.

Leadership central en matière d'analyse et de stratégie

Pour assurer une gestion responsable de la rémunération au sein de la fonction publique fédérale, il est essentiel de disposer d'une capacité stratégique centrale permettant de faire des analyses approfondies et de donner des orientations et des conseils coordonnés. Quoique le Conseil du Trésor ait le pouvoir de superviser tous les aspects de la rémunération, il n'existe pas de service bureaucratique central en mesure d'assurer la gouvernance intégrée des responsabilités connexes. De fait, diverses composantes relèvent de différentes organisations. Par exemple :

Les augmentations des budgets ministériels visant à permettre l'embauche d'employés supplémentaires pour mettre en œuvre une nouvelle politique ou préserver l'intégrité d'un programme sont recommandées par l'un des divers groupes de programme œuvrant au sein du Secrétariat du Conseil du Trésor.

Les mandats de négociation collective sont établis conjointement par le ministère des Finances et le Bureau du Conseil privé sur avis de la Direction des relations de travail et des opérations de rémunération du Secrétariat du Conseil du Trésor et sont approuvés par le président du Conseil du Trésor. C'est à la Direction des relations de travail et des opérations de rémunération qu'il revient de négocier les conventions collectives sous la surveillance, à des degrés divers, d'autres organismes.

Les régimes de pension et d'avantages sociaux de la fonction publique sont gérés par le Secteur des pensions et des avantages sociaux du Secrétariat du Conseil du Trésor. Les mandats de négociation de modifications éventuelles aux régimes d'avantages sociaux sont normalement recommandés par le secrétaire du Conseil du Trésor en consultation avec le ministère des Finances et approuvés par le président du Conseil du Trésor.

Les services analytiques à l'appui de ces activités relèvent du mandat de plusieurs parties du Secrétariat du Conseil du Trésor.

Les politiques régissant la classification des postes sont recommandées au Conseil du Trésor par la Direction de la modernisation de la gestion des ressources humaines de l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada.

Les politiques de classification et de rémunération visant les cadres de direction de la fonction publique sont gérées par le Réseau du leadership, une direction de l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada, sur la base des recommandations du Comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction, formé de hauts dirigeants du secteur privé.

La plupart des décisions en matière de classification et bon nombre de décisions sur les niveaux d'adaptation relèvent des sous-ministres et sont normalement déléguées aux gestionnaires subalternes.

Comme nous l'avons amplement démontré dans ce rapport, la rémunération dans le secteur public fédéral est un sujet extrêmement complexe. Ses diverses composantes sont intrinsèquement liées. Ce n'est qu'en gérant ce domaine comme un tout que nous pourrons espérer concilier adéquatement les intérêts des contribuables et des employés, tout en répondant efficacement aux besoins opérationnels du gouvernement fédéral pour ce qui est d'attirer, de maintenir en poste et de motiver ses employés.

La meilleure façon d'établir l'approche unifiée souhaitée se prête évidemment à un débat. Entre le milieu de 2002 et la fin de 2003, le Secrétariat du Conseil du Trésor a essayé de promouvoir l'adoption d'une approche commune au moyen d'un Conseil de la rémunération réunissant tous les secrétaires adjoints et tous les autres cadres supérieurs du Conseil du Trésor qui jouent un rôle notable dans le domaine de la rémunération. Cette initiative a permis d'accroître la sensibilisation générale à l'interdépendance des questions de rémunération, mais elle n'est pas parvenue à institutionnaliser une seule et même orientation. En théorie du moins, le secrétaire délégué alors responsable du secteur de la gestion des ressources humaines au Secrétariat du Conseil du Trésor (alors appelé le Bureau de la gestion des ressources humaines) pouvait orienter et harmoniser la plupart des politiques et des divers éléments opérationnels ayant trait à la rémunération[172]. Le secrétaire délégué responsable du Bureau de la gestion des ressources humaines (BGRH) ne jouait cependant aucun rôle dans la formulation des recommandations visant à modifier les budgets salariaux des ministères. Le Conseil du Trésor était évidemment responsable des questions de ressources humaines et de budget, mais on ne pouvait pas vraiment s'attendre à ce que le titulaire de ce poste exceptionnellement exigeant de sous-ministre puisse assurer une approche unifiée à des sujets aussi divers sans le soutien de spécialistes exclusivement affectés à cette tâche.

En raison de la création, en décembre 2003, de l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada (AGRHFPC) et des changements connexes apportés à la structure du Secrétariat du Conseil du Trésor, la promotion de l'intégration de la gestion de la rémunération a été retardée. Au départ, c'était la conséquence naturelle du déplacement inévitable des forces vives requis pour mettre en place la nouvelle structure. À plus long terme, la nouvelle structure ne confiait à personne les moyens globaux ni les pouvoirs nécessaires pour planifier et appliquer une approche intégrée en matière de gestion de la rémunération fédérale. En juillet 2004, quand l'AGRHFPC a été intégrée au portefeuille du président du Conseil du Trésor, il est devenu théoriquement possible, mais en pratique impossible, pour ce dernier de mettre en œuvre lui-même une telle approche.

À ce stade, il serait improductif de réorganiser le système de façon à confier à une même entité les responsabilités du Conseil du Trésor en matière de rémunération. Pour l'instant, il faudrait à tout le moins créer un Secrétariat à la planification et à la coordination de la rémunération, doté du mandat clair de conseiller le secrétaire et le président du Conseil du Trésor pour qu'ils puissent exercer, dans une optique globale, leur responsabilité en matière de gestion des questions de rémunération. Ce groupe réunirait et intégrerait les perspectives et la capacité analytique et de planification stratégique de divers organismes centraux, en particulier le Secrétariat du Conseil du Trésor et l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada. Pour que ce nouveau secrétariat soit vraiment efficace, il faudrait qu'il ait l'appui du ministère des Finances et du Bureau du Conseil privé. Un tel appui pourrait se concrétiser si ces organismes détachaient des employés clés auprès du Secrétariat et participaient à l'élaboration de ses orientations et de ses priorités.

Dans une large mesure, la nécessité de créer le Secrétariat proposé est inhérente à nos recommandations antérieures, particulièrement celles ayant trait au Rapport annuel sur la rémunération fédérale et à l'élargissement de la portée de la négociation collective dans la fonction publique fédérale. La création même d'un rapport de synthèse et, encore plus important, la capacité de répondre aux questions qu'il susciterait, exigeront la mise en place d'un organisme faisant autorité pour appuyer les ministres et les cadres supérieurs. Encore plus essentiel, la présentation d'un rapport d'ensemble exigera une planification et une gestion cohérente des sujets sur lesquels le gouvernement fera rapport.

En soulignant que l'analyse et la production de rapports sont au cœur du rôle du Secrétariat à la planification et à la coordination de la rémunération qui est proposé, nous risquons de laisser l'impression erronée que ce travail pourrait être tout simplement assumé par un service existant du Secrétariat du Conseil du Trésor. Ce serait une erreur. Sous l'autorité du secrétaire du Conseil du Trésor, le Secrétariat doit pouvoir fournir, sans crainte, des conseils intégrés sur la cohérence du domaine de la rémunération et sur une stratégie coordonnée à mettre en œuvre. Ainsi, le Secrétariat ne devrait assumer la responsabilité d'aucune des pièces du casse-tête, mais il lui reviendrait spécifiquement de donner des conseils de portée générale.

En plus de réunir des appuis pour la mise sur pied du Secrétariat à la planification et à la coordination de la rémunération proposé, il serait bon que le secrétaire du Conseil du Trésor crée un Conseil de la rémunération, formé de sous-ministres, dont ceux qui assument des responsabilités importantes ou qui ont acquis beaucoup d'expérience dans ce domaine, avec qui il pourrait discuter des principaux enjeux liés à la rémunération. La combinaison d'un service analytique stratégique central et d'un conseil consultatif de sous-ministres, en appui au mandat général du président du Conseil du Trésor et en définitive du Conseil du Trésor lui-même, constitue le meilleur moyen d'assurer la mise en place d'un régime de gouvernance de la rémunération efficace et cohérent au sein du secteur public fédéral.

Dans ce domaine, nous recommandons donc ce qui suit :

Recommandation 8

8.1 Le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait créer un Secrétariat de la planification et de la coordination de la rémunération ayant le mandat et la capacité d'effectuer les analyses nécessaires et de donner des conseils stratégiques au sujet de la gestion globale de la rémunération dans le secteur public fédéral. Ce Secrétariat devrait relever directement du secrétaire. Il devrait être dirigé par un secrétaire adjoint et comprendre des employés clés détachés de tous les organismes centraux jouant un rôle dans la gestion de la rémunération fédérale (les directions compétentes du Secrétariat du Conseil du Trésor, l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique, le ministère des Finances et le Bureau du Conseil privé) afin de faciliter la communication entre les différents acteurs. Toutefois, le Secrétariat ne devrait lui‑même être responsable d'aucun des éléments importants de la gestion de la rémunération, de manière à pouvoir conserver une vision d'ensemble claire.

8.2 Le nouveau Secrétariat de la rémunération devrait être chargé de produire le Rapport annuel sur la rémunération fédérale proposé dans la recommandation 1 et le rapport sur les indicateurs de la politique de rémunération proposé dans la recommandation 4 aux fins d'inclusion dans le Rapport sur les plans et les priorités du Secrétariat du Conseil du Trésor, en utilisant les données et les compétences analytiques disponibles dans les divers secteurs du portefeuille du Conseil du Trésor et ailleurs.

8.3 Pour compléter et diriger le travail du Secrétariat de la rémunération, le secrétaire du Conseil du Trésor devrait présider un Conseil de la rémunération, au niveau des sous-ministres, composé des plus hauts représentants des secteurs de la fonction publique fédérale ayant des responsabilités importantes dans le domaine de la rémunération. Le Conseil donnerait son avis sur le plan de travail et les produits importants du Secrétariat de la rémunération.

Employeurs distincts et gestion de la rémunération

Nous devons indiquer clairement quelle place les employeurs distincts doivent occuper dans un régime efficace de gestion de la rémunération du secteur public fédéral. L'expression « employeurs distincts » est utilisée dans le présent rapport pour désigner les organisations énumérées à la partie II de l'annexe 1 de la Loi sur la gestion des finances publiques. La plupart de ces employeurs ont peu d'employés et gèrent eux-mêmes leur rémunération depuis longtemps, sous réserve de l'application des directives concernant les mandats de négociation et l'approbation de leurs conventions collectives par le Conseil du Trésor. Trois gros employeurs distincts ont été créés à la fin des années 1990 : l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA), l'Agence Parcs Canada (APC) et l'énorme Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC). L'ADRC a été dispensée par la loi de faire approuver ses mandats de négociation et ses conventions par le Conseil du Trésor mais elle doit consulter le Secrétariat du Conseil du Trésor.

La création de ces nouvelles agences durant la dernière décennie soulève deux questions pour le présent examen. Premièrement, quel effet leur création a‑t‑elle eu sur la rémunération dans le secteur public fédéral et, deuxièmement, quels liens devrait-il y avoir entre les employeurs distincts et le régime de gestion de la rémunération recommandé dans le présent chapitre?

En ce qui concerne la première question, notre expérience demeure limitée à ce jour. Des données indiquent cependant que les négociations collectives distinctes pour l'ADRC et le noyau de la fonction publique (dont le Conseil du Trésor est l'employeur) ont donné lieu à une certaine escalade des niveaux de salaire. Ce résultat peut être difficile à éviter dans les circonstances : recours à des structures de groupes professionnels presque identiques à l'ADRC et dans le noyau de la fonction publique, représentation du personnel syndiqué de l'ADRC par les deux principaux syndicats accrédités pour négocier au nom de 80 % du noyau de la fonction publique, différences notables entre l'importance de certains groupes d'employés à l'ADRC et dans le noyau de la fonction publique, et différences entre la période et la durée d'application des conventions collectives des deux employeurs.

La création d'employeurs distincts peut facilement se justifier. Lorsqu'un important groupe d'employés travaille pour un organisme ayant un mandat bien précis, il est tout indiqué de concevoir des politiques et des pratiques de gestion des ressources humaines qui facilitent l'atteinte des objectifs opérationnels de l'organisme. La rémunération représente un élément central de toute stratégie de ce genre. Payer davantage le personnel essentiel à la mission de l'organisme, concevoir des structures de groupes professionnels réunissant les personnes qui font un travail semblable et classifier le travail en fonction de la valeur qu'il revêt pour l'organisme (tout en respectant le principe du salaire égal pour un travail de valeur égale peut avoir des répercussions extrêmement positives sur le rendement de l'organisme. Mener des négociations collectives dans le contexte d'une organisation ayant un mandat relativement clair et une structure de groupes professionnels correspondant à la nature de son effectif est la meilleure façon de relier la rémunération à des règles de travail et à la productivité, comme en témoignent les meilleures relations patronales-syndicales dans le secteur privé.

Mais à l'heure actuelle, le secteur public fédéral se retrouve peut-être en position désavantageuse entre deux approches raisonnables. L'une consiste à établir une distinction entre les régimes de ressources humaines et de rémunération afin d'optimiser le rendement de l'organisation et l'autre à conserver un ensemble unifié de politiques sur les ressources humaines et de régimes de rémunération afin de contrôler les coûts et d'assurer une égalité approximative des conditions, du moins en apparence, pour des missions et des milieux de travail différents.

À la fin des années 1990, le gouvernement fédéral s'est engagé résolument sur la première voie, mais il a trouvé difficile d'apporter aux structures de groupes professionnels les changements qui auraient permis à ces organismes de vraiment tirer parti de régimes distincts de gestion des ressources humaines. Ces difficultés étaient en partie attribuables à des causes externes, par exemple l'opposition des syndicats de la fonction publique et l'apparente réticence de la Commission des relations de travail dans la fonction publique à appuyer des changements structurels. Sur le plan interne, l'inertie des structures et des pratiques établies s'est avérée difficile à surmonter. En outre, le fait que l'on s'affairait alors à préparer le terrain pour l'adoption de normes de classification générales pour tous les employés du noyau de la fonction publique peut avoir masqué l'importance de régler la question de la structure des groupes professionnels.

La persistance des structures de groupes professionnels héritées du noyau de la fonction publique a rendu inévitables les tendances à l'escalade dans la mesure où l'un ou l'autre gros employeur (l'ADRC ou le Conseil du Trésor) a accordé beaucoup plus d'importance que l'autre à un groupe donné d'employés. Ainsi, lorsque l'ADRC a dû accroître la rémunération des vérificateurs afin de pouvoir les attirer et de conserver un ensemble de compétences essentielles, elle a aussi augmenté notamment la rémunération du groupe Achats (PG), dont les membres étaient très peu nombreux à l'ADRC mais qui, pour des raisons historiques, faisaient partie du même groupe professionnel que les vérificateurs. Au sein du noyau de la fonction publique, il y avait peu de vérificateurs mais un nombre relativement élevé d'agents des achats, ce qui a engendré des pressions injustifiées en faveur d'une hausse des salaires. On a réussi à résister à ces pressions dans le cadre des négociations directes, mais il était à prévoir que peu d'arbitres maintiendraient une telle différence au sein d'un groupe de négociation. En fait, en 2005, un arbitre a accordé au groupe AV, qui comprend les vérificateurs et les agents des achats, un nouvel échelon salarial en plus des augmentations économiques courantes.

Il y a deux façons de procéder pour la deuxième question, qui a trait aux liens qui devraient exister entre les employeurs distincts et le régime de gestion de la rémunération recommandé dans le présent rapport : aller résolument de l'avant avec le modèle de l'employeur distinct pour les organismes ayant une taille et une orientation appropriées, ou adopter une approche coordonnée de la négociation pour les employeurs distincts existants. L'une ou l'autre méthode devraient atténuer les tendances à l'escalade injustifiée des salaires entre les organismes.

La première façon de procéder consisterait à créer plusieurs nouveaux employeurs distincts et à accorder une attention concertée, y compris l'adoption de mesures législatives au besoin, à la conception de structures de groupes professionnels et d'unités de négociation répondant aux besoins opérationnels de chaque organisme. Il serait logique que les organismes suivants, entre autres, deviennent des employeurs distincts :

  • l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC);
  • l'agence Service Canada (ASC);
  • Service correctionnel Canada (SCC);
  • Statistique Canada (SC).

Parmi les autres possibilités, il y aurait Affaires étrangères Canada (AÉC) et le ministère remanié de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC).

Chacune de ces organisations compte des milliers d'employés et a un mandat bien défini, à la réalisation duquel pourraient contribuer des pratiques de gestion des ressources humaines et de la rémunération conçues spécialement pour favoriser un bon rendement dans leurs secteurs d'activité particuliers.

La taille relative est un élément crucial à prendre en considération au moment d'établir des règles du jeu concurrentielles pour la négociation collective. Actuellement, le noyau de la fonction publique compte plus de 180 000 employés, l'Agence du revenu du Canada[173] emploie quelque 40 000 travailleurs, trois organismes ont un effectif d'à peu près 5 000 employés et il y a plus d'une douzaine de petits employeurs distincts. Si l'on créait les quatre organismes proposés ci‑dessus, ils compteraient environ 12 000 employés (ASFC), 22 000 employés (ASC), 14 000 employés (SCC) et 5 000 (SC). Le noyau de la fonction publique ne compterait plus alors qu'environ 130 000 employés.

Un plus grand nombre d'employeurs distincts de taille importante créerait un contexte plus compétitif pour la négociation collective dans le secteur public fédéral. Si, en plus, les groupes professionnels et les agents négociateurs étaient adaptés aux besoins de chaque organisme, nous pourrions nous attendre à ce qu'un effet d'escalade ne se manifeste qu'en cas de véritable pénurie de compétences touchant plusieurs organismes. On pourrait aussi s'attendre à ce que les organismes du secteur public fédéral ressemblent davantage aux employeurs de l'ensemble du marché du travail, où une pénurie générale (surabondance) fait augmenter (baisser) les coûts de main‑d'oeuvre pour tous, mais où différents employeurs paient habituellement plus ou moins pour diverses compétences, selon l'importance qu'elles revêtent pour leur mission.

Pour accroître le nombre d'employeurs distincts, il faudrait que le Conseil du Trésor soit mieux en mesure de déterminer le niveau approprié de ressources de fonctionnement à affecter à ces organisations. Un des dangers à atténuer est l'émergence de pressions à la hausse sur les salaires, attribuables simplement à la capacité disproportionnée que pourraient avoir une ou plusieurs organisations d'engager des dépenses salariales.

Ces dernières années, il est devenu évident que le gouvernement fédéral était moins enclin à créer de nouveaux employeurs distincts. On semble juger préférable de conserver un noyau de la fonction publique plus important, ce qui facilite la mobilité. On craint peut-être aussi que la discipline budgétaire préconisée se révèle difficile à maintenir.

Cela étant dit, la deuxième façon de procéder préférable au statu quo consisterait, pour l'employeur, à passer à des négociations coordonnées avec les groupes professionnels qui sont importants tant pour l'ADRC que pour le noyau de la fonction publique. L'Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) semble vouloir adopter elle aussi une telle approche. Ainsi, lors des négociations conclues à la fin de 2004, toutes les unités de négociation de l'AFPC en étaient arrivées à l'étape de l'acquisition du droit de faire la grève en quelques semaines. Cela visait probablement à exercer une pression maximale sur le gouvernement fédéral. En effet, en 2004, les employeurs du gouvernement ont coordonné leurs négociations plus étroitement qu'ils ne l'avaient jamais fait depuis la création de l'ADRC, de l'ACIA et de l'APC en tant qu'employeurs distincts.

Une approche de type « conseil du patronat » pourrait prendre diverses formes. Elle pourrait se limiter à une coordination non officielle ressemblant beaucoup à celle de 2004. Ou, les parties syndicale et patronale pourraient avoir recours à des équipes de négociation commune pour les unités de négociation représentant les mêmes groupes professionnels. Dans l'un et l'autre cas, on chercherait à réduire la probabilité que des accidents touchant le moment et le processus de la négociation collective incitent le gouvernement fédéral à faire passer les salaires à des niveaux non raisonnables soit par rapport au marché du travail externe, soit pour signaler que le groupe n'a pas la même importance pour des employeurs distincts.

Une approche coordonnée ne doit pas nécessairement avoir des répercussions uniformes sur les salaires et les conditions de travail. Le recours à des négociations à deux niveaux permettrait aux employeurs distincts fédéraux d'exécuter ensemble les tâches qui se partagent le plus facilement, comme la négociation des niveaux de salaire globaux, tout en s'occupant individuellement de la négociation des éléments des conventions collectives propres à leur situation.

En ce qui concerne cette deuxième façon de procéder, nous devons reconnaître qu'une approche coordonnée des négociations ne serait nécessaire que si les structures de groupes professionnels des divers employeurs pouvaient être adaptées à leurs besoins opérationnels. Si différentes structures de groupes professionnels étaient en place, il y aurait moins de possibilités de comparaison directe entre les employeurs (entre des groupes pouvant s'équivaloir plus en théorie que du point de vue du travail réellement effectué) et, partant, plus d'occasions de négocier des salaires et des conditions de travail correspondant à la situation de chaque employeur. Nous insistons plus loin sur la nécessité pour le noyau de la fonction publique (dont le Conseil du Trésor est l'employeur) de moderniser sa structure de groupes professionnels. Il est encore plus important pour les employeurs distincts de régler cette question. Même s'ils ont apporté certains changements à leurs structures[174], celles-ci ressemblent plus ou moins aux structures que leur a léguées le noyau de la fonction publique plutôt qu'à des structures conçues expressément pour répondre à leurs besoins opérationnels.

En résumé, nous recommandons donc de régler la question de la façon dont les employeurs distincts devraient gérer la rémunération à la lumière des propositions qui figurent dans le présent rapport, de la manière suivante :

Recommandation 9

9.1 Le gouvernement fédéral devrait envisager de créer d'autres employeurs distincts afin d'améliorer le rendement organisationnel en faisant correspondre les pratiques de gestion des ressources humaines, notamment la rémunération, aux besoins opérationnels de chaque employeur. Les critères applicables à la création d'employeurs distincts comprendraient un effectif d'au moins 5 000 employés et un mandat opérationnel bien défini. L'Agence des services frontaliers du Canada, Service Canada, Service correctionnel Canada et Statistique Canada sont des exemples possibles.

9.2 Dans l'intervalle, ou si le gouvernement décidait de ne pas créer d'autres employeurs distincts, le noyau de la fonction publique et les principaux employeurs distincts devraient avoir recours à une formule de négociation coordonnée avec les syndicats de la fonction publique afin de réduire le risque d'un effet d'escalade donnant lieu à des hausses salariales au sein du secteur public fédéral. La négociation à deux paliers pourrait être employée pour traiter séparément des niveaux de salaire globaux et des éléments de la rémunération propres à un employeur particulier.

9.3 Les employeurs distincts fédéraux devraient tenter de nouveau d'établir une structure de groupes professionnels adaptée à leur mission particulière.

Les recommandations 5 à 9 concernent la façon de renforcer la discipline qui s'applique à la gestion de la rémunération du secteur public fédéral. En assurant une transparence et une responsabilisation accrues ainsi qu'une gestion plus cohérente de la part de l'employeur, nous aurons pris les mesures les plus déterminantes pour faire en sorte que tout le domaine des dépenses liées à la rémunération serve bien les intérêts tant des contribuables que des employés. Il conviendrait cependant d'accorder une attention particulière à plusieurs questions importantes afin d'améliorer notre façon de gérer la rémunération dans le secteur public fédéral. Nous résumons les recommandations appropriées concernant ces questions dans les deux chapitres suivants.

 




13. Questions de rémunération liées aux salaires

Outre les réformes générales préconisées dans les deux chapitres précédents, nous examinons, dans ce chapitre et le suivant, certaines questions de rémunération plus spécifiques rejoignant une douzaine de domaines. Il n'est pas aussi essentiel d'apporter des changements dans ces domaines que dans ceux de la transparence et de la gestion. Néanmoins, globalement, des améliorations dans ces domaines particuliers aideraient beaucoup à instaurer un régime de rémunération favorisant la réussite de la fonction publique dans un monde en pleine transformation.

Structure des groupes professionnels

Dans le chapitre précédent, nous avons indiqué qu'il serait souhaitable que chaque employeur fédéral adopte une structure de groupes professionnels (et une structure correspondante d'unités de négociation) convenant bien à la nature de la mission de l'organisation. À titre illustratif, nous traitons de cette question plus en détail ici pour le noyau de la fonction publique. Cela comprend bien sûr la plupart des grands ministères du gouvernement, dont le Conseil du Trésor est l'employeur officiel, même si la gestion courante du lieu de travail incombe aux sous‑ministres et aux gestionnaires ministériels.

La figure 1004 du chapitre 3 montre la structure actuelle des groupes professionnels pour le noyau de la fonction publique. Cette structure a été créée en 1999[175] afin de réunir en 29 groupes les quelque 70 groupes établis lorsque la négociation collective a été instaurée dans la fonction publique fédérale en 1967.

En vertu de modifications législatives approuvées par le Parlement en 1993, le gouvernement avait le pouvoir de déterminer comment l'effectif serait structuré aux fins de la classification et de la négociation collective[176]. La décision d'instaurer une structure globale a été prise dans le contexte de la réintroduction, en 1997, de la négociation collective après une interruption de six ans, et du fait que l'on s'attendait à ce qu'une seule norme de classification universelle soit bientôt adoptée. On peut comprendre que, dans ces circonstances, le gouvernement ne voulait pas contrarier les syndicats du secteur public en apportant à la structure des groupes professionnels des changements qui n'auraient pas respecté les affiliations syndicales existantes. Cependant, la nouvelle structure représentait tout au plus un compromis du point de vue de la saine gestion des ressources humaines et de la rémunération.

Les problèmes non réglés, voire aggravés, par la nouvelle structure étaient les suivants :

La définition du groupe Services des programmes et de l'administration (PA) est tellement vague qu'elle ne convient plus. Sur le plan des relations de travail, il est irréaliste de penser qu'il puisse y avoir une réelle communauté d'intérêts entre les agents des libérations conditionnelles du Service correctionnel, les commis s'occupant des transactions courantes, les conseillers principaux en politiques des ministères opérationnels et les gestionnaires des bureaux locaux où travaillent des centaines de personnes.

Parmi les autres groupes professionnels particulièrement hétérogènes, il y a les groupes Services de santé (SH) et Services techniques (TC). Leurs sous‑groupes ont peu de choses en commun mais ont des liens étroits avec d'autres groupes. Par exemple, les inspecteurs techniques du groupe TC ont surtout des affinités avec les titulaires de divers postes du domaine de la réglementation des transports, alors que certains technologues de ce groupe exercent des activités s'apparentant davantage à celles du groupe Sciences appliquées.

D'autres groupes ont un noyau bien défini mais comprennent des emplois moins nombreux et en grande partie non reliés. Un bon exemple est le groupe Recherche (RE), dominé par les chercheurs et les scientifiques de la défense. On accorde peu d'attention dans ce groupe aux intérêts des mathématiciens, qui travaillent en général avec des membres du groupe Économique et services des sciences sociales (EC) ou à ceux des spécialistes de la recherche historique.

Le groupe Systèmes d'ordinateurs (CS), qui a connu la plus forte croissance ces dernières années, est en fait composé de deux types distincts d'employés : un groupe de niveau supérieur, qui apporte des connaissances essentielles dans un monde reposant sur les technologies de l'information, et un groupe plus opérationnel qui ressemble à bien des égards au personnel administratif du groupe PA.

En contrepartie, les changements dans l'économie en général plaideraient probablement en faveur de la création d'un nouveau groupe Gestion de l'information, qui réunirait des emplois faisant actuellement partie de plusieurs classifications et groupes professionnels.

Certains groupes existent en tant qu'entités distinctes simplement parce qu'ils sont représentés par des syndicats différents. Trois groupes, Réparation des navires (Est), Réparation des navires (Ouest) et Chefs d'équipe de la réparation des navires, ne comptent qu'au plus 1 400 employés exerçant des responsabilités semblables pour le même ministère, celui de la Défense nationale.

Comme nous l'avons fait remarquer dans la section traitant des employeurs distincts, le groupe Vérification, commerce et achat (AV) ne représente qu'un mariage de raison, les groupes de référence sur le marché du travail externe pour les vérificateurs et les responsables des achats n'étant aucunement reliés.

D'autres exemples d'illogisme structurel pourraient être présentés. Les exemples fournis suffisent toutefois à démontrer que la structure actuelle de groupes professionnels fonctionne surtout parce que les gestionnaires et les employés y sont habitués et trouvent des solutions de rechange, au besoin, pour mener à bien les activités gouvernementales.

Il n'est pas raisonnable d'accepter qu'un tel illogisme soit immuable simplement parce qu'il existe ou parce que certains syndicats s'opposeraient à la création de groupes représentant une réelle communauté d'intérêts si cela entraînait la perte de membres. Ce n'est qu'en procédant à une restructuration des groupes que l'on pourra espérer que les employés constatent les intérêts qu'ils ont en commun avec les autres membres de leur groupe et établir des comparaisons significatives avec le marché du travail externe.

Transformer la structure des groupes professionnels est aussi une conséquence nécessaire de la décision prise par le Conseil du Trésor en 2002 de mettre fin aux travaux concernant une norme de classification universelle. Si tous les emplois de la fonction publique fédérale étaient évalués selon une seule norme, leur structuration par groupe professionnel aurait peu d'importance[177]. Étant donné que nous continuons de reconnaître les groupes professionnels pour établir la rémunération, en nous assurant que les normes de classification des groupes réduisent au minimum le sexisme et que, globalement, chaque employeur accorde un salaire égal pour un travail de valeur égale, il faut que la structure des groupes professionnels soit manifestement logique.

En fait, déterminer la meilleure façon de restructurer nos groupes professionnels va au-delà du mandat et des ressources du présent examen. Cette tâche, qui n'est pas excessivement difficile en principe, devra donc faire partie du suivi. Ce travail pourrait toutefois facilement s'enliser en raison de conflits au sein des syndicats et entre ceux-ci et, évidemment, entre les syndicats et l'employeur. Il est à prévoir que les syndicats de la fonction publique soient peu disposés à relever ce défi, car cela remettrait en question la répartition des membres au sein des syndicats et, partant, leur taille relative et le montant des cotisations perçues – et peut-être même l'existence de certains petits syndicats.

La meilleure approche reposera à la fois sur les conseils de spécialistes externes, des conversations franches entre employeur et syndicats en présence d'un médiateur, une décision de l'employeur concernant la structure de groupes professionnels la plus logique et la détermination, par un arbitre de la nouvelle Commission des relations de travail dans la fonction publique, des unités de négociation convenant le mieux à la nouvelle structure de groupes professionnels. Les autres employeurs fédéraux dont les structures de groupes professionnels et d'unités de négociation ne conviennent pas à leur besoins opérationnels pourraient entreprendre un processus semblable. En dernier recours seulement, si cette approche ne donne pas de bons résultats dans un délai raisonnable (peut-être trois ans), le gouvernement fédéral pourrait envisager d'appliquer, à l'aide d'une loi, une structure convenable de groupes professionnels et d'unités de négociation.

Idéalement, l'employeur procéderait aux analyses et aux consultations nécessaires et choisirait une nouvelle structure qui offrirait un cadre solide pour tous les aspects de la gestion des ressources humaines. La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique[178] accorde ce pouvoir au Conseil du Trésor et aux employeurs distincts. Ce pouvoir n'est subordonné qu'à celui qu'a la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) de déterminer les unités de négociation aux fins de la négociation collective. La CRTFP devrait cependant accepter une structure de groupes professionnels convenable adoptée par l'employeur.

Ce travail s'est avéré difficile principalement en raison des controverses inévitables concernant les changements possibles à la composition des syndicats. Il faudra réfléchir clairement et faire preuve de courage et de détermination. Il est toutefois urgent de mettre en place une structure solide, qui est essentielle pour une si grande partie du travail à accomplir pour gérer efficacement la rémunération dans le secteur public fédéral. Si, pour quelque raison que ce soit, le Conseil du Trésor ou un employeur distinct se sentait incapable d'accomplir rapidement ce travail, il faudrait renvoyer la question à un groupe d'experts qui serait chargé d'évaluer les options et de proposer une structure réaliste.

Plus spécifiquement, nous faisons les recommandations suivantes :

Recommandation 10

10.1 Après avoir consulté les syndicats de la fonction publique et des experts externes compétents, le Conseil du Trésor[179] devrait publier un projet de structure de groupes professionnels et d'unités de négociation qui réunirait de façon appropriée les employés ayant des conditions de travail et des intérêts communs et faciliterait la comparaison avec le marché du travail canadien. Ce travail devrait être complété dans un délai de douze mois.

10.2 Dans les six mois de la publication de cette proposition et après un débat public, le gouverneur en conseil devrait proclamer l'adoption d'une nouvelle structure de groupes professionnels pour le noyau de la fonction publique.

10.3 Si, pour quelque raison que ce soit, les responsables du portefeuille au Conseil du Trésor ne pouvaient mener à bien promptement ce projet, le président du Conseil du Trésor devrait envisager de constituer un groupe d'experts qui serait chargé de formuler une proposition indépendante sur la base de laquelle le gouverneur en conseil proclamerait l'adoption d'une nouvelle structure de groupes professionnels.

10.4 La Commission des relations de travail dans la fonction publique devrait ensuite déterminer le plus rapidement possible la structure appropriée d'unités de négociation correspondant à la nouvelle structure de groupes professionnels.

10.5 En dernier recours, s'il n'y avait aucune autre façon d'adopter dans un délai de trois ans une nouvelle structure appropriée, le gouvernement devrait envisager de recourir à une loi pour mettre en place un tel cadre.

10.6 Les autres employeurs distincts fédéraux devraient entreprendre un processus parallèle mais différent pour adapter leurs structures de groupes professionnels et d'unités de négociation à leurs activités, également dans un délai de trois ans.

Réforme de la classification

Les normes et les structures de classification sont importantes car elles définissent le cadre de détermination des salaires. Elles permettent d'évaluer la valeur relative d'un emploi par rapport à d'autres emplois. Les négociations collectives ou les décisions de la direction déterminent ensuite le taux de rémunération pour chaque niveau de chaque groupe. Un système de rémunération convenable repose donc sur un système de classification logique.

Tel que noté précédemment, les groupes professionnels ont été regroupés aux fins de la négociation collective en 1999. Toutefois, aux fins de la classification, on utilise encore essentiellement les quelque 70 groupes créés lorsque la négociation collective a été adoptée en 1967. Plusieurs des normes de classification connexes ont été révisées ou mises à jour périodiquement. Cependant, nombre d'entre elles sont manifestement désuètes et les nouveaux groupes professionnels réunissant d'anciens groupes professionnels ne s'accompagnent pas de normes de classification.

La réforme de la classification s'est révélée difficile à accomplir pour le noyau de la fonction publique presque tout au long des deux dernières décennies. Cela est attribuable, en grande partie, aux efforts faits pour créer une norme de classification universelle unique qui aurait permis d'évaluer toutes les formes de travail dans la fonction publique selon une seule échelle de valeur non sexiste. Une telle norme aurait permis la négociation d'une seule structure salariale pour tous les emplois du noyau de la fonction publique. En revanche, comme nous l'avons mentionné, cet objectif a été abandonné en 2002, surtout parce qu'on a reconnu la grande diversité du travail accompli dans la fonction publique fédérale et la nécessité de maintenir des liens raisonnables avec le marché du travail externe[180].

Depuis 2002, l'approche consiste à moderniser les normes de classification groupe par groupe. Il faut alors s'assurer que les nouvelles normes n'entraînent pas de discrimination entre hommes et femmes. Même si les normes de classification demeurent une prérogative de la direction et ne sont pas elles‑mêmes visées par la négociation collective, les éventuelles structures salariales doivent être négociées. Dans les faits, revoir une norme de classification suppose donc un dialogue étroit avec le syndicat concerné tout au long du processus.

Des discussions intensives avec l'Association professionnelle des agents du service extérieur (APASE) et les principaux ministères employeurs au sujet de la norme Service extérieur (FS) ont donné lieu à une nouvelle norme de classification et à une structure à quatre niveaux. Un projet de norme a été élaboré pour le nouveau groupe Services frontaliers (FB) créé lors de la mise sur pied de l'Agence des services frontaliers du Canada, dont les effectifs provenaient principalement de l'Agence des douanes et du revenu du Canada. De nouvelles normes sont en cours d'élaboration pour les groupes Économique et services de sciences sociales (EC), Droit (LA), Systèmes d'ordinateurs (CS), les trois groupes Réparation des navires (SR) et le groupe Services des programmes et de l'administration (PA). De plus, certains points épineux touchant, par exemple, à la classification des agents des pêches, ont été réglés dans le contexte des normes existantes.

Dans l'ensemble, ce travail est lent et difficile. Nous devons absolument poursuivre la modernisation de nos normes de classification. Toutefois, le travail de modernisation de la structure des groupes professionnels décrit dans la section précédente devrait logiquement avoir préséance. Les priorités à court terme pour la réforme de la classification devraient donc viser les groupes qui ne changeront probablement pas dans le cadre de la restructuration des groupes professionnels. Une fois la nouvelle structure en place, il faudra déterminer la meilleure approche et les étapes à suivre pour moderniser les normes de classification connexes.

Cependant, peu importe le scénario, il faudra de nombreuses années pour mettre à jour les structures de groupes professionnels et les normes de classification. Il convient donc de se demander ce qu'il y a lieu de faire dans l'intervalle. Dans ce contexte, nous devons remettre en question le principe fondamental de ce que nous pourrions appeler l'approche traditionnelle en matière de classification. Celle-ci prévoit l'attribution, en fonction d'une norme complexe, de nombres précis de points pour des degrés particuliers de certains facteurs considérés importants dans l'évaluation d'un poste. Ces points sont additionnés, puis le poste est assigné au niveau de classification correspondant au nombre total de points. Ce processus suppose une précision quasi scientifique. On semble aussi supposer que ce qui est demandé au titulaire du poste est stable et bien défini. Toutefois, la classification n'est vraiment, en définitive, qu'un jugement global visant à déterminer si, à un moment donné, un poste particulier a une importance plus ou moins grande que certains postes-repères dont la classification est bien établie.

Tel que décrit au chapitre 10, dans un monde où les demandes changent rapidement, le système de classification que nous connaissons est de plus en plus anachronique. Le travail qui consiste à rédiger de longues descriptions de travail pour accumuler des points par rapport à une norme de classification souvent désuète, à discuter des menus détails de divers éléments et à en arriver à une conclusion semble de plus en plus mal orienté, en cette période où les organisations sont appelées à se former et à se transformer en fonction de priorités opérationnelles qui fluctuent.

Nous devons donc trouver une façon plus simple d'aborder la classification et son administration. Il faut aussi que les résultats puissent résister à un examen approfondi. Parmi les tactiques et les outils qui nous aideraient à naviguer entre la simplicité et la responsabilisation, nous pourrions

  • réduire la longueur et la complexité des descriptions de travail,
  • utiliser fréquemment des descriptions de travail génériques,
  • mettre à jour les postes-repères clés,
  • nous servir davantage de justifications qui établissent des liens entre la classification d'un poste nouveau ou révisé et celle de postes-repères et insister moins sur l'évaluation détaillée de différents éléments.

Rien ne justifie que l'on continue de rédiger des descriptions de travail de 20 pages ou plus. De tels « romans » sont habituellement remplis de verbiage visant à convaincre ceux qui déterminent la classification que le poste est vraiment important. En fait, quelques mots suffisent normalement à décrire des postes réellement importants. Les longues descriptions sont donc un indice convaincant d'une présentation exagérée. Il devrait être obligatoire de limiter la longueur des descriptions à cinq pages, par exemple.

Les distinctions entre postes semblables deviennent de moins en moins importantes du point de vue de l'évaluation de la valeur relative. Comme les fonctions changent souvent selon les priorités ministérielles, un catalogage minutieux risque de devenir rapidement désuet. Utiliser des descriptions génériques pour des postes semblables pourrait contribuer largement à simplifier non seulement la classification, mais aussi la dotation. Certaines organisations ont adopté cette approche avec beaucoup de succès. Par exemple, Statistique Canada a environ 200 descriptions de travail pour plus de 5 000 employés.

Une approche plus radicale dont on discute souvent est la nomination à un niveau déterminé. Cette expression désigne un système dans le cadre duquel les employés seraient classifiés en fonction de leurs compétences, de leurs connaissances et de leur rendement. Une telle philosophie s'applique déjà en fait à certains groupes de recherche scientifique, où l'avancement repose sur une évaluation minutieuse du mérite scientifique de l'employé. Elle joue aussi un rôle dans des programmes de perfectionnement et de formation, notamment pour les économistes et les stagiaires en gestion, où il faut répondre à des critères précis pour passer à un certain niveau. Il serait souhaitable de mettre plus activement à l'essai l'application de cette approche à d'autres groupes, en particulier ceux où les compétences, les connaissances et le rendement individuel peuvent être évalués de façon objective. Toutefois, il ne faudrait pas tenter de mettre en œuvre systématiquement un programme de nomination à un niveau déterminé, étant donné que les exemples antérieurs de recours à des solutions générales pour régler des problèmes de classification dans la fonction publique incitent à une grande prudence. Néanmoins, les descriptions de travail génériques représentent un juste milieu intéressant et raisonnable entre une classification fondée sur les exigences du poste et une classification reposant sur le mérite de l'employé.

Un investissement efficace pour rendre les normes de classification plus utilisables en attendant leur modernisation serait de mettre à jour les postes-repères clés. Il s'agirait normalement des postes les plus communs ou les plus typiques d'un groupe professionnel. Lorsque les postes-repères sont décrits avec soin et que la justification du niveau de classification est clairement formulée, la comparaison avec d'autres postes devient assez facile. C'est dans ce contexte que les justifications de la classification pourraient raisonnablement être axées sur une évaluation globale par rapport à un poste-repère, plutôt que d'être détaillées élément par élément.

En suivant ce qu'on pourrait appeler une approche pragmatique pour la gestion de la classification alors que se déroule le long travail de modernisation des normes de classification, il est essentiel de veiller à réduire au minimum le sexisme. Pour y arriver à court terme, nous devons nous assurer que la façon dont nous appliquons les normes non encore modernisées permet d'éviter autant que possible le sexisme. Nos normes actuelles ne sont pas manifestement sexistes, le sexisme prenant plutôt une forme subtile et découlant d'attentes conscientes ou profondément enracinées quant à l'importance relative du travail traditionnellement associé aux hommes et aux femmes. Au cours des prochaines années, pendant que se déroulera le processus de modernisation des normes de classification en fonction de la nouvelle structure de groupes professionnels, l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique devrait fournir une formation et des outils non techniques pour aider notamment les gestionnaires à réduire au minimum le sexisme. Plus loin dans ce chapitre, nous donnons des conseils pratiques au sujet du travail qu'il y a lieu d'entreprendre pour repérer et régler les cas où il pourrait y avoir des écarts salariaux entre des groupes composés surtout d'hommes ou de femmes, écarts qui ne peuvent être attribuées à des facteurs autres que la discrimination.

En résumé, nous formulons les recommandations suivantes au sujet de la réforme de la classification :

Recommandation 11

11.1 Parallèlement à la conception d'une nouvelle structure de groupes professionnels, le Conseil du Trésor[181] devrait déterminer, en consultation avec les syndicats de la fonction publique, l'approche et les étapes les plus appropriées pour élaborer des normes de classification modernes qui tiennent compte des réalités actuelles du travail dans la fonction publique et qui réduisent au minimum le sexisme.

11.2 Dans l'intervalle, l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique devrait s'employer à aider les ministères à simplifier la gestion de la classification en donnant des instructions pour que les descriptions de travail ne dépassent pas cinq pages, en encourageant le recours à des descriptions de travail génériques, en mettant à jour les postes-repères les plus appropriés pour les groupes les plus importants et en donnant des conseils sur la façon d'utiliser des justifications globales pour classifier des postes en les comparant à des postes-repères.

11.3 Il faudrait envisager d'utiliser davantage la nomination à un niveau déterminé pour les employés de groupes et les situations où les compétences, les connaissances et le rendement peuvent être évalués objectivement en fonction de normes biens définies.

11.4 Dans la mesure du possible, l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada devrait, en consultation avec les syndicats de la fonction publique concernés, procéder d'abord à la mise à jour des groupes professionnels prioritaires qui ne subiront probablement pas de transformation par suite de la réforme de la structure des groupes professionnels proposée dans la recommandation 10.

11.5 Une fois que le Conseil du Trésor aura déterminé la structure des groupes professionnels pour le noyau de la fonction publique, l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique devrait publier son échéancier prévu pour la modernisation des normes de classification correspondant à la structure de groupes professionnels recommandée et rendre compte chaque année au Parlement des progrès accomplis dans le Rapport sur les plans et les priorités de l'organisme.

Aspects de la politique et de la gestion générales des salaires

Plusieurs questions générales concernant la politique de rémunération ne seront réglées ni par la refonte de la structure des groupes professionnels ni par la modernisation des normes et des pratiques de classification, notamment les suivantes :

  • la rémunération au rendement,
  • la rémunération fondée sur le savoir,
  • la rémunération spéciale pour un savoir-faire exceptionnel,
  • les indemnités de recrutement et de maintien en poste (dites « provisoires »),
  • la structure des échelles de rémunération,
  • la rémunération régionale.

Nous traitons brièvement de chacune de ces questions dans les sections suivantes.

Rémunération au rendement

L'amélioration de la productivité est une préoccupation de toutes les organisations modernes, privées ou publiques. L'idée de relier une partie de la rémunération au rendement est donc à la fois logique et intéressante sous l'angle de la gestion. Dans la fonction publique fédérale du Canada, la pratique dominante a toujours été d'éviter d'établir un lien explicite entre le rendement et la rémunération. Il est toutefois évident que certains employés travaillent plus fort et mieux que d'autres et qu'on pourrait raisonnablement juger qu'ils méritent un salaire plus élevé. La question de déterminer s'il convient de relier la rémunération au rendement dans la fonction publique et comment le faire est d'autant plus pertinente que des pressions croissantes s'exercent sur la fonction publique fédérale pour qu'elle innove, fasse preuve de souplesse, absorbe des charges de travail croissantes et serve les Canadiens avec distinction.

Beaucoup d'employés et la plupart des syndicats s'opposent cependant à l'adoption de toute forme de rémunération au rendement. Ils prétendent notamment que ce genre de rémunération crée des tensions malsaines en milieu de travail parce qu'une concurrence destructive peut voir le jour et que certains employés peuvent être tentés de s'attribuer le crédit pour les résultats de tout un groupe. Ce qui est plus important encore est qu'ils ne croient pas que les gestionnaires de la fonction publique puissent faire preuve de suffisamment d'objectivité et d'équité pour évaluer le rendement et accorder une rémunération au rendement de manière impartiale.

Le gouvernement américain a décidé de profiter de la création de l'énorme département de la Sécurité intérieure pour modifier sa philosophie et ses pratiques de rémunération. Le nouveau département est chargé de mettre en œuvre un programme de rémunération au rendement qui remplacera l'actuel General Schedule par des échelles de rémunération axées sur le marché, à l'intérieur desquelles la progression de la rémunération des employés reposera uniquement du rendement ou de l'acquisition de compétences, et non de la longévité[182]. Cette initiative donne suite aux recommandations présentées en janvier 2003 par la commission nationale bipartisane sur la fonction publique, présidée par Paul Volcker, dans la foulée des événements du 11 septembre 2001. Le nouveau système doit être entièrement mis en application au département de la Sécurité intérieure d'ici 2009. Il devrait être appliqué ensuite à presque toute la fonction publique des États‑Unis.

En évaluant la version finale du DHS Human Capital Regulations, le General Accounting Office (GAO) a affirmé que même s'il soutenait fermement la réforme du capital humain au niveau fédéral, la façon de procéder, le moment choisi et ce sur quoi elle serait fondée pourraient faire toute la différence entre la réussite et l'échec[183]. Le GAO a insisté tout particulièrement sur la nécessité d'un leadership clair pour l'initiative, de communications efficaces et de modalités rigoureuses et crédibles.

On satisfera peut-être à ces critères de réussite dans l'atmosphère de crise et de réforme qui continue d'imprégner le Washington officiel dans le contexte de la guerre contre la terreur. Cependant, cela est loin d'être garanti. Dans le système actuel du General Schedule, le rythme de progression le long des dix échelons d'un niveau de rémunération donné devait reposer sur le rendement. Dans les faits, toutefois, la plupart des employés montent d'un échelon par année de service, peu importe leur rendement. L'idéal de voir les gestionnaires de la fonction publique américaine définir clairement les niveaux de rendement et d'assumer la responsabilité de porter un jugement sur le rendement d'un employé et de l'expliquer ne s'est donc pas réalisé jusqu'à maintenant.

L'expérience vécue dans la fonction publique canadienne pour ce qui est de définir et d'évaluer le rendement n'est pas encourageante. Dans le Volume Deux du présent rapport, nous présentons le cas du groupe Traduction (TR), qui reçoit une rémunération supplémentaire fondée sur une productivité exceptionnelle, cas qui serait apparemment un exemple de réussite. Toutefois, comme aux États-Unis, l'idée originale selon laquelle les augmentations annuelles dans l'échelle de rémunération d'un niveau de classification particulier devraient reposer sur un rendement satisfaisant n'a essentiellement jamais été appliquée. Même le nombre de nouveaux employés renvoyés en cours de stage est minime, totalisant moins de 100 annuellement depuis 1996-1997[184]. (Trente-six employés nommés pour une période indéterminée ont été refusés à l'étape de la probation en 2002-2003, ce qui représente 0,7 % de toutes les personnes recrutées à l'extérieur pour une période indéterminée dans un poste à temps plein au cours de l'exercice.)

Dans la catégorie de la Direction, les résultats sont encore plus mitigés. Depuis plusieurs années, les membres du groupe Direction (EX) sont admissibles à une rémunération conditionnelle pouvant atteindre 10 % (15 % aux deux derniers paliers) de leur salaire selon leur rendement. Comme nous l'avons indiqué dans le Volume Deux, au niveau EX 1, le versement d'une tranche conditionnelle pouvant aller jusqu'à 7 % de la rémunération possible amène à peine un cadre de direction au niveau de rémunération totale équivalent à celui accordé dans le secteur privé pour le même degré de responsabilité. Toutefois, dans la pratique, les sous‑ministres trouvent difficile d'établir une différence entre les niveaux de rendement, notamment pour les niveaux inférieurs à entièrement satisfaisant. De telles évaluations sont perçues comme étant personnellement humiliantes plutôt que comme un message légitime sur le rendement au cours d'une année donnée. Depuis deux ou trois ans, étant donné la pression exercée par le Comité Stephenson[185] et l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique, les gestionnaires ont appliqué les critères avec un peu plus de rigueur au moment de produire des évaluations.

Une autre complication concernant la rémunération conditionnelle des cadres de direction est que les montants versés sont peu élevés par rapport au salaire de base. Ces cadres peuvent obtenir au plus 10 % (ou 15 % pour les sous‑ministres adjoints). En revanche, la rémunération au rendement accordée dans le secteur privé peut représenter plusieurs mois de salaire, voire davantage. S'ajoute à cela le fait que les cadres de direction du secteur privé ont souvent accès à des incitatifs à long terme, normalement sous forme d'un droit d'acquérir à un prix fixe des actions de l'entreprise à certains moments. Cet aspect de la rémunération est explicitement exclu lorsqu'on compare la rémunération des cadres de direction de la fonction publique fédérale à celle offerte dans le secteur privé. Cela est normal étant donné que rien n'équivaut manifestement aux prix des actions dans le secteur public. Le programme de rémunération conditionnelle de la fonction publique fédérale pourrait donc être plus symbolique que substantiel pour les gestionnaires aux échelons supérieurs de la fonction publique. Cette rémunération est certes appréciée par les cadres de direction car elle s'ajoute à des salaires généralement inférieurs à ceux de leurs homologues du secteur privé, mais les montants disponibles ne sont pas assez élevés et le programme actuel n'est pas administré avec suffisamment de rigueur pour être considéré comme un élément de motivation important.

Globalement, il n'y a pas de culture bien enracinée de définition des attentes en matière de rendement et d'évaluation en conséquence des employés dans le secteur public fédéral. Renforcer cette culture serait un point de départ. On pourrait penser que l'instauration d'un régime de rémunération au rendement favoriserait l'adoption de pratiques plus rigoureuses concernant l'établissement des objectifs et des normes de rendement et l'évaluation en fonction de ces critères. L'expérience nous a cependant démontré que nous ne pouvons pas compter sur cela.

Il serait également instructif de mettre à l'essai des régimes de rémunération au rendement, en particulier au sein de groupes ou d'organisations où une culture raisonnable de gestion du rendement existerait déjà et où cette perspective serait bien accueillie par les employés et, le cas échéant, le syndicat. Les groupes auxquels cela conviendrait le mieux seraient probablement les groupes spécialisés ou professionnels dont les normes professionnelles sont bien définies par des organes externes et bien comprises par les gens du domaine.

Si nous nous tournons vers l'avenir, deux principes ressortent d'un raisonnement éclairé relativement à la gestion :

  1. Nous devrions nous concentrer d'abord sur notre gestion du rendement, afin d'avoir la capacité de lier les salaires au rendement de manière crédible.
  2. Nous devrions faire l'essai, de manière sélective, d'une plus grande utilisation de la rémunération au rendement dans le secteur public fédéral.

Rémunération fondée sur le savoir

Dans ce domaine également, il pourrait être logique que la rémunération du secteur public fédéral reconnaisse le savoir. Après tout, nous insistons continuellement sur l'importance du travail lié au savoir, qui joue un rôle de plus en plus grand dans la fonction publique. Cette idée est sous-entendue dans les normes de sélection employées pour la dotation de divers postes spécialisés pouvant exiger des compétences professionnelles ou des études particulières ou une expérience équivalente. Pourtant, on a peu recours dans le secteur public fédéral à une rémunération supplémentaire explicite pour encourager ou récompenser l'acquisition ou la possession d'un savoir particulier.

La prime au bilinguisme est une exception malheureuse. Il s'agit de l'indemnité annuelle de 800 $ versée aux employés qui ne sont pas des cadres et qui satisfont aux normes de bilinguisme associées à leur poste. La prime est de 800 $ depuis 1979. Cette prime se voulait à l'origine une réponse pragmatique aux protestations d'employés francophones qui estimaient mériter une récompense pour assumer une grande partie de la responsabilité de servir le public en français ou en anglais. Même si sa valeur réelle a diminué au fil des ans du fait de l'inflation, son lien avec le renforcement de la capacité bilingue est mince. Les employés peuvent être admissibles à la prime, mais ne pas nécessairement utiliser leur deuxième langue officielle en réalité. Cette prime est devenue en fait intouchable, même si sa justification est précaire.

La langue est un domaine où il pourrait être particulièrement logique d'accorder une rémunération fondée sur le savoir. Certains employés entrent dans la fonction publique alors qu'ils sont déjà bilingues ou apprennent l'autre langue officielle essentiellement par leurs propres moyens, ayant très peu ou aucunement recours à la formation officielle payée par l'État. Ces employés permettent au Trésor public d'économiser des milliers de dollars. Accorder une prime ponctuelle ou continue à ces employés pourrait encourager les gens à prendre personnellement l'initiative d'apprendre une des langues officielles. De façon plus générale, la connaissance d'une troisième langue pourrait être extrêmement utile pour servir notre population de plus en plus multiculturelle, tant au Canada que dans nos missions à l'étranger. Lorsqu'un tel savoir représente vraiment un atout pour un poste donné, il serait logique d'accorder une indemnité en vue d'attirer des personnes ayant les capacités appropriées et de les maintenir en poste.

Une autre application possiblement fructueuse de la rémunération fondée sur le savoir concerne la mise en œuvre d'un système d'accréditation des compétences en gestion à divers niveaux. Les cours d'importance capitale pourraient être reconnus grâce à une progression accélérée le long d'une échelle salariale ou du versement d'une indemnité ponctuelle ou continue[186]. Une approche semblable pourrait être adoptée pour encourager des groupes spécialisés à se tenir au courant des éléments nouveaux dans leur domaine ou à acquérir des compétences supérieures importantes dans leur milieu de travail.

Des difficultés sont évidemment associées à l'application de la rémunération fondée sur le savoir. Par exemple, la direction doit s'assurer que les compétences supplémentaires sont en fait pertinentes. Il doit y avoir des moyens fiables de vérifier si les connaissances ont été acquises. Il faudrait en outre éviter l'approche figée qui caractérise l'actuelle prime au bilinguisme en adaptant tout système aux changements qui surviennent relativement au savoir essentiel et que l'on pourrait encourager utilement par l'intermédiaire du régime salarial.

Rémunération spéciale pour un savoir-faire exceptionnel

Ce sujet est un prolongement du thème de la rémunération fondée sur le savoir. La fonction publique a de plus en plus besoin d'un degré élevé de savoir-faire dans des disciplines ou des domaines particuliers. Cette tendance se manifeste tant au sein de la direction que dans les rangs des analystes et professionnels de haut niveau dont le rôle de gestion est minime voire inexistant.

Au niveau de la direction, nous avons besoin depuis quelques années des meilleurs talents, entre autres, dans les domaines de la gestion de l'information, des technologies et des finances, ainsi que dans d'autres spécialités. En raison de notre politique consistant à égaler la rémunération totale offerte aux cadres de direction dans le secteur privé seulement au niveau EX 1, l'écart de rémunération s'élargit de plus en plus aux échelons supérieurs de la direction. Nous parlons ici de rémunération totale et non simplement des salaires. Récemment, il s'est révélé impossible dans certains cas d'attirer des gens ayant l'expérience nécessaire avec la rémunération offerte.

Une approche consiste à recruter temporairement les meilleurs talents par l'intermédiaire d'Échanges Canada. Essentiellement, cela suppose une affectation qui ne dépasse normalement pas trois ans et dans le cadre de laquelle un employé d'une autre organisation vient travailler au gouvernement fédéral mais tout en étant rémunéré selon les règles de son organisation d'attache, que le gouvernement fédéral rembourse. Le participant doit retourner à son organisation à la fin de l'affectation. De cette façon, des cadres de direction exceptionnels servant au gouvernement peuvent toucher un salaire beaucoup plus élevé que celui des fonctionnaires ordinaires occupant des postes de niveau équivalent[187]. En 2005, le gouvernement fédéral a lancé le Programme de collaborateurs émérites du Premier ministre afin d'attirer de nouveau l'attention sur les échanges. Ce programme se situe dans le prolongement d'une précédente initiative non officielle, appelée programme de préparation, qui a aidé plusieurs hauts fonctionnaires et cadres du secteur privé à obtenir des affectations temporaires dans l'un et l'autre milieu.

Les programmes d'échanges sont assurément utiles pour recruter temporairement des talents exceptionnels ou très spécialisés, mais nous pouvons nous attendre à ce que, dans certains cas, le gouvernement fédéral veuille recruter de telles personnes de façon plus permanente. Par exemple, il pourrait avoir besoin de quelqu'un pendant beaucoup plus longtemps que la période limite d'affectation normale de trois ans. Dans d'autres cas, les programmes d'échanges pourraient ne pas convenir si la personne que l'on désire recruter travaille à son compte et n'a pas vraiment d'employeur chez qui retourner. Il se pourrait aussi que le détachement d'un spécialiste d'une organisation externe crée un conflit d'intérêts réel ou apparent.

Il serait donc logique d'avoir recours, mais de manière judicieuse et avec parcimonie, au pouvoir qu'a actuellement le Conseil du Trésor d'autoriser l'attribution à un cadre de direction d'une rémunération supérieure à la rémunération maximale prévue pour le poste auquel il est nommé[188]. Il faudrait que cette pratique soit rigoureusement contrôlée en raison des pressions qui s'exerceraient inévitablement pour que l'on ait recours de plus en plus souvent à de telles exceptions. L'idéal serait que le Conseil du Trésor approuve officiellement les cas particuliers sur recommandation conjointe du sous-ministre du ministère parrain et du président de l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique pour les postes de cadres de direction, ou sur recommandation du greffier pour les postes de sous-ministres ou les autres personnes nommées par le gouverneur en conseil. La politique permettrait en fait à la fonction publique d'éliminer ou, du moins, de réduire l'écart entre la rémunération de la fonction publique et celle que touche déjà un candidat de choix.

L'expérience a démontré qu'un tel assouplissement pourrait mener à des abus. On peut facilement imaginer diverses façons de ne pas respecter l'intention du changement proposé à la politique. C'est pourquoi toute exception doit absolument être bien documentée, être recommandée personnellement par les fonctionnaires du plus haut niveau et être approuvée explicitement par les ministres du Conseil du Trésor. Une telle pratique ferait bien sûr l'objet d'une vérification par le vérificateur général.

Une question analogue a trait à la juxtaposition de la rémunération des spécialistes de haut niveau et des cadres de direction de la fonction publique. Le salaire de certains groupes non formés de cadres comme le groupe Économique, sociologie et statistique (ES) chevauche largement, au niveau supérieur (ES 7), celui du groupe Direction (EX). La figure 1053 illustre la correspondance entre les salaires aux niveaux supérieurs de plusieurs groupes professionnels et ceux des EX 1 et EX 2 en mars 2003.

D'un point de vue hiérarchique traditionnel, rémunérer des personnes qui ne sont pas des cadres de direction autant ou plus que ces derniers est offensant. Toutefois, dans un monde où les connaissances et le savoir-faire sont de plus en plus importants, il pourrait être logique de payer des spécialistes autant ou plus que des cadres de direction. Ces dernières années, le nombre de postes de niveau EX s'est accru plus rapidement que la taille de l'ensemble de la fonction publique. Pour en déterminer les raisons, il faudrait réaliser une autre étude. En revanche, un des facteurs contribuant à cela est probablement la nécessité de payer plus pour des travailleurs du savoir très compétents, même si le contenu réel du poste qui représente des fonctions de direction est modeste. Faire en sorte qu'il soit plus facile de récompenser les spécialistes sans en faire des cadres de direction pourrait s'avérer avantageux. En fait, imposer aux meilleurs spécialistes des tâches de gestion réduit à la fois l'efficacité de la gestion et l'apport d'un savoir‑faire important.

Nous ne pouvons même pas trouver au moins une raison qui justifierait de manière explicite les chevauchements actuels, c'est-à-dire qui expliquerait pour quels groupes il y a chevauchement ou quelle est l'ampleur du chevauchement. Le temps est venu d'examiner systématiquement la question du chevauchement, ce qui devrait se faire probablement en même temps que la refonte proposée plus loin dans la présente section concernant l'étendue de la comparabilité externe de la rémunération des cadres de direction. Il faudrait aussi envisager la possibilité d'autoriser des cas individuels de rémunération spéciale pour un savoir-faire exceptionnel aux niveaux inférieurs à celui de la direction lorsque les programmes d'échanges peuvent ne pas convenir. Les mêmes contrôles rigoureux que ceux proposés ci‑dessus pour les cadres de direction s'appliqueraient dans ces cas.

Figure 1053
Illustration du chevauchement des échelles salariales entre le groupe EX et les groupes professionnels, mars 2003

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Illustration du chevauchement des échelles salariales entre le groupe EX et les groupes professionnels, mars 2003

Indemnités de recrutement et de maintien en poste

Comme nous l'avons décrit principalement dans le chapitre 4 du présent volume, des indemnités de recrutement et de maintien en poste – provisoires – ont été accordées ces dernières années à plusieurs groupes de négociation. Ces indemnités ont constitué une rémunération supplémentaire, temporaire en théorie, à des groupes pour lesquels il y avait une concurrence inhabituellement vive sur le marché du travail externe. Le recours à des indemnités temporaires a permis de régler au moins deux questions du point de vue de l'employeur. Premièrement, les marchés du travail en effervescence apparaissent et disparaissent selon la croissance et la décroissance de l'économie et, deuxièmement, de telles indemnités sont reconnues comme une exception au principe du salaire égal pour un travail de valeur égale.

Cependant, comme pour de nombreuses politiques temporaires, des pressions considérables se sont exercées pour qu'on rende permanentes les indemnités de recrutement et de maintien en poste en les intégrant aux niveaux de rémunération de base. Dans les cas où le niveau de rémunération d'un groupe particulier progresse de façon soutenue par rapport à d'autres groupes sur le marché du travail en général, il serait logique d'intégrer les indemnités provisoires à la paye régulière. Toutefois, dans un cas comme celui du groupe Systèmes d'ordinateurs (CS), où la surchauffe de la fin des années 1990 a été suivie de mises à pied et de réductions salariales dans le secteur privé au début du présent siècle, le gouvernement fédéral devrait en principe réduire ou supprimer l'indemnité provisoire. Le gouvernement devrait à tout le moins limiter les augmentations économiques pour le groupe jusqu'à ce qu'il y ait parité raisonnable.

Dans la pratique, cependant, le système de négociation collective du gouvernement fédéral rend presque impossibles de telles réductions ou limites. Les employés de ce groupe de négociation, dont l'emploi est sûr en grande partie et qui sont chargés de fonctions aussi essentielles que le traitement des chèques fédéraux de prestations sociales, n'ont aucun intérêt à accepter des rajustements salariaux inférieurs au taux courant des conventions collectives. À moins que le gouvernement ne soit prêt à recourir à une loi pour imposer une convention collective prévoyant une indemnité inférieure ou à accepter qu'il y ait une grève dans un domaine névralgique pour la population en attendant que le syndicat soit disposé à conclure une entente sur cette base, l'indemnité provisoire demeurera probablement en place pour une période indéfinie.

Par conséquent, il faut faire très attention avant d'accepter d'accorder une indemnité provisoire. Vu la culture et les pratiques qui ont cours actuellement dans la fonction publique fédérale en matière de négociation collective, il est presque impossible de mettre fin à de telles indemnités une fois qu'on les a accordées. Une meilleure approche consisterait à suivre de plus près le secteur privé en se fondant sur une évaluation rigoureuse de la rémunération sur le marché du travail canadien en général. Lorsqu'il y a des hausses rapides dans des marchés en effervescence, il conviendrait peut-être plutôt d'avoir recours à des primes ponctuelles pour recruter ou maintenir en poste des employés essentiels jusqu'à ce que l'on puisse déterminer clairement si les hausses relatives de salaires sont elles-mêmes temporaires ou structurelles.

Structure des échelles salariales

La structure des échelles salariales est un aspect relativement obscur, mais toujours important de la gestion de la rémunération. Idéalement, la structure salariale d'un groupe professionnel prévoira une progression qui incite à passer au niveau suivant, sans que la différence entre les niveaux ne soit trop grande. La figure 1054 illustre ce à quoi nous pourrions nous attendre. Dans cette illustration, il y a une différence raisonnable entre le taux de rémunération maximal des niveaux de classification successifs, normalement au moins 10 %. Deuxièmement, nous constatons que l'étendue des fourchettes salariales est suffisamment importante pour reconnaître la croissance et le développement. Il convient de noter que les niveaux inférieurs ont des fourchettes relativement plus étroites, tandis que les niveaux supérieurs prévoient plus de place pour progresser à l'intérieur d'un niveau de classification donné. Troisièmement, il faut noter aussi que les fourchettes salariales se chevauchent légèrement, ce qui permet de passer facilement d'un niveau à un autre à la faveur d'une promotion, sans qu'il en coûte trop cher.

Figure 1054
Illustration d'une structure salariale rationnelle

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Illustration d'une structure salariale rationnelle

Les échelles salariales de plusieurs groupes professionnels de la fonction publique fédérale sont assez différentes de ce qui pourrait être considéré comme normal. Par exemple, au sein du groupe Programmes et administration (PM), il y a d'importants écarts entre les fourchettes salariales des PM 4 et PM 5, et des PM 5 et PM 6. Un type opposé d'anomalie existe au sein du sous‑groupe Infirmière (santé communautaire). Le salaire maximal du niveau NUCHN 02 n'est que légèrement inférieur au salaire minimal du niveau NUCHN 06, ce qui laisse penser qu'il y a trop de niveaux. Le groupe Bibliothéconomie illustre les deux types de problèmes : un chevauchement considérable entre les niveaux LS 3 et LS 4, et des écarts entre les niveaux LS 2 et LS 3, et LS 4 et LS 5. Ces structures d'échelles salariales inhabituelles sont illustrées dans les figures1055a, 1055b et 1055c.

Il ne semble pas y avoir de politique ou de raison justifiant de telles structures d'échelles salariales sur le plan de la gestion. Elles sont le résultat des nombreuses rondes de négociations collectives au fil des ans. Dans la pratique, la plupart des conventions collectives ne font que hausser les structures existantes d'un certain pourcentage. Il se pourrait que, dans certains cas, les structures actuelles remontent à l'adoption de la négociation collective en 1967, lorsque les groupes professionnels encore utilisés aujourd'hui ont été créés. Lors de leur création, les groupes ministériels qui existaient déjà ont été fusionnés. Ces structures initiales peuvent avoir été rajustées de manière à minimiser le blocage de postes, c'est-à-dire les cas où le salaire d'une personne plafonne jusqu'à ce que de nouvelles augmentations économiques négociées amènent le salaire du groupe au niveau salarial atteint par la personne[189].

Figure 1055a
Illustration des structures salariales de certains groupes professionnels de la fonction publique fédérale

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Illustration des structures salariales de certains groupes professionnels de la fonction publique fédérale

Figure 1055b
Illustration des structures salariales de certains groupes professionnels de la fonction publique fédérale

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Illustration des structures salariales de certains groupes professionnels de la fonction publique fédérale

On pourrait affirmer que les structures salariales ne sont pas importantes. Mais, elles le sont. Les écarts entre les niveaux ont une influence sur la façon de fonctionner tant des employés que des gestionnaires. Dans le cas des employés, des écarts insuffisants entre le maximum salarial de deux niveaux peuvent faire en sorte qu'ils hésitent à accepter davantage de responsabilités. En revanche, si les écarts sont excessifs, les gestionnaires pourraient être peu enclins à faire passer les employés au prochain niveau et pourraient préférer recruter des personnes dont le salaire se rapproche davantage du nouveau niveau. Ce genre de réaction de la part des gestionnaires peut inciter des employés à changer de groupe professionnel afin d'obtenir de l'avancement. Un tel changement n'est pas mauvais en soi et pourrait même être souhaitable. Il devrait cependant découler d'une approche raisonnée de l'avancement professionnel, plutôt que d'un désir de contourner une situation qui ne peut s'expliquer que par l'accumulation d'anciennes décisions.

Une autre préoccupation concernant les structures d'échelles salariales irrationnelles est leur lien avec la définition de promotion. Actuellement, un changement de groupe n'est pas une promotion à moins que le salaire maximal du nouveau groupe et niveau ne soit au moins 4 % plus élevé que celui associé au poste actuel de l'employé. Les échelles salariales mal structurées rendent l'application de cette politique plus arbitraire que souhaitable.

Restructurer les échelles salariales de la fonction publique fédérale pour qu'elles ressemblent davantage à la norme illustrée dans la figure 1054 sera difficile. Les syndicats n'accepteront de tels changements que s'ils se traduisent tous par des augmentations. Une telle approche se révélerait probablement coûteuse. Ces réalités expliquent sans doute pourquoi peu de mesures ont été prises pour supprimer les anomalies existantes. À moyen terme, il est probablement sage d'hésiter à aborder cette question. Toutefois, ne pas avoir adopté de structure d'échelles salariales logique après plusieurs décennies serait inquiétant. Cela supposerait que le système de rémunération est à ce point rigide qu'il est impossible d'apporter des changements souhaitables. Il conviendrait de s'attaquer à ce problème dans le cadre de la modernisation des normes de classification que nous avons proposée dans une section précédente du présent chapitre.

Figure 1055c
Illustration des structures salariales de certains groupes professionnels de la fonction publique fédérale

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Illustration des structures salariales de certains groupes professionnels de la fonction publique fédérale

Paye régionale

Depuis longtemps, les divergences d'opinions sur l'opportunité de prendre en considération les différences régionales dans les salaires externes lors de l'établissement des niveaux de rémunération dans la fonction publique fédérale soulèvent la controverse. Certains font valoir que le gouvernement fédéral doit varier ses taux de rémunération selon les régions pour que le principe de la comparabilité avec le marché de travail dans le secteur privé soit respecté, sans quoi, selon eux, le marché du travail local s'en trouve faussé car les employeurs du secteur privé ou les autres employeurs non fédéraux se voient forcés d'offrir des salaires plus élevés que nécessaire ou d'accepter une main‑d'œuvre moins qualifiée. Selon la théorie économique, offrir des salaires plus élevés que nécessaire entraîne une baisse dans la création et le maintien des emplois.

Les arguments contraires sont tout aussi vigoureux. Premièrement, les opposants à la paye régionale soutiennent que les emplois similaires chez un employeur national devraient être rémunérés au même salaire, peu importe où ils se trouvent. Selon eux, rémunérer des emplois à un niveau inférieur en raison de la région où ils se trouvent est abaissant et injuste pour les employés concernés. Cette situation est également indésirable pour les syndicats, car elle entraîne une dissension entre leurs membres. Deuxièmement, à titre d'employeur national, le gouvernement fédéral déplace ses employés assez fréquemment d'une région à l'autre, pour une période temporaire ou de façon permanente. Des politiques de paye régionale pourraient décourager des employés d'accepter des déplacements souhaitables sur le plan opérationnel.

En principe, la politique la plus sûre en matière de rémunération semble être celle sur laquelle le gouvernement fédéral s'est appuyé pendant des décennies, avant l'arrivée de la négociation collective en 1967. Il y avait à l'époque deux grandes catégories d'employés : ceux recrutés à l'échelle nationale et ceux recrutés à l'échelle locale. Le premier groupe touchait les mêmes salaires à l'échelle du pays, alors que le second touchait les salaires courants dans la région. Si l'on désirait embaucher les meilleurs vérificateurs au pays, on devait leur offrir le taux de salaire national. Cependant, pour embaucher un adjoint administratif, comme on se tournait normalement vers un bassin de candidats locaux, un taux salarial local était suffisant pour attirer des candidats qualifiés.

Le vrai problème d'un système de paye régionale n'est pas théorique, mais bien pratique, puisqu'il est difficile de l'appliquer de façon juste et crédible. Alors que les distinctions adoptées avant 1967 étaient convaincantes, leur mise en application l'était beaucoup moins. En fait, les employés embauchés sous la rubrique nationale s'acquittaient parfois de tâches similaires à celles effectuées par des employés embauchés au salaire courant. Parallèlement, le second groupe comprenait des hommes de métier et des travailleurs de la construction navale, mais aucun employé administratif dont l'embauche devrait également se faire à l'échelle locale.

La définition de zones géographiques significatives pour chacune des douzaines de professions, la collecte en temps opportun de données fiables sur le marché du travail local et le rajustement concomitant des taux salariaux serait une entreprise complexe et difficile. Une telle approche engendrait probablement des plaintes et des appels constants, notamment si les rajustements prenaient un retard quelconque par rapport à l'évolution du marché du travail. Historiquement, ce genre de gestion nuancée de distinctions imprécises n'a jamais été le point fort de la fonction publique fédérale.

La situation actuelle en matière de paye régionale dans la fonction publique ne peut plus durer. Quelques distinctions régionales ont survécu à l'opposition acharnée des syndicats de la fonction publique, mais la plupart ont peu de sens. Comme nous le mentionnons au chapitre 4, les rondes de négociations collectives successives ont fait passer à 3 en 2001 le nombre de zones pour les groupes de métiers, comparativement à 16 en 1989. Les trois zones sont tellement vastes et diversifiées qu'elles n'ont aucune utilité pour suivre de près les écarts salariaux du marché du travail local. À la suite de la ronde de négociation de 2004, les trois zones ont été maintenues. Cependant, cette entente est intervenue dans le contexte d'augmentations salariales relativement plus élevées pour les employés des groupes de métiers, car il était généralement évident qu'ils accusaient un retard par rapport à leurs homologues du secteur privé. On peut s'attendre à ce que le syndicat s'attaque aux zones restantes lors de la prochaine ronde de négociation.

Nous concluons donc que l'employeur fédéral devrait chercher à restaurer une politique de paye régionale rationnelle pour les groupes qui satisfont aux critères suivants :

  • Pratiquement toute l'embauche se fait à l'échelle locale; il n'est pas nécessaire de recruter à l'échelle nationale pour attirer un nombre suffisant de candidats qualifiés.
  • Il y a des différences significatives à l'échelle du pays en ce qui concerne les salaires versés pour des postes similaires.
  • Les données sur ces différences peuvent être recueillies de manière crédible et à un coût raisonnable.
  • La mobilité des employés fédéraux du groupe d'une région à une autre est négligeable.

Dans la conception d'une structure moderne de groupes négociateurs et professionnels pour le noyau de la fonction publique, on devrait également se demander s'il serait logique d'appliquer un système de paye régionale pour certains groupes particuliers, selon les critères susmentionnés[190].

Indemnités de vie chère

On confond parfois la question de la paye régionale et le phénomène connexe des différences dans le coût de la vie au pays. Par exemple, il est évident que le prix des maisons, du transport et du stationnement est plus élevé à Toronto, Vancouver, Calgary et Ottawa qu'en région. En fait, un taux salarial national fait en sorte que les employés fédéraux qui travaillent et habitent en région peuvent profiter d'un niveau de vie plus élevé que leurs collègues des grandes villes.

Il serait possible d'établir un taux salarial national et de l'ajuster ensuite grâce à une indemnité variant selon le coût de la vie dans chaque région par rapport à la moyenne nationale. Les Forces armées canadiennes disposent d'une indemnité de vie chère, instaurée en 2000‑2001. En février 2003, cette indemnité variait de 0 $ à Kingston à 1 138 $ par mois dans certains secteurs de Toronto. Le United States Civil Service prévoit également un élément de paye régionale (« locality pay ») dans les échelles salariales du General Schedule. Des montants additionnels sont prévus là où le salaire des employés non fédéraux est supérieur de plus de 5 % à celui des fonctionnaires. Des taux différents s'appliquent à 32 régions géographiques, dont une appelée « Rest of the U.S. » (reste des É.‑U). En 2003, ce rajustement salarial régional atteignait 21,08 % du salaire de base des employés fédéraux vivant à San Francisco, la région où le coût de la vie était le plus élevé aux États-Unis. Le rajustement moyen au titre de la paye régionale était d'environ 15 % du salaire de base[191].

La faisabilité de passer à un tel régime dans le secteur public fédéral dépendrait généralement de la façon dont serait établi le taux national. La région d'Ottawa‑Gatineau semble être présentement le marché du travail de référence pour la plupart des groupes. Cette situation est logique puisque la plupart des fonctionnaires travaillent dans la région de la capitale nationale (RCN). D'un autre côté, la fonction publique est si présente dans la RCN que le secteur privé n'a peut-être pas suffisamment d'influence sur le marché du travail de la RCN. L'industrie la plus dominante du secteur privé, celle de la haute technologie, offre des salaires relativement élevés, ce qui n'est pas représentatif du secteur privé canadien dans son ensemble.

Nous concluons donc que la question de l'écart lié au coût de la vie est importante mais non urgente pour le moment. En l'absence de pressions inflationnistes significatives, les employés ne sont pas constamment sensibilisés à ces écarts. Lorsque certains des dossiers plus urgents liés à la gestion de la paye et de la rémunération mentionnés dans ce chapitre auront été réglés, il sera logique d'étudier l'opportunité et la faisabilité d'instaurer un système salarial national avec des indemnités régionales fondées sur les écarts significatifs du coût de la vie.

Voici donc, en résumé, nos recommandations dans le secteur de la politique et de la gestion générale de la rémunération :

Recommandation 12

12.1 En ce qui a trait à la rémunération au rendement, nous devrions d'abord concentrer nos efforts sur le renforcement de notre culture et de notre capacité en matière de gestion du rendement, y compris l'acquisition de compétences reconnues dans la définition de normes et d'objectifs organisationnels, l'établissement d'objectifs individuels, l'évaluation du rendement, la rétroaction et la mise en œuvre des mesures nécessaires.

12.2 Les sous‑ministres devraient proposer au Conseil du Trésor de procéder à des expériences sélectives pour utiliser davantage la rémunération au rendement dans les secteurs où la culture et la capacité organisationnelles sont acceptables et crédibles aux yeux des gestionnaires et des employés.

12.3 Le Conseil du Trésor devrait travailler avec les ministères et les syndicats consentants pour mener un ou plusieurs projets pilotes bien définis afin d'évaluer l'utilité d'un système de primes à l'acquisition de connaissances dans des domaines comme les compétences linguistiques et les titres professionnels pour les groupes spécialisés.

12.4 L'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique devrait présenter à l'approbation du Conseil du Trésor des règles de base permettant à ce dernier d'autoriser un salaire maximal supérieur pour des cadres de direction ou des employés qui apportent une expertise exceptionnelle à la fonction publique lorsque les programmes d'échanges ne permettent pas d'avoir accès à l'expertise recherchée.

12.5 Dans le cadre de l'examen des salaires des cadres de direction proposé plus loin dans cette section, le chevauchement de la rémunération des spécialistes de haut niveau et de celle des cadres de direction devrait être examiné et rationalisé de sorte que l'expertise technique de pointe puisse être rémunérée de façon adéquate sans avoir recours aux classifications des cadres de direction pour des postes dont la tâche principale est la prestation de conseils et qui ne comportent que peu de tâches de gestion supérieure.

12.6 En général, les indemnités de recrutement et de maintien en poste (provisoires) devraient être évitées. S'il y a des preuves manifestes d'une hausse soutenue du niveau de salaire relatif sur le marché du travail externe pour un groupe donné, celle-ci devrait être ajoutée aux échelles salariales de la fonction publique. S'il y a des hausses salariales rapides sur un marché du travail externe surchauffé et que l'on ne sait pas s'il s'agit d'un changement structurel ou temporaire, on devrait offrir des primes ponctuelles pour recruter des candidats ou maintenir en poste le personnel actuel de façon aussi ciblée que possible.

12.7 Dans le cadre du processus de modernisation des normes de classification recommandé plus tôt dans cette section, le Secrétariat du Conseil du Trésor et l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique devraient travailler de concert avec les syndicats concernés pour faire en sorte que la structure des échelles salariales de ces groupes cadre avec les normes reconnues en matière d'administration des salaires.

12.8 Dans le cadre des recommandations sur la meilleure façon de moderniser la structure des groupes professionnels et des unités de négociation dans la fonction publique, il faudrait étudier la pertinence d'appliquer un système de paye régionale à certains segments de la nouvelle structure proposée. Les critères d'identification de tels groupes engloberaient l'accent mis sur l'embauche locale, des écarts salariaux importants à l'échelle du pays, l'accès à des données crédibles sur ces écarts, et une mobilité géographique négligeable des membres de ces groupes.

12.9 Une fois que les questions plus urgentes de gestion de la paye et de la rémunération abordées dans ce chapitre auront été réglées, le Conseil du Trésor devrait étudier l'opportunité et la faisabilité d'instaurer un système national de taux de salaires assorti d'indemnités pour les écarts importants du coût de la vie entre les régions.

Établissement de la rémunération pour des groupes particuliers

Le gouvernement fixe les niveaux de salaire et les autres formes de rémunération pour plusieurs groupes du secteur public fédéral par diverses méthodes autres que la négociation collective. Voici quelques‑uns des plus importants[192] :

  • Personnel de direction et sous‑ministres.
  • Dirigeants de sociétés d'État et autres personnes nommées par décret.
  • Forces armées canadiennes.
  • Membres réguliers et civils de la Gendarmerie royale du Canada.
  • Juges nommés par le gouvernement fédéral.
  • Parlementaires.

Personnel de direction et sous‑ministres

Au chapitre 3 du Volume Deux, nous décrivons les pratiques actuelles et faisons un bref historique des dernières années en ce qui a trait à la façon dont les salaires des cadres de direction et des sous‑ministres sont fixés. Essentiellement, le Conseil du Trésor établit ces salaires en tenant compte des conseils d'un organe indépendant, le Comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction. Celui-ci s'appuie sur une comparaison annuelle, faite par Hay Associates, de la rémunération totale versée par un échantillon d'organisations canadiennes des secteurs privé et public pour des postes équivalents à ceux du niveau EX 1 dans la fonction publique fédérale. Le niveau de salaire est fixé de façon à équivaloir à la rémunération totale en tenant compte de la valeur relative des avantages sociaux dans la fonction publique et à l'extérieur[193]. Les salaires des niveaux de classification plus élevés des cadres supérieurs et sous‑ministres sont établis en tant que multiples fixes des taux de l'échelle salariale des EX 1.

Les gouvernements successifs ont choisi d'égaler la rémunération du marché du travail du secteur privé pour les cadres de niveau EX 1, mais non pour les niveaux supérieurs. En fait, et au mieux, l'équivalence est inexacte, puisqu'il y a un décalage structurel et politique au niveau EX 1. Le décalage structurel est dû au fait que les niveaux de salaire établis au mois d'avril d'une année s'appuient sur les données recueillies au mois de septembre précédent sur le marché du travail du secteur privé. Des considérations de politique ont aussi incité le Conseil du Trésor à approuver des augmentations salariales en deçà des niveaux recommandés à deux reprises ces dernières années[194].

Les rapports annuels de Hay Associates[195] montrent qu'il existe un écart de plus en plus important entre les salaires et les autres formes de rémunération des cadres de direction fédéraux par rapport aux titulaires de postes comparables dans le secteur privé canadien pour les postes supérieurs à EX 1. Par exemple, le rapport de mars 2004 (qui présente les données de septembre 2003) révèle les écarts réels suivants au niveau des salaires et de la rémunération totale[196] :

Niveau de classification

Écart au niveau du salaire de base

Écart au niveau de la rémunération totale

EX 1  (893 points)

-4 %

-3 %

EX 2  (1 134 points)

-12 %

-15 %

EX 3  (1 447 points)

-22 %

-35 %

EX 4  (1 847 points)

-34 %

 -48 %

EX 5  (2 207 points)

-47 %

-71 %

DM 2 (3 455 points)

-80 %

-101 %

Si le principe de la comparabilité avec le marché du travail du secteur privé doit jouer un rôle essentiel dans la politique de rémunération de la fonction publique fédérale, il serait logique de réduire l'écart existant au niveau des cadres de direction et des sous‑ministres. Selon les données présentées ci-dessus, il conviendrait de mettre plus particulièrement l'accent sur les postes de sous‑ministres adjoints (EX 4 et 5) et de sous‑ministres (par exemple, de niveau DM 2) afin de rapprocher les salaires de ces postes de ceux de leurs homologues du secteur privé.

En étudiant ce dossier, il faudrait s'assurer que la méthode utilisée pour comparer le degré de responsabilité est fiable. Ainsi, on affirme souvent que les cadres supérieurs du secteur privé sont tenus beaucoup plus directement responsables que leurs collègues du secteur public de l'obtention de résultats précis, comme les bénéfices ou l'augmentation de la valeur des actions de l'entreprise, qu'ils doivent générer les fonds nécessaires aux opérations et qu'ils ont peu de sécurité d'emploi (bien que les indemnités de départ peuvent être généreuses). Par contre, les dirigeants bien informés du secteur privé reconnaissent généralement que la complexité, l'instabilité et la transparence de la gestion dans le secteur public n'ont habituellement pas d'égal dans le secteur privé. Il faudrait procéder à une étude minutieuse pour trouver la meilleure façon de s'assurer que la rémunération des cadres de direction du secteur public fédéral se compare étroitement à celle de leurs homologues du secteur privé[197].

Une meilleure comparabilité pour les cadres de niveau supérieur à EX 1 veut aussi dire une plus grande rigueur dans la classification des postes de cadres de direction dans la fonction publique. Dans le secteur privé, l'essence même d'un cadre supérieur est d'être responsable de l'obtention de résultats substantiels. Nous avons déjà souligné la tendance récente, dans la fonction publique, à classer des postes consultatifs ou techniques de haut niveau dans le groupe des EX afin d'attirer des candidats qualifiés. Tel que proposé à la recommandation 12, la meilleure façon de régler ce problème est d'établir plus clairement que les titulaires des postes techniques ou consultatifs de haut niveau toucheront une rémunération similaire au premier niveau des cadres de direction, sans toutefois être classifiés comme cadres de direction. L'idée de rémunérer les dirigeants de la fonction publique à un niveau qui se compare davantage à celui de leurs homologues du secteur privé serait plus convaincante si l'affiliation au groupe EX était limitée aux personnes exerçant des responsabilités importantes en matière de gestion.

Un point toujours délicat en rapport avec la rémunération des hauts fonctionnaires est la comparaison avec celle des députés et des ministres. Il semble exister une règle implicite voulant que la rémunération des sous‑ministres ne doive généralement pas dépasser celle des ministres. Bien entendu, c'est là une question politique. Si le gouvernement désire respecter ce principe, alors le système actuel d'établissement de la rémunération du personnel de direction ne devrait probablement pas être modifié. Cependant, du strict point de vue des ressources humaines, il serait logique de revoir à la hausse les salaires des cadres de direction – notamment les sous‑ministres adjoints – et des sous‑ministres afin qu'ils se rapprochent davantage de ceux de leurs homologues du secteur privé.

Corollaire important, les conditions d'emploi pour les postes de cadres de direction et de sous‑ministres devraient indiquer clairement qu'un cadre peut être renvoyé s'il ne satisfait pas aux attentes pendant deux années consécutives[198]. Afin d'éviter qu'une mauvaise relation entre un sous‑ministre ou un autre haut dirigeant et un cadre en particulier n'entraîne un renvoi injuste, le cadre congédié devrait pouvoir interjeter appel auprès d'un comité composé de trois sous‑ministres ou sous‑ministres adjoints, selon le niveau du cadre concerné. De fait, nous préconisons une politique de « rémunération réelle pour une haute direction réelle ». De façon générale, la combinaison d'un salaire plus élevé et d'une moins grande sécurité d'emploi devrait donc susciter un engagement plus soutenu envers le rendement dans la gestion de la fonction publique. Le renforcement de cette culture aux échelons supérieurs de la fonction publique devrait imprégner progressivement l'ensemble de l'administration fédérale. Ainsi, on peut penser que l'amélioration de la rémunération des cadres de direction favorisera une plus grande orientation sur les résultats au sein de la fonction publique.

Dans le cadre de toute tentative visant à augmenter la rémunération du personnel de direction de la fonction publique, il faudrait étudier la possibilité d'augmenter la partie du salaire liée au rendement annuel obtenu par rapport aux objectifs établis. Comme nous l'avons noté précédemment, le niveau actuel de rémunération conditionnelle des cadres varie de 10 % pour les postes de niveau 1 à 3, à 15 % pour les postes de niveau 4 et 5. Pour les sous‑ministres, cette rémunération varie de 15 % au niveau 1, à 20 % aux niveaux 2 et 3 et à 25 % au niveau 4. Au niveau EX 1, la tranche de 7 % fait partie du niveau de salaire équivalant à celui du secteur privé. Il n'y a donc qu'une prime possible de 3 % et relativement peu de cadres touchent celle-ci. En raison de la confusion qui persiste à ce sujet au sein du public, toute augmentation au régime de rémunération au rendement devrait établir clairement la différence entre la rémunération ré-octroyable et les primes pour rendement exceptionnel.

On pourrait faire valoir que la plus grande partie ou la totalité de la rémunération ré-octroyable liée à la rémunération au rendement devrait être incluse dans le salaire de base des cadres de direction. La rémunération au rendement serait alors limitée à un vrai système de primes auquel seuls les meilleurs (peut‑être 20 % du groupe, tout au plus) auraient accès. Le public comprendrait plus facilement le fonctionnement d'un tel système, qui serait par ailleurs plus facile à justifier. Cependant, une telle approche éliminerait l'élément de responsabilité face au rendement parmi les cadres de direction, une nouvelle culture qui a déjà fait du chemin au sein de cette collectivité et qui pourrait devenir encore plus rigoureuse. Un tel recul au sujet de la rémunération au rendement pour les cadres de direction pourrait aussi compliquer l'application éventuelle des pratiques de rémunération liée au rendement à d'autres groupes d'employés.

Enfin, la mise en œuvre d'un tel changement permettrait aux cadres les moins performants d'obtenir une augmentation de salaire, alors que les meilleurs ne verraient aucun changement à leur rémunération totale. Ils pourraient même voir leur rémunération réduite si seulement une partie de la rémunération ré-octroyable liée au rendement était intégrée au salaire régulier dans le but de constituer une plus grosse réserve en vue du versement des primes aux meilleurs 20 % ou quelque.

Dirigeants des sociétés d'État et autres personnes nommées par décret

La rémunération des dirigeants des sociétés d'État et des autres personnes nommées par décret est établie selon un processus semblable à celui employé pour les cadres de direction et les sous‑ministres. Le Comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction recommande d'apporter des modifications aux échelles salariales et aux autres aspects de la rémunération en s'appuyant sur une étude comparative des postes du secteur privé et du secteur public réalisée par Hay Associates.

En 2000, le Bureau du Conseil privé (qui gère ces nominations) a fait un examen détaillé de la classification des descriptions de postes des dirigeants des sociétés d'État. Cet examen a permis de faire une mise à jour importante de la rémunération dans ce secteur. Puis, en 2005, le Comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction, qui se préoccupe de la comparabilité externe et de l'équité interne, a recommandé que la rémunération totale des sociétés d'État au niveau du groupe 1 soit égale à la moyenne (50e centile des postes comparables dans les secteurs privé et public).

En ce qui a trait aux autres postes dont les titulaires sont nommés par décret, l'examen de leur structure de classification et de rémunération, effectué en 2002, a entraîné d'importantes hausses salariales. En 2005, le Comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction a recommandé de rapprocher la rémunération totale du niveau le plus populaire, soit GC 3, à celle de la moyenne des postes similaires dans les secteurs privé et public au Canada.

Le gouvernement a approuvé les recommandations de 2005 en s'appuyant sur l'opinion du Comité voulant qu'elles aient pour effet de rétablir les relativités internes entre les différents types de postes de haut niveau dans le secteur public fédéral, y compris les postes de cadres de direction et de sous‑ministres.

Si l'on décidait de rapprocher les salaires des cadres de direction et des sous‑ministres de la fonction publique de ceux de leurs homologues du secteur privé, il serait opportun de revoir à nouveau les niveaux de salaire des dirigeants des sociétés d'État et des autres personnes nommées par décret afin de maintenir une relativité raisonnable dans le secteur public fédéral.

Forces armées canadiennes

Nous expliquons dans le Volume Deux les méthodes complexes utilisées pour établir la rémunération des Forces armées canadiennes. En bref, la rémunération totale est calculée séparément pour les militaires du rang (MR) et les officiers du service général. La comparaison permet de jumeler un ensemble bien précis d'éléments de rémunération. On utilise des postes repères pour établir une différence avec la rémunération du noyau de la fonction publique que l'on appelle le « coefficient d'augmentation justifiée ». D'autres montants sont versés pour le facteur militaire, un pourcentage tenant lieu de surtemps et un montant pour la rémunération d'intérim. La rémunération des officiers du service général est établie comme un multiple de la rémunération des cadres de direction du noyau de la fonction publique et s'appuie sur une évaluation modifiée du Plan Hay. La rémunération des officiers spécialisés tels que les avocats, les médecins et les dentistes militaires ayant le grade de capitaine ou un grade supérieur est alignée sur celle des avocats du ministère de la Justice et des médecins et dentistes du secteur privé, respectivement. La rémunération des officiers supérieurs correspond à un multiple spécifié de celle des cadres de direction du noyau de la fonction publique.

Le Volume Deux nous donne une idée des frustrations et des malentendus passés qui ont influencé l'établissement des niveaux de rémunération des militaires au fil des ans. En réalité, la méthode de calcul du coefficient d'augmentation justifiée est si complexe et si peu comprise (ou reconnue comme valable) que le Conseil du Trésor ne l'accepte que rarement. Il revient typiquement aux échelons supérieurs des Forces armées canadiennes et du Conseil du Trésor de fixer un montant acceptable en s'appuyant sur différents facteurs allant du rythme des opérations militaires à l'état actuel des négociations collectives dans le noyau de la fonction publique. À l'occasion, on a approuvé un examen plus détaillé de la rémunération militaire, comme vers la fin des années 1990.

L'approche actuelle peut être décrite comme étant à la fois inefficace, non transparente, complexe et arbitraire. Les militaires canadiens sont appelés de plus en plus à mettre leur vie en danger dans le cadre de missions internationales. Il serait approprié d'honorer leur contribution lors de missions difficiles et souvent dangereuses en adoptant une méthode plus transparente et équilibrée pour fixer la rémunération du personnel militaire.

Dans des pays comme le Danemark, la France, l'Irlande, les Pays-Bas, les États-Unis et la Nouvelle‑Zélande, il « incomberait au ministère de la Défense de fixer le salaire du personnel militaire. Dans la plupart des cas, ces décisions doivent être ratifiées à un niveau plus élevé du gouvernement ou par le Trésor »[199]. À première vue, le système utilisé dans ces pays semble similaire au nôtre. Il existe cependant des différences considérables dans l'application des pratiques de chaque pays[200].

L'Australie dispose du mécanisme institutionnel le plus indépendant, le Defence Force Remuneration Tribunal. Créé en 1984, le tribunal australien a pour mandat de vérifier et de fixer les salaires et les avantages connexes des membres des Forces armées australiennes[201]. Bien qu'il s'agisse d'un mécanisme intéressant, il est peu probable qu'il puisse être adapté à la situation canadienne. L'Australie utilise depuis longtemps des organismes quasi judiciaires pour fixer les augmentations de salaires dans le secteur privé. L'adoption de cette pratique pour les Forces armées australiennes cadre donc bien avec la norme générale[202]. Au Canada, tous les groupes doivent obtenir l'approbation du gouvernement en matière de rémunération. Il semble donc peu probable que les Forces armées canadiennes échappent au contrôle du Conseil du Trésor et du Parlement[203].

De façon plus conforme aux traditions et valeurs du Parlement canadien et de la fonction publique canadienne, le Royaume-Uni possède d'un organisme indépendant, le Armed Forces Pay Review Body (AFPRB), qui conseille à la fois le premier ministre et le secrétaire d'État à la défense sur la rémunération et les indemnités des membres des Forces armées. Le mandat de cet organisme créé en 1971 stipule, depuis 1998, qu'il doit prendre en considération les points suivants avant de faire des recommandations :

  • La nécessité de recruter, de maintenir en poste et de motiver le personnel apte et qualifié, compte tenu des particularités d'une carrière dans les Forces armées.
  • Les politiques du gouvernement visant à améliorer les services publics, incluant l'exigence d'atteindre les objectifs de prestation de services ministériels que doit respecter le ministère de la Défense.
  • Les fonds dont dispose le ministère de la Défense, tels qu'établis par le plafond de dépenses du gouvernement.
  • La cible d'inflation du gouvernement.

L'AFPRB doit aussi tenir compte du fait que le salaire des membres des Forces armées doit être globalement comparable aux taux de salaire de la main‑d'œuvre civile[204].

Nous sommes conscients que des institutions ne peuvent pas être tout simplement importées d'un contexte politique/bureaucratique à un autre. Cependant, une version canadienne du Armed Forces Pay Review Body du Royaume-Uni pourrait comporter des avantages. Au Canada, les questions de rémunération relèvent habituellement du Conseil du Trésor. Un Comité consultatif sur la rémunération des Forces armées canadiennes devrait donc relever à la fois du ministre de la Défense et du président du Conseil du Trésor. Le Comité devrait être composé de personnalités publiques canadiennes de renom capables de trouver un équilibre entre l'efficacité des Forces armées canadiennes et le bien‑être de ses membres, tout en demeurant prudent et modeste avec les fonds publics. On s'attendrait à ce que le gouvernement mette en œuvre des recommandations bien appuyées, bien qu'il lui serait toujours possible de modifier les options proposées ou de mettre en place certains éléments de façon graduelle.

Il existe une différence importante entre les situations canadienne et britannique, soit la façon dont les ministères sont financés. Au Royaume-Uni, chaque ministère doit respecter un plafond de dépenses, ce qui limite probablement le Armed Forces Pay Review Body en termes de recommandations concernant les augmentations salariales. Au Canada, dans la plupart des cas, les augmentations salariales sont financées à même les réserves du Conseil du Trésor. Il serait donc important de s'assurer que le Comité consultatif sur la rémunération des Forces armées canadiennes évalue de façon judicieuse les augmentations souhaitables sous l'angle du rationnement des fonds publics, tout en respectant des limites financières adéquates.

Cette approche pourrait être utile à plusieurs égards. Premièrement, en adoptant une approche transparente pour fixer la rémunération du personnel militaire, le Comité rassurerait les membres des Forces armées canadiennes que dans les décisions qui les concernent, on tient dûment compte de leur situation et de leurs besoins. Deuxièmement, en mettant l'accent sur les caractéristiques uniques de la vie et de la rémunération des militaires, le travail du Comité faciliterait la distinction entre les décisions entourant le salaire et les avantages des membres des Forces armées canadiennes et celles touchant les autres groupes du secteur public fédéral. Enfin, si elle était appliquée intégralement, cette approche serait crédible aux yeux du public et recevrait probablement l'appui de tous les partis politiques au Parlement.

Membres civils et réguliers de la Gendarmerie royale du Canada

Le Volume Deux présente une description du processus qui a mené, au milieu des années 1990, à la création du Conseil de la solde de la GRC, dont le mandat est d'élaborer une approche « ordonnée, indépendante, transparente et professionnelle » en matière de rémunération au sein de la Gendarmerie royale du Canada. De façon générale, le Conseil a bien fonctionné au cours de la dernière décennie. Grâce à une méthode cohérente pour comparer la rémunération totale de la GRC à celle des corps policiers provinciaux et municipaux à l'échelle du pays, le Conseil a réussi en grande partie à définir les hausses salariales approuvées par le Conseil du Trésor au cours des dernières années.

Cependant, en 2004, le système a connu ses premières difficultés. Pour la première fois depuis des années, le Conseil du Trésor a approuvé une augmentation salariale inférieure à celle recommandée par le Conseil de la solde de la GRC sur la base de son étude annuelle. Cette décision a été motivée par un différend non résolu concernant la politique, et la hausse salariale exceptionnelle des membres du corps policier de la ville de Toronto.

La GRC fait régulièrement valoir que la rémunération de ses membres devrait s'appuyer sur la moyenne des trois principaux corps policiers qui lui servent de points de comparaison au Canada. Pendant plusieurs années, le Conseil du Trésor a appliqué cette approche, mais a refusé de l'adopter comme politique. Le Secrétariat craignait justement que les corps policiers se voient accorder une ou deux hausses salariales exceptionnelles, en raison de politiques locales plutôt que des considérations liées au marché du travail, ce qui aurait entraîné une augmentation excessive pour les membres de la GRC. Une telle augmentation pourrait également avoir des répercussions néfastes sur les processus de détermination des salaires dans la fonction publique.

Point encore plus important, comme nous avons pu le constater à la section précédente sur la rémunération du personnel militaire, le Armed Forces Pay Review Body du Royaume-Uni doit tenir compte non seulement de la comparabilité, mais aussi de l'amélioration de la productivité, des plafonds de dépenses et de la cible d'inflation du gouvernement. Le Secrétariat du Conseil du Trésor soutient par ailleurs que la facilité ou la difficulté relative du recrutement et du maintien en poste des membres de la GRC devrait être prise en considération au moment de définir les niveaux de rémunération du corps policier fédéral.

De fait, en 2004, l'augmentation salariale accordée au corps policier de Toronto a fait passer la moyenne des trois principaux corps policiers canadiens bien au‑delà de l'offre faite au plus gros syndicat de la fonction publique. La décision d'accorder une augmentation inférieure à celle recommandée a été mal accueillie au sein de la GRC[205].

Selon nous, l'approche actuelle utilisée par le Comité de la solde de la GRC est appropriée et devrait être maintenue. Cependant, après avoir appliqué cette approche pendant près d'une décennie, il serait raisonnable de la réexaminer, ainsi que la façon dont on établit les comparaisons de la rémunération totale et la meilleure façon de traiter des augmentations exceptionnelles d'un ou deux corps policiers. L'examen devrait également porter sur la façon de rendre explicites les facteurs autres que la comparabilité dans l'évaluation des augmentations salariales. On peut s'attendre à ce qu'un tel examen entraîne la création d'un nouveau système que la GRC et le Secrétariat du Conseil du Trésor pourraient utiliser avec confiance pour plusieurs années à venir.

Juges nommés par le gouvernement fédéral

La rémunération des juges nommés par le gouvernement fédéral est régie par la Loi sur les juges, telle que modifiée de temps à autre. Tous les quatre ans, une commission est mise sur pied (d'où le nom de Commission quadriennale) afin d'examiner la pertinence de la rémunération des juges et de recommander des modifications appropriées. La Commission est composée de représentants nommés par le ministre de la Justice et le Conseil canadien de la magistrature (qui représente les juges fédéraux) et d'un président chois par les deux parties.

Cette approche permet de préserver l'indépendance judiciaire prévue par la Constitution en ce sens qu'il ne revient pas au gouvernement, dont les gestes sont jugés par les cours supérieures fédérale et provinciales, d'établir les salaires et les avantages sociaux des juges. Bien qu'il incombe au Parlement d'examiner les recommandations de la Commission, il n'est pas tenu de s'y conformer. En apportant des modifications à la Loi sur les juges, le Parlement peut refuser ou modifier les recommandations de la Commission, pourvu qu'il puisse justifier sa décision de façon rationnelle. Cependant, l'approbation régulière de ces recommandations au cours des dernières décennies rend cette situation de moins en moins probable.

D'un autre côté, il est difficile de dire quel serait le meilleur comparateur pour établir la rémunération des juges. Par le passé, comme on le décrit au chapitre 3, les Commissions ont eu tendance à se servir du point médian de l'échelle salariale des sous‑ministres, soit le niveau 3. Dans son dernier rapport publié en 2004, la Commission a préféré faire la comparaison avec les salaires des associés des cabinets d'avocats des principaux centres urbains. Il semble que ce changement de cap ait été motivé par le fait que les salaires des sous‑ministres ont très peu augmenté au cours des dernières années.

Un débat public sur les salaires appropriés pour comparer la rémunération des juges serait justifié, notamment si le gouvernement choisit d'accroître la comparabilité des salaires des sous‑ministres et des cadres de direction de la fonction publique avec ceux de leurs homologues du secteur privé. En fait, le travail des juges est très différent de celui des administrateurs généraux des ministères et organismes, tant au niveau du contenu que des conditions de travail et de l'obligation de rendre compte. Les associés des cabinets d'avocats sont les principaux candidats recrutés pour les postes de juges. En principe, donc, les avocats d'expérience du secteur privé constituent le meilleur élément de comparaison. Or, les écarts de salaire importants parmi les avocats du secteur privé, peu importe la région, le cabinet, les spécialités juridiques et les personnes, posent problème. Le dossier des comparateurs pour la rémunération des juges requiert plus d'attention si l'on veut que le système actuel de Commission quadriennale demeure acceptable aux yeux du public.

Parlementaires

Dans le Volume Deux, nous expliquons comment, à la suite du rapport d'une commission en 2001, on a pris la décision d'augmenter les salaires des députés et des sénateurs, d'intégrer leur indemnité non imposable à leur salaire et de lier toute hausse future à celles des juges nommés par le gouvernement fédéral. En 2004, toutefois, le gouvernement est revenu sur sa décision concernant ce dernier point. En 2005, la Loi sur le Parlement du Canada et la Loi sur les traitements ont été modifiées pour y ajouter un nouvel indice de calcul des hausses salariales annuelles des députés et des sénateurs.

La décision de dissocier les moyens servant à définir la rémunération des juges de ceux servant à définir la rémunération des parlementaires est théoriquement justifiable. Les responsabilités et le travail de ces deux groupes essentiels au système de gouvernance du Canada ne pourraient pas être plus différents. Les juges siègent à vie et doivent agir de façon indépendante en prenant habituellement leurs décisions par eux-mêmes. La durée d'exercice des fonctions des parlementaires varie et ils travaillent normalement en respectant la discipline du parti et en prenant des décisions collectives.

L'approche adoptée en 2005 concernant la rémunération des parlementaires permet des augmentations annuelles transparentes et indépendantes de celles octroyées ailleurs dans le secteur public fédéral, et qui correspondent à celles octroyées au Canadien moyen. Cela évite aussi aux parlementaires d'avoir à voter leurs propres augmentations de salaires. En permettant des hausses salariales annuelles correspondant à l'évolution de l'échelle salariale de l'ensemble des secteurs d'activité économique, la nouvelle politique permettra aux parlementaires de maintenir leur pouvoir d'achat par rapport à la main‑d'œuvre en général.

Cependant, avec le temps, la situation relative du salaire des parlementaires par rapport à ceux des députés et des hauts fonctionnaires fédéraux, y compris les sous‑ministres et les juges, fera surgir des doutes quant à la possibilité d'inciter des candidats sérieux à briguer les suffrages si l'on se contente d'aligner leur rémunération sur celle du Canadien moyen. Il serait donc logique de nommer périodiquement une commission, semblable à la Commission quadriennale chargée de revoir la rémunération des juges, pour voir s'il y a lieu de mettre à jour la rémunération des parlementaires et, le cas échéant, de préciser la façon de le faire.

On pourrait soutenir que les députés et les sénateurs se trouveront en conflit d'intérêts s'ils doivent déterminer leur propre rémunération à la lumière des recommandations d'une telle commission. Une façon de contrer cette critique serait de prévoir que toute augmentation supérieure à l'ajustement annuel dicté par l'ensemble des secteurs d'activité économique ne pourrait être approuvée qu'à la suite de l'élection d'un nouveau Parlement. Même cette mesure ne pourrait écarter toute controverse, puisque certains candidats seraient sûrement tentés de promettre l'annulation d'une augmentation approuvée au préalable. Le fait demeure que seuls les parlementaires peuvent décider de leur propre niveau de rémunération. Même l'adoption de l'approche axée sur l'ensemble des secteurs d'activité économique a dû être approuvée par les parlementaires. Il serait préférable que toute décision entourant une hausse future supérieure au niveau calculé selon la nouvelle formule soit prise dans un contexte de transparence et sur la base de conseils indépendants.

Voici donc, en résumé, les recommandations portant sur la détermination des salaires de certains groupes particuliers au sein du secteur public fédéral :

Recommandation 13

13.1 Le président du Conseil du Trésor devrait demander au Comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction d'examiner la rémunération des hauts fonctionnaires du secteur public fédéral et de faire des recommandations sur la mesure dans laquelle celle-ci devrait être comparable à celle de leurs homologues du secteur privé. Il serait probablement plus logique de se concentrer d'abord sur les salaires des sous‑ministres adjoints et des sous‑ministres. Le Comité devrait s'assurer que la méthode de comparaison est théoriquement bien fondée et que les données sur la comparabilité sont fiables. Il devrait aussi étudier la possibilité de restreindre la définition des postes pouvant être classés dans le groupe de la Direction afin d'exclure les postes ayant peu de responsabilités de gestion et recommander des conditions d'emploi qui permettent de renvoyer un cadre de direction dont le rendement n'est pas satisfaisant.

13.2 Le Comité devrait aussi revoir le rôle que doit jouer la rémunération au rendement dans la rémunération globale des cadres de direction.

13.3 Si le président du Conseil du Trésor juge que l'on doit procéder à l'examen proposé à la recommandation 13.1, le Bureau du Conseil privé devrait demander au Comité consultatif de procéder à un tel examen et de faire des recommandations sur la rémunération des dirigeants des sociétés d'État et des autres personnes nommées par décret par rapport à celle de leurs homologues du secteur privé.

13.4 Le ministre de la Défense nationale et le président du Conseil du Trésor devraient charger conjointement une personnalité canadienne bien en vue de présenter une proposition sur la meilleure façon d'établir un Comité consultatif sur la rémunération des Forces armées canadiennes, inspiré du modèle du Armed Forces Pay Review Body du Royaume-Uni.

13.5 Le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile et le président du Conseil du Trésor devrait inviter une société d'experts‑conseils renommée, spécialisée en rémunération[206], à examiner la façon dont le Conseil de la solde de la GRC mesure la rémunération totale, quels éléments autres que la comparabilité devraient être pris en considération au moment de déterminer la rémunération à la GRC et comment le Conseil du Trésor devrait traiter des situations où les hausses salariales d'un ou de plusieurs corps policiers sont exceptionnellement élevées.

13.6 Le ministre de la Justice et le Conseil canadien de la magistrature devraient demander à la prochaine Commission quadriennale, qui doit faire rapport en 2008, de procéder, dans le cadre de ses délibérations, à une analyse détaillée de la valeur et de la pertinence des divers comparateurs pouvant servir à déterminer le niveau de rémunération approprié des juges nommés par le gouvernement fédéral.

13.7 Si, dans l'avenir, les salaires des parlementaires semblent s'écarter de ceux des autres hauts fonctionnaires fédéraux, une commission indépendante, semblable à celle nommée aux quatre ans pour recommander des modifications à la rémunération des juges, pourrait conseiller le Parlement de manière indépendante et transparente sur la meilleure façon de rajuster la rémunération des parlementaires.

13.8 En mandatant les divers groupes consultatifs sur la rémunération, il importe de respecter le principe de l'indépendance de leurs analyses et de leurs recommandations, en gardant à l'esprit que la décision finale en matière de rémunération revient au gouvernement ou au Parlement, selon le cas.

 




14. Questions de rémunération liées aux pensions et aux autres avantages sociaux

Pensions

Au chapitre 7 du présent volume, nous avons démontré que les divers régimes de pension dans le secteur public fédéral sont parmi les meilleurs au pays, à la fois sur le plan de la sécurité et de la valeur qu'ils représentent pour leurs membres. Certaines de leurs caractéristiques sont particulièrement intéressantes, notamment la possibilité pour un employé de prendre sa retraite, sans pénalité, dès qu'il atteint l'âge de 55 ans s'il compte 30 années de service (dans certains cas, même plus tôt ou avec moins d'années de service) et la protection intégrale contre l'inflation.

En principe, offrir un régime de pension généreux aux fonctionnaires constitue une politique avisée. Libérés du souci d'avoir à prendre les dispositions requises pour pouvoir vivre dignement à la retraite, les fonctionnaires de carrière seront alors peu tentés de tirer parti de la fonction qu'ils occupent pour s'enrichir en abusant de leurs pouvoirs. Cet aspect d'un sain régime de gouvernance est rarement discuté en public, mais nous n'avons qu'à observer ce qui se passe dans les pays où la rémunération dans le secteur public est inadéquate pour voir les coûts qui résultent de l'inefficience économique et de la méfiance mutuelle lorsqu'on ne peut pas se fier à l'intégrité des fonctionnaires.

Cependant, les bénéficiaires d'un tel régime devraient en partager équitablement les coûts avec la société qu'ils servent. Comme nous le montrons dans le Volume Deux, la proportion du coût des prestations au titre des services courants assumée par les employés dans le cadre du principal régime de pension de la fonction publique fédérale est passée de plus de 40 % durant la plus grande partie des années 1990 à aussi peu que 26 % en 2002‑2003. Les membres des autres régimes de la fonction publique fédérale cotisent dans une proportion encore plus faible. Il est maintenant essentiel de hausser les cotisations des employés aux régimes de pension afin de rétablir une plus grande équité entre la quote-part de l'ensemble des contribuables et celle des fonctionnaires au financement de leur régime de pension. Cette hausse devrait se poursuivre jusqu'à ce que les employés assument au moins 40 % du coût des prestations au titre des services courants.

On peut débattre de la meilleure formule à appliquer pour rétablir un équilibre raisonnable à cet égard. Les taux de cotisation actuels sont de 4 % du salaire sous 41 100 $ (en 2005) – le maximum des gains annuels ouvrant droit à pension (MGAP) – et de 7,5 % au‑delà de ce niveau. Étant donné que la plus grande partie de la masse salariale de la fonction publique se situe sous 41 100 $ (environ les deux tiers de ce qui est payé aux fonctionnaires)[207], la plus grande partie de la hausse des cotisations devra être financée dans cette tranche.

Le président du Conseil du Trésor a annoncé, en juillet 2005, la décision prise par le Conseil du Trésor d'augmenter progressivement les taux de cotisation sur plusieurs années, jusqu'à ce qu'ils atteignent 6,4 % en deçà du MGAP et 8,4 %, au‑delà de ce niveau. Comme les employés cotisent également 4,95 % de leur salaire au Régime de pensions du Canada ou au Régime de rentes du Québec[208], leurs cotisations totales au titre des régimes de pension, sous le MGAP, atteindront 11,35 %. On pourrait manifestement jongler avec ces chiffres et s'interroger sur le rythme auquel les nouveaux taux seront appliqués. Toutefois, l'essentiel est que la récente décision du Conseil du Trésor constitue une solution raisonnable pour préserver un régime de pension généreux mais adéquat, tout en faisant en sorte que les fonctionnaires assument une part équitable de ses coûts.

Nous montrons dans le Volume Deux que, pour diverses raisons, les membres des autres régimes de pension du secteur public fédéral (c.‑à‑d. les membres des Forces canadiennes, les membres réguliers et civils de la GRC, les juges nommés par le gouvernement fédéral et les parlementaires) assument une proportion plus faible des coûts des prestations au titre des services courants que les fonctionnaires. La décision du Conseil du Trésor a pour effet de mettre en œuvre ce qui est probablement la meilleure solution pour ces régimes, en augmentant les cotisations des membres pour qu'elles cadrent avec les augmentations appliquées au régime principal. La hausse des cotisations à ces régimes ne permettra pas d'atteindre le taux de 40 %, mais au moins elle préservera la relativité actuelle entre les régimes.

Cependant, au‑delà de la question fondamentale de l'équité du financement, plusieurs autres questions en rapport avec la politique régissant les régimes de pension dans le secteur public fédéral ont suscité des débats. La question prédominante a trait à la façon dont le Régime de pension de retraite de la fonction publique est intégré au Régime de pensions du Canada et au Régime de rentes du Québec. Un changement important intervient dans la façon dont les droits à pension des fonctionnaires sont calculés à 65 ans, l'âge auquel les retraités commencent normalement à toucher leurs prestations du RPC ou du RRQ. À ce moment, le Régime de pension de retraite de la fonction publique ne paie que 1,3 % du service admissible par année, multiplié par le salaire moyen des cinq meilleures années, sur la partie du salaire moyen qui est inférieure au niveau de revenu couvert par le RPC ou le RRQ (MGAP). Le taux des prestations est de 2 % par année de service au‑dessus du seuil de revenu du RPC ou du RRQ, ainsi que pour tout le salaire admissible du retraité avant qu'il atteigne l'âge de 65 ans.

Jusqu'à récemment, la hausse progressive des taux de cotisation au RPC ou au RRQ faisait que ce changement à 65 ans était avantageux pour la plupart des pensionnés de la fonction publique. Mais aux termes des règles en vigueur, à compter de 2008 la plupart des retraités de la fonction publique vont constater que la combinaison de leur pension du RPC ou du RRQ et de leur pension de la fonction publique sous le MGAP n'atteindra pas le total de 2 % par année de service, multiplié par le salaire moyen de leurs cinq meilleures années. Comme cette question ne touche que la partie du revenu ouvrant droit à pension sous le MGAP (là encore, 41 100 $ en 2005), ceux dont le salaire est peu élevé en ressentiront l'impact plus fortement.

Que ce problème ait ou non été pleinement anticipé quand le RPC et le RRQ ont été créés dans les années 1960, il n'était pas urgent de s'en préoccuper jusqu'à récemment. Même si, dans les descriptions détaillées du Régime de pension de retraite de la fonction publique, on explique ce qui se passe à 65 ans, en général les fonctionnaires pensent que les prestations du régime de pension correspondent à 2 % par année de service. Comme cela ne sera plus vrai sous le MGAP, notamment pour ceux dont le salaire est relativement peu élevé, la consternation se fera sans doute sentir. Pour rajuster le Régime de la fonction publique de façon à supprimer la plus grande partie, voire la totalité de cet écart, il faudrait qu'une contribution exceptionnelle d'environ 1,3 milliard de dollars soit versée, ainsi qu'une hausse annuelle d'environ 60 millions de dollars. À la fin de 2005, le président du Conseil du Trésor a annoncé au nom de ses collègues, les ministres de la Sécurité publique et de la Défense nationale, la décision logique de proposer que le Parlement modifie le Régime pour solutionner le problème qui se dessine le plus près possible du moment où les taux de cotisation des employés seront relevés au niveau nécessaire pour correspondre à 40 % du coût des prestations pour services courants.

Le deuxième sujet a trait à la question générale de la pertinence continue de la structure actuelle du Régime de pension de retraite de la fonction publique. Comme nous l'expliquons dans le Volume Deux, de nombreuses modifications ont été apportées au fil des ans à la Loi sur la pension de la fonction publique (et aux lois connexes pour les Forces canadiennes, la GRC, les parlementaires et les juges nommés par le gouvernement fédéral). En dépit de ces changements, il reste toutefois des points à régler, comme l'âge de la retraite, la souplesse des prestations aux survivants, la mobilité professionnelle et l'équilibre entre le financement du régime de pension et les prestations.

Âge de la retraite

Le Régime devrait‑il continuer à encourager les employés ayant de longs états de service à prendre leur retraite dès 55 ans? Vu le vieillissement général de la population, des employés plus âgés, expérimentés et en santé pourront constituer des atouts de plus en plus recherchés. Il semble cependant que les employés qui ont de longs états de service peuvent maximiser la valeur viagère attendue du Régime de pension de retraite de la fonction publique en prenant leur retraite dès qu'ils sont en mesure de le faire sans pénalité. Ainsi, pour persuader ces employés de continuer à cotiser au Régime, il faudrait probablement apporter des modifications à la politique susceptibles de les inciter à garder leur emploi.

Serait‑il sage de permettre l'accumulation de droits à pension supplémentaires au‑delà du niveau actuel de 70 %? Devrait‑on augmenter l'âge minimal auquel quelqu'un pourrait prendre sa retraite tout en touchant une pension non réduite? Pourrait‑on concevoir un système où les employés admissibles à une pension pourraient travailler une partie de l'année et toucher à la fois une pension et un salaire équivalents au salaire qu'ils touchaient quand ils sont devenus admissibles à une pension non réduite?

Souplesse des prestations aux survivants

Devrait‑il y avoir plus de souplesse en ce qui concerne les prestations aux survivants? En théorie, les règles en vigueur prévoient le versement de prestations dont la valeur équivaut à moins de 60 % des prestations conformément à la plupart des lois en vigueur sur les prestations de pension; pourtant, dans certains cas, les prestations aux survivants dépassent celles permises aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu (66 2/3 %)[209]. Comme la notion de famille continue à évoluer et à être redéfinie dans la société canadienne, est‑il temps de repenser un régime qui a été mis sur pied quand la plupart des familles comptaient sur un seul soutien de famille, habituellement l'homme?

Mobilité professionnelle dans la fonction publique

Le Régime de pension de retraite de la fonction publique est-il assez souple pour faciliter la mobilité professionnelle, c.‑à‑d. entrer à la fonction publique ou la quitter, au fil des ans? À l'heure actuelle, les droits à pension du Régime de pension de retraite de la fonction publique sont exceptionnellement transférables en ce sens que ceux qui quittent la fonction publique après deux années de service peuvent les transférer à de nombreux régimes externes, ou demander un montant en espèces équivalent à la valeur actuarielle des droits qu'ils ont accumulés. Cependant, comme le Régime de pension de retraite de la fonction publique est relativement généreux, il peut être difficile de transférer au régime fédéral les droits à pensions acquis ailleurs. Sans subventionner les recrues, y aurait‑il moyen d'intégrer de manière plus favorable le régime fédéral aux droits à pension acquis ailleurs? Ceux qui partent avec l'intention de revenir pourraient-ils continuer à participer au régime fédéral, en assumant à la fois la quote-part de l'employé et la quote-part de l'employeur du coût des prestations pour services courants[210]?

Équilibre entre financement du Régime et prestations

L'équilibre entre le mode de financement du Régime et les prestations auxquelles il donne droit est-il équitable pour les différents groupes d'employés? Dans un certain sens, le Régime n'est pas juste pour les membres célibataires, qui ne peuvent désigner de survivant, pour les employés qui quittent la fonction publique tôt dans leur carrière ou qui y entrent à un âge mûr, ou pour les employés à revenu moyen, qui paient une part proportionnellement plus importante des coûts du Régime que les employés à faible revenu ou à revenu élevé. La définition d'équité varie évidemment d'une personne à l'autre, mais on n'a pas examiné sérieusement la question depuis de nombreuses années.

Gouvernance du Régime

Enfin, nous attirons l'attention sur le mode de gouvernance du régime de pension. À la fin des années 1990, le gouvernement et les syndicats de la fonction publique sont venus près de s'entendre sur un plan visant à gérer conjointement le Régime. Les démarches en ce sens ont cependant achoppé sur la question de savoir si les employés auraient droit à une partie quelconque de l'excédent actuariel qui s'était accumulé dans le Compte de pension de retraite au fil des ans. En raison d'un désaccord sur cette question, les syndicats ont intenté un procès et rejeté l'idée de la gestion conjointe du Régime. Cependant, de nombreux régimes de pension importants du secteur public au Canada sont régis conjointement par l'employeur et les représentants des employés. En principe, lorsque le litige en cours sur l'excédent sera réglé, nous devrions reprendre les démarches pour établir une forme quelconque de gouvernance partagée, à condition qu'elle prévoit un partage proportionnel des responsabilités à l'égard des politiques touchant aux pensions et du financement des régimes.

Pour les employés et leurs syndicats, la raison de contribuer à la gestion de leur régime de pension est évidente : pour la plupart des employés, et surtout pour ceux justifiant de longs états de service, leur pension est leur avoir le plus précieux et sa valeur dépasse souvent celle de leur maison quand ils atteignent l'âge de la retraite. Contribuer à la préservation de cet avoir devrait donc être une priorité pour les employés.

Pour l'employeur, la raison de partager la gouvernance du régime est d'amener les employés et leurs syndicats à assumer conjointement la responsabilité du financement adéquat des prestations convenues. La gouvernance conjointe suppose habituellement que l'employeur et les employés mettront en commun les excédents et les déficits. En gros, l'employeur peut s'attendre à ce que les employés, s'ils sont partenaires à part entière de la santé financière de leur régime de pension, s'intéressent de façon active et responsable à l'évolution des politiques concernant les régimes de pension et de leur financement.

À noter que le Régime de pension de retraite de la fonction publique (RPRFP) diffère de la plupart des régimes de pension au Canada en ce sens qu'il est régi par sa propre loi et qu'il n'est pas assujetti aux lois générales sur les normes de pension. Cela semble résulter du fait que le RPRFP a été instauré avant l'adoption de ces lois, ainsi que de la taille considérable du passif éventuel que représente le paiement des futures pensions de la fonction publique par rapport à la situation financière globale du gouvernement fédéral.

Nous observons également que le modèle de gouvernance conjointe des régimes de pension, dans les secteurs public et privé au Canada, a été mis à l'épreuve ces dernières années en raison du rendement inhabituellement variable des placements. À titre d'exemple, le Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l'Ontario est placé devant la perspective de devoir hausser les cotisations ou de réduire les prestations, parce qu'il s'est engagé à verser trop de prestations par rapport au rendement réel de son portefeuille. Le Régime de retraite des employés municipaux de l'Ontario (OMERS) éprouve aussi des difficultés, tandis que le Syndicat canadien de la fonction publique a intenté des poursuites en alléguant la mauvaise gestion du portefeuille de placements. Manifestement, la gouvernance conjointe est plus facile quand il s'agit de gérer des excédents plutôt que des déficits. Toute gouvernance partagée du Régime de pension de retraite de la fonction publique fédérale devra être soigneusement conçue afin de pouvoir bien affronter les périodes de vaches maigres comme les périodes de vaches grasses.

Recommandation 14

14.1 Le président du Conseil du Trésor devrait demander au Comité consultatif sur la pension, qui compte des représentants de l'employeur, des syndicats de la fonction publique et des pensionnés, de revoir la pertinence de la conception du régime actuel en ce qui a trait au traitement des questions comme les mesures incitant un employé à prendre sa retraite dès qu'il peut toucher une pension sans pénalité, à l'opportunité d'adopter une approche plus souple en matière de prestations aux survivants, à la façon dont le régime influe sur la mobilité professionnelle à l'entrée dans la fonction publique ou à la sortie, ainsi qu'à l'équité du régime pour les divers groupes d'employés, et de formuler les recommandations qui s'imposent.

14.2 Lorsque le litige en cours sur l'excédent du compte de pension sera réglé, le président du Conseil du Trésor devrait renouer la discussion avec les syndicats de la fonction publique afin de les faire participer plus directement à la gouvernance du Régime de pension de retraite de la fonction publique, en visant un plus grand partage des responsabilités pour l'élaboration des politiques et le financement des régimes de pension.

Autres avantages sociaux à la fonction publique

Dans cette section, nous traitons d'abord des grands domaines de l'assurance-vie et de l'assurance-invalidité et des régimes de soins de santé et de soins dentaires, y compris les congés de maladie, puis nous abordons brièvement les autres congés et les heures supplémentaires.

Assurance-vie, assurance-invalidité, régime de soins de santé
et régime de soins dentaires

Comme nous l'avons décrit au chapitre 8, à la fonction publique fédérale, les régimes d'assurance-vie et d'assurance-invalidité, ainsi que les régimes de soins de santé et de soins dentaires se situent dans la moyenne par comparaison avec les régimes du secteur privé[211]. Les divers régimes ont été instaurés et ont évolué pour la plupart isolément les uns des autres, sans grande indication d'une philosophie ou d'une politique systématique de l'employeur sur laquelle reposerait l'ensemble des programmes de ce type. Le coût de ces régimes et des impôts connexes dans les différents domaines du secteur public fédéral examinés dans ce rapport est passé d'environ 1 milliard de dollars, au début et au milieu des années 1990, à environ 1,5 milliard de dollars[212] en 2002‑2003. Bien que ce montant ne corresponde qu'à environ 6 % des dépenses de rémunération totales pour cet exercice, 1,5 milliard de dollars est une somme substantielle. Cet élément de la rémunération mérite une attention à la fois dans l'optique de la gestion des dépenses et parce que les employés, les retraités et les personnes à leur charge comptent sur ces programmes pour répondre à de nombreux besoins importants.

Le Volume Deux résume chacun des régimes en vigueur, y compris leur mode de financement, et retrace leur évolution depuis 1990. Parmi les thèmes généraux importants découlant de cet examen, il convient de souligner les points qui suivent.

Peu de changement dans le choix et les prestations

Depuis 1990, il y a eu peu de changements dans les prestations offertes. De fait, certains services de santé paramédicaux sont devenus plus difficiles à obtenir. Comparativement à de nombreux régimes offerts par de grands employeurs du secteur privé dont le personnel est syndiqué, les régimes de la fonction publique offrent une protection très restreinte. En outre, les employés ont peu de choix quant aux prestations dont ils peuvent se prévaloir.

Instauration du Régime de soins dentaires pour les pensionnés

Instauré en 2001, ce régime est la seule exception importante à la tendance observée au paragraphe précédent.

Financement par l'employeur

Les divers régimes sont entièrement ou principalement financés par l'employeur.

Confusion à l'égard de la négociation collective et de la gouvernance

Quoiqu'on ne discute habituellement pas de ces régimes lors de la négociation des conventions collectives des groupes professionnels, les changements apportés à la plupart des régimes sont négociés avec les syndicats par l'entremise du Conseil national mixte, puis intégrés aux conventions pertinentes.

Ces dernières années, en application d'ententes conjointes patronales-syndicales, des organisations, comme la Fiducie du Régime de soins de santé de la fonction publique, ont été mises sur pied pour gérer ces programmes. Bien que la création de ces groupes ait contribué à rendre leur gestion plus transparente, elle a aussi masqué la question des moyens à prendre pour en contenir et en répartir les coûts.

Le moment est venu de revoir les régimes

Le système actuel fonctionne raisonnablement bien pour ce qui est de répondre aux besoins des employés, des retraités et des personnes qui sont à leur charge. Le nombre de plaintes est généralement minime. Néanmoins, nous ne devrions pas continuer à accepter sans réserve la rigidité actuelle des avantages sociaux, la confusion au sujet du mode de gouvernance et l'ascension rapide des coûts au cours des dernières années, qui ont caractérisé l'ensemble de nos régimes.

Il est temps de revoir en profondeur les objectifs et les moyens de ce secteur.

  • En tant qu'employeur responsable à la fois sur le plan social et sur le plan financier, quel est le but visé par le gouvernement fédéral avec ses divers régimes d'assurance, de soins de santé et de soins dentaires?
  • Compte tenu de l'évolution radicale de la famille au Canada ces dernières années et de la nécessité d'attirer à la fonction publique des citoyens talentueux de tous âges pour des périodes plus ou moins longues, n'y aurait‑il pas lieu d'adopter une approche plus souple qui réponde mieux aux besoins de chacun?
  • Quelle est la meilleure façon de faire participer les représentants syndicaux des employés à la conception et à la gouvernance de ces régimes, de sorte qu'ils partagent avec l'employeur l'obligation de faire preuve de prudence financière?
  • Avec des réponses nouvelles à ces questions, quelle serait la meilleure façon d'obtenir les résultats escomptés, de manière à réduire au minimum les frais généraux d'administration et d'intérêt?

L'innovation probablement la plus importante serait d'offrir de vrais choix aux employés en termes d'avantages sociaux. Si l'on y parvenait, la nécessité de repenser nos programmes serait de fait assumée individuellement par les employés, au moment où ils feraient leurs choix. Encore là, pour déterminer les options possibles, il faudrait procéder à des analyses approfondies, reposant sur des consultations poussées des employés et de leurs représentants syndicaux ou professionnels. Les tentatives antérieures en ce sens ont achoppé par crainte de la complexité administrative et en raison des préoccupations au sujet des coûts, de la réticence des employés et des syndicats et de la prudence naturelle des représentants gouvernementaux. Pour réussir à instaurer un degré utile de souplesse, il faudra probablement deux choses : d'abord, déterminer le montant total annuel que l'employeur consacrerait aux avantages sociaux de chaque employé; et deuxièmement, déterminer une série de choix acceptables pouvant être offerts à un coût raisonnable.

La partie la plus controversée de l'adoption d'un degré accru de souplesse serait de déterminer le montant que l'employeur serait prêt à payer annuellement par employé. Plus tôt dans nos recommandations, nous avons soutenu que la portée de la négociation collective devrait être élargie pour inclure autant de composantes de la rémunération totale que possible. Ainsi, les compromis entre les différents objectifs souhaitables seraient transparents pour tous, y compris les employés et les contribuables. Il serait utile que le gouvernement fixe une allocation annuelle par employé, uniforme au départ, réservée exclusivement au paiement des avantages sociaux. Ce montant ne devrait pas être établi dans le but de réduire les coûts actuels, mais d'indiquer de manière crédible la valeur des dépenses rattachées actuellement aux avantages sociaux. Au cours de la transition, on pourrait s'attendre à ce que les coûts assumés par l'employeur augmentent afin de préserver l'équivalence globale des avantages sociaux actuellement offerts aux employés. Il faudrait probablement offrir des taux distincts pour les employés célibataires et ceux qui ont une famille. Quels que soient les taux initiaux, ils devraient augmenter d'année en année, en fonction d'un coefficient pertinent. Les syndicats pourraient alors chercher à obtenir un montant plus (ou moins) élevé par le truchement de la négociation collective. Les employés qui souhaitent obtenir une protection supérieure à celle qu'ils seraient en mesure de s'offrir grâce à l'allocation prévue pourraient payer la différence de leur propre poche, à ce qui serait – nous l'espérons – un tarif de groupe avantageux.

Une importante crainte, sur le plan des coûts, est que nous pourrions perdre les économies d'échelle dont nous bénéficions actuellement parce que nous souscrivons de l'assurance (par exemple, pour l'invalidité)[213] ou que nous nous procurons des services administratifs (dans le cas du régime de soins de santé et de soins dentaires) pour de très grands groupes, qui ont droit à des prestations uniformisées. On pourrait atténuer les préoccupations à ce titre en négociant des forfaits correspondant aux préférences des divers groupes d'employés. On pourrait envisager de regrouper les régimes existants dans un seul contrat de vaste portée pour qu'il soit plus intéressant pour le secteur privé de tenter de réduire ses coûts pour l'emporter.

Une variante qui permettrait de combiner des économies d'échelle à un ensemble intéressant de choix pour les employés en matière d'avantages sociaux consisterait à conserver un ensemble commun d'avantages de base, assorti d'options pour des avantages supplémentaires dans les domaines particuliers intéressant les employés. Une telle approche réduirait le fardeau des coûts reliés à ce que l'on appelle la sélection négative, selon laquelle seulement ceux qui présentent un risque élevé choisissent certains avantages, ce qui en rendrait le coût prohibitif.

La réforme des congés de maladie et de l'assurance-invalidité

Le domaine de l'assurance-invalidité est tout particulièrement embourbé dans un chevauchement de droits connexes et la complexité administrative. Selon sa situation, un employé handicapé pourrait avoir à faire intervenir les congés de maladie auxquels il a droit, l'un des régimes d'assurance-invalidité de la fonction publique, la Commission provinciale d'indemnisation des accidentés du travail, le Régime de pension de retraite de la fonction publique et le Régime de pensions du Canada ou le Régime de rentes du Québec. En ce qui concerne l'assurance-invalidité, une option intéressante serait de la fusionner à la fois au Régime de pension de retraite et au régime actuel d'attribution des droits aux congés de maladie. Essentiellement, des congés de maladie payés normalement seraient accordés à l'employé pour une courte période (disons d'au plus trois jours), avec l'approbation de son gestionnaire, jusqu'à un maximum annuel non cumulable de peut-être huit à dix jours; dans le cas d'une invalidité de courte durée, il toucherait sa paie habituelle, conformément à un régime d'assurance-invalidité de courte durée, pour une période modérée (disons d'au plus 90 jours), avec l'autorisation du médecin traitant; enfin, pour une période plus longue, il aurait accès au régime d'assurance-invalidité de longue durée, en vertu duquel il toucherait, comme c'est le cas actuellement, 70 % de son salaire, après attestation médicale. Une variante de la proposition concernant l'invalidité de courte durée serait de verser 100 % du salaire pendant les 30 premiers jours, puis disons 90 % pour les 30 jours suivants, et enfin 80 % pendant les derniers 30 jours, avant que l'employé visé devienne admissible à l'assurance-invalidité de longue durée, qui prévoit le versement de 70 % du salaire.

L'instauration d'un régime d'assurance-invalidité de courte durée permettrait de commencer à gérer les cas beaucoup plus tôt qu'à l'heure actuelle, puisque les personnes qui sont en congé de maladie prolongé n'ont pas droit présentement à une aide en ce sens. Une intervention hâtive est importante à la fois pour favoriser la réadaptation de l'employé et accroître ses chances de retourner au travail.

Un corollaire de cette proposition serait d'abolir l'accumulation des congés de maladie non utilisés. L'usage actuel qui consiste à accumuler les droits à ces congés donne aux employés qui comptent de longs états de service et qui sont en santé l'impression de perdre quelque chose quand ils prennent leur retraite avec à leur crédit une réserve substantielle de droits inutilisés à des congés de maladie. Cette situation fait que, périodiquement, des propositions sont présentées pour permettre la conversion en espèces de ces droits, même si les fonctionnaires bénéficient déjà d'une indemnité de départ relativement généreuse pouvant aller jusqu'à 30 semaines de paye pour la plupart des employés syndiqués et normalement jusqu'à 28 semaines pour les employés non syndiqués. Il ne fait aucun doute que certains sont tentés de se trouver un docteur compréhensif à l'approche de leur départ à la retraite.

Pour les employés ne comptant que quelques années de service, le remplacement du système d'accumulation des droits à des congés de maladie par un programme d'assurance-invalidité de courte durée constituerait une nette amélioration de leur protection en cas de maladie grave. Cela serait conforme à la nécessité d'inciter les personnes qualifiées à se joindre à la fonction publique pour des durées variées au cours de leur carrière. L'incidence des maladies augmente en partie avec l'âge, mais l'invalidité peut frapper à n'importe quel stade de la vie. Un régime d'assurance correspondrait de manière plus logique au problème à régler.

En passant en revue ces questions, il serait sage de s'interroger sur l'équilibre optimal à maintenir dans la gestion des risques inhérents à ces avantages entre l'achat d'une protection auprès d'assureurs de l'extérieur et la prise en charge directe de ces risques.

Parallèlement, des mesures pourraient être prises en vue d'harmoniser les régimes d'assurance-invalidité destinés aux différentes parties du secteur public fédéral. Ainsi, à l'heure actuelle, les régimes d'assurance-invalidité des Forces canadiennes et des membres réguliers et civils de la GRC prévoient le versement de 75 % plutôt que de 70 % du salaire en cas d'invalidité à long terme. Par contre, la protection contre l'inflation du régime des Forces canadiennes est moins bonne que celle des autres régimes fédéraux. À moins que nous puissions invoquer une raison impérieuse pour justifier différents taux de remplacement du salaire ou de protection contre l'inflation, il serait logique d'appliquer une norme de protection unique dans tout le secteur public fédéral.

Prestations supplémentaires de décès

Un dernier sujet important qu'il convient d'examiner, en rapport avec la question des assurances, est le régime de prestations supplémentaires de décès (PSD) en vertu de la Loi sur la pension de la fonction publique. On le décrit comme « une forme d'assurance-vie temporaire décroissante destinée à protéger l'employé et son bénéficiaire durant les années où il cotise à son régime de pension ». Pourtant, l'actuel régime de PSD prévoit le versement du double du salaire jusqu'à l'âge de 65 ans, année à partir de laquelle la protection commence à diminuer progressivement jusqu'à 75 ans. Si l'objectif déclaré du régime est toujours valide, il vaudrait peut-être mieux prévoir le versement de cinq fois, voire même dix fois le salaire, pendant les premières années de service, puis commencer à réduire graduellement la protection jusqu'à peut-être une seule fois le salaire à 65 ans, et par la suite encore moins, comme c'est le cas actuellement.

Le financement de cette prestation est inhabituel sous trois aspects : premièrement, depuis 1955, 80 % de son coût est assumé par les employés; deuxièmement, le solde d'ouverture[214] a crû d'année en année, passant de 616 millions de dollars en 1990‑1991 à 1,897 milliard de dollars en 2002‑2003. Enfin, c'est probablement le seul régime d'assurance collective au Canada qui est intégré à une loi, ce qui le rend très difficile à gérer à mesure que les circonstances changent.

Il serait logique de vérifier les prévisions actuarielles pour ce compte afin d'établir avec plus de précision ce à quoi on peut s'attendre au cours des prochaines décennies. Cela s'imposerait si les prestations prévues étaient remaniées pour mieux cadrer avec l'objectif officiel de la PSD. Si l'on prévoit qu'une fraction quelconque du solde accumulé ne sera pas requise pour payer les prestations au cours d'une période raisonnable, on pourrait envisager de réaffecter les fonds non requis à d'autres avantages sociaux. Il faudrait aussi envisager de retirer ce régime de la Loi sur la pension de la fonction publique pour le placer sur le même pied que les autres avantages sociaux offerts à la fonction publique.

Gouvernance des régimes

Avant de quitter ce domaine, il importe d'aborder le mode de supervision de ces régimes. Le mode de gouvernance des avantages sociaux à la fonction publique devrait correspondre au mode de répartition des responsabilités pour leur financement. À l'heure actuelle, on semble appliquer des variantes du modèle de gestion conjointe patronale-syndicale, mais sans obligation redditionnelle conjointe à l'égard des conséquences financières des décisions prises. Si l'on adoptait un système d'enveloppe d'avantages sociaux négociée par employé dans le cadre de la négociation collective, il conviendrait d'établir une formule de gouvernance conjointe patronale-syndicale des régimes négociés auxquels les employés pourraient souscrire, soit à même leur enveloppe soit avec leur propre argent. Toutefois, aussi longtemps que l'employeur continuera d'assumer essentiellement la responsabilité financière de ces régimes, on devrait limiter le rôle des conseils d'administration de ces régimes au règlement des appels par consensus ou au renvoi des cas sans grande conséquence financière à un arbitre indépendant. L'employeur devrait prendre les décisions ayant pour effet d'augmenter sensiblement les coûts permanents d'un régime après consultation du conseil d'administration du régime.

Il faut aussi préciser le rôle des représentants de l'employeur siégeant aux conseils d'administration des régimes, qu'il s'agisse des conseils actuels ou de conseils de gestion véritablement conjoints. À l'heure actuelle, il n'est peut-être pas toujours clair pour les personnes choisies pour représenter l'employeur qu'elles doivent mettre de côté leurs intérêts en tant que bénéficiaires d'un régime au moment de prendre des décisions au sujet de ce régime. Les représentants de l'employeur devraient recevoir une formation approfondie[215] du Secrétariat du Conseil du Trésor avant d'assumer leurs fonctions. De fait, il serait logique que certains des représentants de l'employeur ne soient pas eux-mêmes bénéficiaires du régime. Il incombe aux membres des conseils de faire preuve de jugement dans l'interprétation des positions de principe de l'employeur. Cette façon de faire permettrait sans doute des débats animés et nécessaires entre les représentants de l'employeur. Cependant, ces derniers devront toujours veiller à ne pas se laisser influencer indûment par leurs propres intérêts en tant que membres des régimes visés.

D'aucuns prétendront qu'une refonte fondamentales dans le domaine des régimes d'assurance, des soins de santé et des soins dentaires serait trop controversée, trop difficile et trop complexe pour en valoir la peine. Cela voudrait dire continuer indéfiniment à offrir un méli‑mélo d'avantages sociaux instaurés sans coordination au fil des décennies, qui ne répondent plus nécessairement aux besoins actuels des employés et qui coûtent de plus en plus cher à l'employeur, sans chercher véritablement à adopter les meilleures pratiques d'autres employeurs. Il est temps d'examiner attentivement les avantages sociaux dont les fonctionnaires fédéraux et les personnes à leur charge auront besoin à l'avenir, de se pencher sur la meilleure façon de les financer et de voir comment on pourrait faire en sorte que les employés, par l'intermédiaire de leurs syndicats, partagent avec l'employeur la responsabilité et l'obligation de rendre compte de la conception et du financement de ces avantages.

Congés et heures supplémentaires

Dans le Volume Deux, nous expliquons comment les politiques relatives aux congés et aux heures supplémentaires ont évolué depuis le début des années 1990. Nous décrivons aussi comment a évolué leur usage total, ainsi que l'usage tant des congés de maladie que des congés pour obligations familiales au sein des groupes professionnels dont les membres se sont servis fréquemment ou non de ces congés.

Au niveau le plus général, nous observons que le nombre de congés pris est relativement constant depuis 1990‑1991 – environ 40 jours par année pour tous les types de congé. En 2002‑2003, il semble être passé à environ 41 jours, ce qui cadre avec l'ajout de deux jours de congés personnels dans la plupart des conventions collectives à compter de 2001.

Nous craignons cependant que certains groupes, notamment les cadres de direction, aient tendance à ne pas utiliser tous leurs congés annuels[216]. En vertu d'une politique ou de la convention collective qui s'applique à eux, les employés ont l'option (avec l'approbation de leur superviseur) de se faire payer leurs congés en espèces, plutôt que de les prendre en temps. Cependant, la politique relative aux congés a manifestement pour but de promouvoir la santé et la résistance physique et psychologique des employés. De fait, en payant du temps non travaillé, l'employeur investit dans le bien-être de l'employé. Le fait de ne pas utiliser tous les congés disponibles, en les convertissant en espèces ou en les accumulant pour plus tard, vient à l'encontre de cet objectif. Les gestionnaires de la fonction publique devraient encourager vivement leurs employés à utiliser tous les congés auxquels ils ont droit. Une culture où les gens sont considérés comme continuellement indispensables est malsaine et risque d'être improductive.

De même, au sein de certains groupes ou de certaines organisations de la fonction publique, on semble s'attendre à ce que les heures supplémentaires ne soient pas réclamées ou, à tout le moins, pas en totalité. Il est frappant de constater dans le Volume Deux que le travail supplémentaire est presque unique parmi les éléments de la rémunération totale en ce sens que le nombre d'heures supplémentaires est demeuré essentiellement inchangé de 1991‑1992 à 2002‑2003[217]. Cette tendance contraste, par exemple, avec la Gendarmerie royale du Canada, où un nombre très similaire de membres a fait beaucoup plus d'heures supplémentaires au fil des ans, leur valeur passant de 66,4 millions de dollars, en 1990‑1991, à 99,1 millions de dollars en 2002‑203[218].

Selon le sondage réalisé en 2002 auprès des fonctionnaires fédéraux, 63 % (question 7) estimaient qu'ils « pouvaient demander d'être rémunérés (en argent ou en congés) pour les heures supplémentaires qu'ils avaient faites ». Cependant, 16 % des fonctionnaires (question 15) ont indiqué « qu'ils étaient rarement ou jamais rémunérés pour les heures supplémentaires qu'ils avaient faites ». Les gestionnaires de la fonction publique ne doivent pas dissuader leurs employés de présenter des demandes légitimes de paiement des heures supplémentaires ou refuser de telles demandes.

Avantages offerts aux pensionnés

En plus de recevoir leur pension aux termes de la Loi sur la pension de la fonction publique, les pensionnés de la fonction publique participent à des régimes d'assurance-vie, de soins de santé et de soins dentaires financés en partie par l'employeur. Pour les régimes non couverts par une assurance externe, le passif actuariel des prestations auxquelles auront éventuellement droit les fonctionnaires à la retraite est substantiel. Depuis que l'on a commencé à suivre et à consigner ce montant sur la base de la comptabilité d'exercice dans les Comptes publics du Canada, il est passé de 6,5 milliards de dollars en 2000-2001 à 7,2 milliards de dollars en 2002-2003[219]. Ces dernières années, il n'y a pas eu d'évaluation globale du montant qu'il conviendrait que l'employeur fédéral contribue au coût des avantages destinés aux pensionnés, en relation au niveau de rémunération actuelle des employés et des pratiques des grands employeurs du secteur privé et du secteur public élargi au Canada. Une telle évaluation n'a que trop tardé.

Voici donc nos recommandations pour ce chapitre :

Recommandation 15

15.1 Le président du Conseil du Trésor devait charger des experts externes, y compris des personnes ayant l'expérience de la conception et de la gestion des avantages sociaux, tant dans l'optique de la partie syndicale que de celle de la partie patronale, d'entreprendre une réflexion poussée sur les meilleurs moyens à prendre pour offrir aux employés une assurance en cas de décès ou d'invalidité, ainsi qu'une protection supplémentaire par rapport aux régimes généraux de soins de santé et de soins dentaires, en tenant compte des besoins courants et à venir des employés et de leurs personnes à charge. La portée de l'examen devrait inclure l'objet et la forme du Régime de prestations supplémentaires de décès, aux termes de la Loi sur la pension de la fonction publique. Dans le cadre de cette réflexion, il faudrait notamment évaluer la faisabilité d'offrir aux employés une gamme d'options en matière de protection qui répondraient mieux à leurs besoins et à leurs préférences, à un coût raisonnable. Il faudrait enfin examiner l'opportunité d'acheter des programmes de protection souscrits par des assureurs privés (comme le Régime d'assurance-responsabilité actuel) ou des programmes administrés par des tiers aux termes desquels le gouvernement assume directement la responsabilité des prestations (tel que le Régime de soins dentaires de la fonction publique).

15.2 En s'appuyant sur cette étude externe, le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait discuter avec les syndicats de la fonction publique de la façon d'établir une enveloppe annuelle d'avantages sociaux qui servirait exclusivement à la souscription d'avantages sociaux à partir d'un menu défini conjointement. Le montant initial de cette enveloppe devrait être fixé de manière à maintenir l'équivalence globale avec la valeur des avantages sociaux actuels, assorti d'un coefficient d'indexation annuel approprié. Les négociations collectives ou les décisions en matière de rémunération des employés non représentés pourraient entraîner des variations, à la hausse ou à la baisse, de cette enveloppe. On pourrait aussi envisager une approche hybride, dans laquelle certains des avantages sociaux prévus dans l'enveloppe seraient obligatoires pour tous les employés, tandis que d'autres seraient laissés au choix de chacun.

15.3 Les employés devraient pouvoir souscrire, à leurs frais, une protection en sus de celle prévue dans l'enveloppe des avantages sociaux, aux mêmes conditions.

15.4 Le président du Conseil du Trésor devrait commander une évaluation spécialisée destinée à éclairer l'étude proposée à la recommandation 15.1, ici aussi en faisant appel à des experts externes représentant toute la gamme des points de vue de la partie syndicale et de la partie patronale de la fonction publique, pour examiner la façon de consolider les régimes de protection offerts aux employés en cas d'invalidité prolongée, dans le but à la fois d'améliorer les services offerts aux employés et de réduire les coûts d'administration. L'examen devrait englober la possibilité de remplacer le système actuel d'accumulation des congés de maladie non utilisés par une forme d'assurance-invalidité de courte durée.

15.5 Le Conseil du Trésor devrait harmoniser le taux de remplacement du revenu dans le cadre de l'assurance-invalidité et la protection contre l'inflation annuelle dans les divers régimes du secteur public fédéral, sauf s'il existe une raison impérieuse de maintenir des distinctions à ce titre.

15.6 Selon les conclusions de la réflexion proposée à la recommandation 15.1, le président du Conseil du Trésor devrait demander au Bureau du surintendant des institutions financières d'évaluer le niveau de contribution requis dans le Compte des prestations supplémentaires de décès pour en assurer la viabilité financière à long terme. Tout excédent par rapport au niveau requis pourrait être pris en compte dans les discussions élargies menées avec les syndicats de la fonction publique sur l'avenir des régimes d'avantages sociaux.

15.7 La gouvernance des régimes d'avantages sociaux de la fonction publique devrait cadrer avec la répartition de la responsabilité du financement de ces régimes. Un modèle de gestion conjointe patronale-syndicale ne devrait s'appliquer qu'aux régimes où l'employeur et les employés (par l'intermédiaire des syndicats qui les représentent) sont responsables de la viabilité financière du régime.

15.8 Il faudrait sélectionner et former les représentants de l'employeur siégeant aux conseils d'administration des régimes pour qu'ils agissent de manière à assurer la mise en œuvre de la politique de l'employeur en matière d'avantages sociaux, y compris une approche prudente en matière de financement, et non de veiller à leurs intérêts en tant que membres de ces régimes. Pour souligner l'importance de ce rôle, les représentants à ces conseils devraient être nommés par le gouverneur en conseil.

15.9 Les gestionnaires de la fonction publique devraient s'assurer que les employés utilisent normalement les vacances annuelles auxquelles ils ont droit et veiller à ce que les employés soient rémunérés pour les heures supplémentaires de travail.

15.10 Le président du Conseil du Trésor devrait commander un examen indépendant pour établir le niveau approprié des cotisations de l'employeur aux régimes d'assurance-vie, de soins de santé et de soins dentaires des pensionnés de la fonction publique, en tenant compte notamment des pratiques des autres grands employeurs du secteur public et du secteur privé au Canada. Les représentants des pensionnés de la fonction publique et des syndicats de la fonction publique devraient être invités à contribuer à cet examen.

C'est ainsi que se termine la série de recommandations ayant trait à un large éventail d'enjeux clés en matière de rémunération. Nous passons maintenant aux possibilités qui s'offrent pour mettre à jour le cadre législatif régissant la gestion de la rémunération à la fonction publique fédérale. Nous concluons ensuite la section sur les recommandations par quelques réflexions sur le suivi et la mise en œuvre de nos recommandations.

 




15. Domaines où des modifications législatives pourraient être apportées

Nous traitons dans ce chapitre de deux points délicats régis par la loi : la négociation collective dans la fonction publique fédérale et la parité salariale, soit l'application du principe du salaire égal pour un travail de valeur égale. Dans les deux cas, les enjeux sont complexes et méritent une analyse approfondie. De fait, des comités consultatifs spéciaux ont produit des rapports importants sur ces deux sujets au cours des dernières années : le Comité consultatif sur les relations patronales-syndicales dans la fonction publique fédérale, présidé par John Fryer, qui a présenté des rapports en 2000 et 2001[220], et le Groupe de travail sur l'équité salariale, présidé par Beth Bilson, qui a présenté un rapport en 2004[221]. Dans le présent rapport, nous nous contentons de décrire certains des enjeux qui ont trait spécifiquement à la gestion responsable de la rémunération et qui, selon nous, méritent un examen plus poussé, en dépit des importants travaux réalisés par le Comité consultatif Fryer et le Groupe de travail sur l'équité salariale.

Négociation collective et gestion de la rémunération

Pour commencer, il est important d'affirmer qu'à notre avis, les syndicats jouent un rôle essentiel en permettant aux employés de parler d'une seule voix dans des dossiers importants relatifs au milieu de travail et que la négociation collective représente la meilleure façon de déterminer les conditions d'emploi des travailleurs syndiqués. Dans la présente section, nous remettons en question le point de vue selon lequel la négociation collective devrait être un genre d'épreuve de force dans le secteur public. Cette critique est néanmoins entreprise dans le cadre d'un engagement fondamental à l'égard tant de la légitimité des syndicats que du rôle crucial qu'ils jouent dans la représentation des employés, en particulier dans le processus visant à déterminer les conditions de la rémunération dans le secteur public.

Nul doute que les liens entre la négociation collective et l'évolution de la rémunération susciteront toujours la controverse. Les résultats obtenus dans la fonction publique fédérale depuis 1967 sont relativement positifs, même si la route a parfois été cahoteuse. Pour l'avenir, toutefois, il pourrait être raisonnable de se demander si un système permettant davantage de servir le public sans interruption ne donnerait pas des résultats semblables, voire meilleurs.

Aperçu historique

La meilleure façon de décrire l'expérience de près de quatre décennies de négociation collective dans la fonction publique fédérale depuis son adoption en 1967 serait de la caractériser d'inégale. Dans le chapitre 3, nous décrivons comment les périodes de négociation collective ont alterné avec des périodes de détermination des salaires par voie législative. Il y a eu en fait trois périodes durant lesquelles le gouvernement a fixé directement les salaires :

  • 1975-1978 : La Loi anti-inflation a réglementé les augmentations salariales pour la plupart des employeurs au Canada, notamment la fonction publique fédérale.
  • 1983-1984 : La Loi sur les restrictions salariales du secteur public s'appliquait tout particulièrement au secteur public fédéral, limitant les augmentations salariales à 6 % et à 5 % pour 1983 et 1984, respectivement.
  • 1991-1997 : La Loi sur la rémunération du secteur public et, pendant cinq années successives sur six, la Loi sur l'exécution du budget ont gelé les salaires de la fonction publique fédérale, imposant une hausse de 3 % en 1992.

Pendant les 30 premières années de négociation collective, le système n'a pu fonctionner au total que 19 ans. La période maximale de fonctionnement ininterrompu a été de huit ans – immédiatement après la mise en œuvre du nouveau régime en 1967. La période actuelle, qui a débuté en 1997 au moment du dégel des salaires et de la reprise de la négociation collective, est donc déjà au moins aussi longue que la précédente période de négociation collective continue. Il faut néanmoins reconnaître que, même pendant les périodes de négociation collective, il y a eu des cas de recours à la loi pour mettre fin à une grève particulière, voire pour prévenir une grève.

La plupart des débats publics concernant la négociation collective dans la fonction publique fédérale portent sur ce que l'on pourrait qualifier de mauvaises relations ou de méfiance mutuelle entre le Secrétariat du Conseil du Trésor, qui négocie à l'égard de la plupart des fonctionnaires fédéraux, et les syndicats du secteur public. On semble sous-entendre que, si d'une façon ou d'une autre les parties s'efforçaient davantage de s'entendre ou si l'employeur était moins enclin à recourir à des contrôles arbitraires, tout irait bien.

En fait, les relations entre la direction et les spécialistes des ressources humaines du Secrétariat du Conseil du Trésor et leurs homologues syndicaux sont presque toujours modérées et constructives. Il convient toutefois de noter qu'un roulement relativement élevé parmi les principaux intervenants, notamment du côté patronal, nuit probablement au maintien de solides relations fondées sur la confiance personnelle entre les parties.

Quoi qu'il en soit, l'instabilité qu'a connue le système de négociation collective depuis 1967 a des racines plus profondes, liées principalement aux différends sur le bien-fondé des augmentations de salaire et d'avantages sociaux de la fonction publique dans un contexte économique et politique plus général et, à notre avis, au caractère inapproprié des outils disponibles pour régler les conflits dans le cadre des lois applicables[222].

Les critiques à l'égard des relations patronales-syndicales dans la fonction publique fédérale comprennent souvent l'affirmation – en général non étayée par des données empiriques – selon laquelle les fonctionnaires ont souffert financièrement en comparaison des employés du secteur privé au Canada. Le présent rapport démontre que, même si cela était vrai dans une certaine mesure pendant la période de gel salarial du début et du milieu des années 1990, il n'en est plus ainsi.

Nous soulignons au chapitre 2 de ce volume qu'à la suite du dégel des salaires de 1997, le secteur public fédéral – plus précisément le noyau de la fonction publique, dont le Conseil du Trésor est l'employeur, et les employeurs distincts – a vu son salaire moyen réel augmenter de 14,1 % en cinq ans, soit de 1997‑1998 à 2002‑2003. En fait, il y avait eu une baisse du salaire réel moyen (en dollars constants de 2003) d'environ 3,7 %[223] au milieu des années 1990. En revanche, cette baisse avait été plus que rattrapée en 1999-2000. Il est ainsi démontré au chapitre 4 (voir la figure 1027 en particulier) que le taux cumulatif d'augmentation du salaire moyen dans le secteur public fédéral[224] était en réalité inférieur aux augmentations annuelles négociées dans le secteur privé au cours de la période de 1990‑1991 à 1999-2000. Toutefois, les augmentations cumulatives accordées dans le secteur public fédéral à compter de 1990‑1991 dépassaient au total de plus de 8 % celles du secteur privé en 2002-2003[225].

Tout en obtenant ces résultats sur le plan salarial, les fonctionnaires fédéraux ont vu leurs prestations de pension s'améliorer tout en payant une part réduite du coût des cotisations pour services courants. Ainsi, les modifications apportées à la Loi sur la pension de la fonction publique en 1999 ont fait passer de six à cinq ans la période d'établissement du salaire moyen pour le calcul des prestations. Les autres avantages sociaux sont demeurés essentiellement inchangés, sauf en ce qui concerne l'instauration d'un régime de services dentaires pour les pensionnés en 2001, bien que leur coût ait à peu près doublé de 1997-1998 à 2002-2003 – l'employeur absorbant presque entièrement la hausse.

Nous devons donc conclure que, globalement, les fonctionnaires fédéraux s'en sont bien sortis par rapport au secteur privé canadien depuis l'adoption de la négociation collective, et ce, malgré des périodes de limitations arbitraires, en particulier au début et au milieu des années 1990.

Un modèle inapproprié?

Il n'y a en principe que trois façons de déterminer la rémunération : une partie la détermine unilatéralement; les parties s'entendent; ou une tierce partie tranche. Jusqu'en 1967, le gouvernement fédéral a déterminé lui-même la rémunération de la fonction publique après avoir pris en considération l'avis des associations d'employés[226]. Les diverses périodes au cours desquelles le système de négociation collective a cessé de fonctionner, soit pendant 11 ans depuis 1967, représentent en fait un retour à l'ancienne approche unilatérale. La culture publique canadienne n'accepterait certainement pas un retour définitif à une telle politique. En outre, dans un monde où les employeurs doivent faire appel à la loyauté de leurs employés pour favoriser l'efficacité en milieu de travail, il serait improductif de chercher à exclure les représentants des employés de la détermination des conditions de rémunération de la fonction publique fédérale.

L'option consistant à s'entendre sur la rémunération peut prendre une forme individuelle ou collective. Comme nous l'avons fait valoir plus tôt dans ce chapitre, la nécessité de recruter des employés ayant des compétences exceptionnelles dans un monde où le savoir est essentiel au succès oblige à faire preuve de plus de souplesse dans la détermination des régimes de rémunération individuels. Au Canada, cependant, le droit de négocier collectivement les salaires et les avantages sociaux est bien établi, notamment dans les grands milieux de travail du secteur public. Pour la majeure partie de la fonction publique, on continuera sans doute de négocier collectivement la rémunération avec des syndicats accrédités.

Le succès de la négociation collective dépend de la façon dont se règlent les conflits. Idéalement, les parties s'entendront sur des conditions en négociant directement. Toutefois, la manière de négocier d'un employeur ou d'un syndicat dépend de ce à quoi il s'attend dans l'éventualité où il n'y aurait pas d'entente. La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique donne deux choix aux syndicats : la conciliation suivie de la possibilité d'une grève, ou l'arbitrage par une tierce partie. Pour l'instant, nous nous concentrons uniquement sur l'option conciliation/grève, qui est en fait la voie régulièrement choisie par les plus gros syndicats.

Certains prétendent que le gouvernement fédéral jouit d'un avantage indu dans le cadre de la négociation collective avec ses employés. Ils affirment que, si le gouvernement n'aime pas comment le processus se déroule, il a la possibilité de contourner la négociation collective en demandant au Parlement d'en déterminer unilatéralement l'issue par voie législative. Cela est en définitive indéniable et il y a certainement eu des cas où le Parlement a imposé la volonté du gouvernement à l'ensemble de la fonction publique ou à un groupe de négociation en particulier.

La plupart du temps, le gouvernement hésite toutefois à recourir à une loi. Présenter un projet de loi au Parlement pour régler un conflit de travail dans la fonction publique n'est normalement pas bien vu, sauf s'il apparaît clairement que la sécurité de la population est d'une certaine façon menacée ou que les employés en grève agissent de manière irresponsable en faisant courir un risque à la population[227]. Dans des circonstances plus ordinaires, le syndicat pourrait être en mesure de bénéficier d'un pouvoir de négociation considérable en raison de l'importance des services fournis par ses membres. Pour que la population soit moins ou aucunement incommodée, il se pourrait que le gouvernement ressente la pression d'accorder des hausses salariales ou d'autres avantages sociaux non justifiés par rapport aux conditions offertes sur le marché du travail externe. Acheter la paix à l'aide d'une entente généreuse est souvent considéré comme la meilleure façon de régler à court terme un conflit de travail dans la fonction publique.

En théorie, les travailleurs qui fournissent des services essentiels à la population sont désignés et n'ont pas le droit de participer à un mouvement de grève. La nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique maintient le droit exclusif de l'employeur de déterminer le niveau auquel un service essentiel doit être fourni à la population. L'employeur doit ensuite négocier avec le syndicat le nombre de postes nécessaires pour fournir le service essentiel. Si les parties n'arrivent pas à s'entendre, elles peuvent l'une et l'autre demander à la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) de trancher toute question non réglée. L'entente sur les services essentiels résultant de la négociation ou d'une décision de la CRTFP demeure en vigueur jusqu'à ce qu'elle soit modifiée par une entente ou par la décision d'un arbitre.

Dans la pratique, toutefois, cette protection de la capacité du gouvernement de répondre aux besoins de la population pendant un conflit de travail dans la fonction publique peut être compromise de deux façons. Dans le premier cas, les gestionnaires ministériels pourraient ne pas réussir à négocier un nombre suffisant d'employés devant fournir les services essentiels à la population ou à convaincre la CRTFP de le faire. Ils pourraient également ne pas être en mesure de modifier l'entente à temps lorsqu'une grève est en vue. Il s'agit là évidemment d'une responsabilité de l'employeur; ce n'est pas la faute du syndicat si les désignations sont insuffisantes ou ne sont pas faites à temps. Peu importe la raison, lorsque cela arrive, la capacité de l'employeur de résister à l'interruption de services sur lesquels la population compte est limitée, surtout à mesure que les problèmes s'accumulent. Ce fut le cas notamment en 2002-2003 lors d'un conflit de travail impliquant le groupe Navigation aérienne (AO). À mesure que le temps passait et que se faisait sentir l'effet des mouvements de grève ciblés, le retard accumulé dans la certification des aéronefs et l'attestation de la compétence des pilotes a menacé la capacité opérationnelle de l'industrie du transport aérien au Canada.

Le deuxième problème associé aux désignations mine encore plus la notion même de services essentiels. Il s'agit du refus de plus en plus fréquent de la part de piqueteurs de permettre aux travailleurs essentiels, voire aux employés exclus comme les cadres supérieurs ou les agents du personnel, de se rendre sur leur lieu de travail sans devoir attendre plus ou moins longtemps, de façon arbitraire. Ainsi, durant les grèves tournantes déclenchées à Ottawa en 2004, des piqueteurs ont décidé avec une détermination certaine que les employés exclus ou désignés, ou même les membres du public, seraient forcés d'attendre une heure (à la discrétion des piqueteurs) avant d'entrer sur le lieu de travail. À certains endroits, ce délai forcé aurait même duré jusqu'à quatre heures. Rien dans le droit du travail n'autorise ce genre de réglementation de l'accès au lieu de travail par les syndicats. Cette pratique est en fait une forme d'intimidation qui risque de devenir incontrôlable. Pour la première fois, la nouvelle Loi (article 199)interdit d'empêcher des employés dont le poste est désigné essentiel d'avoir accès à leur lieu de travail ou d'en sortir. L'article 200 prévoit l'imposition d'une amende pouvant aller jusqu'à 1 000 $ aux personnes qui enfreignent l'article 199. La Cour fédérale devrait maintenant pouvoir faire respecter cet article à l'aide d'ordonnances applicables partout au Canada, s'il y a lieu.

Il est trop tôt pour savoir comment ces changements au droit du travail régissant la négociation collective dans la fonction publique fédérale se traduiront dans les faits. Nous pouvons en revanche espérer que les nouvelles dispositions contribueront à faire en sorte que le gouvernement n'ait plus à choisir entre céder aux demandes syndicales parce que la population craint d'être privée de services essentiels et avoir recours à la mesure draconienne qu'est le règlement d'un conflit par voie législative.

Toutefois, peu importe les répercussions de la LRTFP, la question plus fondamentale demeurera le fait que, du point de vue de l'intérêt public, il y a lieu de douter de la valeur du recours à la grève pour régler les conflits de travail dans le secteur public. Comme Roy Adams l'a fait observer, les grèves et les lock-out s'apparentent à la méthode médiévale de règlement des différends par une épreuve de force.[228]

L'idée qui sous-tend généralement le recours à une loi est que l'interaction du pouvoir économique ou, au besoin, du pouvoir politique est la meilleure façon de régler les conflits de travail. La perspective de l'épreuve de force a été bien décrite par Barbara Wootton, membre du Labour à la Chambre des Lords du Royaume-Uni : il est normal qu'un syndicat soit antisocial; les membres auraient raison d'être mécontents si leurs représentants et leurs comités cessaient de faire passer les intérêts du groupe en premier[229].

Ce concept d'épreuve de force peut convenir au secteur privé. Une rémunération excessive peut mettre en péril la taille ou même la survie d'une entreprise, ce qui limite nécessairement les revendications syndicales. Dans le secteur public, un tel frein économique à la progression de la rémunération n'existe pas, du moins à court terme, notamment pour les groupes d'employés relativement restreints. Est-il néanmoins raisonnable d'accorder aux fonctionnaires une rémunération relativement élevée uniquement parce qu'ils pourraient être en mesure d'utiliser le rôle privilégié qu'ils jouent dans la prestation de services essentiels à la population pour imposer de généreuses conventions collectives?

Yvon Tarte, président de la Commission des relations de travail dans la fonction publique, a affirmé ce qui suit dans une allocution prononcée lors du colloque du Conseil national mixte de 1999 :

La méthode du recours à la grève pour régler les conflits dans le secteur public ne repose pas sur les mêmes bases que dans le secteur privé. En 1967, Jake Finkelman, le père des relations de travail dans la fonction publique fédérale, a longuement réfléchi et a hésité avant d'être convaincu d'accepter et de recommander la conciliation/grève comme méthode de règlement des conflits pour la fonction publique fédérale. Plusieurs années après, il a indiqué que, si on lui en donnait la possibilité, il n'emprunterait pas cette voie de nouveau [traduction].[230]

Le modèle de la négociation collective fondé sur une épreuve de force implique que des principes comme la comparabilité servent tout au plus de points de référence pour la négociation. Comme nous l'avons indiqué au chapitre 2, c'est ce dont témoigne aussi l'expérience de la fonction publique fédérale, où l'on a comparé avec le marché ou évité de le faire, selon ce qui était utile pour la lutte que représentait la négociation collective.

Le recours au pouvoir économique appelle une réponse du pouvoir politique. Il n'est donc pas vraiment difficile de comprendre le recours assez fréquent par le gouvernement fédéral au cours des 38 dernières années à la détermination unilatérale de la rémunération par l'imposition de contrôles ou de gels salariaux globaux ou de lois forçant le retour au travail de groupes particuliers.

Les positions axées sur le pouvoir économique et le pouvoir politique ne permettent ni l'une ni l'autre de tenir compte d'un aspect crucial de la négociation collective dans la fonction publique fédérale, à savoir le lien entre les augmentations salariales et la productivité. Dans le secteur privé, les négociations concernent autant les règles du travail que les salaires, et ce, pour la simple raison que la capacité d'une entreprise d'accorder des hausses salariales supérieures au taux d'inflation dépend généralement d'un accroissement de la productivité. De telles améliorations au chapitre de la productivité sont possibles grâce à l'utilisation du meilleur équipement disponible et des méthodes de travail les plus efficaces[231].

Dans la fonction publique fédérale, il y a rarement un lien direct entre la négociation collective et l'amélioration de la productivité, pour trois grandes raisons. Premièrement, dans la majeure partie de la fonction publique, mesurer la productivité de manière significative et fiable est en soi difficile. Deuxièmement, même lorsque gérer la productivité est manifestement faisable (par exemple pour des processus relatifs à des volumes considérables tels l'émission de chèques), la relation de négociation en est une où ni le pouvoir économique ni le pouvoir politique ne domine. Normalement, une solution émerge sans qu'il soit nécessaire de comparer l'évolution de la rémunération à celle du secteur privé ou de la relier aux niveaux ou aux changements de productivité. Troisièmement, les négociations dans le secteur public fédéral font intervenir de très gros ensembles, de sorte qu'il est difficile voire impossible de faire ressortir et encore moins de tenter de régler de manière satisfaisante des questions liées au milieu de travail qui sont essentielles pour assurer l'efficacité d'un ministère ou d'un organisme[232].

En résumé, donc, la négociation collective dans la fonction publique fédérale telle que nous la connaissons (axée avant tout sur le modèle de la conciliation/grève pour le règlement des conflits) fonctionnent en quelque sorte, mais n'est ni suffisamment stable ni vraiment conçue pour servir l'intérêt public. Il convient alors de se poser la question suivante : pourrait-on raisonnablement s'attendre à ce qu'il y ait une autre façon de régler les conflits de travail qui permettrait d'obtenir de meilleurs résultats à la fois pour les employés et pour les contribuables canadiens?

Existe-t-il un meilleur modèle?

Le dilemme décrit ci-dessus en rapport avec la juste détermination de la rémunération dans le secteur public fédéral concerne évidemment aussi, dans une large mesure, l'ensemble du secteur public canadien. S'il existait un modèle incontestablement supérieur à l'actuel mélange de guérilla industrielle et d'unilatéralisme politique, il serait sûrement déjà en train de se répandre dans les instances responsables des relations de travail au Canada. Mais aucun consensus de ce genre n'est perceptible.

D'un point de vue conceptuel, toute solution de rechange doit comprendre le règlement par une tierce partie des conflits de travail où le gouvernement et le syndicat n'arrivent pas à convenir d'une issue dans le cadre de la négociation collective. Nombre de variations sur ce thème ont été mises à l'essai au cours des dernières décennies. John O'Grady présente un excellent examen de la question dans un document intitulé Arbitration and Its Ills[233]. Voici certains des points les plus pertinents qu'il souligne :

  • L'expérience indique que remplacer le droit de grève par l'arbitrage obligatoire entraîne une baisse de la proportion des conflits de travail réglés par la négociation directe entre les parties.
  • Dans l'ensemble, les données disponibles indiquent que l'arbitrage comporte une distorsion à la hausse pour le secteur public dans son ensemble, mais ce point de vue ne fait pas l'unanimité[234].
  • Des études incitent à penser que l'importance accordée par les arbitres aux différents critères varie sensiblement.
  • Les études montrent de façon systématique que la productivité, la capacité de payer et les déséquilibres sur le marché du travail ne jouent qu'un rôle modeste dans les décisions arbitrales. L'importance accordée à la comparabilité est telle qu'elle tend à marginaliser les autres critères.
  • Donner instruction aux arbitres de prendre en considération la rémunération totale semble avoir relativement peu de répercussions sur les pratiques arbitrales.
  • L'arbitrage ne doit pas être perçu simplement comme une façon de remplacer le droit de grève. Remplacer le droit de grève par l'arbitrage obligatoire modifie en profondeur le processus de détermination des salaires dans le secteur public[235].

Le recours à l'arbitrage dans la fonction publique fédérale depuis le rétablissement de cette option en 2002 a généralement donné les mêmes résultats que ceux obtenus par la voie d'un règlement direct. Les hausses économiques ont été accordées au taux courant et des restructurations prévoyant l'ajout d'échelons salariaux avaient déjà été approuvées en juin 2005 dans cinq des sept décisions rendues, soit un peu plus que dans le cas de la négociation directe (11 des 17 règlements englobaient des restructurations).

La nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, entrée en vigueur en avril 2005, ajoute un élément de plus aux facteurs à prendre en considération dans les décisions arbitrales, à savoir « l'état de l'économie canadienne et la situation financière du gouvernement du Canada ». Cependant, on ne sait pas comment les arbitres choisiront d'interpréter ce point[236]. Après plusieurs années successives d'excédents budgétaires, on pourrait faire valoir que le gouvernement fédéral est en bonne posture pour accorder toute augmentation salariale qu'un arbitre jugerait justifiée.

En résumé, les résultats de l'arbitrage sont si imprévisibles qu'ils peuvent parfois paraître arbitraires. Par conséquent, s'en remettre simplement à ce qu'on pourrait appeler l'arbitrage traditionnel pour le règlement des conflits de travail de la fonction publique fédérale ne plairait probablement à personne, y compris au gouvernement en place. Quelle direction devrions-nous alors prendre?

Une solution de rechange logique serait de miser davantage sur le modèle de l'épreuve de force. Si nous décidons de déterminer la rémunération dans le contexte d'une épreuve de force, il conviendrait alors d'accorder plus de latitude à l'employeur. En particulier, outre les tactiques des piqueteurs décrites précédemment, les syndicats de la fonction publique fédérale ont de plus en plus tendance à recourir à de courtes grèves tournantes pour perturber le milieu de travail sans qu'il n'en coûte trop aux employés en grève sous forme de salaire perdu ou au syndicat sous forme d'indemnités de grève. Les membres des syndicats connaissent très bien les opérations gouvernementales et il n'est pas difficile de planifier les activités des grévistes pour qu'elles nuisent le plus possible aux opérations tout en ayant des répercussions négatives minimales pour le syndicat ou ses membres.

Au moins deux solutions pourraient aider à assurer un équilibre. La première est d'ordre administratif. Selon des données informelles, les gestionnaires de la fonction publique ne consigneraient pas avec beaucoup de rigueur les absences des grévistes[237]. En outre, compte tenu du système de paye, toute perte de salaire ne paraît sur les chèques de paye que longtemps après une grève. Ces deux tendances réduisent encore plus la pression ressentie par les employés en grève pour régler le conflit. La consignation systématique des absences des employés par les gestionnaires et la modification du système de paye pour que s'appliquent immédiatement les baisses de salaire feraient en sorte que les grèves tournantes ne soient plus une occasion de faire du théâtre de rue, mais plutôt de perdre de l'argent parce qu'on a décidé de déclencher une grève, peu importe sa durée.

La deuxième solution nécessiterait un changement législatif, à savoir accorder au ministère employeur le droit de mettre en lock-out les employés qui participent à une grève tournante, pour toute période pouvant aller jusqu'à l'échéance de la convention collective. On s'entend depuis longtemps pour dire que le gouvernement ne devrait pas mettre ses employés en lock-out, car il se trouverait à empêcher lui-même la prestation des services à la population. Mais, en faisant un usage de plus en plus subtil des grèves tournantes, les syndicats peuvent nuire au déroulement des opérations presque autant que lors d'une grève complète sans que cela ne coûte trop cher aux employés ni n'affecte trop le fonds de grève. Un pouvoir restreint de mettre en lock-out ceux dont les tactiques de harcèlement ont presque les mêmes conséquences qu'une véritable grève pourrait donc favoriser le règlement des points qui demeurent en litige. Dans la vraie vie, le gouvernement résistera toujours, et à juste titre, à la tentation de mettre en lock‑out des employés qui servent le public. En revanche, la crainte de voir un mouvement de grève limité donner lieu à un lock‑out contribuerait à restreindre les activités de grève ciblées des syndicats, qui comportent actuellement peu de risque et d'inconvénients financiers.

Dans l'ensemble, même si l'option d'un recours accru au modèle de la conciliation/grève semble logique, il y a peu de chance qu'elle améliore les relations patronales-syndicales dans la fonction publique fédérale ou rende la rémunération plus appropriée. La meilleure façon de procéder serait certainement de trouver des variantes au recours à une tiers pour régler les conflits de travail que l'on ne parvient pas à solutionner par la négociation collective.

La proposition la plus intéressante en ce sens qui ait été faite ces dernières années venait du Comité consultatif sur les relations patronales-syndicales dans la fonction publique fédérale, présidé par John Fryer, qui a présenté son rapport en juin 2001. Le Comité estimait que le choix de la procédure, soit entre la conciliation/grève et l'arbitrage, avait tendance à nuire au processus de règlement volontaire. En particulier lorsque le syndicat choisit la voie de l'arbitrage, il devient peu utile de faire des choix difficiles car l'arbitre prendra la décision finale de toute façon.

Le Comité a plutôt recommandé la création d'une Commission de règlement des différends d'intérêt public (CRDIP) inspirée de la Commission de règlement des différends d'intérêt public proposée en 1968 par le Groupe de travail Woods pour l'ensemble du domaine du travail de compétence fédérale. La CRDIP rendrait des comptes au Parlement et serait composée de membres venant de milieux syndicaux, patronaux et neutres.

La CRDIP aiderait les parties à dénouer les impasses en utilisant un large éventail de techniques établies de règlement des différends[238]. On a fait valoir que la latitude dont jouirait la Commission rendrait incertaine la solution qu'elle pourrait imposer en cas d'impasse, ce qui pourrait encourager les parties à en arriver elles-mêmes à une entente pour ne pas se voir imposer une solution moins désirable.

Le concept de commission d'intérêt public (CIP) se trouve dans la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Ce concept est cependant beaucoup plus limité que la Commission de règlement des différends d'intérêt public, préconisée dans le rapport Fryer. Essentiellement, la CIP est une nouvelle appellation pour le Bureau de conciliation qui figurait dans l'ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Il se pourrait que, pour convenir d'une liste d'éventuels présidents de CIP, on s'efforce de choisir des candidats exceptionnellement compétents jouissant d'une grande crédibilité auprès de la population. Si de telles personnes étaient nommées à la tête de certaines des premières CIP, une nouvelle norme pourrait s'établir aux yeux des parties et de la population en général pour ce qui est du poids des recommandations[239].

À cet égard, la volonté d'accorder des indemnités quotidiennes concurrentielles (ce que permet la LRTFP) aiderait à recruter certaines des personnes neutres les plus compétentes et les plus expérimentées dans le règlement des conflits de travail, ou d'éminentes personnalités reconnues pour leur jugement. La politique qui consistait, par le passé, à limiter ces indemnités à des montants relativement modestes visait sans aucun doute à faire des économies. Dans la pratique, il s'agissait assurément de fausses économies.

Lorsqu'on se demande s'il y a une solution de rechange réaliste et viable au modèle de la conciliation/grève pour régler les conflits de travail dans le secteur public fédéral, le document Arbitration and Its Ills, de John O'Grady, et l'examen qu'il fait du recours à l'arbitrage au Canada au début des années 1990 tempèrent l'enthousiasme. Le message principal qui semblent en ressortir est que les arbitres ont leur propre idée du rôle qu'ils jouent; la plupart des arbitres estiment que le but de l'arbitrage est de reproduire une issue négociée et non une issue découlant d'une décision unilatérale de l'employeur[240].

En fait, tout processus permanent reposant sur le recours à une tierce partie devrait viser l'application juste et constante d'une philosophie de la rémunération inspirée de la comparabilité. La plupart des observateurs s'entendent pour dire que la meilleure façon de rémunérer les fonctionnaires est de respecter le principe de la comparabilité avec ce qui est payé dans le secteur privé pour un travail semblable. Comme l'ont souligné Fogel et Lewin :

La production gouvernementale ne passe pas par le marché, où sa valeur relative pourrait être évaluée par des clients. En l'absence de la discipline du marché des produits pour régir les pratiques salariales ... le plus juste ne serait-il pas d'accorder aux fonctionnaires le salaire de leurs homologues du secteur privé? Afin d'attirer au gouvernement des employés de compétence au moins moyenne, le salaire payé doit être comparable à celui offert dans le secteur privé. Toutefois, payer davantage que le secteur privé serait inutile pour le gouvernement et constituerait un gaspillage de recettes publiques [traduction][241].

Un système de règlement des différends par une tiers qui ne permet pas la grève dans la fonction publique fédérale devrait respecter plusieurs conditions, dont les suivantes :

  1. Il faudrait disposer de renseignements fiables sur la rémunération comparable à l'ensemble de la population active canadienne. Comme nous l'avons déjà indiqué, il est difficile de concevoir et de réaliser des enquêtes qui soient convaincantes à la fois pour l'employeur et pour les représentants syndicaux. Néanmoins, nous avons la chance de nous doter d'une telle capacité grâce aux services d'analyse et de recherche sur la rémunération que doit mettre en place la nouvelle Commission des relations de travail dans la fonction publique. La réussite dépendra de l'attention qu'accordera en temps opportun la haute direction à une conception rigoureuse des critères et des méthodes d'enquête.
  2. La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique devrait préciser la politique de rémunération à appliquer. Cette politique n'indiquerait pas les éléments à prendre en considération, mais plutôt les critères à appliquer. Nous esquissons ci‑dessous un modèle sur lequel de tels critères pourraient reposer.
  3. Les arbitres[242] chargés de régler les différends devraient être nommés pour un mandat déterminé afin de pouvoir conserver l'indépendance nécessaire. Il faudrait qu'ils jouissent d'une crédibilité personnelle tant auprès du gouvernement employeur que des syndicats de la fonction publique. À cette fin, les personnes nommées devraient être choisies parmi des candidats acceptables pour le gouvernement et les syndicats. En étant nommés pour un mandat non renouvelable de cinq ans, par exemple, les arbitres pourraient jouir d'une indépendance raisonnable.
  4. Il faudrait que les arbitres justifient en détail et par écrit leurs décisions. La seule façon de démontrer que les critères prévus par la loi pour le règlement des différends sont appliqués en pratique est d'assurer la transparence du raisonnement à la base des décisions et de l'interprétation de la preuve.
  5. Il devrait être possible d'en appeler d'une décision devant un groupe d'arbitres chargés d'entendre les appels pour le motif que les critères prévus par la loi n'ont pas été appliqués. Un système de recours à une tierce partie assorti de critères énoncés dans la loi suppose la nécessité d'être tenu responsable de l'application consciencieuse des critères. Ces questions ne devraient pas être renvoyées aux tribunaux, car les juges ne possèdent pas normalement les connaissances spécialisées nécessaires[243]. Le groupe d'arbitres chargé des appels devrait être composé des arbitres les plus expérimentés et les plus crédibles. Pour prévenir les retards excessifs dans la détermination de la rémunération, il faudrait que les appels soient interjetés et les décisions rendues dans des délais prescrits.

En ce qui concerne les critères, il serait logique d'établir un cadre qui favoriserait la comparabilité dans le contexte de la rémunération globale et non uniquement pour les salaires. De tels critères pourraient ressembler aux suivants :

  • On supposerait que la rémunération est comparable ou qu'elle vise à assurer le respect du principe d'un salaire égal pour un travail de valeur égale. Par conséquent, en l'absence de toute preuve du contraire, les augmentations salariales refléteraient une mesure générale de l'évolution des niveaux de rémunération dans le secteur privé canadien. Une telle mesure pourrait être l'indice de la rémunération pour l'ensemble des activités économiques, qui sert à rajuster le salaire des juges et des parlementaires chaque année[244].
  • L'arbitre pourrait rajuster à la hausse ou à la baisse les augmentations annuelles s'il était prouvé de manière concluante que les salaires d'un groupe d'employés ne sont pas comparables à ceux d'éléments de comparaison appropriés du secteur privé. La preuve justifiant ce rajustement devrait être consignée par écrit et le rajustement devrait pouvoir faire l'objet d'un examen tel que décrit ci‑dessus.
  • L'arbitre tiendrait compte des arguments liés au principe d'un salaire égal pour un travail de valeur égale en déterminant tout rajustement de ce genre. Dans ce chapitre, nous présentons certaines idées complémentaires pour moderniser le régime d'application de la parité salariale dans la fonction publique fédérale.
  • Normalement, les aspects non salariaux de la rémunération ne pourraient faire l'objet d'une entente qu'entre le gouvernement et le syndicat. À la suite de la détermination d'une augmentation salariale par l'arbitre, les parties pourraient convenir d'appliquer une partie de l'augmentation à l'enveloppe des avantages sociaux, proposée dans la recommandation 15.2.

Un élément crucial de l'instauration de tout processus de règlement des différends par un tiers est l'effet que cela aura sur la négociation collective directe entre les parties. Les données présentées dans le document de John O'Grady (et dans d'autres textes sur l'arbitrage) incitent à penser qu'un tel régime rendrait plus difficiles les ententes par voie de négociation directe. Pour qu'il y ait de bonnes chances de déterminer directement les conditions de rémunération, l'issue du processus de règlement par un tiers doit être raisonnablement imprévisible pour les deux parties.

Une critique probable de l'approche décrite dans cette section est qu'elle pourrait réduire la négociation collective à l'application de formules. Cette affirmation est en partie vraie. Néanmoins, si l'on accepte de considérer le concept de la comparabilité comme principal critère lié à la rémunération dans le secteur public fédéral, il suffira alors essentiellement de définir et d'appliquer des méthodes appropriées d'évaluation de la comparabilité avec le secteur privé pour établir les niveaux de salaire ou d'autres formes de rémunération.

Cependant, de telles déterminations concernant la comparabilité susciteront toujours la controverse. Pour de nombreux groupes, il n'existe pas de points de comparaison directs dans le secteur privé canadien, de sorte que la comparabilité doit être établie indirectement par la définition d'une comparabilité au sein même de la fonction publique. La décision éventuelle d'un arbitre doit par conséquent demeurer imprévisible pour les deux parties.

Pour accroître l'imprévisibilité qui devrait favoriser la conclusion directe d'une entente entre le gouvernement et l'un de ses syndicats, nous pourrions ajouter certains éléments de la trousse d'outils pour le règlement des différends, préconisée dans le rapport Fryer de 2001 pour la Commission de règlement des différends d'intérêt public (CRDIP). Ces éléments pourraient comprendre la détermination des faits, la médiation et la publication d'un rapport sur les conditions recommandées d'un règlement. L'option d'imposer un règlement devrait se limiter aux cas où l'on déclarerait que les négociations sont dans une impasse et où l'on confierait à un arbitre le soin de déterminer les conditions de la convention collective en fonction des critères prévus par la loi.

Pour favoriser encore davantage le règlement par la voie de la négociation collective, on pourrait aussi envisager d'autoriser l'arbitre à préciser que la période d'application de la convention collective sera plus longue que celle négociée par les parties.

Les idées présentées dans cette section ne constituent pas une proposition officielle de réforme. Elles visent tout au plus à faire ressortir des éléments à prendre en considération dans la conception d'un régime de détermination de la rémunération excluant le recours à la grève. La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) adoptée récemment n'apporte tout au plus que de légères modifications à la version précédente. La Loi sur la modernisation de la fonction publique (LMFP), de portée plus générale et dont la nouvelle LRTFP était une composante, visait surtout à moderniser la dotation et les recours connexes dans la fonction publique fédérale. La tâche de repenser le cadre législatif de la négociation collective n'a donc pas encore été entreprise.

Toute refonte de ce genre suppose bien entendu une participation active des syndicats de la fonction publique, des fonctionnaires fédéraux, de spécialistes du milieu universitaire et des organisations non gouvernementales intéressées. On peut s'attendre à ce que les syndicats se méfient d'abord d'un tel processus, craignant qu'il nuise aux intérêts de leurs membres et à leurs propres intérêts institutionnels. Un groupe sera certainement prompt à dénoncer toute tentative de mettre de côté l'arme de la grève, pour des motifs tant idéologiques que pratiques. Toutefois, après y avoir réfléchi, nombre de syndicats pourraient adopter une approche plus nuancée. Percevoir des cotisations pour organiser des grèves et assurer le versement d'indemnités de grève est un défi de taille pour les dirigeants syndicaux. En outre, même si les récentes grèves ont permis aux employés mécontents de se défouler dans une certaine mesure et se sont avérées une occasion de renforcer l'esprit de solidarité, la plupart des observateurs estiment probablement que les fonctionnaires n'aiment vraiment pas de façon générale priver le public de services afin d'imiter brièvement les tactiques de leurs confrères du secteur privé.

En 2010, il y aura un examen parlementaire de la LRTFP. Il pourrait alors être propice d'examiner les changements possibles au régime de négociation collective de la fonction publique. Plus de quarante ans après l'adoption d'un régime de négociation collective inspiré du modèle de l'épreuve de force avec droit de grève en vigueur dans le secteur privé, il ne serait pas trop tôt pour envisager l'adoption d'un modèle plus convenable. Un tel modèle devrait mieux parvenir à concilier l'intérêt public associé à la participation des employés à la détermination de leurs conditions de rémunération, et l'intérêt public plus général pour les citoyens de bénéficier de services fiables et, pour les contribuables, de payer juste ce qu'il faut pour les services publics. Cet intervalle de trois ou quatre ans pourrait être utilisé pour favoriser la tenue d'un vaste débat sur les modèles les plus susceptibles de garantir une telle conciliation et acquérir de l'expérience en mettant en œuvre les changements mineurs prévus dans la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.

Voici donc nos recommandations concernant le cadre législatif de la négociation collective dans la fonction publique fédérale :

Recommandation 16

16.1 Le président du Conseil du Trésor devrait parrainer, au cours des prochaines années, une série d'études spécialisées et de conférences destinées à susciter un vaste débat public sur un modèle de règlement des différends liés à la négociation collective pouvant remplacer les modèles actuels de la conciliation/grève et de l'arbitrage prévus dans la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Un tel modèle permettrait le règlement des différends par un tiers (plutôt que le droit de grève ou l'arbitrage traditionnel), en s'appuyant sur le principe de la comparabilité avec le secteur privé canadien dans la détermination de la rémunération totale des groupes particuliers d'employés de la fonction publique, selon une formule qui serait crédible aux yeux des contribuables, des employés, des syndicats de la fonction publique et du gouvernement.

16.2 Tout modèle de ce type devrait satisfaire à l'exigence d'un salaire égal pour un travail de valeur égale, qui figure dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, en faisant appel à une méthode plus claire pour interpréter et appliquer ce principe dans la fonction publique fédérale. Pour d'autres propositions à cet égard, voir la recommandation 17 ci-dessous.

16.3 Si un modèle convenable peut être élaboré, le gouvernement devrait proposer un projet de loi d'ici l'examen parlementaire de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, qui doit avoir lieu en 2010.

16.4 Dans l'intervalle, le Secrétariat du Conseil du Trésor et les gestionnaires de la fonction publique devraient appliquer rigoureusement les nouvelles dispositions de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique concernant les employés essentiels.

16.5 Toutes les personnes jouant un rôle dans la mise en œuvre des dispositions de la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique relatives à la Commission d'intérêt public, notamment le président du Conseil du Trésor, le Secrétariat du Conseil du Trésor, les syndicats de la fonction publique et le président de la Commission des relations de travail dans la fonction publique, devraient saisir l'occasion pour inviter des Canadiens éminents à mettre à contribution leur expérience et leur sagesse en vue du règlement des conflits de travail dans le secteur public fédéral.

Cela conclut nos réflexions sur les changements possibles au cadre législatif pour les négociations collectives dans la fonction publique fédérale. Nous passons maintenant à notre dernier sujet important, à savoir les propositions visant à rendre plus claire et plus raisonnable la façon de mettre en œuvre l'obligation d'accorder un salaire égal pour un travail de valeur égale dans la fonction publique fédérale. Comme pour la négociation collective dont il était question ci‑dessus, il ne serait pas réaliste de vouloir procéder dans ce rapport à une critique détaillée et à la prescription de réformes. Cependant, un survol des points à prendre en considération et l'ébauche d'une éventuelle marche à suivre nous semblent être des éléments indispensables d'une évaluation complète de la rémunération dans le secteur public fédéral.

Appliquer la parité salariale dans la fonction publique fédérale

La parité salariale est l'expression dont on se sert normalement pour désigner le principe du salaire égal pour un travail de valeur égale. Dès 1951, l'Organisation internationale du Travail adoptait une convention (numéro 100) à ce propos, la Convention concernant l'égalité de rémunération entre la main‑d'œuvre masculine et la main-d'œuvre féminine pour un travail de valeur égale. Le Canada a ratifié cette convention en novembre 1972. La Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP), promulguée en 1977, a incorporé cette convention au secteur du travail de compétence fédérale[245]. Notamment, aux termes de l'article 11 de la LCDP, il est discriminatoire d'instaurer ou de pratiquer la disparité salariale entre les hommes et les femmes qui exécutent, dans le même établissement, des fonctions équivalentes. L'Ordonnance de 1986 sur la parité salariale émise par la Commission canadienne des droits de la personne apporte des précisions sur des questions telles que la définition d'« établissement » et les exceptions admissibles, comme la rémunération au rendement, les suppléments en raison d'une pénurie de main-d'œuvre et les taux de salaire régionaux.

Le chapitre 4 du présent volume comprend un aperçu de la nature et des répercussions financières du règlement des plaintes de disparité salariale en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne dans la fonction publique fédérale. L'appendice H comporte un résumé des règlements particuliers conclus dans le noyau de la fonction publique jusqu'en 2003. L'appendice I présente la meilleure estimation existante des coûts des règlements en matière de parité salariale de 1980 à 2003. Des montants forfaitaires de l'ordre d'environ 3,4 milliards de dollars (y compris plus de 900 millions de dollars en intérêts) ont été versés pendant cette période. En date de mars 2003, les employés visés avaient bénéficié d'augmentations de salaire dont le total cumulatif était estimé à plus de 1,8 milliard de dollars et la portion permanente de la masse salariale attribuable à la mise en œuvre de la parité salariale dans le noyau de la fonction publique dépassait 200 millions de dollars par année en 2002-2003.

Les coûts annuels représentent de 2 % à 2,5 % de la masse salariale de la fonction publique. Le Rapport du Groupe de travail sur l'équité salariale, qui citait des études de SPR Associates (1991), de Réalités canadiennes (1992 et 1993) et de l'Institut de recherche sociale (1994), a conclu que les coûts de la parité salariale encourus par les employeurs relevant de la compétence de l'Ontario dans le domaine du travail se situaient entre 0,5 % et 2,2 % de la masse salariale des organismes du secteur public[246]. Signalons que dans les entreprises du secteur privé comptant 500 employés ou plus, le total des rajustements de la masse salariale ne s'élevait qu'à 0,6 %. Dans le cas des petits employeurs, les rajustements se chiffraient en moyenne à 1,4 % ou moins. Le Rapport du Groupe de travail sur l'équité salariale indiquait que dans le secteur du travail du Québec, les résultats ne représentaient d'habitude qu'un « pourcentage relativement modéré de la masse salariale, de moins de 2,5 % »[247].

Il faut absolument que la fonction publique fédérale réponde de façon constructive à l'obligation d'offrir un salaire égal pour un travail de valeur égale, prescrite par la Loi canadienne sur les droits de la personne. Les incertitudes actuelles en matière d'interprétation compromettent toute gestion systématique de la rémunération. Jusqu'à présent, les litiges acrimonieux et la crainte des litiges, ainsi que la vaine recherche d'une panacée sous la forme d'un système de classification universel ont empêché l'adoption d'une stratégie pragmatique et factuelle en vue d'assurer la parité salariale. C'est maintenant qu'il faut relever ce défi, dans le cadre de la réforme générale de la gestion de la rémunération dans la fonction publique fédérale. Cependant, nous devons d'abord approfondir certaines questions fondamentales qui se trouvent au cœur du débat sur la parité salariale, sans toujours être admises ouvertement.

Questions fondamentales

D'ores et déjà, le concept du salaire égal pour un travail de valeur égale est inscrit dans presque toutes les sphères de compétence canadiennes en tant que droit protégé par la loi. De nombreux commentateurs estiment qu'il s'agit d'un droit fondamental d'ordre quasi constitutionnel, d'un élément essentiel des droits de la personne contre la discrimination sexuelle. Dans la perspective du sens commun, le concept est convaincant, car il fait appel à l'équité la plus élémentaire. Le fait bien établi que les femmes gagnent beaucoup moins en moyenne que les hommes dans le milieu de travail canadien le confirme.

D'après Statistique Canada, le recensement de 2001 indiquait que les travailleuses du Canada âgées de 15 ans et plus gagnaient 64 cents pour chaque dollar gagné par leurs homologues masculins. Cette proportion constitue une amélioration par rapport au niveau de 52 cents observé en 1980. Lorsque la comparaison se limitait aux personnes employées pour une année complète, à plein temps, les travailleuses gagnaient 70 cents pour chaque dollar gagné par les travailleurs. Pour ce qui est des jeunes femmes ayant fait des études universitaires travaillant à plein temps pendant toute l'année, le niveau de rémunération était de 81 cents pour chaque dollar gagné par leurs homologues masculins. Au sein des dix professions les plus communes choisies par les hommes, les femmes âgées de 25 à 29 ans ayant fait des études universitaires gagnaient 89 cents pour chaque dollar gagné par les travailleurs masculins[248].

Une étude effectuée par Statistique Canada en 2002, Le qui, quoi, quand et où des écarts salariaux entre les hommes et les femmes, examinait précisément s'il existait des motifs raisonnables autres que la discrimination pour expliquer la disparité de rémunération entre les sexes[249]. Alors que les études précédentes de ce genre portaient sur les caractéristiques différentes des travailleurs individuels, les données recueillies dans le cadre de l'Enquête de 1999 sur le milieu de travail et les employés ont permis d'évaluer aussi la contribution « des caractéristiques particulières du milieu de travail, comme les méthodes de travail à haut rendement, la propriété étrangère, les organismes sans but lucratif, les dépenses de formation par employé, les contrats de travail désirables et le taux de travail à temps partiel du milieu de travail ». L'auteure, Marie Drolet, conclut que :

À la différence de ce que révèlent d'autres études, qui estiment la composante expliquée [la partie non attribuable à la discrimination sexuelle] à environ 50 % de l'écart, l'inclusion de caractéristiques relatives au milieu de travail – en particulier de mesures plus précises de la branche d'activité – fait passer la composante expliquée à 61 % environ de la différence salariale [...] Pourtant, malgré l'inclusion des nouvelles variables de l'EMTE, une partie importante (38,8 %) des différences salariales hommes-femmes reste inexpliquée[250].

Cette étude laisse entendre qu'une certaine forme de discrimination a un effet sur la rémunération des femmes dans le milieu de travail canadien.

Cependant, la question de savoir comment interpréter l'énoncé (plus compliqué qu'il ne paraît) du salaire égal pour un travail de valeur égale et s'en servir comme guide pratique pour réduire la discrimination soulève des défis philosophiques et analytiques épineux et complexes. Voici quelques questions fondamentales :

  • Comment mesurer la valeur lorsqu'on compare différents types de travail?
  • Dans quelle mesure les écarts de salaire entre les groupes à prédominance masculine et à prédominance féminine découlent-ils d'une discrimination?
  • Quel est le lien entre la parité salariale et la négociation collective?
  • Quel est le champ de comparaison approprié pour déterminer la valeur égale?
  • Quel serait un groupe approprié pour établir des comparaisons?

Comment mesurer la valeur lorsqu'on compare différents types de travail?

Le paragraphe 11(2) de la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP) de 1977 stipule que :

Le critère permettant d'établir l'équivalence des fonctions exécutées par des salariés dans le même établissement est le dosage de qualifications, d'efforts et de responsabilités nécessaire pour leur exécution, compte tenu des conditions de travail.

Jusqu'à présent, aucune méthode ferme n'a été établie pour évaluer la valeur égale dans la fonction publique fédérale. L'approche adoptée par les tribunaux durant le long litige sur la cause principale de la parité salariale dans la fonction publique intentée par l'Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) en 1984 et réglée en 1999 souligne la nécessité de développer une telle méthode. En effet, le règlement de la cause de l'AFP était fondé, en l'absence d'une meilleure information ou méthodologie, sur un échantillon douteux de postes et la comparaison de nombreux groupes à prédominance masculine avec des niveaux particuliers à prédominance féminine. Des groupes de postes composés majoritairement d'hommes, qui comportaient même un poste évalué dans la fourchette des points et au niveau du groupe à majorité féminine, ont été inclus dans le calcul de l'écart en matière de valeur égale. Même s'il était pragmatique pour les tribunaux d'accepter une telle approche pour régler une cause intentée depuis longtemps déjà, il n'est pas raisonnable de prétendre que cette méthode permettait effectivement de comparer des types de travail de valeur égale.

La conception d'une méthode valable pose de grands défis. À titre d'exemple, la formulation du paragraphe 11(2) ne correspond déjà plus à la réalité des milieux de travail modernes au Canada. De plus en plus, les connaissances des employés constituent l'élément essentiel que recherchent les employeurs. Pourtant le terme « connaissances » ne fait même pas partie de la liste formelle de critères prévus par la loi. Les « qualifications » y sont apparentées, mais ne sauraient être considérées comme un concept équivalent[251].

Quoi qu'il en soit, on a déployé de grands efforts dans la fonction publique fédérale durant plus de deux décennies pour élaborer une Norme générale de classification (NGC) qui servirait à évaluer toute la gamme des dizaines de milliers d'emplois de la fonction publique à l'aide d'une seule norme de valeur non sexiste[252].

Une telle approche repose sur la prémisse qu'une seule norme de comparaison peut servir à mesurer de façon significative la valeur dans les divers milieux et types de travail au gouvernement fédéral. Cela suppose qu'une fois établie, une telle norme demeurera valide au fil du temps ou, du moins, n'évoluera que très lentement. Les deux propositions sont douteuses. Pour citer un exemple, les connaissances – ou les qualifications selon l'expression utilisée dans la LCDP – prennent de l'importance à titre de composante essentielle du travail à la fonction publique depuis un certain temps; il serait donc logique qu'elles occupent une large place dans l'évaluation de la valeur générale d'un emploi.

En fait, le Conseil du Trésor a décidé en 2002 de mettre fin à la recherche d'une norme générale de valeur pour la classification des postes dans la fonction publique. Cette décision découlait principalement de la conclusion qu'un tel système serait trop rigide pour mesurer un effectif si diversifié. Poursuivant dans l'optique des connaissances, l'évaluation provisoire des postes de l'ensemble de la fonction publique au moyen de la NGC posait un problème important, à savoir qu'il était difficile, selon les gestionnaires, d'évaluer à leur juste valeur les emplois axés sur le savoir au moyen du système d'évaluation proposé. En fin de compte, on a décidé de moderniser les normes de classification un groupe à la fois pour s'assurer que chacune traite les hommes et les femmes équitablement. À ce jour, cependant, seules les normes des groupes Service extérieur et Services frontaliers ont été complétées et approuvées pour mise en œuvre.

Dans quelle mesure les écarts de salaire entre les groupes à prédominance

masculine et à prédominance féminine découlent-ils d'une discrimination?

Cette question peut évidemment susciter de vives controverses. L'étude de Statistique Canada réalisée par Marie Drolet en 2002 donne à penser que plus de 60 % des différences observables entre les salaires des hommes et des femmes dans le marché du travail canadien peuvent s'expliquer par des facteurs autres que la discrimination. Cependant, il est loin d'être clair de quelle façon cette analyse peut servir à comparer des groupes professionnels particuliers dans un établissement donné.

L'article 16 de l'Ordonnance de 1986 sur la parité salariale établit des facteurs raisonnables pouvant justifier la disparité salariale entre les hommes et les femmes qui exécutent des fonctions équivalentes dans le même établissement, notamment les appréciations du rendement différentes, l'ancienneté, la ré-évaluation et le déclassement du poste d'un employé, l'affectation de réadaptation pendant qu'un employé se remet d'une blessure ou d'une maladie, la rétrogradation, l'affectation temporaire à des fins de formation, la pénurie de main-d'œuvre dans une catégorie d'emploi particulière, la reclassification d'un poste à un niveau inférieur et les variations salariales régionales. Ces exceptions sont sensées, mais elles reconnaissent au mieux indirectement les principaux motifs de disparité salariale entre les groupes professionnels, comme les écarts ou les changements dans le marché du travail extérieur ou les différences de pouvoir de négociation de divers groupes d'employés. Elles ne tiennent aucunement compte des facteurs tels que les études, l'appartenance à l'effectif, le degré de travail à temps partiel ou des facteurs semblables figurant dans le genre d'analyses qu'effectue Statistique Canada sur les facteurs expliquant les disparités salariales hommes-femmes.

Quel est le lien entre la parité salariale et la négociation collective?

L'obligation de l'employeur de verser un salaire égal pour un travail de valeur égale s'est superposée à un système d'établissement des salaires basé sur la négociation collective entre l'employeur de la fonction publique – habituellement, le Conseil du Trésor – et les représentants syndicaux des employés. La LCDP n'exige pas que les syndicats incluent la parité salariale dans leurs négociations, et ces derniers ne sont pas responsables de conclure des ententes qui tiennent compte de la parité salariale.

En règle générale, la négociation collective se fonde sur des comparaisons avec les salaires d'autres groupes, à l'intérieur et à l'extérieur du milieu de travail, ainsi que sur le pouvoir de négociation. Bien que les comparaisons avec les groupes internes puissent favoriser la parité salariale, les comparaisons avec le marché du travail externe et le pouvoir de négociation d'un syndicat n'ont rien à voir avec les facteurs qui favorisent un salaire égal pour un travail de valeur égale au sein d'un établissement donné, tel que la fonction publique fédérale[253].

Un scénario possible serait qu'un syndicat revendique des augmentations de salaire pour des groupes à prédominance masculine et mettent davantage l'accent sur les avantages non pécuniaires au cours des négociations liées aux groupes à prédominance féminine[254]. Par la suite, le syndicat pourrait essayer de compenser l'écart salarial dont font l'objet les groupes à majorité féminine en ayant recours à tout processus de parité salariale à sa disposition. Une telle stratégie augmenterait les coûts encourus par l'employeur à court terme; à la longue, elle risquerait de miner la confiance de l'employeur à l'égard de la négociation collective en tant que système viable d'établissement des salaires.

Si un employeur adoptait un système de classification universel, il y aurait des pressions pour fusionner les unités de négociation et les syndicats. Une fois le niveau de salaire d'un groupe d'emplois établi à la suite d'une négociation, vraisemblablement avec le syndicat le plus important de l'établissement, l'employeur ne pourrait négocier différents résultats avec un autre syndicat pour des postes de valeur égale qu'au risque de manquer à son obligation en matière de parité salariale[255].

On pourrait prétendre que de telles pressions pour regrouper les syndicats iraient à l'encontre du droit de liberté d'association, qui est au cœur de la légitimité des syndicats. Il est probable que les employés ont choisi d'appartenir à différents syndicats parce qu'ils préféraient exprimer leurs intérêts de façons différentes. La liberté d'association ne bénéficie pas du même degré de protection dans le droit canadien que le salaire égal pour un travail de valeur égale, mais dans le contexte des conventions de l'Organisation internationale du Travail, les deux principes sont considérés comme des droits fondamentaux du domaine du travail. On présumera que les employés ont choisi d'appartenir à différents syndicats parce qu'ils préféraient exprimer leurs intérêts de façons différentes.

Quel est le champ de comparaison approprié pour déterminer la valeur égale?

Aux termes de l'article 11 de la LCDP, on doit comparer les salaires dans le même établissement. Le paragraphe 11(3) renforce l'idée d'une interprétation large du terme « établissement » en stipulant que « les établissements distincts qu'un employeur aménage ou maintient dans le but principal de justifier une disparité salariale entre hommes et femmes sont réputés [...] ne constituer qu'un seul et même établissement. » Enfin, l'article 10 de l'Ordonnance de 1986 sur la parité salariale précise que les employés d'un établissement comprennent « tous les employés au service de l'employeur qui sont visés par la même politique en matière de personnel et de salaires, que celle-ci soit ou non administrée par un service central. »

En fait, l'intention de la loi et du règlement semble favoriser les grands plutôt que les petits établissements. Cette orientation est raisonnable si l'objectif consiste à définir le champ de comparaison le plus large possible pour déterminer la valeur égale. Dans certains secteurs du travail, notamment en Ontario, la loi prévoit la comparaison avec des établissements distincts en l'absence d'emplois à prédominance masculine permettant de faire des comparaisons appropriées au sein d'un établissement. Pour sa part, le Québec permet de construire un emploi théorique à prédominance masculine, aux fins de comparaison, dans certains cas.

En ce qui a trait à la fonction publique fédérale, il a été convenu jusqu'à présent que le noyau de la fonction publique est un seul établissement et que les divers employeurs distincts constituent des établissements distincts. Cependant, ce point de vue est contesté devant les tribunaux, l'Alliance de la Fonction publique du Canada soutenant, qu'en définitive, le Conseil du Trésor exerce un contrôle général sur une grande part du secteur public fédéral et que, par conséquent, toute cette entité ou presque devrait être considérée comme un seul établissement.

En théorie, toutefois, plus un établissement est diversifié, plus ses secteurs d'activité et d'opération sont variés et moins il est probable que la valeur d'un ensemble donné de compétences soit uniforme. Ainsi, à l'Agence du revenu du Canada, comme nous l'avons signalé au chapitre 4, les vérificateurs jouent un rôle d'importance fondamentale par rapport à la mission de l'organisation. Dans le noyau de la fonction publique, les vérificateurs constituent un groupe moins essentiel. Par conséquent, si l'on jugeait que la valeur du groupe était égale chez les deux employeurs, on ne tiendrait pas compte de sa valeur réelle pour l'un ou pour l'autre, ou même les deux. L'utilisation d'un tel groupe aux fins d'une comparaison avec d'autres groupes serait de nature à induire en erreur.

Quel serait un groupe approprié pour établir des comparaisons?

La législation fédérale ne définit pas clairement ce qui constitue un groupe aux fins de l'évaluation d'un salaire égal pour un travail de valeur égale. Le terme « groupe professionnel identifiable » revient plusieurs fois dans l'Ordonnance de 1986 sur la parité salariale. Dans le contexte de la fonction publique fédérale, ce terme pourrait désigner l'un des quelque 70 groupes professionnels définis en 1967. Par contre, l'utilisation du qualificatif « identifiable » laisse entrevoir la possibilité de cibler un autre groupe d'employés. La question s'applique différemment à la définition des groupes à prédominance masculine et à prédominance féminine. On peut présumer qu'elle permet d'adopter des approches différentes pour évaluer la valeur égale de part et d'autre.

De plus, il est difficile de définir la domination d'un sexe en particulier. L'Ordonnance de 1986 sur la parité salariale établit, à l'article 13, une échelle mobile basée sur la taille du groupe, à savoir 70 % dans le cas d'un groupe comptant moins de 100 membres, 60 % dans le cas d'un groupe comptant de 100 à 500 membres et 55 % dans le cas d'un groupe comptant plus de 500 membres. La norme de 55 % s'applique à la plupart des groupes du noyau de la fonction publique fédérale. Cette distinction minime en matière de représentation hommes‑femmes ne semble pas un motif raisonnable pour justifier un constat de discrimination fondée sur le sexe[256]. Au fur et à mesure que l'équilibre hommes-femmes évolue grâce à l'équité en emploi ou simplement à l'évolution du marché du travail, il se pourrait bien que des groupes professionnels à prédominance masculine se transforment en groupes à prédominance féminine ou vice versa[257]. Logiquement, toute discrimination sexuelle résultant d'un tel changement mettrait des années à se produire. Pourtant, en principe, le fait qu'un groupe professionnel passe à une majorité féminine pourrait immédiatement faire l'objet d'une plainte.

Notre bref examen des cinq questions présentées ci-dessus avait pour but de montrer que l'application du concept du salaire égal pour un travail de valeur égale est très ambiguë. Au fond, la parité salariale vise à corriger l'écart de revenu entre les hommes et les femmes dans l'économie canadienne. L'ironie de la chose, c'est que les femmes les plus susceptibles d'être victimes de pratiques salariales discriminatoires sont probablement concentrées dans de petites entreprises du secteur privé. Pourtant les chiffres cités dans le Rapport du Groupe de travail sur la parité salariale montrent qu'en moyenne, les augmentations de salaire liées à la parité salariale dans les petites entreprises du secteur privé ne s'élevaient qu'à environ un quart de celles du secteur public. De plus, cette comparaison ne tient pas compte des avantages sociaux habituellement beaucoup plus généreux dans le secteur public que dans les petites entreprises du secteur privé. Il est raisonnable de supposer que la législation sur la parité salariale actuelle profite surtout aux femmes qui se trouvent déjà dans une situation relativement avantageuse.

Vers une approche viable

La fonction publique fédérale fait bien sûr partie (c'est de loin la plus grande partie) de la sphère de compétence fédérale en matière de travail. À ce titre, elle est régie aux fins de la parité salariale par la Loi canadienne sur les droits de la personne, comme nous l'avons indiqué. Par conséquent, toute approche visant à gérer l'obligation d'assurer un salaire égal pour un travail de valeur égale doit s'harmoniser avec le cadre législatif applicable.

Dans son rapport de 2004, le Groupe de travail sur la parité salariale a proposé des modifications législatives au cadre existant. Le ministre de la Justice et le ministre du Travail avaient commandé ce rapport en 1999 à la suite du règlement du long conflit de travail avec l'Alliance de la fonction publique du Canada. Pour diverses raisons, la mise sur pied du Groupe de travail n'a pas été complétée avant juin 2001. Ce dernier était chargé de mener un examen complet de la législation « afin d'assurer la clarté du mode de mise en œuvre de la parité salariale sur le marché moderne du travail. »

Une évaluation détaillée du Rapport du Groupe de travail sur la parité salariale dépasserait la portée du présent examen général de la rémunération dans le secteur public fédéral. À bien des égards, ce rapport est un document impressionnant, le fruit de longues recherches et discussions avec des théoriciens et praticiens, ainsi que des employeurs et des représentants syndicaux. Cependant, malgré ses quelque 500 pages et plus de trois années de travail, à notre avis, le Rapport du Groupe de travail sur la parité salariale n'aborde pas vraiment les questions fondamentales que nous avons énoncées dans la présente section. Le rapport accorde une attention considérable aux enjeux relatifs aux institutions et aux processus, mais ne fait qu'effleurer certaines questions, par exemple :

  • Quels résultats la législation sur la parité salariale devrait‑elle produire?
  • Jusqu'à quel point ces résultats ont‑ils été atteints?
  • À quel prix ces résultats ont-ils été obtenus, compte tenu d'autres objectifs importants comme l'efficacité par rapport au coût, la place des femmes dans le milieu de travail et l'intégrité de la négociation collective?

Nous sommes conscients que le Parlement pourrait modifier le régime législatif qui régit la façon dont les employeurs de compétence fédérale doivent satisfaire à leurs obligations en matière de parité salariale. Le reste de la présente section suggère des orientations possibles pour une réforme, ainsi que des mesures que les employeurs de la fonction publique fédérale devraient prendre pour gérer l'obligation d'assurer un salaire égal pour un travail de valeur égale.

Questions relatives à la législation et aux politiques

Le cadre législatif devrait être constitué, entre autres, de manière à respecter les cinq prémisses suivantes :

1. La parité salariale devrait viser à corriger la part de l'écart salarial entre hommes et femmes attribuable à la discrimination et non à d'autres facteurs.

Comme nous l'avons souligné, les facteurs raisonnables reconnus dans l'Ordonnance de 1986 sur la parité salariale n'épuisent pas les facteurs non discriminatoires qui peuvent expliquer les écarts de salaire entre des groupes donnés d'employés masculins et féminins. Ces autres facteurs comprennent, par exemple, les années d'expérience, les niveaux de scolarité et les heures travaillées. On pourrait prétendre que les différences dans ces secteurs résultent elles‑mêmes de la discrimination fondée sur le sexe dans la société en général et ne devraient donc pas être excusées en évaluant la parité salariale. Toutefois, un tel point de vue obligerait les employeurs à tenter de corriger des tendances sociales générales, ce qui constituerait un fardeau déraisonnable.

La législation sur la parité salariale devrait par conséquent permettre aux employeurs de faire valoir qu'une part définissable de tout écart salarial entre les hommes et les femmes résulte de facteurs autres que la discrimination fondée sur le sexe. Tel qu'indiqué, ces facteurs devraient aller au-delà des facteurs raisonnables énumérés dans l'Ordonnance de 1986 sur la parité salariale.

Un facteur qu'il pourrait être difficile d'évaluer avec précision est ce que l'on appelle le pouvoir de négociation. En effet, aucun employeur ne voudrait admettre publiquement qu'un règlement a été conclu en raison du pouvoir de négociation que possède un syndicat. Un tel aveu pourrait rendre la prochaine ronde encore plus difficile à gérer.

2. La parité salariale devrait s'appliquer au niveau systémique afin de déceler et de corriger toute forme de disparité salariale entre hommes et femmes accomplissant un travail de valeur égale dans un établissement.

Depuis 25 ans, on a tendance à concevoir des systèmes complexes en matière de parité salariale afin de quantifier la valeur de divers emplois selon une norme théoriquement non sexiste. Implicitement, il y aurait une seule norme pour un établissement donné. Il en est résulté, dans la fonction publique fédérale, une recherche inutile et coûteuse d'une sorte de Saint‑Graal. Dans une grande organisation complexe comme la fonction publique fédérale, toute norme unique servant à mesurer la valeur est forcément arbitraire et perdra rapidement de sa pertinence avec l'évolution des besoins et, partant, des valeurs relatives du milieu de travail.

En fait, nous avons jugé bon de créer des instruments de mesure tellement complexes et obscurs que peu de gens pouvaient même prétendre les comprendre. Une telle méthode d'évaluation des emplois a pour effet d'aliéner les employés et les gestionnaires, et il en résulte des épisodes périodiques de mécontentement lorsque les relativités vont à la dérive. Une pseudo-science ne peut pas compenser le fait sous-jacent que la valeur est difficile à évaluer même dans les circonstances les plus favorables, qu'elle varie selon la nature du travail de chaque organisation et qu'elle change assez rapidement au fur et à mesure que la technologie et les besoins des clients évoluent.

La meilleure approche serait d'analyser les disparités salariales réelles entre hommes et femmes dans un établissement, de déterminer si les explications que l'on donne à l'égard de ces différences ne constituent pas une forme de discrimination fondée sur le sexe, puis trouver des moyens de corriger tout autre écart systémique. À ce propos, il n'est pas clair pourquoi le redressement doive être en argent; d'autres avantages ou conditions d'emploi pourraient en fait convenir davantage à un groupe en particulier.) L'employeur et les représentants syndicaux devraient effectuer cette analyse conjointement, avec l'aide d'un tiers au besoin. C'est dans cette optique que l'approche proactive prônée dans le Rapport du Groupe de travail sur l'équité salariale pourrait s'avérer fort utile – au lieu d'attendre, comme on le fait actuellement, qu'il y ait des plaintes pour prendre conscience des problèmes qui se posent[258].

3. La parité salariale devrait s'appliquer dans le cadre d'un système de détermination de la rémunération fondé sur la négociation collective et visant de multiples unités de négociation qui partagent des intérêts communs, et elle devrait perturber le moins possible ce système.

Il est insensé de maintenir un cadre législatif fondamentalement incohérent. En fait, à l'heure actuelle, le principe inhérent aux droits de la personne du salaire égal pour un travail de valeur égale peut éclipser les résultats de la négociation collective. Il peut être compréhensible qu'on ait mal compris le lien entre ces deux systèmes en 1977 lorsqu'on a adopté la Loi canadienne sur les droits de la personne, et que la négociation collective n'existait que depuis une décennie dans la fonction publique fédérale. En réalité, l'interaction entre les deux régimes a été limitée jusqu'à présent. Toutefois, si nous imposons à l'employeur l'obligation proactive d'assurer la parité salariale sans imposer aux syndicats une responsabilité analogue, nous courons un grand risque de créer d'importantes distorsions salariales. Il pourrait en résulter une profonde méfiance à l'égard de l'intégrité de la négociation collective. Il n'y aurait aucune raison valable, près de trente ans plus tard, de modifier les lois sur la parité salariale, tout en laissant la question de leur interaction avec la négociation collective se résoudre par tâtonnements.

L'employeur et les syndicats devraient partager l'objectif d'un salaire égal pour un travail de valeur égale, au moins dans le contexte des travailleurs représentés par un syndicat donné. L'absence de respect de ce principe serait un motif suffisant pour conclure que l'une ou l'autre partie négocie de mauvaise foi. L'employeur demeurerait responsable d'assurer le respect de la parité salariale en collaboration avec l'ensemble des syndicats, mais sur une base systémique comme nous l'avons décrit ci‑dessus.

4. En appliquant la parité salariale, il importe de reconnaître que le Canada est une économie de marché où les salaires reflètent généralement l'offre et la demande, et l'on ne devrait pas s'attendre à ce que les employeurs relevant de la compétence fédérale s'écartent beaucoup des normes du marché dans la mise en œuvre de la parité salariale.

De par sa nature, la parité salariale va à l'encontre du marché du travail extérieur. Elle cherche à substituer au mécanisme impersonnel de l'offre et de la demande, en tant que facteur déterminant de la valeur du milieu de travail, un système concurrent qui s'applique essentiellement à un établissement particulier. Ce système pourrait peut‑être fonctionner si l'employeur n'était pas obligé de recruter sur le marché du travail extérieur ni d'empêcher ses employés de se replacer chez d'autres employeurs. Cependant, comme tous les employeurs, la fonction publique fédérale peut s'attendre à faire face à un marché du travail de plus en plus concurrentiel à mesure que la génération du baby‑boom arrivera à l'âge de la retraite au cours de la prochaine décennie. Elle ne peut donc pas s'isoler de l'ensemble du marché du travail canadien.

Un régime de parité salariale sensé doit mieux tenir compte des réalités du marché du travail extérieur. Même si un groupe particulier d'employés est très en demande, cela ne signifie pas pour autant que l'on doit s'attendre à ce que les salaires d'autres groupes dont la valeur peut être perçue comme semblable seront rajustés. En fait, avec le temps, la valeur relative des groupes fluctue à la hausse et à la baisse sur le marché du travail canadien. La parité salariale ne devrait pas avoir pour rôle de se substituer à cette réalité dans un établissement quelconque.

Dans des circonstances extraordinaires, par exemple le soutien d'opérations militaires outre‑mer, l'employeur pourrait être disposé à négocier des augmentations de salaire inhabituelles avec un groupe donné pour éviter un arrêt de travail. Il pourrait avoir recours à la loi pour contourner ce besoin, mais ce ne serait probablement pas souhaitable, ne serait-ce que pour prévenir le mécontentement d'employés essentiels.

5. Dans le cas des grands employeurs dont l'effectif est diversifié, la parité salariale devrait permettre une répartition appropriée des emplois dans des groupes ayant des caractéristiques généralement similaires, surtout en ce qui concerne les niveaux de compétence exigés.

La valeur de compétences particulières peut être très différente dans les divers secteurs d'un établissement diversifié. Si l'on impose des évaluations homogènes, on ne peut que fausser la réalité du milieu de travail. Dans les gros établissements diversifiés, il serait préférable de reconnaître qu'il est légitime de définir des familles appropriées d'emplois comportant des niveaux de scolarité et de responsabilité semblables, au sein desquelles on peut évaluer les disparités de rémunération entre hommes et femmes. Plus loin dans cette section, nous décrivons comment une telle méthode pourrait s'appliquer en pratique. Cette approche réduirait ou éliminerait l'un des aspects les moins justifiables de la parité salariale comme on en est venu à l'interpréter, où la recherche de groupes de référence à prépondérance masculine justifiant une augmentation de salaire en vertu de la parité salariale a plus de poids que les similarités perceptibles au niveau de la nature du travail.

Le Rapport du Groupe de travail sur l'équité salariale renferme suffisamment de matière pour permettre au gouvernement et au Parlement de rédiger une nouvelle loi sur la parité salariale ou de modifier la loi actuelle qui s'applique au secteur du travail de compétence fédérale. À notre avis, toutefois, les recommandations formulées dans le Rapport du Groupe de travail sur l'équité salariale ne vont pas assez loin pour tenir compte des principes législatifs décrits ci‑dessus, qui émanent des questions fondamentales abordées dans la présente section. Après presque 30 années d'expérience dans l'application du principe du salaire égal pour un travail de valeur égale dans la sphère de compétence fédérale, il importe d'éclaircir les points controversés au bénéfice des travailleurs, des contribuables et des employeurs.

Pratiques administratives

D'ici là, il y a plusieurs mesures importantes que les employeurs, dans la fonction publique fédérale, pourraient prendre pour mieux garantir l'égalité entre les sexes au chapitre de la rémunération. En gros, nous préconisons une approche pragmatique et proactive en vue de repérer et de combler les écarts de rémunération entre les groupes à prédominance masculine et féminine, quand ils ne peuvent s'expliquer par des facteurs non discriminatoires. Voici les quatre pratiques les plus souhaitables à cet égard.

1. Veiller à ce que les nouvelles normes de classification réduisent au minimum le sexisme.

La décision prise par le Conseil du Trésor en 2002 d'abandonner l'élaboration d'une norme générale de classification pour tenter plutôt de renouveler les normes existantes, un groupe à la fois, visait à adapter ces normes aux réalités du milieu de travail dans la fonction publique et de réduire au minimum le sexisme. L'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada a fait des progrès marqués pour mettre au point des méthodes quantitatives servant à vérifier le sexisme inhérent à différents aspects, tels que les dimensions ou les éléments du travail omis, les mesures biaisées, la progression et la pondération des éléments (dimensions) et le double comptage ou la redondance de certains éléments[259].

2. Aider les gestionnaires et les autres personnes qui s'occupent de classification à réduire au minimum le sexisme dans l'application des normes de classification existantes.

La formation des agents de classification et des gestionnaires pour qu'ils appliquent comme il se doit les normes existantes est au moins aussi importante que la modernisation des normes en vigueur. Elle devrait comprendre la sensibilisation aux questions de sexisme et expliquer comment en tenir compte dans l'évaluation des emplois, y compris la façon dont les emplois sont décrits en tout premier lieu.

3. Définir un cadre approprié pour comparer les groupes aux fins de la parité salariale.

Une façon efficace de regrouper les employés dans un contexte commun approprié serait de créer de nouveaux employeurs distincts dont les activités sont suffisamment spécifiques et autonomes. Nous avons suggéré d'accorder le statut d'employeur distinct à des organisations telles que l'Agence des services frontaliers du Canada, la nouvelle agence Service Canada, Service correctionnel Canada et, peut-être, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada. En adoptant cette approche là où cela est approprié, on éviterait ou, du moins, on réduirait les conflits portant sur l'évaluation du travail à la fonction publique, en permettant aux différents employeurs d'évaluer le travail en fonction de leur mission et de leurs objectifs propres.

Que le gouvernement décide ou non de créer de nouveaux employeurs distincts, le noyau de la fonction publique restera un employeur de grande taille qui mène un large éventail d'activités. Afin d'évaluer l'application du principe du salaire égal pour un travail d'égale valeur, il serait logique d'établir un cadre permettant de comparer utilement les divers groupes visés. On aurait ainsi moins besoin, comme on en a toujours l'impression, qu'il faut s'appuyer sur un amalgame complexe de groupes à prédominance masculine comme point de comparaison d'un niveau particulier d'un groupe à prédominance féminine. Cette façon de faire peut donner de bons résultats pour ceux qui portent plainte, mais le caractère abstrait des données ainsi amalgamées fait de ces comparaisons des mesures contestables de la valeur relative.

La structure de la Classification nationale des professions (CNP) constitue un outil prometteur pour regrouper les types d'emplois largement similaires. Conçue et tenue à jour par Ressources humaines et Développement des compétences Canada et les ministères qui l'ont précédé, la CNP « est la taxonomie officiellement reconnue à l'échelle nationale des professions qui forment le marché du travail canadien et elle en constitue le cadre organisationnel ». Cette structure est décrite comme étant :

« D'importance cruciale pour présenter de l'information sur le marché du travail et sur les carrières ainsi qu'aux fins de perfectionnement professionnel, pour formuler des prévisions sur l'évolution des professions et analyser la demande et la disponibilité de la main-d'œuvre, pour les besoins de l'équité en matière d'emploi... Elle constitue un cadre normalisé qui permet de structurer le monde du travail en un système pratique, logique et compréhensible et elle a été intégrée à plusieurs applications d'envergure au cours des dix dernières années »[260].

Fait intéressant, dans l'édition de 2001 de la CNP, on souligne aussi qu'au cours de dernière décennie, le marché du travail a subi des changements importants. Les progrès technologiques, la mondialisation de l'économie et l'importance accrue accordée au savoir dans de nombreuses professions ont tous contribué à l'évolution des professions.

En résumé donc, la CNP constitue un cadre élaboré spécifiquement pour la gestion des ressources humaines en général. Elle est largement utilisée (y compris, par exemple, pour faire des comparaisons aux fins de l'équité en emploi) et elle est mise à jour régulièrement en fonction de l'évolution de la réalité du marché du travail au Canada.

Pour classer les professions, la CNP se sert d'une structure hiérarchique à trois niveaux, soit 26 grands groupes, 140 groupes intermédiaires et 520 groupes de base. Les types de compétence sont différenciés selon les dix grandes catégories professionnelles suivantes :

0.   Gestion
1.   Affaires, finances et administration
2.   Sciences naturelles et appliquées et domaines apparentés
3.   Secteur de la santé
4.   Sciences sociales, enseignement, administration publique et religion
5.   Arts, culture, sports et loisirs
6.   Ventes et services
7.   Métiers, transports et machinerie
8.   Secteur primaire
9.   Transformation, fabrication et services d'utilité publique.

La CNP distingue en outre les quatre niveaux de compétence suivants :

  1. Diplôme universitaire
  2. Études postsecondaires à un collège communautaire, un institut technique ou un cégep; ou deux à cinq ans d'apprentissage; ou trois à quatre ans d'études secondaires et plus de deux ans de formation en emploi, ou des cours ou une expérience de travail spécifique; et d'autres emplois comportant des fonctions de supervision ou des responsabilités importantes en matière de santé et de sécurité
  3. Études secondaires; ou jusqu'à deux années de formation en cours d'emploi, cours ou expérience de travail spécifique
  4. Peu ou pas d'exigences scolaires ou de formation en cours d'emploi[261].

Cet outil pourrait servir à réaliser la tâche proposée dans la recommandation 10 afin d'élaborer une structure de groupes professionnels plus logique pour le noyau de la fonction publique. En harmonisant mieux la structure des groupes de la fonction publique avec l'ensemble du marché du travail canadien, il sera plus facile de faire des comparaisons avec le secteur privé. Cela faciliterait aussi la définition des regroupements d'emplois de valeur globalement égale, à partir desquels nous pourrions analyser les écarts entre les groupes à prédominance masculine et à prédominance féminine.

Jusqu'à maintenant, le Secrétariat du Conseil du Trésor et l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada ont entrepris des travaux préliminaires afin d'évaluer la manière dont on pourrait se servir de la CNP pour mieux repérer les ensembles d'emplois qui seraient raisonnablement comparables aux fins de l'équité en emploi. La distinction générale entre les divers niveaux de compétence dont on se sert dans la CNP est particulièrement intéressante. Une application subjective préliminaire de ces définitions au noyau existant de la fonction publique, indique qu'environ 10 000 postes seraient rattachés à la gestion, 45 000 au niveau de compétence A, 45 000 au niveau B, 30 000 au niveau C et 2 000 au niveau D. Les autres postes sont plus difficiles à classer et n'ont pas été inclus. Comme le savoir – les qualifications, selon la Loi canadienne sur les droits de la personne – constitue indubitablement la valeur la plus importante pour un employeur dans la conjoncture actuelle et que l'on peut s'attendre à ce que son importance aille en augmentant, il semble logique de se servir des grands niveaux de compétence au sens de la CNP pour définir les groupes professionnels afin d'évaluer l'application du principe du salaire égal pour un travail d'égale valeur. Il faudrait maintenant élaborer ces concepts de façon plus détaillée et avec plus de rigueur.

4. Analyser les écarts importants entre les salaires des hommes et des femmes dans le noyau de la fonction publique.

Pendant des décennies, la fonction publique fédérale s'est débattue avec la théorie, les grandes déclarations et les abstractions complexes en rapport avec l'application du principe du salaire égal pour un travail d'égale valeur. Il est plus que temps que nous consacrions désormais notre énergie à des analyses concrètes de l'écart réel entre la rémunération des hommes et des femmes dans la fonction publique fédérale et à évaluer si cet écart peut être raisonnablement attribué à la discrimination sexuelle. On peut y voir un exemple du genre d'analyse de la problématique hommes-femmes susceptible de guider l'élaboration des politiques connexes à la fonction publique.

Une telle analyse dépassait le mandat et les moyens attribués au présent rapport. Nous pouvons cependant proposer une façon de la réaliser, au moyen des étapes suivantes :

  1. Réunir des données sur la proportion des femmes et des hommes employés dans chaque groupe professionnel et à chaque niveau de classification, ainsi que sur les salaires moyens.
  2. Réunir des données sur les caractéristiques du travail des hommes et des femmes dans ces groupes et à ces niveaux, selon les critères qu'utilisent Statistique Canada et d'autres spécialistes des recherches sociales, afin d'évaluer dans quelle mesure les écarts salariaux peuvent s'expliquer par des facteurs autres que la discrimination.
  3. Évaluer dans quelle mesure il existe des écarts de salaire au sein de certains groupes qui ne peuvent raisonnablement s'expliquer par des facteurs autres que la discrimination.
  4. Établir des domaines de comparaison appropriés, fondés essentiellement sur la structure de la CNP, et en particulier les niveaux de compétence, afin de faciliter les comparaisons entre groupes.
  5. Si les analyses précitées mettent en évidence des écarts marqués qui pourraient résulter d'une discrimination fondée sur le sexe, il faudrait en discuter en priorité lors de la prochaine ronde de négociation collective portant sur les groupes visés.

De telles analyses seront sans doute complexes sur le plan technique et controversées. Par exemple, toute la question des facteurs non discriminatoires suscitera des débats animés. Cependant, la tenue d'une enquête résolument pragmatique et transparente sur la situation réelle des employés masculins et féminins dans la fonction publique fédérale n'a que trop tardée. Ironiquement, malgré les efforts énormes consacrés au fil des ans au dossier de la parité salariale, relativement peu de recherches ont été menées sur ce qui se passe réellement. La quête d'une soi-disant science de l'égale valeur a empêché la réalisation de simples examens, basés sur les sciences sociales, de la rémunération dans la fonction publique dans une perspective hommes-femmes. Il est maintenant temps d'adopter une stratégie plus humble, mais probablement plus efficace.

Un aspect crucial d'une telle analyse sera d'évaluer soigneusement l'évolution de la position relative des hommes et des femmes dans la fonction publique depuis l'adoption, en 1977, de la Loi canadienne sur les droits de la personne. L'évolution du ratio hommes-femmes au sein des quelque 70 groupes professionnels établis quand la négociation collective a été instaurée dans la fonction publique en 1967 est un signe particulièrement révélateur des changements dramatiques qui se sont produits sous la surface. L'appendice K[262] renferme des détails sur la répartition des hommes et des femmes au sein de ces groupes en 1981, 1986, 1991, 1996, puis à chaque année entre 2001 et 2005.

Globalement, alors que la fonction publique était composée de 59 % d'hommes et de 41 % de femmes en 1981, les femmes étaient en majorité en 2001 (48 % d'hommes et 52 % de femmes) et elles occupaient presque une place prédominante en 2005 selon les critères de l'Ordonnance de 1986 sur la parité salariale, puisqu'elles comptaient alors pour 54 % de l'effectif, tandis que les hommes n'en représentaient plus que 46 %. Certains des changements notables observés au sein de groupes professionnels particuliers sont présentés à la figure 1056.

Figure 1056
Évolution de la répartition des hommes et des femmes au sein de certains groupes de classification, 1981-2005

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Évolution de la répartition des hommes et des femmes au sein de certains groupes de classification, 1981-2005

* Il s'agit de chiffres pour 1986 étant donné que le groupe Direction n'existait pas encore en 1 981 sous sa forme actuelle. Le Groupe de la gestion supérieure qui l'a précédé était composé de 96 % d'hommes en 1981.

Presque sans exception, les 16 groupes professionnels précités sont relativement bien payés. À ce niveau supérieur de la fonction publique, la parité salariale semble se réaliser par le truchement de l'équité en emploi et par la participation de plus en plus grande des femmes aux programmes de formation scolaire et professionnelle nécessaires pour occuper les postes en question. Une analyse plus poussée de ces groupes par niveau ferait probablement ressortir la proportion plus forte des hommes aux niveaux de classification supérieurs. On peut s'attendre toutefois à ce que la tendance historique reflète, au fil du temps, un meilleur équilibre entre les hommes et les femmes aux différents niveaux.

En étudiant l'évolution temporelle de l'équilibre entre les hommes et les femmes au sein des groupes professionnels, il serait également important de vérifier si la rémunération des groupes comptant une proportion croissante de femmes a diminué comparativement aux groupes similaires à prédominance masculine. Le cas échéant, ces changements devraient être évalués soigneusement pour établir s'ils résultent d'une discrimination fondée sur le sexe.

Il reste quelques groupes, qui ne comptent habituellement que peu de membres, composés essentiellement d'hommes, par exemple : Architecture et urbanisme (91 % d'hommes en 2005), Électronique (96 %), Génie et arpentage (85 %), Foresterie (82 %), Pompiers (98 %), Manœuvres et hommes de métier (95 %), Chauffage, force motrice et opérations de machines fixes (99 %), Équipages de navires (93 %), Réparation des navires (97 %) et Inspection technique (89 %). Bon nombre de ces groupes gagnent tout au plus un salaire moyen par rapport à l'ensemble de la fonction publique.

Quant aux groupes comptant une plus grande proportion de femmes, plusieurs sont restés essentiellement inchangés depuis 1981. Ainsi, le plus grand groupe professionnel, celui des Commis aux écritures et règlements, est composé à 82 % de femmes. Le groupe Services hospitaliers compte 58 % de femmes, le groupe Bibliothéconomie, 74 %, le groupe Sciences infirmières, 85 %, le groupe Ergothérapie et physiothérapie, 73 %, et le groupe Secrétariat, sténographie et dactylographie, 98 %. Le nombre de membres de ce dernier groupe décline rapidement et l'on peut s'attendre à ce qu'il disparaisse à toute fin pratique au cours des prochaines années.

Ce bref exposé sur l'évolution de la proportion des hommes et des femmes au sein des divers groupes professionnels au cours des 25 dernières années ne vise pas à faire une constatation précise quelconque au sujet de l'application du principe du salaire égal pour un travail d'égale valeur. Ce qui est évident, toutefois, est que l'effectif de la fonction publique fédérale s'est transformé de bien des façons quant à la place accordée aux hommes et aux femmes. Cela ne peut que modifier profondément les rapports hommes-femmes en matière de rémunération.

Cela conclut nos observations sur les questions relatives à l'application du principe, en droit de la personne, du salaire égal pour un travail d'égale valeur dans la fonction publique fédérale. La plus grande difficulté à laquelle la génération précédente a dû faire face en cherchant à interpréter et à appliquer ce concept tient peut-être à l'ambiguïté non résolue qui est au cœur de la parité salariale, soit son objectif véritable. Officiellement, la convention 100 de l'Organisation internationale du Travail, et la législation canadienne qui donne effet à cette convention, interdit aux employeurs de faire de la discrimination salariale fondée sur le sexe. Mais les partisans de la parité salariale sont naturellement motivés par un objectif plus grand, qui est de faire en sorte que, dans la société, les revenus des hommes et des femmes soient autant que possible égaux. Ainsi, les écarts salariaux attribuables à une scolarité moins élevée, à une participation plus brève au marché du travail ou à un horaire de travail plus court, même si logiquement ils ne sont pas jugés discriminatoires pour un employeur particulier, peuvent encore être vus comme le résultat de l'action de forces sociales plus vastes qui engendrent de la discrimination envers les femmes. Cette perspective sociale générale amène les défenseurs de la parité salariale à s'opposer à ce que des facteurs non discriminatoires puissent être invoqués par un employeur pour diluer son obligation de combler entièrement tout écart salarial qui pourrait exister entre les hommes et les femmes.

La parité salariale vise donc carrément à remédier à la discrimination salariale dans l'ensemble du marché du travail. On peut citer certains exemples historiques fameux de sous-évaluation du travail des femmes dans l'économie en général. De nos jours, peu de gens prétendraient, par exemple, que les infirmières étaient traitées équitablement, dans les professions du domaine de la santé, jusqu'à tout récemment. Mais qu'un seul employeur, même un employeur aussi important et prédominant que le gouvernement du Canada, veuille influencer le marché du travail est une entreprise périlleuse. S'il existe des écarts salariaux internes qui ne correspondent pas au marché du travail externe, il sera facile de recruter et de maintenir en poste certaines catégories d'employés étant donné que ceux qui réussiront à décrocher ces emplois bénéficieront d'un avantage salarial qui n'est pas offert au reste des Canadiens qui se trouvent dans la même situation. Par contre, ces écarts salariaux risquent de rendre la fonction publique moins attirante pour d'autres catégories de travailleurs qui peuvent généralement s'attendre à être mieux évalués par des employeurs privés moins influencés par le système de parité salariale.

Il est particulièrement malheureux que ces déséquilibres dans la pondération des caractéristiques du travail tendent à minimiser l'importance du savoir, qui est de plus en plus la clé de la compétitivité au travail. Cela est doublement regrettable si les procédés appliqués pour arriver à cet état de fait sont eux-mêmes coûteux, mal compris, fastidieux ou ne suscitent pas vraiment la confiance. Les organisations qui parviennent à offrir un service de haut calibre à leur clientèle ne peuvent se permettre de réaffecter, pendant de nombreuses années, les rares talents dont elles disposent à la recherche d'une formule universelle leur permettant de mieux assurer l'égalité salariale entre hommes et femmes.

Pour la fonction publique fédérale, le principal danger des réformes législatives proposées par le Groupe de travail sur l'équité salariale et que, là encore, une série de concepts mal définis seront alors inscrits dans la loi, mais sans indications véritables sur la façon de les interpréter, de les appliquer ou de les concilier avec d'autres principes importants, comme la libre négociation collective. Il se peut que, par la suite, cela donne naissance à une nouvelle industrie d'une soi-disant science, complexe et hermétique. Après d'inévitables tergiversations, litiges et hostilités de toutes les parties, il faudra consacrer des sommes considérables à la promotion de l'égalité du revenu entre les hommes et les femmes, mais sans vraiment tenir compte de l'énergie qu'il faudra y consacrer au détriment des activités fondamentales de la fonction publique, ou encore de sa capacité d'attirer et de conserver les talents essentiels dont elle a besoin. Il ne conviendrait pas de se lancer dans des décennies supplémentaires de tâtonnements au nom d'un puissant principe de promotion des droits de la personne. Nous avons déjà trop tardé à relever de façon pragmatique les infractions à l'application du principe du salaire égal pour un travail d'égale valeur et à nous efforcer d'éliminer directement les écarts qui ne peuvent s'expliquer par des facteurs plausibles autres que la discrimination.

Voici donc, en résumé, nos recommandations sur la parité salariale dans la fonction publique fédérale :

Recommandation 17

17.1 Le gouvernement du Canada devrait envisager de proposer des modifications au cadre législatif régissant la parité salariale afin d'établir clairement comment s'applique la parité salariale dans un milieu de travail moderne. Ces modifications devraient, entre autres, respecter les cinq prémisses suivantes :

  • La parité salariale devrait servir à combler la partie de l'écart salarial entre hommes et femmes attribuable à la discrimination et non à d'autres facteurs.
  • La parité salariale devrait s'appliquer de façon systémique afin de déceler et de corriger toute forme de disparité salariale entre hommes et femmes accomplissant un travail d'égale valeur dans un établissement.
  • La parité salariale devrait s'appliquer dans le cadre d'un système de détermination de la rémunération fondé sur la négociation collective et visant de multiples unités de négociation qui partagent des intérêts communs, et elle devrait perturber le moins possible ce système.
  • En appliquant la parité salariale, il importe de reconnaître que le Canada est une économie de marché où les salaires reflètent généralement l'offre et la demande, et l'on ne devrait pas s'attendre à ce que les employeurs relevant de la compétence fédérale s'écartent beaucoup des normes du marché dans la mise en œuvre de la parité salariale.
  • Dans le cas des grands employeurs dont l'effectif est diversifié, la parité salariale devrait permettre une répartition appropriée des emplois dans des groupes ayant des caractéristiques généralement similaires, surtout en ce qui concerne les niveaux de compétence exigés.

17.2 Quoiqu'il ait beaucoup contribué à faire comprendre au public les enjeux en matière de parité salariale sur le marché du travail de compétence fédérale, le Rapport de 2004 du Groupe de travail sur l'équité salariale, intitulé L'équité salariale : Une nouvelle approche à un droit fondamental, ne devrait pas être considéré comme une base adéquate pour revoir le cadre législatif. Il faudrait notamment préciser les points suivants : la raison d'être fondamentale de la loi compte tenu de la concurrence sur le marché du travail en général; comment faire en sorte que le savoir soit davantage reconnu comme la valeur à laquelle les employeurs attachent le plus d'importance de nos jours; comment déterminer quelle partie de l'écart salarial entre les hommes et les femmes résulte de la discrimination fondée sur le sexe; enfin, comment faire pour que la parité salariale coexiste de manière constructive avec la négociation collective.

17.3 Jusqu'à ce que soit modifié le cadre législatif régissant l'application du principe du salaire égal pour un travail d'égale valeur sur le marché du travail de compétence fédérale, le Secrétariat du Conseil du Trésor, en collaboration avec l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada, devrait adopter une approche pragmatique et proactive afin de déceler et d'éliminer les écarts de salaire entre les hommes et les femmes résultant de la discrimination fondée sur le sexe. Il faudrait notamment :

  • Veiller à ce que les nouvelles normes de classification réduisent au minimum le sexisme.
  • Aider les gestionnaires et les autres personnes qui s'occupent de la classification à réduire au minimum le sexisme dans l'application des normes de classification existantes.
  • Définir un cadre approprié pour comparer les groupes aux fins de la parité salariale. Il faudrait étudier soigneusement les possibilités que présente à cet égard la Classification nationale des professions publiée par Ressources humaines et Développement des compétences Canada.
  • Analyser les écarts importants entre les salaires des hommes et des femmes dans le noyau de la fonction publique.

17.4 En effectuant les analyses mentionnées au quatrième point de la recommandation 17.3, il faudrait prendre les mesures suivantes :

  • Réunir des données sur la proportion des femmes et des hommes employés dans chaque groupe professionnel et à chaque niveau de classification, ainsi que sur les salaires moyens.
  • Réunir des données sur les caractéristiques du travail des hommes et des femmes dans ces groupes et à ces niveaux, selon les critères qu'utilisent Statistique Canada et d'autres spécialistes des recherches sociales, afin d'évaluer dans quelle mesure les écarts salariaux peuvent s'expliquer par des facteurs autres que la discrimination.
  • Évaluer dans quelle mesure les écarts de salaire au sein de certains groupes ne peuvent raisonnablement s'expliquer par des facteurs autres que la discrimination.
  • Établir des domaines de comparaison appropriés, fondés essentiellement sur la structure de la CNP, et en particulier les niveaux de compétence, afin de faciliter les comparaisons entre les groupes.
  • Si les analyses précitées mettent en évidence des écarts marqués qui pourraient résulter d'une discrimination fondée sur le sexe, il faudrait en discuter en priorité lors de la prochaine ronde de négociation collective portant sur les groupes visés.

17.5 Quelles que soient les méthodes adoptées, le Secrétariat du Conseil du Trésor et l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada devraient s'assurer que les mesures prises pour appliquer le principe du salaire égal pour un travail d'égale valeur viennent compléter, mais sans fausser, une approche équilibrée de la gestion de l'ensemble des enjeux touchant à la rémunération dans la fonction publique fédérale.

17.6 La fonction publique fédérale devrait continuer de privilégier l'équité en emploi comme instrument clé de promotion de l'égalité salariale entre les hommes et les femmes qui y travaillent.

Ce chapitre conclut notre série de propositions concrètes visant à améliorer la gestion de la rémunération dans la fonction publique fédérale. Avant de conclure cette partie consacrée aux recommandations, nous présentons, dans le prochain chapitre, quelques réflexions et recommandations sur la meilleure façon de procéder pour donner suite à nos propositions.

 




16. Cadre de mise en œuvre

Dans la section portant sur les recommandations, nous avons fait 77 propositions regroupées dans 17 ensembles de recommandations. Ces propositions varient grandement quant à la difficulté et à la faisabilité de leur mise en œuvre et quant à leur impact éventuel. Bon nombre d'entre elles sont interreliées et devraient donc être mises en œuvre dans un ordre approprié. Quoique la mise en œuvre de la plus grande partie des recommandations relève du président du Conseil du Trésor ou du Secrétariat du Conseil du Trésor, plusieurs visent des organisations comme l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada ou le ministère des Finances, ou s'adressent aux gestionnaires de la fonction publique en général. Pour mettre en œuvre de façon relativement complète la majorité de nos propositions, il faudrait leur accorder une attention soutenue pendant de nombreuses années, dans certains cas 10 ans ou plus.

Il en est ainsi parce que nous préconisons une refonte fondamentale et une modernisation du régime de rémunération dans la fonction publique fédérale, lesquelles, à notre avis, n'ont que trop tardé. Aucun examen exhaustif de ce genre n'a été entrepris en presque 40 ans, soit depuis l'instauration de la négociation collective en 1967. Pourtant, comme nous l'avons esquissé au début de ce volume, le monde du travail au Canada et la fonction publique fédérale canadienne ont changé radicalement depuis, et nous pouvons nous attendre à ce que les transformations se poursuivent à mesure que s'intensifient les effets de phénomènes comme les technologies de l'information, les attentes des citoyens et la mondialisation. Pour continuer à bien servir les Canadiens, la fonction publique fédérale doit veiller à ce que ses politiques et ses pratiques en matière de rémunération favorisent la souplesse et l'acquisition du savoir qu'exige l'évolution de la conjoncture.

Premiers pas

La première étape de tout programme de mise en œuvre doit être d'établir un cadre de gouvernance et de gestion permettant de planifier, d'orienter et de contrôler le processus, et plus important encore, d'obtenir les résultats escomptés en contrepartie d'un investissement raisonnable en argent et en énergie. Un tel cadre devrait comprendre les trois éléments suivants :

  1. Parrainage du Conseil du Trésor – Le Conseil du Trésor est le comité du Cabinet à qui incombe la responsabilité ultime, aux termes de la Loi sur la gestion des finances publiques, d'assurer une saine gestion de la fonction publique fédérale, y compris de la plupart des aspects relatifs à la rémunération[263]. La stratégie et le calendrier de mise en œuvre doivent être approuvés par le Conseil du Trésor. Celui‑ci devrait aussi examiner les progrès réalisés au moins une fois l'an.
  2. Direction par le secrétaire du Conseil du Trésor, avec l'avis d'un conseil de la rémunération formé de sous-ministres – C'est au secrétaire du Conseil du Trésor qu'incombe la plus grande part de responsabilités pour ce qui est d'assurer la cohérence des décisions concernant la rémunération dans la fonction publique. Il devrait donc en diriger la mise en œuvre, la planification et l'exécution[264]. Pour assurer la cohérence globale, comme on le propose à la recommandation 8.3, le secrétaire devrait être soutenu par un conseil de la rémunération formé des représentants les plus élevés des parties de la fonction publique fédérale qui assument des responsabilités importantes dans le domaine de la rémunération, ainsi que de tout autre cadre supérieur choisi par le secrétaire.
  3. Une équipe spéciale de gestion de projet devrait être rattachée au Secrétariat à la planification et à la coordination de la rémunération proposé à la recommandation 8.1, avec la responsabilité de concevoir et de gérer le processus de mise en œuvre. La planification et la gestion des divers processus interreliés inhérents à la mise en œuvre d'un examen et d'une refonte en profondeur de la rémunération dans la fonction publique nécessiteront des travaux à temps plein pendant plusieurs années. Un secrétaire adjoint relevant directement du secrétaire du Conseil du Trésor fournirait le leadership nécessaire à la fois a) à l'équipe de gestion de projet et b) pour les travaux concrets que devrait mener le Secrétariat à la planification et à la coordination de la rémunération, comme la production du Rapport annuel sur la rémunération fédérale. Cette combinaison de projets et d'activités concrètes sera probablement utile et stimulante.

En raison de l'importance et de l'étendue des recommandations présentées dans ce rapport, il serait également nécessaire de confirmer l'appui du premier ministre au plan d'action connexe. Il faudra donc, pour cela, que le secrétaire du Conseil du Trésor travaille en étroite collaboration avec le greffier du Conseil privé afin de mettre la dernière main au plan qui sera recommandé au Conseil du Trésor.

Une fois mise en place une solide structure de gouvernance, le président du Conseil du Trésor devrait rendre le rapport public et inviter les intéressés à y réagir et à en discuter. Même si nous nous sommes efforcés de faire preuve d'objectivité et de présenter les enjeux et les éléments d'information avec détachement, le rapport est clairement écrit dans l'optique de l'employeur et – dans une large mesure nous l'espérons – des contribuables. Nous pouvons nous attendre à ce que les commentaires formulés soient très variés et que le dossier suscite une certaine controverse. On pourrait avoir recours à des tables rondes dirigées par un modérateur pour concilier les perspectives opposées et débattre des points de vue divergents. Ces délibérations devraient être pleinement prises en compte au moment de déterminer la façon de procéder à la mise en œuvre.

Cadre suggéré pour une mise en oeuvre progressive

Tout en reconnaissant la nécessité de tenir des consultations, nous suggérons néanmoins de structurer la mise en œuvre en fonction de quatre paniers, organisés essentiellement par niveau de difficulté.

Panier 1 – L'essentiel

Le premier panier comprendrait les recommandations susceptibles de procurer des avantages marqués à un coût relativement faible et qui relèvent essentiellement du Conseil du Trésor ou du Secrétariat du Conseil du Trésor. On pourrait y regrouper les dix recommandations suivantes :

  • La recommandation 8 sur le leadership central en matière d'analyse et de stratégie. C'est un préalable à tout progrès sur d'autres plans.
  • La recommandation 1 sur la présentation d'un rapport annuel au Parlement sur la rémunération fédérale. Le suivi méthodique des tendances clés en matière de rémunération fédérale soulèvera des questions auxquelles il faudra répondre. Si les réponses posent des préoccupations, il faudra que la direction accorde plus d'attention à la gestion des tendances de la rémunération.
  • Si la recommandation 1 est acceptée, il faudra également donner suite à la recommandation 3, qui consiste à définir rigoureusement tous les éléments de données consignés dans le rapport annuel et à investir pour mettre en place les systèmes et les moyens analytiques nécessaires pour produire des estimations des principaux éléments de données sur la rémunération et en rendre compte d'une manière cohérente. Il faudrait alors établir un plan de faisabilité du projet afin de garantir le bien-fondé des investissements proposés à cette fin.
  • Pour des raisons connexes, il faudra aussi donner suite rapidement à la recommandation 4 portant sur la mise en place d'une fonction de recherche sur la rémunération pour pouvoir suivre, de manière crédible, l'évolution des tendances dans l'ensemble du marché du travail au Canada. Cependant, comme il faudra d'abord obtenir la collaboration de la nouvelle Commission des relations de travail dans la fonction publique et celle des syndicats de la fonction publique, le calendrier d'exécution connexe sera établi de concert avec ces partenaires. Pour l'employeur de la fonction publique fédérale, le point essentiel sera toutefois de ne pas laisser passer l'occasion, en n'investissant pas, dès le départ, dans l'élaboration des définitions, des normes et des méthodes qui régiront les travaux connexes pendant des années.
  • La recommandation 5, qui porte sur le cadre stratégique de la rémunération pour la fonction publique fédérale, devrait aussi être mise en œuvre le plus tôt possible. Ce cadre a déjà fait l'objet de vastes consultations, notamment en 2003. De fait, on attendait les résultats du présent rapport pour l'approuver. Il n'y a dorénavant plus de raison de retarder l'approbation de ce cadre.
  • Parce que les coûts de rémunération sont directement liés à la taille de la fonction publique fédérale, il serait bon d'agir rapidement pour mettre en œuvre la recommandation 6, qui porte sur la gestion des budgets salariaux. En relevant le facteur de majoration qui s'applique aux transferts entre les budgets non salariaux et salariaux, on enverrait un important signal au sujet du coût réel de ces conversions. Après avoir confirmé le nouveau facteur de majoration approprié – nous proposons qu'il passe de 20 % à 30 % – le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait mettre en œuvre ce changement dès 2007‑2008. Il faudra un certain temps pour élaborer les protocoles et les systèmes requis pour suivre l'évolution des budgets salariaux et rendre compte de leur bien-fondé. Il faudra un peu plus de temps pour élaborer les rapports plus détaillés proposés à la recommandation 6.4, mais la décision d'aller de l'avant à ce sujet peut être prise à brève échéance.
  • Comme il l'est indiqué plus loin, on peut s'attendre à ce qu'en pratique, il faille encore plusieurs années avant de mener à bien le processus de modernisation des normes de classification de la fonction publique, qui tarde depuis longtemps. D'ici là, il importe que l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada s'emploie à aider les ministères à gérer les normes en vigueur de manière pragmatique, comme le propose la recommandation 11.2.
  • Il serait bon d'envisager la mise en œuvre hâtive de la recommandation 13.4, qui porte sur l'établissement d'un Comité consultatif sur la rémunération des Forces canadiennes, selon le modèle général de l'organe d'examen de la solde des forces armées du Royaume-Uni (Armed Forces Pay Review Body). Étant donné l'importance accrue qu'accorde le gouvernement au rôle des Forces canadiennes, il serait logique de procéder sans délai pour faire reposer le calcul de la rémunération militaire sur des assises plus solides.
  • On devrait entreprendre rapidement la révision, proposée à la recommandation 13.5, de la façon dont le Conseil de la solde de la GRC mesure la rémunération totale, ainsi que l'examen des points à prendre en considération, mis à part la comparabilité, en vue de déterminer la rémunération à la GRC.
  • Les recommandations 15.8 et 15.9 sont en fait des avertissements, inspirés du bon sens, qui s'adressent à la haute direction de la fonction publique pour qu'elle nomme et forme à bon escient les représentants de la partie patronale siégeant aux conseils d'administration des régimes d'avantages sociaux, pour qu'elle exhorte les employés à prendre leurs congés annuels étant donné que cela est bénéfique pour la santé de l'organisation et du personnel, et pour que l'on paye les heures de travail supplémentaires.

Ces recommandations pourraient probablement être mises en œuvre en grande partie d'ici la fin de 2006‑2007, suivies de l'application des aspects techniques plus complexes ou relatifs aux systèmes dès que possible, selon le plan de travail convenu.

Panier 2 – Examens et réformes plus en profondeur

Le deuxième panier porte sur des questions cruciales, mais plus difficiles, pour lesquelles il faudra mettre sur pied un type quelconque de mécanismes consultatifs en vue de l'élaboration d'options et de recommandations plus précises en vue de décisions ultérieures. Sur ces points, les consultations publiques seront particulièrement utiles pour décider de l'opportunité de donner suite aux recommandations contenues dans le présent rapport et de la façon de le faire. Dans chaque cas, le Secrétariat du Conseil du Trésor et les autres principaux organismes de la fonction publique concernés voudront examiner soigneusement s'il convient, en principe, d'aborder le sujet. Une fois cette décision prise, il faudra déterminer en priorité la meilleure façon de procéder pour mettre sur pied les mécanismes consultatifs requis.

Évidemment, il sera aussi nécessaire d'établir soigneusement l'ordre de priorité de ces mécanismes, ainsi que la façon de gérer les liens entre ceux‑ci. Ce travail de planification devra être rigoureux de sorte que toutes les parties intéressées affectent les professionnels et les leaders nécessaires et consacrent les ressources requises pour mener à bien ces processus, tant individuellement que collectivement, dans les délais impartis.

Il convient de faire une mise en garde générale au sujet de ce panier. Tout d'abord, la plupart des questions qu'il renferme sont difficiles et soulèveront la controverse. Il sera tentant de laisser aller les choses pour éviter de s'enliser dans d'interminables débats. Cependant, chacune de ces questions mérite, en soi, une attention urgente, si nous voulons renouveler le régime de rémunération pour qu'il réponde aux besoins de nos ressources humaines, quand se produira le grand passage de la génération du baby-boom à la génération suivante au cours de la prochaine décennie. En ayant une vision claire de ce dont on a besoin et en manifestant la détermination d'agir, nous pourrons surmonter les obstacles inévitables. Le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait consulter activement les intéressés mais, faute de consensus, ce sera à lui d'agir afin d'assurer la vitalité à long terme et la saine gestion de la fonction publique.

Voici les 12 questions clés regroupées dans ce panier :

  • Afin de gérer la rémunération de façon rationnelle, il faut mettre en œuvre la recommandation 10, où l'on propose de réviser la structure des groupes professionnels et le mode de négociation de façon à regrouper adéquatement les employés partageant des intérêts communs et dont les conditions de travail sont similaires, et à faciliter la comparaison avec la rémunération offerte sur le marché du travail externe au Canada. Étant donné que la mise en œuvre des changements proposés risque de mécontenter au moins certains syndicats, il sera important d'obtenir l'aide de tiers, comme il est suggéré à la recommandation 10.1. Si l'on ne parvient pas à établir une structure de base adéquate pour la main-d'œuvre, la saine gestion de la rémunération dans la fonction publique continuera d'être compromise.
  • La recommandation 11, qui a trait à la détermination de la méthode et de l'ordre de priorité convenant le mieux à l'élaboration de normes de classification non sexistes, est essentiellement un corollaire de la recommandation 10. La modernisation de ces normes a fait l'objet de tentatives frustrantes et généralement infructueuses pendant plus de deux décennies. L'achèvement de ce travail n'a que trop tardé, mais il doit néanmoins s'harmoniser aux résultats de la révision proposée de la structure des groupes professionnels. À noter également la recommandation 12.8 où l'on suggère de chercher conseil quant à l'opportunité d'inclure dans une structure appropriée de groupes professionnels une rémunération régionale pour l'un ou l'autre des groupes proposés.
  • Il est essentiel que les employeurs distincts, s'ils ne l'ont pas déjà fait à un degré satisfaisant, adoptent leurs propres versions des recommandations 10 et 11. À noter également la recommandation 9.3. Il serait prudent de synchroniser ces exercices afin d'éviter de surcharger de travail les syndicats de la fonction publique ou les autres partenaires.
  • À la recommandation 13.1, on propose que le président du Conseil du Trésor demande au Comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction de recommander que la rémunération offerte au personnel de direction se compare davantage à celle offerte dans l'économie canadienne en général, mais en définissant de façon plus restreinte ce qu'est un cadre de direction et en faisant en sorte qu'un cadre puisse être plus facilement renvoyé en cas de rendement insatisfaisant. Le sujet de la rémunération du personnel de direction a toujours prêté à controverse, mais une plus grande comparabilité avec le secteur privé, surtout au niveau des sous-ministres adjoints et des sous-ministres, en échange d'une responsabilisation plus rigoureuse, devrait faciliter une gestion plus saine à ce titre. Les recommandations 13.2 et 13.3 sont étroitement liées et portent sur la rémunération au rendement et l'application des changements touchant les cadres de direction de la fonction publique aux premiers dirigeants des sociétés d'État et aux personnes nommées par décret.
  • Il faudrait envisager de mettre en œuvre la recommandation 14, où il est proposé de réexaminer l'option d'un mode de gouvernance et de responsabilité partagé – entre les syndicats et l'employeur – du régime de pension de retraite de la fonction publique, lorsque sera réglée la poursuite intentée par les syndicats au sujet de l'excédent du compte de pension de retraite. Comme nous le soulignons dans cette section, la logique d'un partage de responsabilité pour ces excédents est incontestable. Par ailleurs, il serait sage d'évaluer attentivement l'expérience acquise dans d'autres sphères de compétence canadiennes en ce qui concerne les conseils d'administration mixtes. Ainsi, on saurait si, en définitive, cette idée mérite d'être approfondie et ce que pourrait être le modèle privilégié à cet égard.
  • La recommandation 15.7 renferme une proposition similaire relativement au mode de gouvernance des régimes d'avantages sociaux de la fonction publique, en ce sens qu'une gouvernance conjointe patronale-syndicale devrait comporter la responsabilité conjointe de la solidité financière des régimes.
  • Quelle que soit la décision prise au sujet de la gouvernance conjointe des régimes de pension de la fonction publique, il est essentiel de poursuivre la mise en œuvre de la proposition faite à la recommandation 14.1 de revoir la pertinence de la structure actuelle de ces régimes pour ce qui est de répondre aux besoins des employés actuels et futurs. Compte tenu de l'évolution de la notion de famille, de l'intérêt grandissant pour la poursuite du travail au‑delà de la période d'admissibilité à une pension et de la hausse probable de la proportion des employés qui se joindront à la fonction publique et qui la quitteront, peut-être plusieurs fois, au cours de leur carrière, il serait sage de jeter un regard neuf sur le mode de fonctionnement des régimes.
  • Dans le même ordre d'idées, il est proposé, à la recommandation 15, une série de mesures afin de revoir et de renouveler les régimes d'assurance, de soins de santé et de soins dentaires offerts aux fonctionnaires fédéraux. En invoquant le même genre de forces démographiques et sociales soulignées plus haut en rapport avec le Régime de pension de retraite de la fonction publique, on peut remettre en question la pertinence des régimes en vigueur. Ainsi, on devrait entreprendre un examen conjoint, de concert avec des experts ayant de l'expérience en conception et en gestion de régimes d'avantages sociaux, tant du point de vue patronal que du point de vue syndical. Une telle refonte n'a pas été entreprise depuis des décennies et ce qui existe aujourd'hui est essentiellement le résultat des rajustements successifs apportés au fil des ans.
  • La recommandation 7, qui porte sur la façon d'élargir la portée de la négociation collective normale afin de permettre plus explicitement des compromis parmi l'éventail des éléments de rémunération, est étroitement liée aux recommandations 15.2 et 15.3, où il est proposé d'accorder une allocation annuelle pour les avantages sociaux qui permettrait aux employés de choisir, parmi toute une gamme de régimes d'avantages sociaux, ceux auxquels ils voudraient souscrire. Comme l'élargissement de la portée de la négociation comporterait divers avantages et inconvénients stratégiques et pratiques, il faudrait les soupeser soigneusement. Le comité consultatif, dont la création est proposée, aiderait à évaluer la faisabilité de l'approche suggérée, en tenant compte à la fois de la perspective de la partie patronale et de celle de la partie syndicale. Avant de décider de donner suite à ces recommandations, le Secrétariat du Conseil du Trésor serait bien avisé d'élaborer et d'évaluer d'abord à l'interne divers scénarios possibles.
  • À la recommandation 15.4, il est suggéré de revoir en particulier l'ensemble complexe de régimes et de politiques portant sur la maladie et l'invalidité. Ce sujet pourrait être inclus dans l'examen général des avantages sociaux proposé ci‑dessus. Cependant, vu la nature spécialisée et probablement controversée des enjeux, il serait plus logique de procéder à un examen distinct dans ce cas.
  • La recommandation 15.6, qui porte sur l'examen des obligations financières du Compte des prestations supplémentaires de décès, à la lumière de son excédent actuariel grandissant et des changements qui pourraient être apportés au niveau des objectifs et de la conception suite à l'examen plus général des régimes d'avantages sociaux proposé à la recommandation 15.1, est essentiellement une question technique qui requiert une évaluation objective comme celles que le Bureau du surintendant des institutions financières est bien placé pour réaliser. Toute somme dépassant ce qui est requis à ce titre pourrait être prise en considération dans les délibérations générales avec les syndicats de la fonction publique au sujet de l'avenir des régimes d'avantages sociaux.
  • À la recommandation 15.10, il est proposé de réévaluer les taux de cotisation de l'employeur aux régimes d'assurance, de soins de santé et de soins dentaires des pensionnés de la fonction publique. C'est un sujet auquel on a accordé relativement peu d'attention au fil des ans, malgré l'obligation substantielle de l'employeur au titre des avantages sociaux dans les Comptes publics.

Panier 3 – Modifications possibles au cadre législatif

Le troisième panier comprend les deux composantes du cadre législatif qui touchent la rémunération dans la fonction publique fédérale, à savoir la négociation collective et la parité salariale. Dans deux sections relativement élaborées du chapitre 14, nous soutenons que les lois régissant ces domaines sont déficientes et méritent une réflexion approfondie. Nous ne nous sommes pas attaqués à la tâche colossale de proposer des modifications précises à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique ou à la Loi canadienne sur les droits de la personne. Nous formulons toutefois des idées de réforme qui, à notre avis, pourraient s'avérer utiles pour toutes les parties intéressées.

  • En ce qui concerne la négociation collective, la recommandation 16 précise essentiellement qu'il est temps d'amorcer une recherche plus fondamentale d'un modèle de rechange viable de règlement des différends qui pourrait remplacer les options actuelles de la conciliation/grève et de l'arbitrage aux termes de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Même si les options actuelles n'ont pas trop mal fonctionné en dépit du recours relativement fréquent à des mesures législatives pour dénouer une impasse, la prémisse de base du règlement des différends entre la partie syndicale et la partie patronale – l'épreuve de force de la grève ou une décision arbitrale non réglementée – semble incompatible avec le principe sous-jacent de la comparabilité de la rémunération du secteur public à celle offerte dans le secteur privé au Canada.

    L'amorce d'un dialogue sur de nouveaux modèles prêtera à controverse, mais pourra aussi favoriser l'adoption, dans le secteur public, d'un nouveau modèle de négociation collective qui permettrait de mieux concilier les intérêts des contribuables et ceux des employés. Il n'est pas urgent d'agir dans ce domaine, mais il importe de le faire pour assurer la crédibilité à long terme du régime de gestion de la rémunération dans le secteur public fédéral. Le moment approprié pour examiner de nouveaux modèles est la période qui s'écoulera d'ici l'examen parlementaire de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, fixé dans la loi pour 2010 (cinq ans après la proclamation de la Loi en 2005).
  • En ce qui a trait au principe du salaire égal pour un travail d'égale valeur, nous soutenons, à la recommandation 17, que le rapport du Groupe de travail sur la parité salariale ne constitue pas un fondement adéquat pour modifier la loi régissant la parité salariale dans le champ de compétence fédéral. À notre avis, les recommandations du rapport ne règlent pas certaines questions clés liées à l'interprétation du principe du salaire égal pour un travail d'égale valeur, qui sont devenues de plus en plus problématiques au fil des trois décennies écoulées depuis l'adoption de la Loi canadienne sur les droits de la personneen 1977.
    À ce stade, nous pensons qu'il serait plus logique d'appliquer une approche pragmatique et proactive pour déceler et éliminer les écarts salariaux entre les hommes et les femmes résultant de la discrimination fondée sur le sexe. Pour donner suite à nos propositions d'ordre administratif, il faudra que le Secrétariat du Conseil du Trésor et l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique investissent en vue d'élaborer en détail la méthode suggérée et de commencer à l'appliquer systématiquement au cours des deux à trois prochaines années. Nous pensons que cela devrait être fait en priorité compte tenu du fait que l'employeur, dans la fonction publique fédérale, n'a pas encore adopté une approche systématique pour s'acquitter de ses obligations dans ce domaine, aux termes de l'actuelle Loi canadienne sur les droits de la personne. Sans ce fondement dûment en place, la stabilité de l'ensemble du système de rémunération dans la fonction publique fédérale est menacée.

Panier 4 – Propositions visant les autres instances

Le dernier panier contient un ensemble relativement restreint de propositions qui relèvent manifestement d'instances hors du portefeuille du Conseil du Trésor. Essentiellement, le seul rôle qu'a à jouer le Secrétariat du Conseil du Trésor est de porter ces recommandations à l'attention des instances concernées. Il s'agit notamment des six propositions suivantes :

  • À la recommandation 2, il est suggéré que le ministère des Finances donne une estimation des dépenses totales en personnel dans le budget fédéral annuel. En indiquant une somme globale à ce titre, on renforcera le principe de la planification et de l'obligation de rendre compte des dépenses de rémunération.
  • À la recommandation 4.3, on exhorte les responsables de la Commission des relations de travail dans la fonction publique à tenir des consultations afin d'établir une fonction crédible de recherche en rémunération, conformément à la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.
  • À la recommandation 9.1, on soulève la possibilité de créer de nouveaux employeurs distincts en vue d'améliorer le rendement organisationnel en harmonisant les pratiques de gestion des ressources humaines, y compris notamment celles qui concernent la rémunération, avec les besoins opérationnels de chaque employeur. Les décisions relatives au fonctionnement de l'appareil gouvernemental relèvent évidemment du premier ministre, qui reçoit des avis du Bureau du Conseil privé.
  • À la recommandation 10.3, on reconnaît le rôle qu'a à jouer la Commission des relations de travail dans la fonction publique en ce qui concerne la détermination de la structure appropriée des unités de négociation, par rapport à la nouvelle structure des groupes professionnels que l'on propose d'établir et de proclamer aux recommandations 10.1 et 10.2.
  • Aux recommandations 13.6 et 13.7, on suggère des mesures que pourraient envisager le ministre de la Justice et l'Association canadienne des juges fédéraux en ce qui a trait au choix des points de comparaison appropriés pour déterminer les niveaux de rémunération des juges nommés par le gouvernement fédéral, ainsi que des mesures que pourrait envisager le Parlement en vue de l'établissement éventuel d'un mécanisme d'examen périodique de la rémunération des parlementaires.
  • Les recommandations 17.1 et 17.2 portant sur les modifications législatives éventuelles au cadre d'application du principe du salaire égal pour un travail d'égale valeur dans la sphère de compétence fédérale devraient être étudiées par le ministre de la Justice et le ministre du Travail.

En passant systématiquement au travers des quatre paniers de recommandations, la mise en œuvre du présent rapport pourra être adaptée aux priorités du gouvernement et aux ressources disponibles pour améliorer la gestion de la rémunération dans le secteur public fédéral.

En passant systématiquement au travers des quatre paniers de recommandations, la mise en œuvre du présent rapport pourra être adaptée aux priorités du gouvernement et aux ressources disponibles pour améliorer la gestion de la rémunération dans le secteur public fédéral.

 




17. Conclusion

Ces observations sur la mise en œuvre des recommandations concluent le présent rapport. À la fin d'un aussi long cheminement d'analyse et de réflexion, de nombreuses pensées cherchent à retenir notre attention. La meilleure façon de terminer consiste peut-être à simplement souligner sept perspectives qui se sont transformées en convictions au fil de la rédaction du rapport.

1. L'avenir de la fonction publique fédérale dépendra beaucoup de la façon dont son personnel sera rémunéré.

La rémunération qu'offre l'employeur aux travailleurs leur révèle la valeur que l'employeur attache à leur travail. Étant donné que le savoir constitue de plus en plus la valeur la plus importante aux yeux des employeurs, et que les jeunes employés veulent exercer un plus grand contrôle sur leur carrière que la génération du baby-boom qui arrive à la retraite, le régime de rémunération influera de façon déterminante sur qui entrera à la fonction publique ou y restera, et sur l'efficacité de leur contribution à la satisfaction des attentes des Canadiens.

2. Comme tous les aspects de la rémunération sont liés pour les employés, l'employeur doit gérer ce domaine de manière cohérente.

Une conception réfléchie devrait lier tous les aspects de la rémunération, y compris les salaires, les pensions, les régimes d'assurance, les droits aux congés et même la sécurité d'emploi; l'employeur fédéral doit trouver un équilibre approprié pour que les divers éléments de la rémunération totale permettent d'attirer et de motiver le personnel dont il a besoin.

3. La norme appropriée pour juger de l'équité de la rémunération est la comparabilité avec des éléments pertinents du secteur privé canadien.

Dans le secteur privé, les employeurs qui offrent une rémunération trop élevée le font à leur propre péril. Ainsi, le secteur privé dans son ensemble constitue un point de repère pour la rémunération qui doit être offerte dans le secteur public. Même si l'application de ce concept peut être extrêmement difficile en pratique, nous devrons toujours justifier nos choix en fonction de l'interprétation la plus sensée de cette norme. En clair, il faut comparer l'ensemble de la rémunération et non uniquement certaines de ses composantes.

4. La négociation collective dans la fonction publique fédérale est un bon moyen de concilier les intérêts des employés et des contribuables, mais elle ne doit pas servir à justifier une rémunération excessive.

Le fait que les employés disposent d'une voix forte pour influer sur la façon dont ils sont rémunérés et traités au travail est salutaire dans une société libre. Cependant, le pouvoir de négociation exceptionnel dont ils disposent du fait qu'ils ont le privilège de servir le public ne saurait justifier d'aller au-delà de ce qui est raisonnablement comparable, dans des circonstances équivalentes, dans le secteur privé. Le temps est venu de chercher résolument de meilleures façons de régler les différends de manière équitable, sans recours à l'arme de la grève.

5. La négociation collective dans le secteur public fédéral devrait porter autant sur la productivité que sur la rémunération.

Cet objectif sera très difficile à atteindre compte tenu du caractère fortement concentré de la négociation collective dans la fonction publique fédérale. Il serait logique d'envisager sérieusement une gamme d'options pour renforcer ce lien, qui est au cœur des négociations portant sur la rémunération dans le secteur privé. À titre d'exemple, on pourrait créer de nouveaux employeurs distincts, là où les chiffres et un mandat particulier le justifient, ou utiliser de manière ingénieuse la négociation à deux niveaux.

6. Le temps est venu de repenser la structure et l'équilibre des avantages sociaux non salariaux, en partant des régimes de pension jusqu'aux régimes d'assurance, de soins de santé et de soins dentaires.

Les régimes actuels ont pris forme au fil de décennies de changements non planifiés. La transformation de la notion de famille au Canada, l'évolution des attentes des jeunes travailleurs et la diversité accrue que l'on observe dans le secteur privé rendent impérative un tel examen.

7. La transparence est la meilleure façon de faire prévaloir la rigueur dans le domaine de la rémunération.

Peu de gens comprennent le régime actuel de rémunération dans la fonction publique fédérale et encore moins de gens en suivent l'évolution et font des comparaisons avec ce qui se passe dans le secteur privé. La publication régulière de rapports sur les tendances des indicateurs comme l'emploi total, les dépenses totales et les salaires moyens forcera tant les employeurs que les syndicats du secteur public fédéral à expliquer et à justifier leurs choix.

Cette toute première description exhaustive du domaine de la rémunération dans le secteur public fédéral et de son évolution récente permettra aux ministres, à la haute direction de la fonction publique, aux représentants syndicaux et aux autres observateurs de bien cerner le contexte des enjeux en présence. En nous appuyant sur l'ensemble de ces faits et de ces explications, nous sommes mieux placés que jamais pour concevoir et développer un régime de rémunération pour la fonction publique qui permettra d'attirer et de maintenir en poste l'effectif dont nous avons besoin pour bien servir les Canadiens au cours des années à venir.

 




Notes


Chapitre 1. Contexte de la comparabilité

[1] En 2004‑2005, les dépenses à ce chapitre avaient augmenté à près de 27,7 milliards de dollars, soit le tiers environ des dépenses discrétionnaires fédérales durant cet exercice.

[2] Pour un complément d'information, voir la fiche d'information intitulée Le comité d'examen des dépenses : le catalyseur de la modernisation des pratiques de gestion, publiée le 24 mars 2004. Le mandat initial de l'Examen figure à l'appendice A.

[3] L'équipe qui a effectué l'Examen de la rémunération, composée de l'auteur principal et de quatre analystes, a travaillé au projet essentiellement à temps plein pendant la plus grande partie de 2004. À partir de décembre 2004, l'auteur principal a consacré de cinq à dix heures par semaine au projet, avec le soutien d'un analyste à temps plein jusqu'en juillet 2005 et d'un analyste à temps partiel par la suite. Parmi les analystes qui ont fait partie de l'équipe à temps plein et les autres membres du personnel (qui ont participé aux travaux pendant diverses périodes), citons Lee Beatty, Louise Richer, Lucie Proulx, Monique Paquin, Don Booth, Noomen Ketata, et Joanne Di Raimo, tous du Secrétariat du Conseil du Trésor pendant la plus grande partie des travaux. Des douzaines de spécialistes, cités dans les remerciements, ont aussi contribué à l'Examen.

[4] En mars 2003, il s'agissait encore de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, c'est pourquoi nous utilisons cette organisation plus vaste dans l'analyse du Volume Deux. Celle-ci est devenue l'Agence du revenu du Canada en décembre 2003 lorsque le Service des douanes a été transféré à la nouvelle Agence des services frontaliers du Canada.

[5] L'intérêt que revêtent les entreprises publiques fédérales et les autres sociétés d'État réside dans la variété de leurs politiques de ressources humaines et de rémunération, ce qui peut se révéler utile pour la conception des politiques concernant le noyau de la fonction publique. On trouvera des exemples de ces politiques dans le Volume Deux.

Chapitre 2. Composantes des augmentations des salaires moyens

[6] Rapport de la Commission royale sur la gestion de la fonction publique(Commission Glassco). Troisième rapport : Gestion du personnel, partie 2, chapitre 8 , « Rémunération : Politique et administration », p. 437.

[7] Cette section est en grande partie une paraphrase de l'appendice B du document de travail de 2003, intitulé Vers l'adoption d'un cadre de politique sur la rémunération pour la fonction publique fédérale, qui est fondé en grande partie sur le document mentionné dans la note 3 en bas de page.

[8] Tiré des Notes d'information sur la comparabilité salariale totale, Secrétariat du Conseil du Trésor, mai 1978.

[9] A.D.P. Heeney, Rapport du Comité préparatoire des négociations collectives dans la fonction publique, 1965, p. 7 de l'anglais.

[10] E.W. Beatty, Report of the Royal Commission on Technical and Professional Services, 1930. La citation est tirée de la p. 14 de l'anglais.

[11] Les citations figurant dans ce paragraphe et le suivant sont tirées de W.L. Gordon, Report of the Royal Commission on Administrative Classifications in the Public Service,1946, p. 11, 14, 17 et 25, respectivement, de l'anglais.

[12] L'appendice C s'intitule « Principaux extraits sur la rémunération dans la fonction publique et la comparabilité tirés du chapitre sur la Gestion du personnel du Rapport de la Commission royale d'enquête sur l'organisation du gouvernement ». Plus particulièrement, nous reproduisons les chapitres 7 et 8 du Rapport à titre de référence.

[13] Glassco, p. 395-397.

[14] Glassco, p. 410.

[15] Glassco, p. 411.

[16] Glassco, p. 411.

[17] Glassco, p. 412-418.

[18] Glassco, p. 421.

[19] Heeney, 1965.

[20] L'information au sujet des points de vue du gouvernement Pearson est citée dans Jacob Finkelman et Shirley B. Goldenberg, Collective Bargaining in the Public Service: The Federal Experience in Canada, Montréal, Institut de recherche en politiques publiques, 1983, p. 426 de l'anglais.

[21] Programme de coopération – Un document d'étude portant sur les questions du décontrôle et de l'après-contrôle, p. 27 de l'anglais.

[22] Idem, p. 60.

[23] Ces points sont tirés d'un document du Conseil du Trésor intitulé Notes d'information sur la comparabilité salariale totale, mai 1978.

[24] Tel que mentionné dans le document de Finkelman et Goldenberg (p. 43 et p. 443 de l'anglais), le projet de loi C-28 aurait également appliqué les règles visant les exclusions de la direction et établi une limite de 33 500 $ au titre du salaire qui pouvait être déterminé dans une décision arbitrale. Le premier rapport du Comité consultatif sur les relations patronales-syndicales dans la fonction publique fédérale (présidé par John Fryer), Identifier les enjeux, 2000 (p. 20 de l'anglais) indique que les modifications englobaient également des restrictions au droit de grève et l'adoption d'un droit de lockout pour l'employeur.

[25] Document du Conseil du Trésor cité dans la note de bas de page 16, paragraphe 113. Les dix années désignent la décennie suivant l'instauration de la négociation collective en 1967.

[26] Evaluation of Current Salary Comparability Practices and Total Compensation Comparability Methodology, Wyatt Consultants, septembre 1992.

[27] Citations tirées du document du Secrétariat du Conseil du Trésor intitulé Document de discussion : Comparabilité de la rémunération, février 1987, p. 172-173 de l'anglais.

[28] Notes d'information sur la rémunération, Direction des relations de travail, Secrétariat du Conseil du Trésor, mars 1984, p. 3.

[29] Compensation Determination for Represented Employees: Future Directions, Secrétariat du Conseil du Trésor, 1992, p. 132.

[30] La voie de l'arbitrage a été suspendue pendant quatre autres années jusqu'en 2001.

[31] L'appendice B s'intitule « Politique sur la rémunération ». Elle inclut l'ébauche de politique diffusée aux fins de discussion par le Secrétariat du Conseil du Trésor, Vers l'adoption d'un cadre politique sur la rémunération pour la fonction publique fédérale : Document de discussion, juillet 2003, et l'énoncé de politique adopté par l'Agence des douanes et du revenu du Canada en mars 2001.

Chapitre 3. Le cadre juridique et institutionnel de la détermination des salaires

[32] La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) est entrée en vigueur le 1er avril 2005. Les principales dispositions de la LRTFP sur les règles régissant la négociation collective et le règlement des différends ressemblent beaucoup à celles de la précédente Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, qu'elle a remplacée.

[33] Une loi distincte, la Loi sur les relations de travail au Parlement (LRTP), adoptée en 1986, prévoit la négociation collective et l'arbitrage obligatoire des différends pour les employés de la Chambre des communes, du Sénat et de la bibliothèque du Parlement

[34] Les hausses salariales ont été limitées à 2,5 % plus une augmentation d'échelon en 1997, et à 2 % à la fois en 1998 et en 1999.

[35] Le paiement forfaitaire était égal à 1,5 % de la masse salariale de chaque groupe, divisé par le nombre de membres du groupe et arrondi la plupart du temps à la tranche de 50 $ la plus près.

[36] L'obligation d'obtenir un tel mandat découle de l'article 112 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et d'une décision du Cabinet du 30 novembre 1967. L'objet de la décision du Cabinet était de maintenir un certain contrôle financier sur les organismes distincts en ce qui a trait aux conventions collectives qu'ils négociaient. Bien que ces organismes disposent du pouvoir de gérer leur personnel, ils sont toujours tributaires des crédits de l'État. Un décret de 1967 délègue au Secrétariat du Conseil du Trésor la fonction de passer en revue les demandes de mandats provenant des organismes distincts et de faire des recommandations au président du Conseil du Trésor en vue de l'approbation des mandats de négociation collective.

[37] La structure des groupes professionnels reflète l'organisation du travail au sein d'une entité. Elle distingue les postes aux fins du recrutement, du perfectionnement, de la rémunération et de la gestion générale des ressources humaines. Chaque groupe réunit une famille d'emplois connexes.

[38] Une norme de classification définit les critères et les moyens d'évaluer un emploi par rapport à la norme qui permet de déterminer la pondération relative de l'emploi au sein d'un groupe particulier. La norme est complétée par des postes repères assortis d'une évaluation correspondante qui facilite la tâche des évaluateurs.

[39] Selon les définitions et les calculs de Hay Associates.

[40] Après 2003, la détermination de la rémunération des chefs de la direction a commencé à se faire différemment, d'après les recommandations du 7e rapport du Comité consultatif. Elle s'inspire maintenant de comparaisons de la rémunération globale médiane au niveau du Groupe 1 par rapport aux données globales sur le marché canadien de Hay Associates.

[41] À l'automne 2004, le gouvernement a annoncé son intention de modifier la loi de façon à ce que la rémunération des parlementaires ne soit plus liée à celle des juges de nomination fédérale. À cette fin, le Projet de loi C-30, la Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada et la Loi sur les traitements et apportant des modifications corrélatives à d'autres lois, a été déposé à la Chambre des communes le 3 décembre 2004 et a reçu la sanction royale le 21 avril 2005.

Chapitre 4. Composantes des augmentations des salaires moyens

[42] À proprement parler, nous n'avons inclus que les trois plus grands employeurs distincts (soit l'Agence des douanes et du revenu du Canada, l'Agence canadienne d'inspection des aliments et l'Agence Parcs Canada), en raison des contraintes de données pour les petits organismes. En mars 2003, ces trois organisations comptaient pour 88 % du domaine des employeurs distincts.

[43] À noter que nous avons inclus l'ancien groupe de la gestion supérieure (SM) dans le groupe EX 1 en 1991 parce que l'amalgamation est survenue peu de temps après.

[44] Les données antérieures à cet exercice n'étant pas considérées fiables, nous ne les avons pas incluses.

[45] Ces chiffres ont été confirmés conjointement par la Direction de l'information sur les nominations et de l'analyse de la Commission de la fonction publique ainsi que la Direction de l'organisation et de la classification de l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique. Des erreurs attribuables à la rigueur des rapports se sont sans doute glissées, mais nous estimons que les chiffres présentés sont adéquats pour l'analyse des tendances, ce qui est notre but ici.

[46] Un point d'ordre technique : le chiffre correspondant à la « mobilité externe » est un résidu qui sert à équilibrer les différents facteurs entrant dans l'évolution globale des salaires moyens.

[47] Cohortes des employés ES engagés et leur progression, Direction de l'information sur les nominations et de l'analyse, Commission de la fonction publique, 2004.

[48] Il s'agissait d'un dossier complexe et controversé où les positions des parties étaient très divergentes, et il existait un risque imminent de perturbation sérieuse des activités de l'industrie du transport aérien.

[49] Jusqu'en 1997‑1998, le domaine des employeurs distincts comptait moins de 9 000 employés.

[50] De fait, cela s'est produit dans une décision arbitrale rendue en 2005.

Chapitre 5. Comparaison de la rémunération fédérale totale aux indicateurs économiques, 1990 à 2003

[51] La série actuelle de données sur les gains hebdomadaires moyens fondée sur le Système de classification des industries de l'Amérique du Nord (SCIAN) n'est pas disponible avant 1991-1992 alors que les gains hebdomadaires moyens s'élevaient à 544,68 $. Les données avant cette date sont tirées d'une série fondée sur la Classification type des industries (CTI). Nous avons évalué le montant pour 1990-1991 en appliquant le taux de croissance de 4,57 % de 1990-1991 à 1991-1992 à partir de la série de données fondée sur la CTI au montant de 544,68 $ de la série de données actuelle.

[52] Cet indicateur inclut l'administration publique générale et les établissements de soins de santé et de services sociaux, les universités, les collèges, les instituts de formation professionnelle, les écoles de métiers et les entreprises publiques provinciales et territoriales.

[53] Cet indicateur inclut l'administration publique générale, les commissions scolaires locales et les entreprises publiques locales.

[54] Dans ce contexte, le taux d'augmentation « plus élevé » est mesuré par la pente (c'est-à-dire, l'inclinaison) des différentes lignes dans la figure 1025.

[55] À noter que la masse salariale totale peut aussi être modifiée par l'évolution de la composition de l'effectif en regard de la distribution de la semaine de travail. À titre d'exemple, un déplacement en faveur des travailleurs à temps partiel fera diminuer la masse salariale même si les salaires et l'emploi demeurent inchangés. Nous n'avons pas tenté de tenir compte de cet élément de complexité supplémentaire.

[56] Les gains hebdomadaires moyens dans le secteur privé ont trait aux « agrégats sectoriels » de Statistique Canada, à l'exclusion de l'administration publique, des soins de santé et de l'aide sociale, des services d'enseignement et des services publics. Les données ne font pas une distinction rigoureuse entre les secteurs privé et public. Toutefois, nous croyons que les écarts sont mineurs. Cette mesure englobe les travailleurs à temps plein et à temps partiel. En conséquence, elle peut fluctuer avec les changements observés dans la semaine de travail moyenne.

[57] Les gains horaires moyens correspondent aux employés du secteur privé qui occupent des postes à temps plein.

[58] Les données concernant les gains horaires moyens dans le secteur privé commencent en 1996-1997. Aux fins de la présentation, le point de départ de ces données a été harmonisé avec la série de données sur les gains hebdomadaires moyens dans le secteur privé.

[59] En estimant la croissance des gains horaires moyens à l'aide du taux de croissance des gains hebdomadaires moyens pour la période précédant 1996-1997, les gains horaires moyens auraient augmenté d'environ 33 % entre 1990-1991 et 2002-2003. Cependant, comme ce calcul ne tient pas compte des changements dans la semaine de travail moyenne, l'estimation doit servir uniquement d'indicateur très général.

[60] Ce sont des données non publiées fournies par Ressources humaines et Développement des compétences Canada. Elles attribuent les augmentations salariales à l'année où elles s'appliquent plutôt qu'à l'année où elles sont négociées.

[61] À titre de rappel, nous soulignons que la « mesure générale » inclut le domaine du noyau de la fonction publique, les employeurs distincts, les Forces canadiennes et les membres réguliers et civils de la Gendarmerie royale du Canada.

[62] Cette estimation provient d'un document interne du Secrétariat du Conseil du Trésor intitulé Compensation Determination for Represented Employees : Future Directions, de décembre 1992, p. 16.

[63] Le Bureau de recherche sur les traitements a été aboli à peu près au moment où le rapport du Conseil du Trésor était en voie de rédaction.

[64] Les professions choisies visaient les gestionnaires, les secrétaires, les agents d'administration, les commis et les professionnels. Plus particulièrement, les « gestionnaires » incluent les cadres supérieurs du gouvernement (comparativement aux cadres supérieurs des secteurs des services financiers, de la transmission des télécommunications et des autres services aux entreprises, du commerce, de la radio-télédiffusion et des autres services, de la production des biens, des services d'utilité publique, des transports et de la construction. Les « professionnels » incluent les vérificateurs financiers et les comptables, les spécialistes des ressources humaines, les spécialistes des systèmes informatiques et des systèmes d'information, les chercheurs dans le domaine de la santé et des politiques sociales et les professionnels du domaine des relations publiques et des communications. Les « commis » incluent les commis de travail général de bureau et du soutien administratif, les commis de travail général de bureau, les commis au classement et à la gestion des documents, les opérateurs à la saisie des données, les commis à la comptabilité et le personnel assimilé, les commis au soutien administratif, les commis au service à la clientèle, les commis à l'information et le personnel assimilé et les interviewers pour enquêtes et les commis aux statistiques. « Les secrétaires et agents d'administration » ne sont pas spécifiés. Dans le Recensement de 2000, ces quatre groupes représentaient 33 % des employés du gouvernement fédéral et 13 % des employés du secteur privé.

[65] Encore une fois, nous définissons le « secteur public fédéral » comme étant le domaine du noyau de la fonction publique, les employeurs distincts, les Forces canadiennes et les membres réguliers et civils de la GRC.

[66] Cet écart est fondé sur l'observation faite au sujet de la figure 1027 selon laquelle l'écart d'augmentation cumulative entre la rémunération moyenne dans la fonction publique fédérale et les hausses salariales annuelles selon les conventions en vigueur dans le secteur privé atteignait environ 8,3 % en 2002-2003.

Chapitre 6. Études comparant la rémunération dans l'administration fédérale à celles du secteur privé et du secteur public élargi

[67] Picard, Derek, Droit de regard sur les salaires du secteur public et du secteur privé, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, octobre 2003. Les études antérieures ont été publiées en 1992 (recensement de 1986), en 1993 (recensement de 1991) et en 1999 (recensement de 1996).

[68] Page 5.

[69] Page 3.

[70] Notes d'information sur la rémunération, Direction des relations de travail, Secrétariat du Conseil du Trésor, p. 28-29. L'aversion prononcée de l'auteur à l'égard de telles études est évidente dans la citation suivante : « Ces comparaisons sont trompeuses et aucune d'elles ne permet d'établir de relations de rémunération entre les emplois semblables de la Fonction publique et d'autres secteurs. Comme la rémunération est un aspect délicat des affaires publiques qui intéresse beaucoup de gens, on attache une importance injustifiée à ces comparaisons ». (p. 29)

[71] Page 4.

[72] Analyse spéciale intitulée Correcting Census Data for the Receipt of Employment Equity Cheques in 2000, mars 2004. Cette analyse a été effectuée par la Division de l'analyse des entreprises et du marché du travail de Statistique Canada.

[73] Morley Gunderson, Douglas Hyatt et Craig Riddell, Pay Differences between the Government and Private Sectors: Labour Force Survey and Census Estimates, Document de discussion des RCRPP, no W/10, collection Human Resources in Government, février 2000. Ce rapport examine également les données des recensements pour compléter la source principale de l'analyse, l'Enquête sur la population active de 1997.

[74] Morley Gunderson (MKG Associates), Public-Private Sector Wage Differences with Emphasis on the Federal Government , rapport provisoire d'octobre 2003 non publié.

[75] Les commentaires dans ce paragraphe et le paragraphe précédent résument les points présentés dans le document de discussion des RCRPP, notamment aux pages 2 et 23.

[76] Par exemple, les observations pour l'Île-du-Prince-Édouard en avril 2003 indiquaient 1 284 en comparaison à 16 110 pour l'Ontario dont la population est environ 100 fois plus élevée. Ce suréchantillonnage permet de fournir des estimations fiables pour diverses caractéristiques du marché du travail à l'Île-du-Prince-Édouard. Selon Statistique Canada, le processus d'attribution d'un poids d'échantillonnage à chaque enregistrement comporte les étapes suivantes : « Chaque enregistrement a un poids initial correspondant à la probabilité inverse de sélection. Ce poids est redressé pour tenir compte de la non-réponse qui ne peut être traitée par imputation. À l'étape finale de la pondération, tous les poids des enregistrements sont corrigés de façon à ce que les totaux généraux concordent avec les estimations démographiques calculées indépendamment pour divers groupes âge-sexe selon la province et les principales régions infraprovinciales ». Source : Enquête sur la population active [en ligne] http://www.statcan.ca/français/sdds/3701.htm

[77] Cependant, un inconvénient lié à l'utilisation des poids d'échantillonnage est que les erreurs-types estimées ne sont pas valides et que cela ne permet pas de faire des tests d'hypothèse pour l'estimation ponctuelle, par exemple pour vérifier si l'estimation est différente de zéro.

[78] Institut de la statistique du Québec, Rémunération des salariés : État et évolution comparés, 2003.

[79] La définition de « l'administration fédérale » n'est pas précisée, mais on peut supposer qu'elle désigne principalement la fonction publique fédérale.

[80] En effet, l'ISQ hérite de la tradition du Bureau de recherche sur les traitements depuis 1992, année où le BRT a fermé ses portes.

[81] À partir des données de l'Enquête sur la population active de juin 2003 et excluant les travailleurs autonomes. Cette population (les entreprises ayant plus de 100 employés) est celle qui correspond le plus à la population visée par une enquête de l'ISQ sur les employés travaillant pour des entreprises comptant plus de 200 employés. Les données de l'ISQ présentent la situation de la rémunération au 1er juillet 2003.

[82] Pour les employés à plein temps nommés pour une période indéterminée ou pour une période déterminée de plus de trois mois.

[83] Bien que la prime salariale de 16,2 % mesurée par Gunderson soit plus élevée que le pourcentage de 15,1 % calculé par la FCEI, nous considérons que l'estimation de la FCEI est « plus élevée » en principe parce qu'elle porte sur l'année 2000, alors que Gunderson présente des données pour 2003. Ce point de vue repose sur l'information présentée dans la section précédente, selon laquelle la rémunération moyenne dans le secteur public fédéral augmentait plus rapidement que les indicateurs de la rémunération dans le secteur privé au cours de la période 2000- 2003.

[84] Il est intéressant de rappeler le commentaire fait par Morley Gunderson au sujet de la nature de la modeste prime en faveur du secteur public fédéral : « ... [une telle] prime doit être jugée à la lumière des pratiques plus égalitaires en matière de rémunération qui semblent prévaloir dans le secteur public, notamment à l'égard des femmes et des travailleurs moins qualifiés, dont les primes sont habituellement les plus élevées. Cela pourrait traduire des pressions politiques, ainsi que la pression de se comporter comme un 'employeur modèle', du moins en matière de rémunération ». Gunderson, Hyatt et Riddell, février 2000, page 36 de l'anglais.

[85] Morneau-Sobeco, Enquête nationale sur la rémunération de postes opérationnels, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada – Alliance de la fonction publique du Canada – Rapport final, juillet 2003.

[86] Enquête sur la rémunération des groupes de la Table 2 – Analyse des résultats effectuée par l'AFPC, Alliance de la fonction publique du Canada, octobre 2003.

[87] Page 40.

[88] Overview– Joint Wage Comparability Study of the Operational Services Groups for the 2003-2006 Round of Negotiations, Secrétariat du Conseil du Trésor, aucune date.

[89] Par exemple, (page 3 du commentaire du SCT), 78 % des postes de manœuvre échantillonnés se trouvent dans la zone de rémunération du Québec, de l'Ontario et de l'Atlantique, alors que seulement 38 % des employés faisant partie de la population du groupe SV travaillent dans cette zone.

[90] Page 1.

[91] Des précisions sont fournies au tableau 2 à la page 9 du commentaire du SCT (version anglaise).

[92] En fait, ce phénomène existe depuis un certain temps. Par exemple, le rapport du Conseil du Trésor de 1992 qui calculait un écart général de 8,3 % entre la fonction publique fédérale et le secteur privé indiquait un écart de 20,3 % pour la catégorie de l'exploitation, qui recoupe largement l'unité de négociation actuelle du groupe SV.

[93] Comparative Terms and Conditions of Employment of Foreign Service Officers, Pricewaterhouse Coopers, mai 2002.

[94] Il s'agit des deux pays où les salaires sont 60 % plus élevés que ceux du service extérieur du Canada.

[95] Transports Canada – Review of Recruitment, Retention and Compensation of the Civil Aviation Inspector Community, Pricewaterhouse Coopers, janvier 1999.

[96] The Art and Science of Competitive Compensation, Watson Wyatt Worldwide, novembre 2002.

[97] De façon plus générale, ce cas soulève la question à savoir si les indemnités « provisoires » peuvent, en fait, être supprimées. Même lorsque les conditions externes du « marché en effervescence » qui justifiaient la mise en place d'une telle indemnité changent ou sont inversées, la logique de la négociation collective qui est appliquée actuellement rend de tels correctifs extrêmement difficiles, peut-être même impossibles à appliquer.

[98] Studies on Total Compensation Comparability and Total Cash Compensation of Senior Level Employees in the Public and Private Sectors, Hay Group Ltd., octobre 2001.

[99] La méthode d'évaluation des avantages sociaux est présentée aux pages 5 à 9 de la version anglaise du rapport d'octobre 2001 de Hay Group Ltd.

[100] Page 30.

[101] Page 31.

[102] Page 32.

[103] Page 33.

[104] Pages 34-36.

[105] Page 37. Tel qu'indiqué au chapitre 13 du présent volume, la version de 2004 du rapport de Hay Group Ltd. révélait un écart de 80 % pour les salaires et de 101 % pour la rémunération totale au niveau DM 2.

[106] L'enquête pilote était limitée à l'Ontario afin de pouvoir gérer la logistique et les coûts.

Chapitre 7. Comparaison des régimes de pension

[107] En 2002-2003, les cotisations patronales au régime de retraite fédéral représentaient environ 40 % du coût total des prestations.

[108] La plupart des sociétés d'État ont leurs propres régimes de retraite, mais leur description dépasse la portée de la présente étude.

[109] Notre principale source pour cet aperçu est la publication de Statistique Canada intitulée Régimes de pension au Canada, janvier 2000 et les versions mises à jour jusqu'en janvier 2003. Pour les données, nous avons utilisé des documents d'analyse publiés par Statistique Canada sur le CD intitulé Programmes de revenu de retraite au Canada : un aperçu statistique, qui présente une analyse jusqu'en 2002.

[110] Ce pourcentage tient compte du fait que les travailleurs autonomes au sein d'entreprises non constituées en société, les travailleurs familiaux non rémunérés et les chômeurs ne sont pas admissibles à ces régimes puisque ces personnes n'ont pas de relations employeur-employé.

[111] Il faudrait noter que quelques-uns de ces régimes peuvent offrir « des exonérations de cotisations » de temps à autre, tandis que d'autres offrent des taux de cotisation variables (c'est-à-dire intégral ou partiel).

[112] Tel que noté précédemment, nos principales sources pour cet aperçu sont les publications de Statistique Canada citées à la note 3 ci-dessus.

[113] Directive sur le réaménagement des effectifs du Secrétariat du Conseil du Trésor, Énoncé des principes régissant la pension, Test de vraisemblance, Towers Perrin, juillet 1997.

[114] Report on PSSA/RCA Evaluation, Buck Consultants, février 2001

[115] Understanding the Value of the Pension Plan, Part II: A Comparison with Provincial Pension Plans, Buck Consultants, septembre 2002.

[116] Banque de données sur les avantages sociaux® – Gouvernement du Canada, Towers Perrin HR Services, juin 2004.

[117] Tel qu'il est indiqué ultérieurement, ce taux s'applique uniquement à la part du revenu supérieure au « maximum des gains annuels ouvrant droit à pension » du Régime de pensions du Canada/Régime de rentes du Québec, soit 39 900 $ en 2003.

[118] Il est à noter que les prestations acquises pour les revenus inférieurs au maximum des gains annuels ouvrant droit à pension du RPC varient d'un régime à l'autre, comme nous l'indiquons ci-après. Les méthodes de calcul des gains moyens varient également. Certains régimes utilisent maintenant les gains moyens de carrière, ce qui réduit considérablement les prestations comparativement à la moyenne des cinq « meilleures » ou « dernières » années.

[119] Cette information figure aux pages 7 et 8 de l'étude (dans la version anglaise). Dans certains cas, la politique correspond aux cinq meilleures années consécutives. L'Île-du-Prince-Édouard utiliserait une moyenne triennale. Cette information est confirmée dans un rapport de 2004 de la Régie de retraite de la fonction publique du Manitoba au sujet des régimes canadiens de pension de retraite dans le secteur public.

[120] Cette information est tirée de la base de données exclusive de Towers Perrin.

[121] Nous croyons comprendre que les employeurs font une mise à jour annuelle de leurs données dans la base de données de Towers Perrin.

[122] Le « salaire moyen de fin de carrière » signifie que la pension d'un employé est fondée sur la moyenne d'un nombre déterminé d'années de revenu avant la retraite

[123] C'était largement le cas dans les différents scénarios selon l'âge au moment de l'inscription au régime et le revenu examinés dans le rapport.

[124] Ces renseignements ont été compilés et présentés en juillet 2004 par la Régie de retraite de la fonction publique du Manitoba. C'était au tour du Manitoba cette année à titre de participant à la conférence fédérale-provinciale régulière sur les pensions.

[125] Ce point est souligné dans le Volume Deux.

[126] Il s'agit de la date la plus récente à laquelle ces données sont disponibles.

[127] Toutefois, il faut réitérer que seulement 58 % des régimes de pension agréés couvrant environ 73 % des participants étaient des régimes contributifs. Pour le reste, les régimes étaient entièrement financés par l'employeur.

[128] Selon l'étude de Towers Perrin de 1997, le régime de pension fédéral se classe au deuxième rang, après la Nouvelle-Écosse,pour la valeur totale et le taux de cotisation patronale. Nous n'avons pas mentionné ce point dans le texte parce que l'analyse est relativement ancienne.

[129] L'écart entre le chiffre de 13,1 % mentionné dans l'étude de Towers Perrin de 2004 et celui de 17,3 % du Secrétariat du Conseil du Trésor nécessiterait une analyse plus approfondie. Mais il est difficile de faire une telle comparaison dans le cas d'une base de données exclusive. Ce qui importe avant tout c'est l'intégrité et la cohérence méthodologique d'une étude particulière.

[130] Les résultats mentionnés ci-dessous ont trait aux constations générales de l'étude, qui est fondée sur plusieurs cas et non uniquement sur le cas particulier illustré dans le graphique ci-dessus.

Chapitre 8. Comparabilité des autres avantages

[131] Analyse comparative des régimes de soins de santé à l'intention de la Fiducie du Régime de soins de santé de la fonction publique, Mercer Human Resources Consulting, septembre 2003.

[132] 2001/2002 Statistical Summary – Health Benefits Prevalence Tables, Watson Wyatt Comparison, octobre 2003.

[133] Un « index » est une liste de médicaments approuvés aux fins d'achat ou de remboursement en vertu d'un régime d'assurance-médicaments.

[134] Depuis la fin de 2003, le RSSFP rembourse le coût des nouveaux médicaments de ce genre tels que le Cialis

[135] Les données proviennent de l'étude de Mercer. Les employeurs visés étaient les suivants : le gouvernement de la Colombie-Britannique, la Société canadienne des postes, la Société Radio-Canada, Canfor, CIBC, EDS Canada, Nortel, le gouvernement du Québec, la Banque TD et une société anonyme.

[136] Page 39.

[137] Il existe en fait deux régimes, le régime de l'Alliance de la fonction publique du Canada et le régime du Conseil national mixte. Dans ce chapitre, nous les considérons comme un seul régime puisque leurs conditions sont pratiquement identiques.

[138] Benchmarking Study of Selected Employee Benefits and Paid Leave Policies, Mercer Human Resources Consulting, septembre 2004.

[139] Il s'agit d'une base de données exclusive à laquelle les employeurs peuvent avoir accès s'ils y sont abonnés moyennant des frais annuels.

Chapitre 9. Conclusions au sujet de la comparabilité

[140] À l'exception des pensions où nous avons inclus les cotisations salariales pour déterminer la valeur.

[141] Les données concernant le secteur public fédéral incluent le domaine du noyau de la fonction publique, les employeurs distincts, les Forces canadiennes et les membres réguliers et civils de la Gendarmerie royale du Canada.

[142] Nous avons utilisé des indices pour comparer le taux de changement des différentes variables. Mais la question demeure à savoir si ces indicateurs ont commencé à des points comparables ou si le taux de changement plus rapide de l'une des variables réduisait une disparité initiale, par exemple.

[143] Voir le chapitre 6 du présent volume pour plus de détails.

[144] Le terme « proactive » signifie que les employeurs ont l'obligation de mettre en œuvre la parité salariale au sein de leur organisation, sans que les employés aient à déposer une plainte.

[145] Morley Gunderson,« The Evolution and Mechanics of Pay Equity in Ontario », Analyse de politiques, vol. XXVIII, Supplément I / Numéro spécial, 1 2002, p. S117.

[146] Groupe de travail sur l'équité salariale, ministère de la Justice, L'équité salariale : une nouvelle approche à un droit fondamental, 2004.

[147] Groupe de travail sur l'équité salariale, 2004, p. 125 de l'anglais. Ceci reprend une analyse faite par SPR Associates en 1991.

[148] Secrétariat du Conseil de gestion de l'Ontario, courriel du 22 juillet 2004.

[149] Information provenant du gouvernement du Québec.

[150] Cette information est tirée d'un article intitulé « Show Us the Money : A Pay Equity Cross-country Check-up », publié dans le numéro de février-mars de la revue syndicale Our Times.

[151] Gunderson, Analyse de politiques,2002, p. S143.

[152] Les rapports les plus importants sont celui de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante et celui de Morley Gunderson de l'Université de Toronto. Ils sont décrits plus en détail au chapitre 6 du présent volume.

[153] Rapport de la Commission Glassco, 1962, chapitre 7, « Rémunération dans la fonction publique – Comparaisons avec le secteur privé ».

Chapitre 11. Recommandations sur la transparence et la reddition de comptes

[154] Ce chiffre figure au tableau 3, page 1.18 des Comptes publics du Canada pour 2002‑2003.

[155] Comme le domaine de la rémunération est fondamentalement complexe et qu'il repose sur la compréhension de précédents, de relations et de distinctions subtiles, la reconstitution du savoir-faire requis nécessitera plusieurs années d'efforts soutenus et le maintien en place de responsables et d'employés clés.

[156] Nous faisons valoir que seule l'approche axée sur le coût pour l'employeur peut fonctionner réellement. Toute tentative visant à calculer la valeur pour l'employé, même si elle repose sur un concept solide, perdra de la crédibilité en raison des débats sans fin au sujet de la méthodologie employée et du caractère purement abstrait des résultats.

[157] Au niveau EX 1, les salaires sont fixés, en principe, de façon à ce que la rémunération totale corresponde à ce que l'on verse, pour des emplois comparables, dans le secteur privé et dans le secteur public élargi au Canada. Une partie (soit 7 % du salaire) du montant nécessaire pour que la rémunération corresponde à celle versée sur le marché du travail externe est retranchée pour être regagnée, en tout ou en partie, en fonction du rendement réel. En cas de rendement exceptionnel, l'employé peut se mériter jusqu'à 10 %. Le cas échéant, les 3 % qui dépassent le « montant normal » peuvent être considérés comme une prime de rendement.

[158] Comme nous l'indiquons dans une section ultérieure, la politique et les pratiques en matière de rémunération au palier fédéral doivent tenir compte de diverses considérations, y compris le marché du travail externe et la relativité interne (comme pour tout autre employeur) et diverses considérations de politique publique. Un exposé clair de ces considérations et de leurs tendances pourra faciliter un plus vaste débat public sur la rémunération appropriée dans le secteur public fédéral.

[159] Le cadre financier est l'expression employée au gouvernement fédéral pour décrire l'ensemble des dépenses approuvées et prévues. Il englobe les éventualités pour diverses fins, y compris les politiques non encore annoncées, et les questions délicates comme les fonds mis en réserve pour parer aux résultats des négociations collectives et aux autres décisions touchant aux salaires et à la rémunération.

[160] Apparemment, Statistique Canada présente ses données de manière à se conformer aux usages, à l'échelon international, concernant la communication des données statistiques. En discutant et en planifiant de façon appropriée, il devrait être possible de déclarer les données de différentes façons, à différentes fins.

[161] Fait intéressant, cet exemple illustre pourquoi une réponse probante ne peut être construite que grâce à la collaboration de groupes d'experts qui ne sont pas habitués à travailler ensemble ou même à tenir compte des données des autres.

[162] Nous nous attendons à ce que ces investissements totalisent 10 millions de dollars ou plus pour établir une base solide, puis plusieurs millions de dollars par année pour faire fonctionner le système.

[163] Les parties de la Loi sur la modernisation de la fonction publique qui ont trait à l'établissement d'une fonction de recherche sur la rémunération relevant de la nouvelle Commission des relations de travail dans la fonction publique devraient être proclamées le 22 avril 2005. Cependant, la mise sur pied du nouveau groupe de recherche demandera sans doute plusieurs années.

[164] Par « parties », on entend les divers employeurs fédéraux, principalement le Conseil du Trésor, et le syndicat de la fonction publique pertinent

[165] Évidemment, ce point s'applique aussi bien aux syndicats. Cependant, ils sont beaucoup moins susceptibles de laisser passer cette occasion que l'employeur, étant donné que l'obtention d'informations utiles sur la rémunération et susceptibles d'appuyer leur cause est sans conteste au cœur de leur mission syndicale. Par le passé, l'employeur a trop souvent accordé trop peu d'attention à ces études avant qu'elles ne soient terminées.

[166] Sur un total de 4 883 mises à pied d'employés embauchés pour une période indéterminée en 2002‑2003, seulement 22 employés ont été congédiés pour incompétence ou inaptitude, tandis que 36 ont été remerciés durant leur période de probation (ce dernier chiffre représente environ 0,6 % des personnes embauchées pour une période indéterminée au cours de l'année).

[167] L'Enquête sur la population active, de Statistique Canada, et le Système de projections des professions au Canada tiennent compte des départs à la retraite et des décès dans leurs données sur l'« attrition ». En conséquence, il est difficile d'obtenir des données fiables sur les « taux de départ » dans le secteur privé. Une étude réalisée par Statistique Canada en 2003 incite à penser que les taux de départ dans le secteur privé varient probablement entre 10 et 15 % selon l'industrie concernée. Voir R. Morissette et J.M. Rosa, Innovative Work Practices and Labour Turnover in Canada, Collection Un milieu de travail en évolution, Statistique Canada et Développement des ressources humaines Canada, août 2003.

Chapitre 12. Gestion cohérente de la rémunération fédérale

[168] Le document a été publié en partie en réponse à une recommandation faite par la vérificatrice générale dans son rapport de mai 2003, Réforme de la classification et Évaluation des emplois à la fonction publique fédérale.

[169] À l'appendice A du cadre proposé, on évalue une série d'indicateurs qui permettraient de suivre les tendances relatives aux facteurs liés à l'employeur.

[170] Par exemple, dans ce système, deux employés travaillant la moitié de l'année chacun correspondraient à un poste équivalent temps plein.

[171] Une question connexe est de savoir si ces virements devraient servir à assumer d'autres coûts liés à l'augmentation des effectifs (par exemple les locaux à bureaux et les frais généraux pour l'informatique). Depuis 1998, les ministères et organismes ont été assujettis à un prélèvement de 13 % sur toute augmentation de leurs coûts en personnel par rapport à leur niveau de référence en guise de compensation pour les frais de locaux.

[172] À noter que l'auteur principal du présent rapport était le secrétaire délégué dont il est question dans ce paragraphe.

[173] L'ancienne Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) a été scindée en deux entités en décembre 2003. La plus grosse est devenue l'Agence du revenu du Canada, dont le mandat est d'administrer divers programmes fiscaux. Le volet « douanes » de l'ADRC a été fusionné à des éléments du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration du Canada pour former l'Agence des services frontaliers du Canada.

[174] Par exemple, l'Agence canadienne d'inspection des aliments a fusionné quatre groupes d'inspection dont elle a hérité et l'Agence du revenu du Canada a créé un groupe de la gestion composé de toutes les personnes jouant un rôle de supervision.

Chapitre 13. Questions de rémunération liées aux salaires

[175] On a modifié de nouveau la structure des groupes professionnels en 2005 afin de scinder l'ancien groupe Sciences appliquées et génie (AP) en deux groupes, soit Architecture, génie et arpentage (NR) et Sciences appliquées et examen des brevets (SP), et de créer le groupe Services frontaliers (FB), ce qui donne un nouveau total de 31 groupes.

[176] Ce pouvoir ne pouvait être exercé que pendant six ans. Ce qui était inhabituel était que le pouvoir de créer des groupes professionnels comprenait celui de faire de ces groupes des groupes de négociation. La législation canadienne du travail attribue normalement cette dernière responsabilité à la commission des relations de travail compétente. Le Conseil du Trésor a réuni les groupes existants à la toute fin de cette période.

[177] Cela n'est pas tout à fait exact car, pour la détermination de la paye dans le contexte d'un système de classification universel, on aurait pu prévoir une certaine latitude en cas de pénuries dans des domaines d'emploi particuliers pouvant justifier une majoration de la rémunération.

[178] L'article 7 réaffirme que le Conseil du Trésor et les employeurs distincts conservent leur pouvoir « quant à l'organisation de tout secteur de l'administration publique fédérale » pour lequel ils sont l'employeur, « à l'attribution des fonctions aux postes et aux personnes employées dans un tel secteur et à la classification de ces postes et personnes ».

[179] Dans ce cas, la responsabilité incomberait à l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada, qui est chargée de la classification. Le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait cependant être un partenaire actif, étant donné l'importance que revêt la structure des groupes professionnels pour le négociation collective et la gestion de la rémunération en général.

[180] D'autres détails se trouvent dans le communiqué de presse du Secrétariat du Conseil du Trésor du 8 mai 2002 et du document d'information qui l'accompagne, intitulé Le gouvernement procède à la réforme de la classification, que l'on peut consulter sur le site Web du Secrétariat du Conseil du Trésor (www.tbs-sct.gc.ca).

[181] Comme pour la recommandation10.1, l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique assumerait cette responsabilité au sein du portefeuille du Conseil du Trésor en collaboration étroite avec les secteurs compétents du Secrétariat du Conseil du Trésor.

[182] Cette citation est tirée du document Fact Sheet on DHS and OPM Final Human Resource Regulations affiché sur le site Web du département de la Sécurité intérieure (Department of Homeland Security – DHS) des États‑Unis. « OPM » désigne l'Office of Personnel Management (bureau de la gestion du personnel). Le General Schedule (tableau général) est le principal système de classification et de rémunération du gouvernement américain; il comprend 15 niveaux, chacun étant composé de dix échelons de rémunération.

[183] Le General Accounting Office ou GAO (bureau de la comptabilité générale) est le pendant américain du Bureau du vérificateur général au Canada. La citation est tirée de la première page du rapport du GAO intitulé Observations on Final DHS Human Capital Regulations du 2 mars 2005.

[184] Avant cette date, les chiffres étaient généralement à peu près deux fois plus élevés. Mais au cours des années antérieures, les employés pouvaient être rejetés à l'étape probatoire à chaque fois qu'ils passaient à un niveau supérieur et non uniquement lors de leur premier emploi dans la fonction publique.

[185] Il s'agit du nom familier (en fait, le nom du président actuel) du Comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction, qui conseille le Conseil du Trésor sur la rémunération des cadres de direction.

[186] Le régime de promotion fondée sur les qualités du titulaire qui s'applique aux chercheurs scientifiques est, dans une certaine mesure, un exemple de cette approche

[187] Des fonctionnaires fédéraux sont évidemment aussi affectés à des organisations externes selon les mêmes modalités. Le fonctionnaire travaille alors pour l'employeur externe mais est rémunéré en fonction de sa classification dans la fonction publique.

[188] Le Conseil du Trésor a, en fait, approuvé de tels régimes de rémunération dans quelques cas ces dernières années.

[189] Cette possibilité a été mentionnée par Warren Edmondson, qui se rappelait comment les échelles salariales de la fonction publique fédérale avaient été constituées au moment de l'adoption de la négociation collective en 1967.

[190] Dans le même ordre d'idées, les processus parallèles suggérés pour les autres employeurs fédéraux devraient aussi permettre d'évaluer si les critères proposés pour adopter une philosophie de paye régionale devraient s'appliquer aux nouveaux groupes.

[191] La définition de « locality pay » se trouve à la page 73 du livre blanc publié en avril 2002 par l'Office of Personnel Management des États-Unis, intitulé « A Fresh Start for Federal Pay: The Case for Modernization ». Source des données : General Schedule 2003, Office of Personnel Management des États-Unis.

[192] Les niveaux de rémunération des employés exclus des groupes ayant une représentation syndicale, ainsi que le groupe Gestion du personnel (PE), sont essentiellement déterminés en fonction des conventions collectives pertinentes.

[193] Il est bon de rappeler que cette comparaison comprend un montant de 7 % à titre de moyenne du salaire gagné grâce à la rémunération au rendement. Donc, en l'absence de cette disposition, les salaires des EX 1 devraient êtres plus élevés de 7 % pour être équivalents aux salaires de postes similaires sur le marché du travail du secteur privé.

[194] Dans les deux cas (en 2003, lorsque la réduction était de 0,3 %, et en 2004, lorsqu'elle était de 0,25 %) les réductions ont été approuvées afin de ne pas perturber les négociations collectives alors en cours avec l'Alliance de la Fonction publique du Canada.

[195] Le rapport s'intitule Gouvernement du Canada : Étude de marché sur la rémunération totale des cadres et des sous‑ministres.

[196] Ces chiffres sont en comparaison avec le niveau médian de l'échantillon de Hay Associates. Pour les sous‑ministres, les comparaisons n'ont été effectuées qu'au niveau DM 2, où l'on retrouve le plus grand nombre d'administrateurs généraux appuyant directement un ministre.

[197] Les incitatifs à long terme, comme les options sur actions, peuvent jouer un rôle important dans le secteur privé, mais ne pourraient probablement pas être offerts dans le secteur public. Il apparaît plus réaliste d'omettre cet élément de toute définition pratique de la comparabilité.

[198] Dans le but d'éviter qu'une telle politique ne soit utilisée de façon abusive, il devrait y avoir un droit d'appel auprès de la Commission de la fonction publique, qui est responsable de la protection du principe de mérite, pour éviter que des personnes ne soient renvoyées parce que le gouvernement ne les aime pas pour des raisons partisanes ou parce qu'elles ont dénoncé certaines pratiques.

[199] Citation tirée d'un rapport de Mercer Human Resources Consulting produit pour l'Office of Manpower Economics du Royaume-Uni et intitulé Benchmarking International Armed Forces' Pay and Allowances, décembre 2004, p. 25.

[200] Par exemple, le rapport Mercer susmentionné précise que le Canada recourt à un groupe consultatif conjoint du Secrétariat du Conseil du Trésor et des Forces armées canadiennes sur les questions de ressources humaines militaires. En diverses occasions, le processus canadien a été décrit à l'interne comme il est indiqué dans le rapport Mercer. Cependant, cette formulation suppose que le processus est beaucoup plus rigoureux qu'on ne pourrait le justifier en réalité.

[201] Les renseignements concernant l'approche australienne sont tirés du Nineteenth Report (2003‑2004) produit par le Defence Force Remuneration Tribunal, 29 octobre 2004.

[202] Bien que le gouvernement Howard ait modifié le système de primes sur le marché du travail afin d'encourager les contrats spécifiques aux entreprises ou les contrats de travail individuels, il a conservé le ADF Remuneration Tribunal apparemment en raison du rôle essentiel qu'ont joué les forces armées australiennes dans la politique étrangère du pays au cours des dernières années.

[203] Comme nous le mentionnons un peu plus loin, le salaire des juges canadiens est établi par un organisme consultatif indépendant, la Commission quadriennale. En vertu de la Constitution, les juges se trouvent dans une position particulière, car ils doivent être indépendants du gouvernement afin de demeurer neutres. Des changements sont néanmoins mis en œuvre par le biais de modifications à la Loi sur les juges. Le Parlement pourrait donc théoriquement refuser de mettre en vigueur les recommandations.

[204] Tiré du Thirty‑Third Report 2004 du Armed Forces Pay Review Body du Royaume-Uni, février 2004. p. 5.

[205] D'un côté, le mécontentement des membres de la GRC est compréhensible. Ils sont fiers de pouvoir profiter d'un taux de rémunération égal ou supérieur à tous les corps policiers canadiens, sauf un ou deux. La décision de 2004 place la GRC en 4e position au pays, bien que par seulement quelques dollars. D'un autre côté, il est important de garder une perspective à long terme en ce qui concerne la rémunération de la GRC, plutôt que de réagir à des situations temporaires.

[206] Pour des raisons d'objectivité, il ne devrait pas s'agir de l'entreprise ayant effectué les sondages sur la rémunération totale durant la dernière décennie

Chapitre 14. Questions de rémunération liées aux pensions et aux autres avantages sociaux

[207] Cela ne veut pas dire que les deux tiers des fonctionnaires gagnent moins de 41 100 $, mais que, quel que soit leur salaire, la partie qui est en deçà de 41 100 $ équivaut à environ les deux tiers de tous les salaires versés.

[208] Sauf pour les premiers 3 500 $ de leur salaire, pour lesquels ils n'ont pas à cotiser.

[209] Voir le rapport de 2002 intitulé Un cadre stratégique d'examen de la LPFP, préparé par BRO Workforce and Retirement Strategies Inc.

[210] Sur ces questions, il se peut que les prescriptions de la Loi sur les normes de prestation de pension ou de la Loi de l'impôt sur le revenu empêchent que certains genres de modifications soient apportés au régime. Ces lois pourraient peut-être aussi faire l'objet de la réflexion et du renouveau que nous suggérons.

[211] Parallèlement, il convient de noter que selon l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu que Statistique Canada a menée en 2000, 38 % de la population active canadienne ne bénéficiait pas de ce genre de régime au travail. La moitié de la population active bénéficiait d'un régime de soins de santé et d'un régime de soins dentaires et était protégée par une assurance-vie et une assurance-invalidité. Source : L'emploi et le revenu en perspective, été 2003, volume 15, no 2, p. 9.

[212] À noter que les chiffres pour 2002‑2003 comprennent environ 0,2 milliard de dollars pour les programmes visant les pensionnés du secteur public fédéral.

[213] Par exemple, les régimes d'assurance-vie peuvent connaître des hausses soudaines des demandes de règlement, suivies de périodes où il y peu de demandes. Ce genre de volatilité peut faire plonger les régimes de petite taille dans un déficit tel qu'ils risquent de ne pas s'en remettre complètement. Les régimes de grande taille, qui gèrent un bassin plus vaste de risques, connaissent des variations en général moins fortes du nombre de demandes de règlement et peuvent résister plus facilement, le cas échéant, aux hausses des demandes de règlement. En conséquence, les assureurs demandent habituellement une prime de risque plus élevée pour les petits régimes que pour les grands. En général, un régime qui compte beaucoup de membres est plus solide et moins coûteux qu'un régime qui ne compte qu'un petit nombre de membres.

[214] À noter qu'il ne s'agit pas d'un régime capitalisé, mais plutôt d'un compte maintenu dans les Comptes publics du Canada.

[215] Évidemment, ces commentaires s'appliquent également aux représentants de l'employeur siégeant au Comité consultatif sur la pension, abordés dans la section précédente du présent chapitre.

[216] Entre 1991‑1992 et 2002‑2003, les membres du groupe de la direction (EX) ont converti en espèces entre 4,12 et 5,81 jours de congé en moyenne, soit environ 20 à 25 % des congés annuels auxquels ils avaient droit pour les années en question. Par contre, dans l'ensemble de la fonction publique, le nombre de jours de vacances payés en espèces a varié entre 0,91 et 1,79 jour en moyenne, soit entre 5 et 10 % des congés annuels auxquels les employés avaient droit. Ces données sont tirées du Système de rapports sur les congés de la fonction publique (SRC).

[217] Le déclin apparent du nombre d'heures supplémentaires au tableau 2047 du chapitre 6 du Volume Deux résulte en partie de la création de l'Agence des douanes et du revenu du Canada comme employeur distinct, retranchant ainsi du domaine du noyau de la fonction publique une grande organisation où il se fait beaucoup d'heures supplémentaires.

[218] Même à la GRC, les heures supplémentaires sont demeurées aux environs de 66 millions de dollars aussi récemment qu'en 1999‑2000.

[219] En 2004-2005, ce passif actuariel avait grossi pour atteindre 8,3 milliards de dollars.

Chapitre 15. Domaines où des modifications législatives pourraient être apportées

[220] Le rapport de 2000 s'intitulait L'identification des enjeux : Premier rapport du Comité consultatif sur les relations patronales-syndicales dans la fonction publique fédérale. Le rapport de 2001 s'intitulait Travailler ensemble dans l'intérêt public : Deuxième rapport du Comité consultatif sur les relations patronales-syndicales dans la fonction publique fédérale.

[221] L'équité salariale : Une nouvelle approche à un droit fondamental, rapport du Groupe de travail sur l'équité salariale, présidé par Beth Bilson, 2004.

[222] Pour un point de vue tout à fait différent, voir l'ouvrage de L. Panitch et D. Swartz, intitulé From Consent to Coercion: The Assault on Trade Union Freedoms (Aurora, Ontario, Garamont Press,2003), où les auteurs prétendent qu'au cours des 20 dernières années, les gouvernements sont progressivement passés à « l'exceptionnalisme permanent partout au Canada, supprimant progressivement les droits des syndicats en imposant des modalités dans les conventions collectives par voie de législation, en incarcérant des dirigeants syndicaux dans les années 1970 et en désignant un nombre de plus en plus élevé d'employés essentiels.

[223] Le salaire moyen en dollars constants est passé de 48 100 $ en 1994-1995 à 46 300 $ en 1997-1998.

[224] Juste pour le noyau de la fonction publique et les employeurs distincts, l'augmentation cumulative a dépassé celle prévue dans les ententes du secteur privé en 2001-2002.

[225] Il conviendrait de noter que nous comparons les salaires moyens de la fonction publique fédérale et les augmentations salariales négociées dans le secteur privé, deux mesures qui représentent des choses différentes. Toutefois, si nous prenons plutôt en compte les salaires moyens horaires ou hebdomadaires dans le secteur privé (voir la figure 1026), l'écart cumulatif en faveur du secteur public fédéral est encore plus grand jusqu'en 2002-2003.

[226] Aux États-Unis, les salaires du secteur public fédéral sont encore recommandés par le président et approuvés par le Congrès, sur la base de recommandations faites par des conseils consultatifs.

[227] Un gouvernement minoritaire pourrait être particulièrement peu enclin à régler par voie législative un conflit de travail dans la fonction publique. S'il optait pour la voie législative mais ne réussissait pas à faire adopter son projet de loi, il se trouverait alors dans une position de négociation intenable.

[228] B. Adell, M. Grant et A. Ponak, Strikes in Essential Services, IRC Press, Kingston, Ontario, 2001, chapitre 1, p. 7.

[229] Cité dans Sandra Christensen, Unions and the Public Interest: Collective Bargaining in the Government Sector, Fraser Institute,1980, p. ix.

[230] Exposé présenté par Yvon Tarte, président de la Commission des relations de travail dans la fonction publique, au colloque du Conseil national mixte tenu du 15 au 17 septembre 1999 à Winnipeg, au Manitoba.

[231] Peter Warrian, Can't Get There From Here: Old/New Unions in a New/Old Economy, Sefton Lecture 2001, Université de Toronto. Se servant du secteur de la santé de l'Ontario comme exemple, Peter Warrian affirme que l'application répétée du modèle traditionnel du syndicat wagnériste ... condamne à un tapis roulant de périodes de négociation distributive alternant avec des périodes de restriction des droits des syndicats et de contrôle salarial. Un nouveau contrat social est nécessaire dans le secteur de la santé, reposant sur les conditions locales, permettant davantage aux employés de s'exprimer et utilisant les compétences et l'engagement des travailleurs de nouvelles façons.

[232] Il est intéressant de noter que, dans le cadre du programme gouvernemental de restrictions du milieu des années 1990, on avait proposé que les économies et les gains d'efficience recensés par les ministères ou les syndicats soient partagés avec les employés au moyen d'une majoration des salaires gelés une fois qu'ils auraient été mis en œuvre. L'initiative n'a pas abouti en raison des difficultés décrites dans ce paragraphe.

[233] John A. O'Grady, Arbitration and Its Ills, document de discussion no 94-05, 1994, Government and Competitiveness Project, School of Policy Studies, Université Queen's.

[234] Comme nous l'avons fait observer dans le chapitre 2, l'expérience du recours à l'arbitrage pendant les 20 années qui ont précédé les gels salariaux du début des années 1990 semble indiquer que, dans l'ensemble, les résultats de l'arbitrage étaient légèrement inférieurs à ceux des ententes collectives négociées. Il est encore trop tôt pour évaluer les répercussions de l'arbitrage pour la période ayant suivi son rétablissement en 2001.

[235] En italique dans le texte original

[236] Voir la page 44 du document de 1994 de John O'Grady, intitulé « Influencing arbitrators through directive language in statutes was found to have been comparatively ineffective ».

[237] Parce que la négociation collective est généralement centralisée, les gestionnaires hiérarchiques des ministères peuvent avoir tendance à estimer que le conflit de travail ne fait pas partie de « leurs » responsabilités, mais est une question du ressort du Conseil du Trésor, qui est relativement éloigné.

[238] Ces techniques engloberaient notamment la détermination des faits, le renvoi des parties à la table de négociation, l'offre d'un service de médiation, la publication d'un rapport préliminaire renfermant des commentaires sur le caractère raisonnable des positions des parties, la publication d'un rapport énonçant les conditions d'un règlement pouvant être adopté par les parties ou pouvant leur être imposé, et l'imposition d'une convention collective à la demande d'un syndicat, dans des circonstances précises.

[239] Toutefois, il y a lieu de craindre que la méthode prescrite par la Loi pour le choix du président d'une CIP rende improbables les nominations inédites. Lorsque l'une ou l'autre partie demande la création d'une CIP de trois membres, ce sont les personnes nommées qui choisissent le président. Les parties se montreront probablement prudentes en choisissant une personne avec qui elles ont déjà travaillé. La nécessité de s'entendre sur un nom limite en soi la possibilité de faire un choix novateur pour la présidence d'une CIP. En contrepartie, si le syndicat demande l'instauration d'une Commission tripartite, il devra assumer les coûts de son représentant. Tout considéré, le président de la CRTFP, qui pourrait davantage expérimenter, n'aura peut-être pas souvent l'occasion de choisir un président de CIP.

[240] Gene Swimmer (cité par John O'Grady), « Critical Issues in Public Sector Industrial Relations », dans Collective Bargaining in Canada, publié par Amarjit S. Sethi (Scarborough, Ontario, Nelson, 1989, p. 410). John O'Grady ajoute dans sa note de bas de page no 34 que, bien qu'il soit difficile de trouver un énoncé de critère arbitral aussi tranché, l'arbitre Martin Teplitsky s'en est approché lorsqu'il a fait observer que les arbitres de différends interprètent la scène des négociations collectives. Ils n'en jugent pas les résultats. Tiré de Re: Ottawa Board of Commissioners of Police and Ottawa Police Association (Martin Teplitsky), 10 septembre 1980, p. 4.

[241] W. Fogel et D. Lewin, « Wage Determination in the Public Sector », dans Industrial and Labor Relations Review, vol. 27, no 3, p. 413.

[242] Le terme « arbitrators » n'a pas été employé (dans la version anglaise) parce que ce titre a une longue histoire et un contexte culturel que nous ne voudrions pas importer dans un nouveau régime.

[243] Il faut reconnaître que plus le système est « fondé sur des règles », plus les juges peuvent intervenir, même s'ils n'ont pas les connaissances nécessaires dans la plupart des cas. Il faudrait tenir compte de cette réalité dans la conception d'un nouveau système.

[244] Un agrégat industriel est défini par Statistique Canada comme étant la moyenne des traitements et salaires hebdomadaires au Canada au cours d'une année donnée et a tendance à suivre l'inflation et l'augmentation générale du revenu du travail.

[245] Cette sphère de compétence englobe le gouvernement fédéral et les entreprises privées dans les domaines tels que les services bancaires, les chemins de fer, le transport aérien, l'expédition, les ports et le camionnage interprovincial.

[246] Rapport final du Groupe de travail sur l'équité salariale, 2004, p. 124-125.

[247] Voir le rapport précité, p. 138. Signalons que les négociations patronales-syndicales dans le secteur public provincial au Québec, qui ont pris fin avec l'adoption d'une loi en décembre 2003, envisageaient d'importants rajustements additionnels au titre de la parité salariale.

[248] Ces données sont tirées du rapport du recensement de 2001 de Statistique Canada intitulé Vue d'ensemble : les études universitaires et l'expérience rapportent des gains plus élevés, p. 7-8.

[249] La présente étude fait partie de la Série sur le milieu de travail en évolution, basée sur l'Enquête sur le milieu de travail et les employés, menée en 1999 par Statistique Canada avec l'appui de Développement des ressources humaines Canada. L'auteure était Marie Drolet de la Division des études et analyses micro-économiques de Statistique Canada.

[250] Voir la page 43 de l'étude précitée.

[251] L'explication donnée dans l'Ordonnance de 1986 sur la parité salariale promulguée par la Commission canadienne des droits de la personne ne règle pas la question. L'article 3 précise que : « Pour l'application du paragraphe 11(2) de la Loi, les qualifications comprennent les aptitudes physiques et intellectuelles acquises par l'expérience, la formation ou les études ou attribuables à l'habileté naturelle. »

[252] Signalons que les critiques de tels systèmes de cotation universels ont mené des expériences qui indiquaient que différents évaluateurs pouvaient produire des évaluations très différentes de descriptions de postes tout en appliquant des normes en principe objectives. [À noter tout particulièrement l'étude de 1986 intitulée Game Playing with Comparable Worth, qui visait à déterminer si les évaluations indépendantes de la valeur des emplois par diverses entreprises spécialisées dans l'évaluation des postes étaient cohérentes. L'étude a révélé des résultats très différents et des divergences importantes entre les entreprises. Entre autres choses, l'étude a montré qu'il était possible pour un évaluateur de soutenir que deux emplois devraient être rémunérés au même niveau tandis qu'un autre évaluateur était d'avis que l'un des emplois devait comporter une rémunération 50 % plus élevée que l'autre. Au bout du compte, les auteurs ont conclu qu'il n'était pas possible de définir des mesures cohérentes et fiables de la valeur d'un emploi autre que sa valeur marchande. E.J. Arnault et coll., Game Playing with Comparable Worth, octobre 1986.

[253] La juridiction du travail de l'Ontario accepte le pouvoir de négociation comme une exception admissible à la parité salariale.

[254] Une étude préliminaire effectuée pour le Groupe de travail sur l'équité salariale examinait la complexité de régler la question des avantages non pécuniaires dans le contexte de la parité salariale; voir Monica Townson, Le traitement du salaire indirect dans les comparaisons d'équité salariale, décembre 2002. Le Groupe de travail affirme que les avantages sociaux non pécuniaires devraient être compris dans l'approche de la rémunération totale qu'il préconise. Townson constate cependant (page vii) que les problèmes d'évaluation, pour les formes de salaire indirect traditionnelles et non traditionnelles, semblent avoir augmenté en complexité depuis que les dispositions fédérales sur la parité salariale de la Loi canadienne sur les droits de la personne sont entrées en vigueur en 1977.

[255] Cela est vrai, sauf dans la mesure où la disparité salariale se justifie par l'un des « facteurs raisonnables » énoncés à l'article 16 de l'Ordonnance de 1986 sur la parité salariale.

[256] Le Rapport du Groupe de travail sur l'équité salariale recommande l'adoption d'un seuil unique de 60 %, ce qui constituerait une amélioration. Toutefois, de nouvelles ambiguïtés sont proposées, par exemple prendre en compte des concepts imprécis comme la « composition historique » et les « stéréotypes traditionnels ». La suggestion d'additionner le nombre de femmes et d'autres groupes désignés (autochtones, minorités visibles et personnes handicapées) pour déterminer si le seuil de 60 % est atteint est encore plus bizarre. À mesure que les définitions se compliquent, on s'éloigne de toute méthode raisonnable pour comparer le salaire égal pour un travail de valeur égale.

[257] En fait, le groupe Gestion du personnel (PE) est passé d'une prédominance masculine à une prédominance féminine dans les années 1980. En 1981, 64 % du groupe était composé d'hommes; en 1991, 60 % des PE étaient des femmes. Par la suite, une plainte en matière de parité salariale a été déposée et un règlement a été conclu en 1999.

[258] Il est curieux de constater l'absence de liens conceptuels entre la notion de salaire égal pour un travail de valeur égale et l'amélioration de la position relative des femmes par rapport aux hommes dans la population active. Comme la parité salariale compare la valeur des emplois entre groupes, les hommes peuvent profiter des règlements de parité salariale lorsqu'ils sont en minorité (jusqu'à 45 %) ou qu'ils font partie d'un groupe visé. Par contre, les femmes occupant des emplois mal rémunérés à prédominance masculine ont peu de chances d'améliorer leur situation en déposant une plainte de parité salariale.

[259] Voir, par exemple, l'étude intitulée Assessing the Gender Neutrality of the FB Classification Standard, réalisée par le professeur John Kervin de l'Université de Toronto en août 2005.

[260] Extrait de l'Introduction à l'édition 2001 de la Classification nationale des professions (CNP), publiée par Ressources humaines et Développement des compétences Canada 2001, p. i.

[261] Cela constitue un résumé du graphique présenté à la page vii du document cité à la note 41.

[262] L'appendice K est intitulé « Projet de rapport annuel sur la rémunération dans le secteur public fédéral ».

Chapitre 16. Cadre de mise en œuvre

[263] Les employeurs distincts sont autonomes, à des degrés divers, du Conseil du Trésor en ce qui concerne la rémunération. Cependant, le Conseil du Trésor examine les budgets de fonctionnement et les plans financiers de toutes les institutions fédérales.

[264] Il se pourrait bien que le secrétaire décide de confier un important rôle de leadership dans ce domaine à son secrétaire délégué. Cependant, le secrétaire lui-même doit continuer à veiller manifestement, et en toute connaissance de cause, à la réussite des travaux connexes.